Forum

Pour poster un commentaire, vous devez vous identifier

encore un prété pour un rendu..

Article lié :

James

  30/01/2008

Une base chinoise en Iran ?

Par Kaveh L Afrasiabi
Asia Times Online, le 28 janvier 2008
article original : “A China base in Iran?”

  Dans le sillage de la récente tournée du Golfe Persique effectuée par le Président George W Bush, coïncidant avec un voyage similaire du Président français Nicolas Sarkozy qui a culminé avec un accord avec les Emirats Arabes Unis pour [l’installation d’] une petite base française, le calcul de l’Iran en matière de sécurité a changé. Téhéran en est pratiquement arrivé à considérer l’option de rendre la pareille à l’excès perçu comme tel des intrusions occidentales dans son voisinage, en permettant à la Chine [d’installer] une base dans l’un des ports iraniens du Golfe Persique ou sur l’une de ses îles.

  Sans aucun doute, ce serait un geste géopolitique considérable, à la fois de la part de l’Iran et de la Chine, qui perturberait sûrement la superpuissance étasunienne, qui bénéficie d’une hégémonie sans rivale dans cette région pétrolière et qui a elle-même perturbé la Chine avec le récent accord nucléaire civil qu’elle a passé avec l’Inde, accord largement interprété comme étant une initiative à long terme pour “contenir” la Chine.

  Dans cette interaction serrée de géopolitique et de géo-économie, avec la Chine qui est fortement dépendante des importations d’énergie depuis l’Iran et des autres Etats du Golfe, la tendance va sans aucun doute vers un complément naval à la rafale d’accords énergétiques qu’elle est en train de conclure, afin de sécuriser ses précieux cargos qui transportent le pétrole et le gaz (liquéfié) et qui sortent [du Golfe] par les couloirs étroits du Détroit d’Ormuz.

  En ce moment, la stratégie de la Chine se confine à la ville portuaire de Gwadar, le long de la côte sud-ouest du Pakistan, dans la province du Baloutchistan, stratégiquement située près du Détroit d’Ormuz. Pourtant, compte tenu des relations étroites entre les Etats-Unis et le Pakistan, il est très improbable que les Etats-Unis permettent à Islamabad d’entamer des relations stratégiques avec Pékin. La Chine, qui manque toujours d’une marine impressionnante, pourrait en effet utiliser [une telle base] pour projeter sa puissance dans la région.

  Le cas est assez différent avec l’Iran. Celui-ci est constamment menacé par les Etats-Unis - et à présent par la France - et il bénéficie déjà d’un statut d’observateur au sein de l’Organisation de Coopération de Shanghai (OCS), que dirigent la Chine et la Russie. La tentative de l’Iran de rejoindre l’OCS a été en partie bloquée, en conséquence de l’impasse sur son programme nucléaire, mais elle aboutira probablement, dans un avenir pas trop lointain, si le statut actuel de la coopération entre l’Iran et la Russie et entre l’Iran et la Chine se poursuit.

  De son côté, la Chine a déjà dépassé l’Allemagne en tant que partenaire commercial numéro un. Sonipec, le plus grand raffineur de pétrole de Chine, vient juste de finaliser un accord portant sur plusieurs milliards de dollars pour développer l’immense champ pétrolier de Yadavaran, cela en plus du “contrat du siècle” sur le gaz naturel de l’immense champ gazier iranien de Pars Nord. Les contractants chinois travaillent aussi à construire pour l’Iran des terminaux pétroliers dans la Mer Caspienne et, entre autres projets, à étendre le métro de Téhéran et à construire des aéroports. Tout cela, alors que les ventes d’armes chinoises à l’Iran incluent des articles aussi chauds que de la technologie de missiles balistiques et des radars de défense anti-aériens.

  La coopération grandissante sino-iranienne sur les fronts de l’énergie et du commerce s’étendra sûrement tôt ou tard à une coopération militaire plus poussée et, là-aussi, cela dépendra en partie des hauts et des bas dans les “jeux de stratégie” Iran/Etats-unis et Chine/Etats-Unis, surtout si la Chine ressent une pression supplémentaire de la part des Etats-Unis sur le front géopolitique.

  Pour sûr, il est maintenant possible que l’Iran veuille montrer une meilleure disposition que jusqu’ici pour embrasser l’idée de vaisseaux de guerre chinois faisant escale chez lui. Ceci en prélude à plus d’accords de grande envergure pouvant aller jusqu’à inclure des dispositions pour un petit poste naval avancé chinois sur l’une des îles iraniennes du Golfe Persique.

  Une fois encore, un tel scénario, certain de soulever le courroux de Washington, dépend d’un grand nombre de variables. Parmi celles-ci, les futurs mouvements des Etats-Unis dans le Golfe Persique, par exemple, si l’armée américaine cesse ou non d’utiliser certaines îles artificielles installées par les Emirats. Si tel est le cas, cela accroîtrait la capacité de projection de puissance des Etats-Unis au regard de l’Iran et Téhéran pourrait être plus enclin à essayer de contrebalancer une pression américaine aussi lourde pesant sur lui en jouant la “carte de la Chine”.

  Il faut le répéter, la nouvelle et audacieuse manœuvre de la France dans le Golfe Persique a également perturbé Téhéran. En effet, l’Iran trouve que le nouveau tournant pro-américain de la politique étrangère française est nuisible à ses intérêts nationaux. Le résultat net est la bifurcation cognitive de “l’Ouest” contre “nous” [1] qui cadre gentiment avec l’“orientation vers l’Est” de l’Iran, sous la présidence de Mahmoud Ahmadinejad. Cela fait partie intégrante d’une nouvelle approche énergétique “mondialiste” qui inclut de nouvelles ouvertures stratégiques avec certaines nations d’Amérique Latine et Centrale.

  Autrement dit, c’est une grave erreur de mal-interpréter la “nouvelle politique étrangère” de l’Iran comme étant de nature uni-dimensionnelle, tant régionale que continentale, malgré son intérêt étroit pour les régions qui lui sont immédiatement voisines.

  Voici ce que dit un professeur de sciences de premier plan à l’Université de Téhéran : “L’Iran ne peut pas rester indifférent aux manœuvres géopolitiques agressives menées contre lui par les nations occidentales, qui ont pris l’Iran pour cible dans un langage sans ambiguïté”.

  Ce professeur s’est demandé à haute voix comment la France réagirait si tout d’un coup l’Iran commençait à installer des bases près de sa côte ou, d’ailleurs, comment Washington réagirait à une base iranienne au Nicaragua, pays ami de l’Iran ! “Ils ont vraiment besoin de se réveiller et de comprendre que la sécurité nationale n’est pas un processus à sens unique”.

  Si les experts politiques iraniens ne sont pas encore prêts à concéder que l’Iran en est maintenant au stade d’autoriser une base chinoise le long de sa vaste côte du Golfe Persique, ils sont toutefois nombreux à s’accorder sur le fait, avec le milieu géopolitique changeant qui représente des menaces potentielles sérieuses à la sécurité nationale de l’Iran, que toutes les options doivent rester ouvertes.

  Note
  ___________________
  [1] Après tout, Sarkozy est revenu sur la parole de “multipolarité” de son prédécesseur et, à la place, selon un article dans le New York Times de cette semaine, “a tempéré cette notion en parlant de la place de la France dans sa ‘famille occidentale’, une expression bien accueillie à Washington”.

  Copyright 2008 Asia Times Online Ltd/Traduction : JFG-QuestionsCritiques.

RosBank

Article lié : Jérôme K., “victime émissaire”

Steven Rix

  30/01/2008

Il devait y avoir un deal d’ici quelques mois entre la Societe Generale et Rosbank (une banque russe) mais apres l’histoire de Jerome Kerviel, les opportunites du marche russe vont se refermer aux investisseurs francais. Les degats generes par la societe generale ne s’arretent pas simplement au trading, ce sont les alliances strategiques qui risquent d’etre remis en jeu avec la Russie.

Toujours plus de crédit pour la "Grande Bouffe".

Article lié : Jérôme K., “victime émissaire”

Francis

  29/01/2008

Aussi loin que l’on remonte l’argent a toujours trouvé ses fous. Le désir non régulé devient avidité et addiction. La valeur de l’argent est un instrument de maîtrise du pouvoir, mais cet outil libéré devient une arme. Toujours. Les peuples abusent de leur ressources et réclament alors le pillage des voisins, toujours et plus loins. Que ce soit Genghis Kan ou Napoléon, l’empire c’est le pillage et sa croissance.

Ainsi nos ressources sont épuisées. Nous sommes depuis longtemps dans l’inflation financière, une bulle massive de crédit pour équilibrer les balances commerciales de nos importations. Compulsivement créé par notre consommation, l’argent créé emporte l’immobilier, les matières premières et les produits dérivés dans sa hausse. Le marché devenu racket “rançonne” à coup de bulles des ressources de plus en plus convoitées et rares. C’est la curée portée aux extrêmes jusqu’à vider la mer, un monde de plus en plus silloné par les peuples pillés. Mais les consommateurs ADORENT: “plus de crédit pour gaspiller jusqu’à la dernière goutte”. Tout dans l’instant ! L’avenir, le temps même est nié dans les dernières bouchées, la vie s’éteint à mesure de notre vie, le nihilisme se finalise.

Dans cette course les USA ne publient plus le M3 du dollar (agrégat totalisant les différents instruments financiers), l’euro sous des discours contradictoires (et manipulateurs) voit une expansion étonnante du sien (du jamais vu sous Wim Duisemberg le prédécesseur de Trichet !) : mais silence, TABOU familial !

Dans le tsunami financier, le lendemain même de l’orgie des crédits, dans les fraudes expiatoires et la dépression qui s’installent que réclament les politiciens du pillage ?

Un ABAISSEMENT des taux ! Des facilités de crédit ! Une relance de la consommation, de la croissance : la suite, plus, non tout, tout de suite ! Toujours plus de mal pour soulager son mal et vite : la définition de l’addiction. Le fumeur, sa tumeur et ses cendres sont la parabole compulsive de cet univers.

Des peuples obéses “Sarkosent” la planète, leurs états sont les dealers qui se disputent les marchés dans une concurrence mortelle. Au bout du crédit, à la dernière bouffée, il ne restera que nos cendres ... maudites pour le restant des temps par nos enfants.
 
Allez, encore la dernière ...

Interview ancienne (1982) mais intéressante.

Article lié :

Périclès

  29/01/2008

Primaires : Hillary Clinton l’a-t-elle emporté par un vote truqué ∫

Article lié : Kennedy soutient Obama par hostilité aux Clinton et la crise du parti démocrate s’élargit

Misanthrope modéré

  29/01/2008

Vous êtes peut-être déjà au courant mais certains accusent les partisans d’Hillary Clinton d’avoir fait truquer le vote lors des primaires (en bidouillant les programmes des machines à voter), au détriment d’Obama. Idem pour les partisans de McCain au détriment de Ron Paul. Je ne sais pas ce qui est vrai ou faux dans cette histoire, mais quand bien même ce soupçon ne serait pas étayé, ça illustrerait tout de même la crise de confiance systémique dont vous parlez. :-)

http://libertesinternets.wordpress.com/2008/01/22/elections-us-hillary-la-remporte-par-un-vote-truque/

http://www.globalresearch.ca/index.php?context=va&aid=7794

Cordialement.

Le fraudeur

Article lié : Jérôme K., “victime émissaire”

Jojo

  29/01/2008

La presse “MSM” y compris notre petite RTBF qualifie l’opérateur malchanceux de fraudeur.
On devine à qui elle rend des comptes car qui dans cette pièce est le véritable fraudeur sinon le système lui-même.
Si Kerviel a commis une faute professionnelle (même lourde)dans le cadre de ses activités, c’est l’employeur qui en assume la responsabilité vis à vis de ses clients, actionnaires etc. A moins de prouver qu’il ait détourné de l’argent à son profit, en Belgique il répondrait de ses actions devant le tribunal du travail.

Psychologie du subprime

Article lié : Jérôme K., “victime émissaire”

FB

  29/01/2008

(en s’écartant quelque peu de l’aspect Maistrien)
Sur le blog de Mike Shedlock, il y a un passage particulièrement intéressant sur la psychologie des clients du Subprime - partie émergée de l’iceberg financier actuel-:
...

“Nobody seems to be saying, ‘Look, I made a contract with you. I borrowed money from you. I’m gonna do everything I can to pay off that obligation.’ People just seem to be saying, ‘Look, take the house. Good-bye. I’m leaving,’”

Kroft observes to real estate agent Kevin Moran. “There was a time, I think, when people felt really bad about not paying off a debt.”

“Yeah, I think in those days, loans were made by your local banker or building and loan associations or savings and loan,” Moran replies. “They were guys you saw in the grocery store. They were on the little league team with you, the PTA, the school. And I think as mortgages became securitized and Wall Street became involved, they became very transactional and there was no relationship built with the borrower and the lender. And I think that makes it easier for someone to see it as an anonymous party at the other end of the transaction and just walk away from it.”

“Just a business decision,” Kroft says.

Implicit in this segment is that families are not entitled to make “business decisions.” But you know who is entitled? Why, businesses of course. When businesses laid off 1.5 million workers in 2007, it was purely a “business decision.” When Wall Street banks “wrote down” more than $100 billion in losses in 2007, it was purely a “business decision.”

Look for families to become more comfortable making “business decisions” of their own in 2008.
...

Il semble que la réaction de rejet de la Grande Finance par la population française à l’égard de “l’Affaire SocGen” soit très proche en fait de l’état d’esprit de l’américain moyen coincé dans les Subprimes.

Voilà le retour de baton!

Coup gagnant ∫ Sociologie contre psychologie

Article lié : Pour Patrick Buchanan, une victoire de McCain signifierait : la guerre

Francis

  29/01/2008

Le débat porté sur le domaine économique profite plus aux démocrates (Hilary & Obama), le bilan économique de cette administration est catastrophique et chaque américain peut y traverser personellement le mur des discours au contraire des cauchemars lointains : le Katrina économique révèle la Busherie et le pillage des ressources par le CMI.

Par contre ramener sans arrêt le débat dans le domaine évangélo-militaire (comme lors des précédentes élections), alors que le “surge” risque d’être ressenti comme les “soldes” populaires du “cakewalk”, ne peut que favoriser les républicains comme Mac Cain ou autres Bush. C’est le jeu de fascination du CMI, son virtualisme psychologique !

Néocons, Wolfowitz et autres Rumsfeld ne sont à ressortir des poubelles que si le débat retombe dans l’ornière militariste.

Il semblerait qu’une partie plus importante des américains soit sensible à l’image qu’ils projettent dans le monde. Un huitième des votants est d’origine latino-asiatique et leur poid dé-binarise le débat des ânes et des éléphants en changeant sa nature. Le sol se dérobe lentement et ce mouvement pourrait décomplexer les USA du CMI. Laissons le CMI s’auto-virtualiser et s’évanouir dans son miroir.

La sociologie prend donc l’avantage sur la psychologie en cette phase de la partie ?

Philip Giraldi n'est pas de cet avis

Article lié : Une affirmation officielle US (Chertoff): non, nous n’attaquerons pas l’Iran

Dominique Larchey-Wendling

  29/01/2008

Voir cet article sur ContreInfo

http://contreinfo.info/article.php3?id_article=1625

Lame de fond Obama

Article lié : Une victoire considérable pour Obama, – mais une stratégie obligée?

Flupke

  28/01/2008

On ne peut que s’interroger sur ce candidat et sur
ceux qui l’ont porté là . On ne vient jamais du néant . Mais cette candidature donne vraiment à réfléchir et pourrait surtout être en filigrane : “tout mais surtout pas Mme Hillary Clinton et en finale déboucher sur la victoire du candidat républicain ...” Curieux l’adoubement par Kennedy
du candidat Obama .

Article lié : Plus ça change… Ce que cherchent les Américains en Afghanistan

bert

  28/01/2008

“Plus que jamais, le Pentagone croit à l’efficacité totale de l’intervention aérienne dans la lutte contre le terrorisme, conforté en cela par les enseignements sélectifs et biaisés tirés des derniers développements en Irak.”

Sans vouloir surestimer les capacités d’analyses de ces messieurs, je pense plutôt qu’ils n’y voient que des avantages, pas (ou peu) de pertes de leur coté, l’impression de “faire quelque chose”, et garder le contrôle de l’espace aérien entre le Pakistan et l’Iran.

Parce qu’à l’inverse, le seul enseignement de l’histoire, c’est que lorsque les USA bombardent à outrance en remplacement d’interventions terrestres, c’est le début de la fin, un constat d’impuissance et une opinion publique réticente.

“On peut chercher à imaginer ce qu’une telle intervention donnerait si les forces aériennes US étaient libérées de toute entrave en Afghanistan, du point de vue des dommages “collatéraux” et éventuellement des pertes “fratricides” (pertes accidentelles dues de troupes amies dues à des tirs sur des forces amies), et aussi du point de vue de l’efficacité à terme sur le terrain.”

Pas besoin d’imaginer, voir Laos, Cambodge, Vietnam, Kosovo, Irak (1991-2001), Afghanistan (sovietiques 79-89, USA 2001-2008)

Peut-on avoir l’esprit conservateur et le cœur à gauche ∫

Article lié : Une victoire considérable pour Obama, – mais une stratégie obligée?

Francis

  28/01/2008

Tout, tout, tout sur Hillary…
http://madame.lefigaro.fr/celebrites/en-kiosque/1027-tout-tout-tout-sur-hillary

... Carl Bernstein, figure légendaire du journalisme américain depuis l’affaire Watergate, publie la grande biographie (1) non autorisée, mais éclairante ...

... Le seul événement qui mobilisa la fibre plus militante de Hillary fut l’assassinat de Martin Luther King…

« Peut-on avoir l’esprit conservateur et le cœur à gauche ? » questionnait-elle à l’époque dans une lettre à un ami : aucun portrait de Hillary Clinton adulte ne peut la définir de façon plus succincte que cette réflexion prémonitoire faite à l’âge de dix-huit ans.

Les subprimes par Bird and Fortune

Article lié :

Tenten

  28/01/2008

Suite des humoristes de l’autre côté du “channel” : Bird & Fortune

Le sujet : Les subprimes

“Unemployed black man in the street invest fund”

Enjoy!

Source: hhttp://fr.youtube.com/watch?v=SJ_qK4g6ntM

Paiement de ma cotisation : Effectué.

Continuez !

De ma hongroise préférée

Article lié :

geo

  27/01/2008

http://www.hajnalka-vincze.com/
L avant-garde européenne : diagnostic, remède, raison d être
Intervention aux Assises des Associations d Europe, Strasbourg/Parlement européen, 28 septembre 2007

La réflexion qui suit se propose de dresser une sorte d’état des lieux, bref mais impitoyable, de la construction européenne aujourd’hui. A partir d’un diagnostic (celui de l’impasse), elle se poursuit en identifiant le remède (projet d’avant-garde), pour se clore par l’évocation de la raison d’être de toute initiative européenne digne de ce nom (sauvegarde de notre liberté de choix).

Le diagnostic

La construction européenne se trouve aujourd’hui dans une impasse. Ajoutons tout de suite que ce n’est évidemment pas l’absence d’un énième traité qui l’y avait pongée, et ce n’est certainement pas une signature solennelle à Lisbonne, en décembre, qui va l’en faire sortir. Autre précision : s’il est vrai que l’Europe, jusqu’ici, s’est largement construite dans des crises, à travers des crises et grâce à des crises, il est tout aussi vrai que cette crise-là n’est pas une crise comme les autres. Pour dramatiser un peu, à peine, les enjeux : le risque que l’Europe court aujourd’hui est celui de son propre anéantissement. La disparition pur et simple de la possibilité même d’exister et de peser sur l’échiquier géopolitique. Les raisons de cette situation alarmante sont d’ordre tantôt externe, tantôt interne. Elles s’additionnent pour produire leur effet cumulé : une crise européenne profonde et englobante, qui nous met face à nos contradictions fondamentales.

Pour ce qui est des raisons externes susceptibles d’augmenter la gravité de la crise actuelle, il convient avant tout de rappeler l’exacerbation de la compétition sur la scène internationale. L’euphorie accompagnant la fin de la guerre froide masque à peine les rivalités économiques, technologiques, sociales et culturelles-identitaires qui s’intensifient sous nos yeux. Or la course à la sécurité, la prospérité et la stabilité s’inscrit dans une logique de puissance. Un paradigme inébranlable, mais à contre-courant de l’idéologie du jour. Laquelle, comme le dit le philosophe Marcel Gauchet, « interdit de penser la politique, la nation, la puissance, le gouvernement ». Deux facteurs supplémentaires sont appelés, néanmoins, à donner le coup de grâce à ce dogmatisme ambiant duquel l’Europe tarde toujours à s’affranchir. 
Premièrement, la reconfiguration en cours des rapports de force, avec l’émergence de nouveaux pôles de puissance, qui en plus d’être un défi, est surtout une mise à nu pour l’Europe. L’abdication de notre propre puissance, une pratique bien rodée à force d’avoir été perfectionnée pendant plus d’un demi siècle dans nos relations avec l’Amérique, est en effet beaucoup plus délicat à admettre et à justifier lorsqu’il s’agit de nous effacer volontairement devant la Chine, l’Inde ou la Russie. Finalement, il est de plus en plus difficile de faire abstraction du fait que, pour reprendre les mots de Paul Valéry, « le temps du monde fini commence ». Les crises de « survivance » qui s’annoncent, liées à l’épuisement et la dégradation des ressources naturelles, sifflent la fin de la récréation : pour y faire face, le retour en force de la politique apparaît comme l’unique solution.

Ce qui nous amène aux ressorts internes de la crise européenne aujourd’hui. Il s’agit en fait du « péché originel » de la construction de l’Europe, aggravé par une double fuite en avant qui s’est poursuivie ces quinze dernières années. Le péché originel n’est rien d’autre que l’indécision initiale entre la création d’un grand « marché » (vaste zone de libre-échange, conçue comme le point de départ à une libéralisation généralisée à l’échelle mondiale), et celle d’une « communauté » (assumant des priorités et des objectifs politico-stratégiques). Ce sont deux visions antagonistes : ou l’Europe n’est qu’un instrument pour mieux libéraliser (réduire la marge de manœuvre des pouvoirs publics) ou, au contraire, la libéralisation intra-européenne n’est qu’un instrument pour faire l’Europe (augmenter notre marge de manœuvre politique collective). Le plus petit dénominateur commun entre ces deux approches ne suffisait qu’à démanteler les barrières internes en Europe. Autrement dit, à grignoter chaque jour davantage sur la souveraineté des Etats, sans qu’il y ait, au niveau européen, la possibilité d’assumer et sauvegarder ensemble cette même souveraineté.

A cette situation, déjà devenue explosive du fait que le grignotage s’approchait de plus en plus du cœur des souverainetés nationales, est venu s’ajouter, dans les années 1990, un double mouvement de fuite en avant. D’un côté le grand élargissement de l’UE ne pouvait qu’accélérer la dilution, pour des raisons à la fois de nombre, d’hétérogénéité et de préférence politique des nouveaux entrants. Ce n’est pas un hasard si, parmi les anciens pays membres, les plus fervents partisans de l’élargissement furent les mêmes qui avaient toujours défendu l’idée d’une Europe-marché. De l’autre côté, ceux qui voulaient contrebalancer cette dilution, en réclamant le soi-disant approfondissement de l’UE, ne faisaient que renforcer la tendance qu’ils souhaitaient combattre. Compte tenu des deux visions opposées sur l’Europe et de leur seul point de compromis commun, toute « avancée » possible au niveau des 15 (puis 25, 27) Etats membres ne pouvait, ne peut, et ne pourra, qu’accentuer davantage le déséquilibre fondamental, au profit notamment de l’intégration négative. Celle qui se limite, comme on vient de le voir, à la déconstruction des souverainetés.

Le remède

Dans ces conditions, rien d’étonnant à ce que l’attention se tourne vers des solutions alternatives. Notamment celle qui, au vu des tendances à 27, apparaît comme la seule à même de garantir la sauvegarde de la liberté de décision et d’action des Européens : l’idée d’avant-garde (ou groupe pionnier). Deux figures emblématiques de la construction européenne, Jacques Delors et Valéry Giscard d’Estaing, étaient parvenus, chacun de son côté, à la même conclusion. Dans le courant des années 1990, l’ancien Président français proposait une distinction claire entre deux concepts : l’Europe-espace et l’Europe-puissance. Pour Giscard, il ne fallait pas chercher de faire de la « Grande Europe » (élargie) une zone d’intégration accrue, mais de la confiner au niveau d’ambition de l’Acte unique (le traité précédant Maastricht), et n’approfondir l’intégration que parmi ceux qui en ont réellement la volonté politique. D’après Delors aussi, les ambitions du traité de Maastricht avaient été « excessives », déjà pour les 12 à l’époque. L’ex-président de la Commission de Bruxelles fut d’avis qu’au-delà d’un vaste ensemble européen bien régulé dans les cadres de l’UE, la poursuite des objectifs politico-stratégiques doit revenir à un petit groupe de pays déterminés.

Pour ce qui est de l’éventuelle (ou inévitable, c’est selon) mise en œuvre de tout projet d’avant-garde/Europe-puissance, il convient ici de se limiter à trois remarques. Premièrement, le débat sempiternel entre logique fédérale versus logique intergouvernementale, quant au principe d’organisation de la future avant-garde, doit être évacuée d’emblée, et remplacée par une seule considération, très concrète celle-ci : l’intérêt. Les propos de Henry Kissinger, ancien Secrétaire d’Etat américain, sont révélateurs à cet égard. Pour les Etats-Unis, « l’Europe que voulait Monnet n’était pas vraiment différente de l’Europe du Général de Gaulle ». Dans les deux cas, elle serait un problème pour Washington, puisque prête et capable à défendre ses propres intérêts. Par ailleurs, pour arriver à cette Europe forte, la mise en place de mécanismes institutionnels toujours plus intégrés ne constitue pas forcément la seule et unique voie. A la fameuse question, un brin condescendante dudit Kissinger « L’Europe, quel numéro de téléphone ? », la réponse est à la fois plus simple et plus nuancée que l’on ne croit. Au fait, ce qui importe n’est pas de savoir si l’on a un ou plusieurs numéros de téléphone en Europe, mais si l’on a la même réponse et le même message à chacun des numéros…

Deuxièmement, il faut en finir, une bonne fois pour toutes, avec une illusion trompeuse : l’avant-garde n’est pas, en réalité, une « Europe à plusieurs vitesses ». Ce n’est pas le rythme du mouvement qui fait la différence entre le groupe pionnier et les autres Etats membres de l’UE, mais sa direction et son objectif. La principale impulsion au lancement d’une avant-garde réside justement dans le constat de volontés politiques différenciées. En ce sens, l’avant-garde constituerait une véritable rupture. Etroitement liée au point précédent, la dernière remarque concerne l’importance des relations avec ceux qui restent dehors. Une fois l’avant-garde lancée, sur la base du principe non discutable de la sauvegarde de la souveraineté européenne, tous ceux des pays de l’UE qui décideraient de se souscrire, intégralement, aux objectifs initiaux, devront savoir que la porte leur est ouverte. Sous peine de faire le jeu de ceux qui, à l’extérieur, sont toujours à l’affût pour récupérer les Etats membres qui se sentent marginalisés, afin de les ancrer ensuite dans des systèmes d’allégeance extra-européens.

La raison d’être

En abordant la question du mobile profond (sauvegarde de la souveraineté européenne) de toute initiative d’avant-garde qui se veut légitime et viable, deux clarifications s’imposent. L’une concerne l’emploi du terme « européen », l’autre le concept de « souveraineté ». Pour ce qui est du premier, il convient d’abord de mettre le doigt sur un amalgame aussi répandu que fallacieux. Car l’adjectif « européen » se réfère d’une part au niveau européen par opposition au, et comme étant au-dessus du, niveau national. D’autre part, il nous définit par rapport au reste du monde et désigne, dans cette acception, des intérêts et des priorités spécifiques à notre continent. Contrairement à ce que l’on veut nous faire croire en passant sous silence cette distinction cruciale, les deux ne se confondent point. L’européanisation au sens bureaucratico-institutionnel ne signifie pas mécaniquement européanisation au sens politico-stratégique. La supranationalisation ne nous mène pas automatiquement à la prise en compte et la défense des intérêts de l’Europe au sens géopolitique. Elle risque même de conduire à l’inverse.

Dans l’état actuel des choses, laisser jouer un processus « intégrationniste » (avec, par exemple, le passage au vote à la majorité) entraînerait, dans les domaines d’importance stratégique, la mise en minorité immédiate de toute velléité d’autonomie. Plus grave encore, cela ferait disparaître, du même coup, toute porte de sortie. Au fait, pour que les Etats les plus volontaristes puissent se regrouper en vue de poursuivre des objectifs plus ambitieux, il leur faut de la marge de manœuvre. A l’heure actuelle, pratiquement chaque « pas en avant » dans l’intégration à 27 est comme une attache supplémentaire sur une camisole de force. A moins d’un changement de cap radical (prise de conscience générale des enjeux de souveraineté), toute poussée vers l’européanisation au sens bureaucratico-institutionnel ne ferait que verrouiller l’Europe un peu plus dans une position de dépendance définitive. C’est-à-dire dans une direction exactement contraire à l’européanisation au sens politico-stratégique.

Dans le cas du terme « souveraineté », il faut, en un sens, pratiquer la démarche inverse de ce que l’on a vu pour l’adjectif « européen ». Ici, ce n’est pas la distinction cruciale entre deux significations faussement confondues du même terme qu’il convient de souligner, mais bien au contraire, le lien intrinsèque, quoique rarement relevé, qui unit les deux dimensions indissociables de la notion de « souveraineté ». D’un côté le volet « autonomie », qui désigne la liberté d’appréciation, de décision et d’action de l’Etat, de l’autre la « démocratie » où, le pouvoir suprême étant attribué au peuple, les citoyens participent, en leur qualité d’électeurs, à l’exercice de cette liberté au moment du suffrage.

Concernant la question de l’autonomie, l’Europe se trouve aujourd’hui sous la dépendance de l’Amérique. D’après Zbigniew Brzezinski, ancien conseiller du Président Carter et personnalité emblématique de l’establishment washingtonien, « l’Europe reste largement un protectorat américain, avec des pays alliés qui rappellent les vassaux des temps anciens ». Pour Charles Kupchan, ex-directeur des affaires européennes sous le Président Clinton, « l’Europe est restée dépendante des Etats-Unis pour sa sécurité. Or le contrôle en matière de sécurité est le facteur décisif pour déterminer qui est aux commandes ». Ce n’est pas Robert Cooper, l’éminence grise de Javier Solana, qui dira le contraire. Le constat du directeur général chargé des Affaires extérieures et politico-militaires au Secrétariat du Conseil de l’UE est sans appel : « Nous sommes dépendants des Etats-Unis pour notre sécurité, du coup les conflits sont contenus dans certaines limites, nous pratiquons l’autocensure ». En effet, le refus obstiné de la puissance et de l’indépendance entraîne la perte de toute position de négociation réelle. Et pas qu’en matière de sécurité. Comme un document officiel du Pentagone l’avait gentiment mis en évidence dès 1993 : « Nos alliés doivent être sensibilisés au lien qui existe entre le soutien américain à leur sécurité et leurs actions dans les domaines tels que la politique commerciale, le transfert de technologies et la participation aux opérations de coalition ».

Et c’est à ce point crucial (à savoir le problème des «contreparties» et de «l’autocensure») que le volet autonomie rejoint la dimension démocratique de la souveraineté. Car l’autonomie de décision et d’action de l’Etat est ce qui donne un sens au vote des citoyens. En leur garantissant la possibilité de vrais choix, et par là, la maîtrise de leur propre destin. Toute initiative européenne digne de ce nom ne peut avoir autre but que de nous assurer les bases concrètes de cette liberté de choix. Encore faut-il, bien sûr, en avoir l’ambition et le courage. Pour citer les propos de Jean-François Deniau, négociateur français du traité de Rome, premier Commissaire européen aux relations extérieures, et un partisan de la première heure de l’idée d’avant-garde : « L’Europe, ce n’est pas un territoire, pas une nationalité, c’est une volonté. Est européen seulement celui qui entend être européen ».

Janvier 2008 sur le site

Méthodes

Article lié : Les “faux-frais” au coeur de la crise

Robert

  27/01/2008

Mais a qui donc profite le crime dans l’affaire SocGen ? Doit on d’ailleurs parler d’un seul crime ou délit ? La décision de la FED et la position de la BCE ne sont elles pas concertées ? Monsieur Boutin qualifiant Kerviel de terroriste montre bien l’utilisation d’une méthode. Pour le monde financier ou plutôt pour le monde bancaire, la criminalité financière est devenue une simple méthode de travail.