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313126 juin 2016 – La psychologie de l’américanisme, ou simplement psychologie américaine dans ce cas, a-t-elle découvert que l’Europe existe pour se rappeler d’un même élan que la sécession existe pour les USA ? Question pour un psychanalyste... Ou bien pour un chroniqueur ; ou bien mieux encore, pour un chroniqueur qui se fait psychanalyste parce qu’un psychanalyste courant ne prendrait évidemment pas (encore) la chose au sérieux. Moi, elle m’apparaît sérieuse, parce que si conforme à cette psychologie américaine. Je dis bien “psychologie américaine” dans ce cas parce que le phénomène dont je veux vous entretenir ici est “dissident” en soi, donc que l’américanisme, chose qui est “au Système” comme l’on appartient à son maître, se refuse absolument à seulement évoquer ce phénomène ; il se soumet, comme fait la presse-Système US, à cette incroyable autocensure qui s’exerce aujourd’hui, qui éclipse en force toutes les censures totalitaires dont l’Histoire nous a montré l’existence.
(Les faits qui m’ont alerté, en trois jours depuis le Brexit, n’existent pas vraiment selon la narrative-Système ; quasi-silence complice, quelques mots condescendants, petit sourire nerveux, rire jaunasse, tout cela n’est pas sérieux cher ami-prenez-un-autre-verre-les-petits-fours-sont-délicieux... Le Système et ses zombies vivent dans les temps actuels sous dose massive de Prozac-déni, catégorie particulière du produit : euphorie forcée de l’expectoration continuelle par vomissements d’une vérité-de-situation dont ils espèrent montrer le non-être en la vomissant, avec le Royaume-Uni en lambeaux, ses bouseux anti-UE, sa xénophobie insupportable parce qu’ils n’embrassent pas les migrants ; Prozac-déni, vomissements, Prozac-déni, vomissements, ainsi va le zombie-Système dans ces jours galopants dont le sens lui est complètement alien, et la non-ontologie évidente. Rame, zombie, rame, tandis que l’on déplace les transats sur le pont du Titanic.)
D’abord, cet article de Ryan McMaken, de The Mises Institute du 24 juin, repris par ZeroHedge.com, signalé sur ce site le 25 juin. En un mot : l’Ecosse prépare une nouvelle procédure de sécession du Royaume-Uni suite au Brexit, voilà qui constitue un excellent modèle pour le Texas vis-à-vis des USA ; nommons cela Texit. Puis un article de ZeroHedlge.com le 26 juin, signalant un formidable intérêt dans les réseaux pour l’idée, dans le genre extrêmement affirmatif : « Calls For Texas Independence Surge After Brexit Vote. » Il s’agit simplement du constat de l’intérêt du citoyen-internet US pour le mot et l’idée, disons pour le concept-Texit pour faire sérieux... J’ai une estime particulière pour cette sorte de “sondage”, qui ne témoigne pas de la progression d’un jugement mais de l’ouverture soudaine de la psychologie au concept, et donc à la possibilité effective et soudain complètement réaliste de la chose :
« As Vocativ reports, the site analyzed the use of “Texit” since the beginning of 2016, and found that the phrase exploded when the Brexit results were announced, as more than 5,800 people on Twitter used the phrase, a five-fold increase from the day before. 1,745 people tweeted about Texit between 7am - 8am London time, the hour when the final results were announced. [...] According to Vocativ, the largest group advocating for secession is the Texas Nationalist Movement (TNM), which has been promoting its own version of Brexit called “Texit” over the past several weeks. “The vast majority of the laws, rules and regulations that affect the people of Texas are created by the political class or unelected bureaucrats in Washington,” said Daniel Miller, president of TNM. »
Là-dessus, le bulldozer, The Donald soi-même. (Lequel entretient l’opinion originale et point du tout dépourvue de bon sens que “Poutine et moi-même” sont les deux grands bénéficiaires, – les vainqueurs, en un sens, du Brexit.) Interrogé sur ces “bruits” de Texit, Trump répond droitement que cela n’arrivera pas (la sécession du Texas) parce que “le Texas m’adore” (terme amoureux : “because ‘Texas loves me’”.) Précision intéressante : “Le Texas ne fera jamais cela si je suis président”. The Donald s’institue donc comme le garant de l’unité des USA. (Inutile de vous demander ce qu’il arriverait si, par extraordinaire, Hillary-la-puante [notre traduction à moi de “Crooked-Hillary”] était élue...)
Toute la magie de Trump est là ... 1) D’abord, ce n’est qu’à lui qu’on ose poser ce genre de question, parce que face à Leurs Majestés Hillary, Obama, Jeb-Bush, etc., on se trouve entre gens de trop haute lignée parmi les crapules corrompues pour oser aborder de telles billevesées ; 2) ensuite il vous dit que cela n’arrivera pas, la sécession du Texas, parce que le Texas l’adore, – lui Trump et pas les USA, vous aurez remarqué la nuance j’espère ; 3) et ensuite, ensuite, toujours dans le même registre de l’“amour fou”, cette affirmation liée à l’amour du Texas pour Trump suppose que, pour que le Texas ne fasse pas sécession, ce soit Trump lui-même qui soit élu président... ; 4) enfin, puisque ce bulldozer à trompe qu’est Trump est quasi-officiellement candidat républicain à la présidence, cet intermède-bouffe ne signifie pas moins que ceci qui n’est pas rien, que le débat sur la sécession aux USA (celle du Texas mais aussi le principe de la sécession), jusqu’alors objet d’un simple haussement d’épaules washingtonien comme toute question concernant quelque sécession que ce soit lors de débats ou de conférences de presse à Washington DC, devient un véritable débat, un objet considéré comme sérieux pour un débat officiel... On progresse. Avec à-propos, les sécessionnistes texans, regroupés en parti, annoncent qu’ils espèrent bien que le Texas sera appelé par son gouverneur à voter sur son indépendance, c’est-à-dire à faire sécession des USA, en 2018.
...Notez encore ou à nouveau, on a assez insisté sur la chose sur ce site, que le Brexit a frappé les USA de plein fouet, comme c’était absolument inattendu, peut-être bien plus encore que l’Europe ; cela est d’ailleurs ma conviction, le Brexit a déstabilisé les USA bien plus que l’Europe. (Remarquez, certes, l’Europe c’était déjà fait puisque le Brexit est la conséquence et non la cause de la déstabilisation de l’Europe.). Cela va d’une presse-Système devenue absolument folle (« “This is the end” : Media hysterical over Brexit », titre Washington Examiner le 25 juin, parlant des seuls médias US cela va de soi) à certaines déclarations, comme ce communiqué solennel du sénateur Jeff Sessions, de l’Alabama, grand pote de Trump et placé sur la liste des vice-présidents possibles : « ...Brexit : Maintenant, c’est notre tour. »
« The British people, our special friends and allies, deserve our full support following their sovereign and considered decision to leave the European Union. The people spoke from their hearts and with conviction. They considered deep and critical issues never discussed by the international elites. Their strong vote arose not out of fear and pique but out of love for country and pride of place. Their experience with a distant government in Brussels was given a long and fair chance to succeed. In the end, however, they concluded that the costs outweighed the benefits. Often, Britain makes changes that precede U. S. action...[...]
» Now it’s our time. The period of the nation state has not ended. No far off global government or union can command the loyalty of a people like their own country. Vague unions have no ability to call on the people to sacrifice for the common good. They seem incapable of making decisions and when they do, they have difficulty executing the decision. Far better to celebrate the wonder and proven worth of good nation states and to work hard to use that foundation to build harmonious political and trading relations among the nations. This is the best basis for peace and prosperity.
» In negotiations and relationships, national leaders should first ensure they have protected the safety and legitimate interests of their own people. This principle has been eroded and Brexit is a warning for America. Our British friends have sent the message loud and clear. The interests of powerful international corporations, media, special interests, and leftist international forces are not coterminous with those of our people. This we must understand. The ultimate interest that our government is legally and morally bound to serve is that of our people... »
Si le commentateur que je prétends être se mue en psychanalyste, je dirais alors ceci. Pour les USA, jusqu’au 23 juin, l’Europe en tant que telle n’existait pas, sauf pour les dirigeants-Système, de Obama à Juncker et à Hollande-Merkel, de Washington DC à Bruxelles-UE. Le Brexit fait découvrir l’Europe aux USA au moment où la révolte éclate en Europe ; et, ce faisant, cet ensemble d’évènements à contretemps conduisant à conclure qu’après tout, la même chose pourrait bien survenir pour les USA.
Il s’agit d’un exorcisme ; en termes psychanalytiques, une inhibition libérée par une impulsion ; soudain, l’idée de sécession, totalement relaps depuis 1865, redevient concevable. On peut mesurer la puissance de la communication et ses effets sur la psychologie ! Depuis la terrible Guerre de Sécession, particulièrement sanglante et cruelle, et l’objet de la première campagne aussi massive et puissante de désinformation/mésinformation que peut le permettre le système de la communication dans l’histoire de la modernité, le mot de “sécession” est synonyme d’enfer ; il est nécessairement tenu pour relaps, dissident, et unthinkable sinon unspeakable. Il est, quasi par définition, un-American, selon cette expression si remarquable qui n’a guère de traduction en français (“anti-américain” ne convient pas) et qui caractérise, selon ma propre perception, un comportement déviant, quasiment pathologique et passible d’asile d’aliénés, par rapport à la narrative que l’américanisme a composé pour mettre en musique et rythmer la marche en avant des Etats-Unis d’Amérique ; une sorte de péché de non-conformisme, qui est évidemment le péché capital dans The Land of the Free.
Depuis 1865, depuis que les USA se sont payés le luxe de devenir singulier (la grammaire passant du “the USA are...” à “the USA is...”) en se racontant qu’ils étaient devenus une nation (Birth of a Nation), le mot est, ou bien disons “était” “dissident”. C’est pour cette raison essentielle d’une telle inhibition collective, vécue collectivement et imposée collectivement, que Sigmund Freud, en venant visiter les USA en 1909, exultait parce qu’il y voyait à juste raison la terre d’élection de la pratique de la psychanalyse, la “Terre Promise” du psychanalyste. Il y a très peu de temps, une grande campagne de quelque chose comme une sorte de “désudistation” (comme on disait “dénazification” dans le bon vieux temps et “déforestation” dans la langue courante de la modernité) a été lancée pour supprimer les divers symboles et vestiges officiels du conflit tels qu’ils étaient encore honorés dans les États du Sud, comme on donne des antidépresseurs à la partie la plus atteinte et la plus rebelle du système nerveux. Bien plus que le coup de grâce portée à une idée que plus personne n’était autorisé à concevoir, je considérerais cette attaque, en plus à la lumière des évènements courants, en vérité comme le premier signe d’une tentative spasmodique et hystérique de riposte du Système (grâce à ses “idiots utiles” progressistes et pseudo-antiracistes) contre la marée qu’il sentait venir. Tout ce qu’il peut y avoir de tragique et de décisif dans le destin des USA ne peut se situer qu’un niveau de la mise en cause de son unité, tant cette unité fut au départ une escroquerie par rapport à l’histoire, une tromperie par rapport aux principes du monde et d’une façon générale un arrangement contre-nature qui a sa part, qui est essentielle, dans le “déchaînement de la Matière”.
On dira justement que Trump et sa cohorte de sortilèges-sacrilèges est à la croisée d’une contradiction : lui-même brigue la présidence d’un puissance qui est une fédération bureaucratique en s’appuyant sur l’exemple d’une sécession d’une autre puissance (disons puissance-bouffe, cela définit mieux l’UE) qui prétendrait devenir une fédération bureaucratique, et il se trouverait alors lui-même confronté à un état d’esprit qui en viendrait bien à revendiquer la même logique de sécession (Texit pour Brexit). Son pari serait-il de transformer le gouvernement de cette puissance-fédération bureaucratique à l’avantage de ses composants pour faire passer ce goût naissant de la sécession ? Ou bien échouerait-il et rendrait-il son tablier en disant triomphalement : “Eh bien, puisqu’il en est ainsi, que chacun (Texas en premier) reprenne ses billes et suive sa propre voie, et c’est ainsi que “America is great again” ?
Je ne pense pas que cette sorte de contradiction gêne en quoi que ce soit The Donald. C’est un monstre, une sorte d’extra-terrestre, sans le moindre intérêt pour la cohésion de la pensée et la rectitude de la logique. Il n’est même pas démagogique, il est tout instinct et dynamique d’adaptation, braillard, absolument plein d’une énorme conviction qui est celle de n’en avoir aucune. Absolument né du Système, aussi vulgaire que lui, sans aucun apprêt, sans le moindre fard malgré la permanence de son bronzage, il le déteste (le Système) comme le fils prodigue pourrait détester le Père s’il s’apercevait, par pure inversion, qu’il est revenu vers lui pour découvrir la vérité de sa tromperie et de sa dissimulation. S’il le faut et si la chose est bonne pour ses investissements mis dans une “Trump Independence Tower” qui serait la plus haute de toutes, Trump-devenu-Donald-The-Ist pourrait tout aussi bien être le détonateur qui embrase l’explosion finale de ce patchwork de principes bafoués que sont les USA.
Par ailleurs, je suis persuadé plus que jamais que c’est bien là, dans la désunion des USA, que réside le paroxysme final de la crise du Système. L'industrieux et habile investisseur qu'est The Donald revendiquerait bien cet honneur d’avoir allumé la mèche après l’avoir vendu à un bon prix.
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