La colère de M.K. Bhadrakumar

Journal dde.crisis de Philippe Grasset

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La colère de M.K. Bhadrakumar

7 juin 2025 (14H30) – C’estr un document qu’il faut absolument voir et écouter, sur le réseau ‘Glenn Diesen in French’, organisé par l’universitaire norvégien en bel et bon anglais, avec une traduction vocale simultanée en un français d’excellente qualité. Ce fut un cas exceptionnel de colère de cet ambassadeur indien à la retraite que nous suivons depuis près de vingt ans dans ses commentaires d’une excellente mesure (voyez la première fois où il est référencé, le 7 juin 2006). Cette fois, non ! La mesure est à son comble ! Voyez donc ‘Measure for Measure’, du grand Will.

M.K. Bhadrakumar a une approche extrêmement pessimiste (on parle de l’Ukraine, n’est-ce pas, à laquelle Shakespeare ne s’intéressait que modérément) et il l’affirme avec une conviction d’une rare violence chez lui. M.K. écarte toutes les billevesées sur un “moment Orechnik”, – un moment où les Russes décideraient d’utiliser, décision symbolique extrêmement puissante, le fameux missile ‘Orechnik et toute sa famille d’armes hypersonique à pénétration très profonde (dans la distance comme dans la profondes) dont les ‘Iskander’, les ‘Kajal’, les ‘Zircon’, etc. ; et les autres, les nouveaux qui viennent d’entrer en service sur des sous-marins, – toutes ces armes qui ne sont pas nécessairement armées de nucléaire, inarrêtables par la défense de l’OTAN et dont aucun pays de l’OTAN ne dispose pour ses propres ambitions offensives... M.K. tonne :

« Qu’on cesse donc de menacer avec les ‘Orechnik’, dont les Russes auraient une cinquantaine d’exemplaires et qu’ils s’en servent ! Ou bien que les Russes les mettent dans un musée ! »

Dès lors, le distingué diplomate, toujours extrêmement mesuré, au langage châtié, semble se déchaîner car il parle de la souveraineté de la Russie, de son existence, et qu’il est depuis longtemps un partisan non dissimulé de la Russie, de sa puissance, de sa gfrandeur civilisationnelle, de son rôle central de matrice d’équilibre au milieu du monde euroasiatique face à l’« l’ Hégémon” catastrophique ».

« Une situation extrêmement dangereuse se profile car l'attaque contre la Russie a franchi pratiquement toutes les lignes rouge. Il appartient désormais à la Russie en fait de définir une nouvelle dissuasion. La Russie est vulnérable aux attaques je veux dire ce n'est pas anodin pour un pays comme l'Ukraine de pouvoir frapper la Sibérie et l'Extrême Orient Russe et c'est ce qui s'est passé. Donc il ne s'agit pas de savoir combien d'aéronefs ont été détruits s'il y a eu des éléments en Russie qui ont collaboré à ce projet qui ont participé tout cela n'est que détail mais la situation d'ensemble est très préoccupante. » 

Pour Bhadrakumar, Trump n’a jamais eu de politique conciliante vis-à-vis de la Russie. Depuis qu’il est au pouvoir, il ne fait que suivre la politique de Biden, avec bien sûr en plus la reprise de contact avec les Russes que certains (même un Orlov) jugent très importante parce qu’elle reprend la situation de la Guerre Froide où tout était en place pour éviter un affrontement nucléaire. Mais c’est tout, même si c’est beaucoup, ce qu’a apporté Trump, le reste est sans changement constate notre ambassadeur dont le credo professionnel fut la diplomatie mais qui s’avoue lassé de voir la stupidité des gangsters otaniens poursuivre son œuvre de destruction de l’âme autant que de la chair humaine.

« J’émets donc un doute quant aux intentions américaines. D’une certaine manière je ne suis pas d'accord avec les analystes russes qui disent que Trump souhaite sincèrement la paix et la réconciliation avec la Russie. J'appartiens à cette école de pensée selon laquelle il y a une continuité remarquable dans la politique américaine envers la Russie. »

Pour M.K., l’attaque constitue un signal extrêmement important pour la Russie, en quelque sorte il opérationnalise ce qu’il pense de la continuité de la politique antirusse de l’Amérique. Dans un long passage, Bhadrakumar explique soin interprétation de ces attaques, sous la forme de trois messages adressés à la Russie, qu’il est impératif pour la Russie de les déchiffrer avec attention.

« Nous devons donc considérer cela [l’attaque contre les bombardiers] comme un signal très puissant adressé à la direction russe et il me semble que cela coïncide avec une période où la Russie a ouvertement évoqué la nécessité impérative de créer une zone tampon une zone de sécurité en Ukraine et certaines opérations militaires ont également commencé dans cette direction. Donc le message que j'ai cru percevoir ici est le suivant : “Vous ne pouvez pas vous cacher de nous, nous viendrons vous chercher où que vous soyez, qu'il y ait une zone tampon ou non nous en avons les moyens car nous sommes à l'intérieur de votre pays...”.

» Ce genre de message est un message puissant et cela signifie qu'il s'agit d'une sorte de guerre totale. Cela correspond à ce qu'a déclaré le nouveau chancelier allemand.. Il n'y aura plus d'inhibition à l'avenir et c'est un effort total pour infliger une défaite stratégique à la Russie ; ainsi le concept de zone tampon a été tourné en dérision voilà pour le premier point.

» Le second point est très évident il existe dans le monde occidental dans les capitales occidentales un courant d'opinion selon lequel tout n'est pas perdu, que l'inévitabilité d'une victoire russe n'est propagée que par certains partisans de l'establishment russe sinon la question reste très ouverte et la Russie peut encore être vaincue où on peut empêcher la Russie d'imposer un règlement,

Le troisième message est peut-être le plus important dans l’esprit de Bhadrakumar, parce qu’il est absolument opérationnel. Il constitue la description d’une attitude occidentale mais, surtout, il suggère avec force ce que devra être sans l’ombre d’un doute la suite de la crise et l’option presque nécessaire, le faux-choix réduit à une seule option  qui s’offrira à la Russie.

Sur le terrain, les Russes avancent irrésistiblement et vont très vite atteindre un point où il leur faudra faire un choix, – d’ailleurs, concluons pour nous-mêmes et déjà suggéré, un choix qui n’en est pas un ... Soit accepter la négociation et quelques concessions, ce que Poutine a écarté, qu’il a dû écarter à cause de sa direction, de son armée et de son opinion publique, et sur tout cela, un terrain où il ne peut revenir et où l’on gage qu’il ne veut pas revenir ; ou bien, et c’est là que le choix est fait pour lui et la Russie, poursuivre cette offensive et atteindre un point où elle dépasse l’Opération Militaire Spéciale et se prépare à affronter directement l’OTAN. M.K. choisit le franchissement du Dniepr comme point de basculement, lançant d’une part une offensive sur Odessa au Sud, de l’autre une offensive au Nord vers Kharkov et Kiev.

Son ton est impératif : pour lui, la Russie se doit et doit à sa pérennité de ne pas hésiter, – ton absolument inhabituel pour ce diplomate, je le répète tant j’en suis moi-même surpris. L’on gardera en mémoire, comme une révélation, cette conversation devant un tel esprit, libre et modéré à la fois, nous révélant que dans cette tragédie-bouffe, tout est en place pour que la tragédie prenne le dessus.

« Le troisième point a à mon avis une résonance très forte pour l'establishment américain car c'est là que la prochaine étape majeure sera franchie. Je vais m'expliquer. D’après ce que je vois les pourparlers d'Istanbul ne déboucheront sur aucune avancée cela devient plus ou moins un rituel après quoi les protagonistes retourneront sur le champ de bataille et c'est là que la question sera tranchée et j'ai de plus en plus le sentiment que cela va déborder de la région du Donbass vers d'autres régions. Il est possible que la prochaine phase de l'opération voit une offensive en direction du fleuve Dniepr et toutes sortes de possibilités sont désormais discutées ouvertement même par des analystes russes... »

Pour suivre et décorer la sortie tonitruante de M.K. Bhadrakumar, on signale que Mercouris, hier encore à Tbilissi pour un important colloque, estime que l’armée russe devrait achever l’occupation de l’Ukraine de l’Est délimitée par le Dniepr d’ici la fin de 2025. L’OTAN les attend de pied terriblement ferme mais avec des semelles de chaussures constellées de trous.

Mercouris ne considère pas l’attaque russe massive de la nuit précédente (4 juin) comme une réponse à l’attaque des bombardiers et le reste, cette riposte venant bientôt, qui sera bien plus dévastatrice que l’attaque de la nuit du 4 juin. Pour lui l’attaque russe du 4 juin, plus dévastatrice qu’aucune autre, – drones, missiles, tirés par des Tu-95 et des Tu-22 en belle forme et forme pimpante  malgré leur destruction au sol, – s’est montrée si efficace et si puissante malgré (bis) la résistance ukrainienne (près de 600 drones russes abattus sur les 400 tirés par les Russes, – le bel exploit du système de relations publiques du SBU conseillé par le MI6), qu’elle a dû être préparée pendant plusieurs semaines, bien avant l’attaque contre les bombardiers stratégiques filmés par des satellites d’observation de type-hollywoodien revu par les studios Disney.

Digressons sur le terrible terrorisme

Allez-y, l’on peut continuer. L’idiotie pathologique mêlée au gangstérisme à la coke et au mensonge qui évolue, selon le colonel Baud, selon un rythme darwinien (les mensonges, trop lourds pour la théorie de l’évolution et nos piètres consciences, coulent à pic très rapidement sous le regard attendri des idiots congénitaux) rythment à la vitesse de l’éclair l’évolution de la situation. Dans cette ambiance survoltée, malgré la succession folle des montagnes russes, et parce que le poids des mensonges finit par les faire couler à pic, on a de plus en plus souvent une accentuation menaçante de la pression russe et de la pression sur la Russie pour qu’ils y aillent à fond, donnant ainsi raison à M.D. Bhadrakumar.

Cela s’est encore vu avant-hier et hier, avec la course à propos de la dénomination de “terroristes” pour qualifier les actes du gang Zelenski.

« Et puis une phrase glacée, définitive, de Poutine dont on sait que sa dureté et son goût de la légalité souveraine ont un ennemi mortel, et cette phrase annoncée par notre observation d’hier :

» “...la possibilité de l’apparition d’un nœud terroriste dévastateur au cœur de l’Europe, même après, et peut-être plus sûrement après la défaire de l’Ukraine-Zelenski”. »

Ainsi et à cette lumière, en est-il donc de cette phrase de Poutine, hier dans l’après-midi, qui annonce un pas de plus dans la voie que va suivre le destin désormais dans ce terrible déchirement “au cœur de l’Europe” :

« Le régime illégitime de Kiev est en train de se transformer en une organisation terroriste. »

... Aussitôt après, un conseiller de Poutine, discutant avec des journalistes, leur donnant une nouvelle, – les Russes sont sensibles plus que tout aux nuances des discours juridiques, – que relève le même Mercouris :

«  [Le régime à Kiev est d’]ores et déjà essentiellement une organisation terroriste... »

Et bottons ce qu’il y a à botter chez Zelenski

... Dans ce cas, on est quasiment au point où l’on ne peut plus reculer, jacasser, transiger (rien du tout d’ailleurs), attendre que Trump monte dans le train, supporter les discours de concierge du Sénat du sénateur Lindsey Graham enveloppant de ses bras câlins le porc-épic Zélenski en lui assurant 1 500% de réussite des tirs de ‘Patriot’ contre les risibles ‘Orechnik’ des barbares de l’Est..

Alors, on en rajoute deux qui nous disent : “Mais bon Dieu, Zelenski s’est mis en position de se faire botter le cul ! Eh bien, bottons !” ; ou encore : “Mais ce type est fou à suivre aveuglément les consignes de l’invisible, omniprésent, masqué et relooké en simulacre, l’inévitable DeepState qui correspond aussi bien que ses mensonges  à la théorie de l’évolution de Charles Darwin !”

Citons alors et pour conclure deux personnalités de la sécurité nationale à Washington...

`• Le nommé Donald J. Trump, 47ème POTUS :

« Vendredi, Trump a déclaré aux journalistes qu'il n'appréciait pas l'escalade lorsqu'on lui a demandé si l'attaque de Kiev contre un élément clé de la triade nucléaire russe avait modifié sa vision des enjeux et des cartes en main de Vladimir Zelensky.

» “Eh bien, ils ont donné à Poutine une raison de les bombarder à outrance hier soir”, a déclaré Trump. “C'est quelque chose qui ne m'a pas plu. Quand j'ai vu ça, je me suis dit : ‘C'est parti… maintenant, ça va être une frappe’.” »

• Général Michael T. Flynn, un long message sur X où l’ancien conseiller pour la sécurité nationale de Trump-I (de janvier 2016 à février 2016, balancé sans filet dans les filets du ‘Russiagate’, ancien général de l’US Army, ancien directeur de la DIA (Defense Intelligence Agency, “CIA militaire”), – Flynn emporté dans la tempête des dénonciations du simulacre grotesque du ‘Russiagate’ et ainsi de suite, puanteur sans foi ni loi, et sans fin par ailleurs, du cloaque infâme de Washington D.C.

Voici le message de Flynn : lui aussi rejoint Bhadrakumar pour fixer, plutôt en termes militaires, le symbolisme absolument catastrophique de cet épisode.

« Il semble donc que Zelenski ait donné le feu vert pour attaquer des bombardiers nucléaires russes stationnés sans en informer

» (S'il est vrai que notre président n'a été ni consulté ni informé, il ne s'agit pas simplement d'une violation du protocole. C'est une insulte géopolitique et un signal d'alarme. Si l'Ukraine est prête à mener des frappes aux conséquences stratégiques sans en informer la Maison-Blanche, nous ne sommes plus des alliés avec des problèmes de coordination : nous sommes des co-belligérants agissant à l'aveuglette).

» De plus, compte tenu de la récente visite du sénateur “va-t-en-guerre” Lindsey Graham et du sénateur “Da Nang Dick” Blumenthal, cette attaque pourrait passer pour une approbation. J'espère que les Russes disposent de meilleurs renseignements. À mon avis, ces deux-là n'ont ni le bon sens ni le sens commun nécessaires pour commettre une telle action (il faudra toutefois nier).

» Pour information, les bombardiers touchés DOIVENT être bien visibles en raison des obligations du traité sur le nucléaire. Zelenski en a profité. Par exemple, ils semblent avoir caché les drones dans des conteneurs et les avoir transportés sur des camions près de la base aérienne. Une utilisation astucieuse de la tromperie.

» Imaginez cependant que n'importe laquelle de nos grandes bases de bombardiers subisse exactement la même chose. Des bombardiers stratégiques américains très coûteux peuvent être détruits de la même manière par quiconque disposant de drones bon marché, de camions de livraison, d'explosifs et d'un minimum de connaissances techniques (ce qui n'est pas une bonne chose, et de nouvelles tactiques devront désormais être développées).

» Les citoyens, et en particulier les dirigeants mondiaux, doivent prendre conscience des implications mondiales d'une opération comme celle que l'Ukraine vient de mener.

» La Russie ripostera. Action, réaction, contre-attaque. Tels sont les courants changeants de la guerre.

» Ce n'était pas une action audacieuse, c'était de l'impétuosité. La victoire à court terme de l'Ukraine pourrait être la perte à long terme du monde.

» Malgré le chaos total actuel en Europe, il existe encore des solutions pour parvenir à la paix. Cependant, elles se font rares et le temps, comme souvent, devient un ennemi au lieu d'un allié précieux.

@PeteHegseth
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@marcorubio
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