Jean-Paul Baquiast
10/11/2012
La politique étrangère de celle-ci est aussi déstructurée, hélas, que celle de l’Amérique. Idem en ce qui la concerne de la politique française. Idem des politiques économiques…
dont acte
10/11/2012
Que le système génère sa propre autodestruction, certes. Mais quid de la théorie de la stratégie du choc de Naomi Klein, nous montrant que cette autodestruction est souhaitée par ce même système afin dassener un système encore plus coercitif aux populations, groggys par la gravité dun tel choc ?
Maurice ESTIENNE
10/11/2012
Brigadier General Jeffery A. Sinclair.
US Navy Commander Joseph E. Darlak.
Et maintenant: David Petraeus
Jack v.
09/11/2012
Petraeus quitte la CIA, dont il était le patron, après [a href=http://www.romandie.com/news/n/Etats_Unis_David_Petraeus_le_patron_de_la_CIA_dssionne_RP_091120122305-24-274599.asp] une infidélité conjugale. [/a]
marc gébelin
08/11/2012
« En 1535, Soleiman dit le Magnifique, avait cru bon de renforcer les liens de vague vassalité avec François 1er qui lavait appelé à son secours après sa défaite à Pavie et son emprisonnement par son rival Charles Quint en lui octroyant des privilèges commerciaux », dites-vous.
Le rapprochement « capitulation » de Soleiman et capitulation dHollande me pose problème. Récapitulons: Le 24 février 1525 François 1er est fait prisonnier à Pavie par Charles V. Il sera libéré le en mars de lannée suivante. Six mois plus tard, fin août 1526, Suleiman vainc les Austro-hongrois à Mohacs et étend sa domination aux portes de Vienne, empire de Charles V. En 1535, dix ans donc après Pavie et neuf ans après Mohacs, Soleiman renforce ses liens de vague vassalité avec François 1er en lui octroyant des privilèges commerciaux. Ce qui me surprend (je nai pas lhistoire exacte de la période en tête), cest que vous laissiez alors entendre que Suleiman se sent « faible » -alors quil domine une bonne part de lEurope Centrale et du sud- au point de devoir accorder des capitulations à François 1er, c’est-à-dire abandonner à un étranger une part de souveraineté sur son propre territoire, comme la chose se renouvellera au Maroc plus tard. Symboliquement, la même chose sest passée en France avec Hollande-Netanyahou, le Français souchien accordant cette fois une « capitulation » au Juif israélien pour ce qui est des Juifs vivant sur son territoire.
Nest-ce pas seulement lorsquon est en position de faiblesse quon accorde de telles choses? QuHollande y soit, certes, mais Soleiman, létait-il à ce moment ? Cela ne partait-il pas dun autre sentiment, dune autre stratégie, quil faudrait précisément chercher dans la mentalité du grand souverain dont la pensée est régie par un Islam conquérant au plan des territoires mais tolérant au plan religieux alors que celle des rois très chrétiens est régie par une pulsion de conquête aux plans religieux et territorial ?
Avec Hollande cest le contraire qui se produit, son agenouillement nest pas à mettre au crédit dun esprit de largesse dun puissant pouvant se permettre doffrir à un autre des droits chez lui mais dun faible nayant pas dautre choix que dobéir aux ordres du bloc BAO-Crif?
En un mot : Soleiman ne mapparait pas faible dans sa démarche, Hollande si.
Bertrand Arnould
08/11/2012
«Defense officials say that a nuclear-powered Russian attack submarine sailed to within 200 miles of the United States last week and was granted safe harbor as Superstorm Sandy struck the East Coast.
Un sous-marin n’est en aucun cas, sauf problème technique, tributaire des conditions météo, il lui suffit de rester sous l’eau.
Jack v.
08/11/2012
Jean Lemoine
07/11/2012
Avant de revenir aux sempiternels commentaires-Système, France Info ce matin nous a offert une interview de l’éditorialiste d’Harper (de mémoire) qui nous a donné son ressenti sur les élections aux USA, quelques heures à peine après l’annonce de la victoire de BHO.
Je n’ai pas tout entendu, mais on l’a notamment entendu dire (citations approximatives) :
- “[...] Bien sûr, il y a eu les grandes déclarations patriotiques, les grands idéaux, les embrassades, etc., et c’était nécessaire : vous ne pouvez peut-être pas le comprendre, mais c’est très important dans notre pays ; vue notre histoire, ces images et discours sont très importants parce que c’est un peu la seule chose qui nous lie [...]”
- “J’ai 59 ans, et de toute ma vie je n’ai jamais vu les américains aussi dépressifs…”
- “Obama a été élu sur l’espoir de le voir ouvrir une nouvelle voie, remettre en cause le statu quo et secouer la politique du pays[...] Aujourd’hui, il gagne le vote populaire d’une marge infime : ceux qui hier s’étaient déplacés en masse pour lui sont restés chez eux. Ils savent qu’avec Obama, les USA vont dans le mur.”
- “Il était impossible que Romney gagne : il s’est complètement dissout en essayant de rallier les courants extrémistes du parti républicain alors qu’il était connu comme un modéré.” (cf. sa politique comme gouverneur du Wisconsin).
Ce que j’interprète comme une situation dans laquelle l’électorat est placé devant un choix : “aller dans le mur”, ou “aller très vite dans le mur”...
Ou encore :
- “Obama a commencé par tendre la main à Romney en lui proposant de négocier avec lui les prochaines réformes, dans une politique de consensus bipartisan. C’est une erreur : Romney est fini. Et tout ce qu’il restera du parti républicain sera les extrémistes. Le congrès, lui, restera bloqué dans ses querelles.”
Donc, Obama est d’ores et déjà parti pour continuer tête baissée dans cette impasse d’un consensus illusoire.
Ce qui est intéressant ici, c’est que pour une fois, ce n’est pas DeDefensa qui nous parle d’un American-Gorbatchev qui ne fut pas, de dépression populaire, d’un montage de communication comme fondement de la “nation”, etc., mais un Américain pur jus (quoi qu’il parle plutôt bien français).
Ou peut-être est-il lui-même lecteur de DeDefensa ?...
Michel DELARCHE
06/11/2012
Dans le monde anglo-saxon, on trouve souvent cités ces vers de Byron (tirés de Don Juan):
“This is the patent age of new inventions
for killing bodies and for saving souls
All propagated with the best intentions”
(par exemple mis en exergue de “The Quiet American”, le plus férocement et le plus judicieusement anti-américain des romans de Graham Greene) mais on oublie généralement de citer les vers suivants:
“Sir Humphry Davy’s lantern, by which coals
Are safely mined for in the mode he mentions,
Tombuctoo travels, voyages to the Poles,
Are ways to benefit mankind, as true,
Perhaps, as shooting them at Waterloo”
Comme quoi Byron était déjà il y a un siècle un critique lucide et acéré du “Parti de l’Industrie” (déjà bien plus développé en Angleterre qu’en France) et du globalisme voyageur (ou faut-il dire du voyagisme global ?)
Devant la Chambre des Lords, Byron prit seul la défense de quelques ouvriers disciples de Charles Ludd qui avaient été condamnés à mort pour avoir brisé quelques de ces “new inventions” qu’ils accusaient d’accroître le chômage et la misère du peuple.
Pour nous inciter à prendre quelque distance envers tous les fanatismes religieux, Byron nous dit ironiquement:
“Christians have burnt each other, quite persuaded
That all the Apostles would have done as they did.”
Et plus gravement, dans une lettre à un prêtre:
“I do not believe in any revealed religion. I will have nothing to do with your immortality; we are miserable enough in this life, without the absurdity of speculating upon another.”
Un grand poète et une belle âme.
Francis Lambert
06/11/2012
Elections US : Mitt Romney, le milliardaire qui est candidat républicain contre Obama, n’a payé AUCUNES taxes aux USA de 1999 à 2009 !
http://crooksandliars.com/nicole-belle/harry-reid-was-right-about-romneys-ta
P C
05/11/2012
Bonjour,
Merci pour vos articles dont j’apprécie le regard original. Voici quelques pensées concernant celui-ci:
1) “Ce qui est créé en 1776-1788, cest le socle dune puissance, dun monstre à la dimension dun continent dont le premier but,(...), est dassurer la pérennité de son oligarchie de possédants qui en est la fondatrice, ou des influences directes de ces fondateurs, grâce à un système économique (capitaliste) protégé des exigences du bien public et entièrement tourné vers le profit.” écrivez-vous. Je vous propose donc l’écoute de cette émission mettant en avant les compromis instaurés pour “la pérennité de son oligarchie de possédants ...”:
(Rq: Je ne me suis pas permis de leur signaler l’intérêt de votre site pour leur(s) analyse(s); à tout seigneur…)
2) “Du point de vue de la Matière, la Révolution a la tâche fondamentale dimposer avec la plus extrême brutalité un tabula rasa à tout ce qui faisait la richesse de la Tradition qui est la source de la vérité du monde. En ce sens, elle est le complément de la révolution américaniste en détruisant la vérité du monde (lAncien Monde, dans le jargon du Système) pour permettre à ce que la vérité virtualiste du Nouveau Monde (lAmérique) se répande plus aisément.”
Ne retrouve-t-on pas la bascule radicale “Ancien Testament/Nouveau Testament” dans la tentative (maladroitement athéiste, dirais-je) du Culte de la Raison et de l’Être suprême? Et donc pour une vision métaphysique croyante (dont je ne suis pas) une corroboration de sa vision métaphysique (Tradition, pour elle)?
3) Enfin, je n’arrive pas à articuler votre vision maistrienne avec une vision plus hégelienne de l’Histoire, plus simplement matérialiste, descriptive (rapports de force), donc a-morale (Quid Bien/Mal?). D’où mon incompréhension devant ce qui suit (oui pour la métaphysique, mais toujours née -créée, comme la divinité en des Temps plus anciens- du Sapiens sapiens (2 fois, ce n’est pas rien quand même, le dit-il lui-même)):
“Cest-à-dire que nous ne pouvons concevoir le concept du déchaînement de la Matière que dun point de vue métaphysique ; la Matière, bientôt créatrice du Système pour opérationnaliser son action, se découvrant alors elle-même, dune façon totalitaire, comme nétant rien en elle-même et nayant pour justification dêtre que lexercice de la pure opérationnalité du Mal. Elle est le Mal (elle nest que parce quelle est le Mal). “
En espérant une réponse détaillée de votre part, merci encore pour vos analyses et informations sur la géopolitique en cours, dont étonnamment je ne trouve que rarement trace ailleurs.
PC
Francis Lambert
04/11/2012
Welcome to the Third World, Part 9: Entrepreneurs Cant Retire on September 3, 2012
For most small business people, the ideal life goes pretty much like this: a few years of all-consuming obsession to get set up, followed by a few decades of 12-hour days to build a reputation and client base sufficient to make the business valuable. Then sell out for enough to retire comfortably. This is easier [...]
Welcome to the Third World, Part 8: A PhD Is Now a Path to Poverty on August 23, 2012
Newly-minted anthropology PhD Sarah Kendzior has written a chilling piece for Aljazeera on what things are really like in academia these days: The closing of American academia It is 2011 and Im sitting in the Palais des Congres in Montreal, watching anthropologists talk about structural inequality. The American Anthropological Association meeting is held annually [...]
Welcome to the Third World, Part 7: Bye Bye, Public Services on August 12, 2012
Meredith Whitney was an obscure Oppenheimer & Co. bank analyst back in 2008 when she broke from the pack and predicted Armageddon. She was right, the pack was wrong, and she parlayed her new-found fame into a research boutique of her own. Last year she went for it again, predicting that the next big crisis [...]
Welcome to the Third World, Part 6: Portraits of a Quiet Depression on August 7, 2012
Last month I took a long, winding West Coast trip, partially for work and partially to see some old friends. It was
shocking. Almost without exception the old friends are having money or career troubles, in some cases catastrophically so. Most, to one degree or another, have lost the lifestyles they once saw as every well-educated [...]
Welcome To The Third World, Part 5: Higher Education Goes Broke on June 22, 2012
Not all that long ago, most college campuses were pleasant but somewhat austere places where kids without much free cash learned from modestly-paid (but dedicated and respected) professors. Then came the credit bubble, which allowed universities to put up modern buildings and hike pay and benefits, all paid for with state aid, student loans (which [...]
Welcome To The Third World, Part 4: Boomers Reap What Theyve Sown on December 19, 2011
It was fun while it lasted. We Baby Boomers got to diss our elders when we were young and borrow without restraint through middle-age. Few generations have traveled such a smooth stretch of financial/psychological highway. But now that were
old
the world we created isnt so congenial. Our savings are inadequate, jobs are scarce, and retirement, as [...]
Welcome to the Third World, Part 3: Disappearing Pensions on November 8, 2011
One of the things that separate the rich world from the rest of humanity is the expectation that a lifetime of work is rewarded with a comfortable retirement. Whether through an employers pension or 401(K), or government plans like Social Security and Medicare, citizens of the US, Canada, Europe and Japan take it for granted [...]
Welcome To The Third World, Part 2: Real Lives on November 1, 2011
Yesterdays Wall Street Journal devoted an entire page to the differences between todays economy and a typical recovery: Slow Recovery Feels Like Recession Americans are two years into a recovery that doesnt feel much different to many of them from life during the most bruising recession in seven decades. Scenes of the long haul back [...]
Welcome To The Third World. Part 1 on August 22, 2011
One upon a time, the US was a place where police came when you called, a basic safety net caught those who fell on hard times, and a lifetime of work was rewarded with a decent retirement. A First World country, in other words. To be born here was to win lifes lottery. But apparently [...]
Jean-Paul Baquiast
03/11/2012
Voir svp l’article Les leçons d’un ouragan que j’ai écrit le 30 octobre
http://www.automatesintelligents.com/edito/2012/oct/ouragan-sandy.html
http://www.automatesintelligents.com/edito/2012/oct/ouragan-sandy.html
GEO
03/11/2012
En guise de publicité: la fin du livre de cédric Lagandré
“la plaine des asphodèles”, publié par Climats, 2012.
(......)
La catastrophe imminente
Mais au fond notre enfermement même est de bon
augure : l’humain résiste à sa transformation en chose
muette. Désuvrée, l’humanité se découvre une tâche
irréductible, que ne commande aucun Dieu, et dont
aucune pratique ne l’acquitte. Un avoir-à-faire alors
qu’il n’y a rien à faire ; un avoir-à-dire alors qu’il n’y a
rien à dire. Ce que l’humanité rencontre, en même
temps que l’impossibilité de restaurer les cultures dis-
parues, c’est l’impossibilité de s’acquitter du langage,
qui se maintient comme maladie, comme ne-pas-
tourner-rond, comme angoisse : l’angoisse vague mais
persistante que laisse à l’esprit l’irrésolu de cette tâche
à laquelle on ne peut répondre, cet avoir-à sans assigna-
tion, cette dette bizarre à l’égard de personne. Un rien,
sans doute, puisque aucun Dieu ne nous y oblige, et
qu’aucun discours ne sait en rendre compte. « Le désir
suffit à faire que la vie n’ait pas de sens à faire de nous
des lâches », disait Lacan. Dieu n’existe pas, et il n’est
pourtant pas permis d’être lâche. Même vide, la mer
reste à boire. L’appel d’être demeure, quoique aucun à-
venir ne se donne à désirer, puisque seule reste au
monde la vaste plaine du réel aplati. Mais il ne
demeure que sous une forme grimaçante, désir rendu
au désastre qu’il est. Pour avoir anéanti les significa-
tions, on n’en a pas pour autant fait taire le signifier,
qui se perpétue comme un rien. Mais un rien qui nous
chiffonne : à défaut de se déplier en pas-encore, c’est-
à-dire en possible subjectif, la négativité du pas-autrement
hante l’esprit comme une sourde angoisse. Le seul après
auquel le sujet, empêché de se faire, est exposé, est celui
de la catastrophe ; le seul horizon pour le moi désolé,
sommé de trouver en lui seul un sens à exister, c’est le
déluge de l’après-moi. Cet « après moi le déluge » qui
constitue la vérité de notre temps n’est pas à prendre
au sens où tel ou tel moi serait égoïste, mais au sens où
le « déluge » est le seul horizon possible pour un moi pris
à la lettre, un moi sans histoire, un moi sans sujet. Notre
lot historique est le sentiment de la catastrophe imminente.
La catastrophe matérielle annoncée par le discours éco-
logique n’est que la projection collective du désastre
individuel, c’est-à-dire de l’aberration anthropologique
où nous sommes, qui fait assumer à l’individu seul et
souverain, sans porte ni fenêtre, son identité au Tout. Le
prochain d’un être sans prochain, c’est le rien, c’est-à-
dire le contraire du Tout. Et comme rien ne freine plus
l’existence humaine, que malgré sa longévité l’homme
moderne a presque déjà fini sa vie sitôt qu’il la com-
mence, car une vie standardisée est par définition sans
devenir ni développement possible - de la même
manière que l’automobiliste empruntant une autoroute
est pour ainsi dire déjà arrivé, ce n’est qu’une question
de temps, juste un morceau de temps sans avenir-, les
vies humaines se trouvent aussitôt écrasées sur le rien
auxquelles elles sont promises. Quant à la catastrophe
naturelle qui s’annonce, elle n’est évidemment pas une
catastrophe du point de vue du réel : le réel est en soi la
catastrophe, rien n’est pour lui catastrophique ; que la
« nature » telle que nous la connaissons subisse bientôt
des modifications radicales, comme elle en a subi
d’innombrables par le passé, n’est pas un problème pour
la nature, mais un simple bouleversement de ses équi-
libres. Des espèces peuvent disparaître, d’autres apparaî-
tront, et il est parfaitement raisonnable d’imaginer qu’un
jour, de nouvelles espèces de grands prédateurs domi-
neront la planète ; qui s’imagine sérieusement que
l’espèce humaine assistera à la mort du système solaire ?
L’homme ne « détruit » pas la nature : il se contente,
depuis qu’il s’en croit le propriétaire, de la rendre invi-
vable pour lui, et de précipiter la disparition des espèces
qui s’y trouvent, ainsi que la sienne propre. L’annonce
de la catastrophe matérielle n’est en somme que l’expres-
sion, inscrite dans les choses mêmes, de la catastrophe
culturelle, pour autant que la catastrophe désigne
d’abord, dans le langage tragique, le moment où la fata-
lité se lève, désamorce le sérieux des actions humaines,
c’est-à-dire leur capacité à avoir prise sur les événements,
et précipite tout ce beau monde à l’abîme. Quand il
n’arrive rien, quand les choses sont disposées autour de
l’homme de manière à ce qu’il ne puisse plus rien arriver,
lorsqu’on bâtit un monde plein (aussi bien que plain),
saturé, expurgé de toute virtualité, la seule chose qui
puisse arriver est le rien lui-même. Le pressentiment
moderne de la catastrophe, et, disons-le, le goût pour la
catastrophe, n’est que l’effet d’un désir empêché de dési-
rer. Il faut quelque chose, dit Beckett ; mais la catas-
trophe est le seul nom possible de ce quelque chose qu’il
faut. Aussi est-elle réclamée à grands cris par les âmes des
asphodèles.
Le pressentiment de la catastrophe est l’expression de
la conscience partagée d’avoir franchi un point histo-
rique de non-retour, quoique cette conscience advienne
sous la forme paradoxale d’un revenu-de-tout ; la
conscience partagée, quoique diversement exprimée,
d’un épuisement des possibles ou, pour être exact :
d’une exténuation de la catégorie même du possible.
Sous la profusion sans précédent des discours, la vitesse
foudroyante des notoriétés, nous pressentons que nous
avons détruit les conditions mêmes de la mémorabilité.
Et puisque « le monde » ne vise en vérité que cette
mémorabilité, qui ménage pour les hommes le semblant
d’un tourner-rond, la fin du monde n’est plus à craindre,
nous y sommes déjà. « Sentiment de la préhistoire »,
disait De Chirico il y a déjà un siècle : les pierres s’affran-
chissent des monuments qui les vouaient à la forme et
au sens, la dureté de leur matière se dresse dans sa nudité
impitoyable et atemporelle, son éternel midi, son opa-
cité, son mutisme, révélant sous les récits humains
réduits à l’impuissance le monde sous l’homme, sans
l’homme, indifférent à l’homme. Sans le symbole, le réel
est un trou. C’est dans ce trou que l’homme moderne
est précipité ; de ce trou, notre époque est l’apocalypse,
c’est-à-dire la révélation. Apocalypse de l’en-soi rendu à
sa vitesse, à son néant primitif, et parvenant à la
conscience sous la forme dramatisée, la seule possible
dans la déchéance des drama, de l’imminence du
désastre. La catastrophe est le récit minimal, celui auquel
est condamné l’homme qui n’a plus rien à se raconter,
le seul horizon, le seul après possible, somme toute dési-
rable, pour qui n’est plus en devenir.
Ce désastre n’en constitue pas moins une occasion
unique dans l’histoire des hommes. « A partir d’un cer-
tain point, écrit Kafka, il n’y a plus de retour. C’est ce
point qu’il faut atteindre. » Nous y sommes, mais ne
pouvons l’admettre. Les marges bruissent, mais le
centre est pétrifié. Le commun fait défaut, le monde
fait défaut ; nous qui aimerions posséder le monde
sans sortir de chez nous, peut-être finirons-nous,
dans ce désert, et comme l’annonçait encore Kafka, à
contraindre le monde à « se tordre devant soi » - le
monde à toute force voulant exister. Pour cela, il ne
nous manque peut-être que de parvenir à ce que
Beckett appelle la vraie prière : « Oui, on a beau dire,
il est difficile de tout quitter. Les yeux usés d’offenses
s’attardent vils sur tout ce qu’ils ont longuement prié,
dans la dernière, la vraie prière enfin, celle qui ne sol-
licite rien. Et c’est alors qu’un petit air d’exaucement
ranime les vux morts et qu’un murmure naît dans
l’univers muet, vous reprochant affectueusement de
vous être désespéré si tard. »
Pascal B.
02/11/2012
A deux reprises vous mentionnez André Compagnon ; je suppose qu’il s’agit en fait d’Antoine Compagnon ... Et son ouvrage
“Les anti-modernes ; de joseph de maistre a roland barthes”
9782070772230
Antoine Compagnon
Gallimard - Bibliotheque Des Idees
03 Mars 2005
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