Le Journal dde.crisis de Philippe Grasset, qui a commencé le 11 septembre 2015 avec la nouvelle formule de dedefensa.org, l’accompagne et la commente en même temps qu’il tient la fonction d’être effectivement un “Journal” pour l’éditeur et directeur de la rédaction de ce site.
Mai 2025 (10 articles)
31 mai 2025 (18H40) – Il faut croire que l’on ne peut se passer des jeux les plus passionnants accrochés à des idées extrêmement fixes, aussi fixes qu’une ancre d’un grand porte-avions d’attaque de l’US Navy (bien entendu). Cette ancre formidable qui fixe notre pensée dans les limites autorisées, ce sont la barbarie, l’incompétence, l’ahurissement idiotique des hordes barbares d’au-delà du Dniepr. Par conséquent, le débat autour de leur capacité à dépasser la technologie de l’arc et des flèches, peut-être pour montrer quelque indulgence de l’arbalète et de ses traits, – ce débat-là n’en finit pas. A côté, il y a bien entendu nos splendides opérations et nos éblouissantes prévisions, comme la façon dont nous avons si bien vu le formidable impact de l’offensive dite “Mur de drones” devenu gruyère plein de trous des Ukrainiens (voir ce qu’en disent les amis Christoforou-Mercouris : « L’Ouest furieux de l’échec de l’attaque des drones »).
On publie deux textes très intéressants puisqu’ils viennent tous les deux du même côté de la barricade, alors qu’ils se contredisent complètement derrière les habituelles rhétoriques mielleuses des experts de notre belle civilisation. Les deux textes se suivent, le premier étant ce texte sur un rapport de la RAND Corporation, – que nous avons décidé, d’un commun accord avec les planificateurs des BRICS, de rebaptiser Fantasy-RAND Corporation pour donner à cette organisation toute sa dignité.
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27 mai 2025 (14H00) – Décidément, il existe beaucoup de liens, et d’une réelle force, entre ce Constantin von Hoffmeister et nos conceptions. Il existe beaucoup de liens entre ce von Hoffmeister et la chute vertigineuse de notre époque, dont il est un observateur impitoyable, avec un regard qui rejoint celui des gens qui cultivent la lucidité. Il existe beaucoup de liens entre tous ces gens (dont moi) et Nietzsche.
Notes de PhG-Bis : « On y reviendra sous peu, je parle de PhG. Je ne cesse de le persécuter pour qu’il mène son projet concernant Nietzsche, qui ne demande d’ailleurs pas d’efforts considérables, – il a tout dans sa tête. Ce n’est pas du tout un projet sur une nouveauté, bien au contraire, mais qu’avons-nous à faire de la nouveauté quand l’on voit et mesure ce que cette époque si “nouvelle”, si innovante, quand l’on voit ce qu’elle nous donne en fait d’immondices, de faux-semblants, de simulacres ? »
On sait que Nietzsche est inclassable comme philosophe, que tout chez lui repousse le classement, la catégorie, la définition universitaire et technique, la mise au pas et la mise en rang. Dire qu’il est “un électron libre” n’est pas suffisant, car même si on le dit libre et sans attaches, il reste dans les normes de la science dure et exigeante qu’est la physique. L’expression anglaise de ‘loose cannon’, outre d’être sonore, belle et très rythmée je trouve, exprime bien ce qu’il est.
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24 mai 2025 (18H30) – J’entends encore Mercouris, outré, s’écrier, dans une de ses interventions hier, à propos d’un article de ‘Foreign Policy’, l’une des grrrandes publications de l’establishment-DeepState US sur la politique étrangère et de sécurité nationale ; j’ai oublié les termes exacts (ce fut une exclamation en passant) mais cela donnait à peu près ceci :
« Incroyable ! Écrire et publier un tel article dans une revue aussi prestigieuse, c’est incroyable ! »
J’ajoute aussitôt, même si on l’a compris, que cet article va constituer le sujet de cette page du ‘Journal dde-crisis’. L’article est de Michael Kimmage, directeur du Kennan Institute au Wilson Center de Washington. Veut-on en connaître le sens et le contenu : le titre et le sous-titre nous en disent beaucoup
« La Russie a commencé à perdre la guerre en Ukraine. – Le vent de l’affrontement pourrait s'être retourné contre Poutine. »
En découvrant que l’auteur, présenté comme un expert de première ligne diplômé d’Harvard et d’Oxford dans la publication dirige le Kennan Institute, Larry Johnson, qui a lui-même publié (aujourd’hui) un article sur l’article, n’en revient pas également. Ses premiers mots sont pour invoquer les mannes du grand ancêtre qui savait de quoi la politique étrangère, la diplomatie, la connaissance des réalités sont faites.
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23 mai 2025 (13H00) – Le professeur norvégien Glenn Diesen, activiste et professeur à l’université du Sud-Est de Norvège, produit et présente un site d’un très grand intérêt, dans sa version ‘Glenn Diesen French’ très intéressante pour nous avec une traduction parlée instantanée en français. Nous nous arrêtons à une excellente intervention qu’il a faite en interviewant interviewe le 17 mai 2025 Marlène Laruelle pour son dernier livre ‘Idéologie et fabrication du sens sous Poutine’.
Marlène Laruelle, de nationalité française, est une universitaire très originale, occupant une fonction de la plus haute importance à la fameuse université Georges Washington de Washington D.C. Elle y est professeure de recherche en affaires internationales et en science politique, ainsi que directrice du programme d’études sur l’illibéralisme, – sujet particulièrement nouveau et également original, et d’une importance chaque jour grandissante, – et qu’il est si étonnant de voir déjà établi en programme à George Washington University.
Nous nous attachons ici à un sujet également du plus grand intérêt, qui est l’influence de Soljenitsyne dans cette “idéologie” et cette “fabrication du sens” qui est en train de s’installer dans la Russie de Poutine, dans le flux d’un courant qui est de plus en plus au cœur de l’affrontement entre la modernité progressiste globaliste d’une part et d’autre part l’espèce d’“archéo-futurisme” qui se développe en s’appuyant sur un puissant retour des grandes tendances de la Tradition en adversaire féroce de la modernité globaliste. Par conséquent, le sujet débattu par Diesen-Laruelle, s’il est typiquement russe, est également, et de façon beaucoup plus vaste, transnational et au cœur du déclin accéléré de la civilisation moderniste occidentale. On peut ici rappeler la proximité, – que nous nommions le 26 février 2025 “complicité”, – de la pensée du vice-président des États-Unis JD Vance avec celle de Soljenitsyne.
La présentation du livre de Laruelle (actuellement dans sa seule version anglaise) sur le site de vente résume aussi bien la démarche de la chercheuse explorant l’idéologie russe comme une des expressions les plus fortes de l’“illibéralisme” :
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20 mai 2025 (18H40) – Rappelez-vous : il y a à peine trois semaines, nous étions tentés puis conquis par ce titre de “Montagnes russes” (« RapSit-USA2025 : Montagnes russes ») pour illustrer un nième renversement de la politique de l’administration Trump vis-à-vis de l’Ukraine et de l’Europe. Aujourd’hui, nous cédons de nouveau à la tentation pour décrire un formidable tournant de l’état d’esprit, de l’humeur, de la perception, à la suite du coup de téléphone (deux heures) entre Trump et Poutine, à la demande du premier.
Ainsi, Larry Johnson, qui écrivait, le 18 mai, ceci :
« Donald Trump continue d'orienter sa politique envers la Russie sur la base d'au moins trois hypothèses erronées. Premièrement, il estime que la Russie subit des pertes massives et ne peut les supporter. Deuxièmement, il estime que l'attaque russe contre l'Ukraine est motivée par une certaine animosité personnelle de Vladimir Poutine. Troisièmement, il estime que la guerre pèse lourdement sur l'économie russe et que Poutine cherche une issue. »
... écrit (Larry Johnson toujours) ceci, aujourd’hui 21 mai :
« Donald Trump refuse de suivre la ligne Zelenski/pays européen visant à piéger la Russie. Les dirigeants britannique, français, allemand et polonais ont désespérément tenté de convaincre Trump d'exiger de la Russie un cessez-le-feu inconditionnel de 30 jours, sous peine d'une nouvelle salve de sanctions accablantes. Zelenski, tel un singe dressé, a répété ce mantra. Trump n'a pas mordu à l'hameçon. »
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19 mai 2025 (15H15) – La situation actuelle, – bien entendu surnommé “crise ukrainienne”, – ressemble à une cavalcade effrénée de divers personnages, en général de piètre envergure mais qui prétendent pourtant poursuivre des ambitions considérables, – et la cavalcade tournant en rond, c’est plus facile... On trouve bien entendu les dirigeants européens les plus en vue, sorte de clowns hystériques extrêmement insignifiants qui jurent qu’ils sont capables de déplacer des montagnes grâce à des ruses ressemblant parfois à des manœuvres enfantines construites sur des rêves d’enfants débiles. Parmi eux se glisse parfois un Trump à la fois tonitruant, méprisant, pérorant, indécis et incertain, qui suit un instant leur groupe avant de s’en détacher pour pouvoir mieux en dire tout le mal qu’il en pense.
Ce groupe fou et vain à la fois semble avoir pris comme point de référence, pour le dompter et en faire sa chose autant que comme référence pour tourner autour, ce qu’on pourrait désigner comme l’ensemble imperturbable et impossible à affaiblir que sont les Russes ; avec, au milieu d’eux, évidemment, un Poutine à la fois habile comme un renard et aussi solide et inébranlable qu’un bloc de granit. On espère le faire bouger, c’est-à-dire capituler, sans réaliser à quel personnage ils se frottent. Constantin von Hoffmeister décrit ainsi l’un de ses acteurs métaphysiques favoris, Friedrich Nietzsche, et cela pourrait aussi bien faire l’affaire pour notre bloc de granit, sa façon de voir et d’être, son demi-sourire à moitié ironique, son allure compassée et énigmatique :
« Dans les terres désolées du présent, entre gestes épuisés et applaudissements stériles, il cherche des vestiges de feu, des ancêtres qui ont jadis déferlé sur la réalité telles des apparitions divines. Il ne les trouve pas chez ses pairs, qui tremblent devant la bureaucratie et miment l'action sans appétit. Au lieu de cela, il tourne son regard vers le passé, cherchant à travers la brume des figures nées à l'extrême de la forme : César, Dante, Beethoven. Leur existence est une incantation. D'eux, l'acteur apprend que ce qui a été créé peut renaître. Goethe déclarait déjà que le monde environnant était devenu indigne du désir du poète. »
Je ne veux pas faire de Poutine une sorte plus récente de Nietzsche mais indiquer la similitude des situations où les Russes espèrent malgré tout que de ce saccage désertique qui ressemble au Désert des Tartares renaîtra quelque chose de la grandeur de notre passé commun.
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16 mai 2025 (14H15) – Je dois reconnaître avec empressement et sans barguigner que l’on se trouve dans un de ces moments-bouffe dont cette époque foisonne, tous plus “historiques” les uns que les autres, – un de ces moments où, à moins d’en faire un “moment métahistorique”, l’on n’y comprend, avec une sorte de délice, plus rien du tout. Tout le monde est là, sauf Poutine et Trump qui tournent ici et là, – sauf “les pieds-nickelés poudrés de Kiev” (seulement les 4 du trio), et cela ne nous fait pas perdre grand’chose. Macron, Merz, Starmer, Tusk, – passons outre, ô les « qu’un peu de sable efface »... Par contre, Zelenski, qui était le seul à clamer depuis des mois qu’il ne négocierait jamais, ne pourrait jamais rencontrer un Russe sans tomber malade, ne jamais se déplacez pour une telle infamie, – Mister Z. était là et il s’est précipité pour rencontrer Erdogan à Ankara. Peut-être cette rencontre s’imposait-elle pour le bien de l’Ukraine et qu’on y introduirait Erdogan en “vedette américaine” ?
Je n’ai bien entendu jamais entendu ni vu les deux compères Christoforou-Mercouris commenter un événement sur un ton d’une si extrême dérision, ni entendu Mercouris commencer son programme (du 15 mai) par cette évaluation, sans prendre la peine de nous saluer :
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15 mai 2025 (16H00) – Venant après la nouvelle d’hier qui nous donnait des précisions que l’on doit qualifier de stupéfiantes sur la réaction des USA contre la direction allemande (le Système) et en faveur de l’AfD, celle qui nous vient aujourd’hui confirme ce que je considère comme un formidable tournant à 180° de l’action du Système dans la machinerie de l’américanisme.
Il est question ici d’une véritable “révolte indirecte” (non identifiée comme telle et effective par contrecoup, – mais que nous importe et que m’importe) contre la politiqueSystème, – ou, si l’on veut faire simple, la politiqueSystème utilisée contre la politiqueSystème.
Comme hier, il s’agit encore d’une commission du Congrès, – la commission judiciaire de la Chambre dirigée par le redoutable Jim Jordan, – s’adressant sous la forme d’une lettre de Jordan adressée à Michael McGrath, Commissaire européen pour la Justice et l’application de la Loi, de la Commission de l’UE (globaliste), à propos d’une intervention du gouvernement Tusk (globaliste) contre les forces conservatrices et traditionnalistes représentant l’opposition en Pologne.
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13 mai 2025 (17H00) – Nous reprenons ce texte de James Howard Kunstler (texte du 28 avril 2025, traduction du ‘Sakerfrancophone’ le 13 mai 2025) qui donne une excellente synthèse de la crise intérieure américaine, par le biais d’un américanisme exacerbé, – et qui promet la fin de la Grande République si Trump est empêché de réussir et/ou se trompe lui-même sur les priorités. Considéré quinze jours plus tard (les temps vont vite !), je m’autorise un pessimisme beaucoup plus accentué dans la mesure où Trump semble de plus en plus prisonnier de la crise ukrainienne et de son issue.
Nombre de nos commentateurs habituels parlent dans ce sens, comme Andrew Korybko qui résume le dilemme auquel fait face Trump (condamner la Russie et renforcer l’Ukraine jusqu’à risquer un affrontement avec la Russie ou se retirer de la crise au risque devoir l’Ukraine écrasée par la Russie dans le plus grave désastre géopolitique que connaitrait l’Occident malgré ses héroïques 4-Pieds-Nickelés + 1) :
« Trump est sur le point de se retrouver face à ce dilemme en raison de son refus ou de son incapacité à contraindre l'Ukraine à accepter les concessions exigées par la Russie. Dans ce cas, il serait préférable pour lui de rompre définitivement avec ce conflit plutôt que d'intensifier l'implication américaine, mais l'accord sur les minerais et les contrats d'armement qui en découlent suggèrent qu'il est plus susceptible de redoubler d'efforts. Il ruinerait alors l'héritage qu'il espérait laisser à son prédécesseur, celui d'artisan de la paix, et compromettrait son projet de “retour vers l'Asie” visant à contenir plus vigoureusement la Chine. »
Il faut savoir et il faut se rappeler constamment que la voie de l’effondrement des USA passe, pour nous, par une grave défaite stratégique à l’extérieur, – comme l’expliquait il y a 15 ans ce néo-sécessionniste du Vermont que je ne me lasse pas de citer. Il pensait à l’Iran mais, comme catastrophe, l’Ukraine couronnée par un affrontement avec la Russie dont la Russie sortira évidemment victorieuse, cela fait l’affaire.
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7 mai 2025 (20H00) – Nous avons beau nous moquer, revenir sur nos jugements, juger qu’il n’est qu’un outil, une sorte de marionnette du Ciel pour transformer le ballon des globalistes en un cube de type Rubik, hermétique et explosif, – lui, il terminera toujours le “Jeu, Set & Match” en nous stupéfiant une fois de plus. Trump n’est nullement un menteur ni un simulacreur comme nous avons dû en supporter tant ces dernières années ; c’est un magicien de foire et de génie, une sorte de boni-supermenteur, un prestidigitateur, un enchanteur et un escamoteur. Devant lui, on reste sans voix et si quelqu’un dit : “Mais il dit n’importe quoi, il ment, il ne cesse de mentir !”, on chuchote autour de lui, d’une seule voix :
“ Chchchttt, il n’a pas fini... Voyons ! Un boni-menteur, peut-être, mais un menteur jamais !”
Ainsi en était-il lorsqu’il a annoncé hier, au détour d’une conférence de presse standard, que les États-Unis avaient remporté une “victoire” sur les Houthis, – rien de moins que la “victoire” finale, en fait. Larry Jackson exprime de cette façon un peu leste le passage :
« Donald Trump a mentionné en passant que les Houthis avaient appelé les États-Unis pour qu'ils cessent leurs bombardements, et Trump, en homme bienveillant qu'il est, a acquiescé. Les Houthis ont capitulé... »
Mais vous connaissez Larry : ancien officier de la CIA, il n’aime rien tant que la vérité des faits alignés d’une façon ordonné. Il corrige donc sévèrement le 47ème président des Etats-Unis en précisant que le cessez-le-feu, s’il est effectif, a été obtenu après quelques jours de négociations secrètes entre l’indispensable Witkoff et les Houthis, par l’intermédiaire d’Oman, et que les USA étaient plutôt demandeurs dans cette affaire. L’Iran suit ces négociations et les approuve chaleureusement.
(Suite)