Les S-400 sont en Turquie

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Les S-400 sont en Turquie

12 juillet 2019 – Des déclarations officielles sans doute coordonnées, des Russes et des Turcs, ont annoncé que les livraisons des systèmes de défense aérienne russe S-400 à la Turquie ont commencé. Il s’agit bien entendu des premières infrastructures, des premiers systèmes, pour l’instant n’ayant aucune capacité opérationnelle, et d’autre part avec la nécessité d’un écolage du personnel turc qui va contrôler ce système. Il est possible qu’une première unité de S-400 turcs soit opérationnelle en octobre prochain

Constat de l’événement selon ZeroHedge.com : « Des sources russes et turques ont confirmé mercredi que les livraisons de systèmes de missiles antiaériens S-400 sont en cours, les pièces détachées des systèmes russes avancés étant déjà arrivées en Turquie par avion de transport avec une équipe de spécialistes russes, apparemment dans la ville de Malatya en Anatolie orientale ainsi que dans la capitale Ankara.
» Dimitri Pechkov, le porte-parole du président russe, a annoncé le transfert qui est considéré comme une provocation par les USA, qui l’ont condamné l’année dernière, condamnation assortie de la menace de sanctions et du  blocage de la livraison des F-35 à la Turquie. Pechkov a déclaré que “les livraisons des complexes russes S-400 en Turquie sont effectuées comme prévu”. »

Bien entendu, c’est un événement annoncé, mais c’est aussi un événement dénoncé (par les USA) au moins autant de fois qu’il fut annoncé, et sans doute plus encore. On avait coutume de penser en général, ajoutant les manigances et l’absence de rectitude d’Erdogan, son habileté à transformer des affaires courantes ou des corrections de posture stratégique en moyens de pression ou de chantage, enfin ajoutant encore la puissance qu’on juge souvent irrésistible des capacités de pression US, qu’au dernier moment Erdogan rentrerait dans le rang de l’OTAN, c’est-à-dire des consignes-USA. Ce n’est pas le cas, il faut se rendre à l’évidence.

C’est une affaire qui remonte loin : nous-mêmes parlâmes pour la première fois de l’intérêt de la Turquie pour le S-400 Triumf russe il y a plus de dix ans, le 29 avril 2009. Politiquement, c’était la première période de rapprochement diplomatico-stratégique de la Turquie vers la Russie, la Turquie ayant été un, des rares sinon le seul pays de l’OTAN à clairement se montrer très ouvert aux thèses russes dans le conflit entre la Russie et la Géorgie d’août 2008. Les premières réactions US à ces perspectives turco-russes furent du type standard, quand il y en eut. Manifestement, les bureaucraties US/atlantistes ne pouvaient croire que la Turquie puisse prendre une telle orientation du point de vue des armements, concernant un domaine et un système de cette importtance. On peut penser qu’une longue habitude de totale vassalisation./corruption US des élites turques jusqu’à l’ère Erdogan avait figé les bureaucrates du renseignement US dans leurs certitudes que ce “terrain conquis”  (la Turquie) l’était à jamais.

Il est intéressant de rappeler cette situation de la Turquie dans le jusqu’au début du XXIème siècle. On peut avoir un témoignage personnel (de PhG) sur l’importance de la Turquie dans le dispositif d’infiltration global des USA/du Complexe Militaro-Industriel (CMI) dans la deuxième partie du XXème siècle avec cet extrait du Journal-dde.crisis, (le 22 juillet 2016), où PhG retrouve une ancienne relation, passée de la Force aérienne Belge à General Dynamics (GD), à Bruxelles puis à Ankara à partir de 1980. La source de PhG est identifiée comme “DD” et, dans les circonstances rapportées, est atteinte d’une maladie mortelle à courte échéance... 

« Puis le F-16 fut choisi [par la Belgique et trois autres pays de l’OTAN], puis le temps passa, et DD avec lui, que je ne revis plus avant longtemps. Effectivement, je le rencontrai une fois encore, près de vingt ans plus tard, parce qu’il avait vu un de mes livres à la Foire du Livre de chaque mars à Bruxelles, qu’il s’était souvenu de moi, etc. ; il voulait lui-même écrire, ses souvenirs à propos de GD, et il avait pensé qu’il pourrait s’informer auprès de moi sur les procédures à suivre, voire pour un contact avec un éditeur, voire même pour une collaboration éditoriale. Je me rappelle notre déjeuner, rapidement conclu après un coup de téléphone, dans un petit restaurant d’une sorte d’amicale des anciens aviateurs militaires dans le “quartier européen”, Les Ailes. Je reconnus à peine DD : il avait terriblement vieilli et paraissait épuisé, et j’appris dans le cours du déjeuner, une confidence qui lui échappa, qu’il était très malade (cancer, sans nul doute), – et il dit cela, presque gêné, comme s’il pensait qu’il n’en avait plus pour très longtemps et qu’il voulait qu’on l’excusât de ce prochain départ intempestif... Alors, il était pressé d’écrire ce livre.
» DD m’apprit qu’une fois l’affaire des F-16 européens bouclée, vers 1979-1980, il avait été nommé à Ankara, à un poste stratégique à l’antenne GD. Il passa sur les détails, mais il était assez clair que des difficultés considérables avaient surgi entre GD et lui, qui l’avaient mis dans une position très difficile, presque au risque de sa vie. Il m’expliqua qu’il avait disposé et travaillé sur le logiciel des diverses activités secrètes de GD “et du reste” en Turquie et dans de vastes régions stratégiques, au Moyen-Orient et en Extrême-Orient, qu’il avait percé les protections et codes divers de l’entièreté du programme grâce à une jeune fille, étudiante qu’il avait connue comme stagiaire, qui était une spécialiste en informatique. A deux, ils avaient mis à jour toutes les données avec capacités d'interférences, et DD laissait entendre que c’étaient la disposition de ces informations et de ces capacités qui lui avaient attiré tous ses ennuis, mais également lui avaient permis d’échapper à de plus graves ennuis encore ; de ce qu’il possédait, et d’ailleurs qu’il avait pu suivre en réactualisant pendant un laps de temps non négligeables avant que GD ne découvre la chose, il s’avérait que la Turquie était la plaque tournante des exportations US dans la région, et éventuellement d’autres opérations connexes.
» On a vu que bientôt, GD/Fort Worth [F-16] passerait à Lockheed, puis à Lockheed Martin, – transactions faites quand je revis DD, – mais cela n’importait guère. DD m’expliqua que ce matériel d’information et de gestion de ventes et de corruption, sans oublier les contacts avec des organisations comme les réseaux Gladio/Loups Gris qui pouvaient avoir leur utilité à l’occasion, était partagé par tous les exportateurs du complexe militaro-industriel, sous gestion et coordination de l’office-export du Pentagone avec les antennes des ambassades, et des différentes agences de renseignement [CIA, DIA, etc.].) DD était effrayé du contenu de ce qu’il possédait mais, d’autre part, sentant sa fin proche, il avait voulu laisser une trace, – et peut-être dénoncer le système (Système...) en écrivant un livre ; c’est mon hypothèse à moi, toujours optimiste. Nous nous quittâmes sur sa promesse de m’envoyer son manuscrit ou du matériel pour faire un livre, pour que je le guide vers l’un ou l’autre éditeur, et que l’on collabore éventuellement ; bien entendu, j’étais fasciné par avance, en attendant cette lecture, et puis également un peu troublé. Je n’eus plus jamais de nouvelle sinon, un jour, je ne sais par quel canal, celle de sa mort. Je n’ai jamais su s’il avait eu la force d’écrire ce livre, dans tous les cas je n’ai jamais eu le moindre écho d’une édition quelconque qui s’en rapprochât.
» C’était un jour assez sinistre, celui de notre dernière rencontre. On venait d’apprendre, quelques jours plus tôt, le suicide du général Lefebvre, ancien de la Force Aérienne, qui avait travaillé pour Dassault dans la campagne de vente du Rafale en Belgique. (Docu abondante sur la chose, largement par expérience personnelle, le 10 octobre 2009, le 24 octobre 2014 et le 13 avril 2015.) Ce suicide, des années après l’affaire du Rafale, alors qu’on avait déterré quelques à-côtés divers de soupçons et autres affirmations de corruption, jetait rétrospectivement une lumière sinistre sur une période qui annonçait notre temps des soupçons, des narrative, des manigances et des diffamations-Système... Je crois que Lefebvre avait mis fin à ses jours parce qu’on l’accusait à mots à peine couverts d’avoir été un corrupteur, ce qu’il n’avait pas supporté ; l’avait-il été ? On ne sait pas mais ce que je sais, moi, de science certaine, c'est que de leur côté, les autres, eux, avaient été sans aucun doute corrupteurs de toutes les façons du monde...
» “Les autres”, c’est-à-dire la partie US, les américanistes, et j’en reviens en conclusion à DD et à ce qu’il m’avait dit à mots couverts. Il avait parlé abondamment de la Turquie et de l’extraordinaire tissu de corruption américaniste dans le pays (GD avait directement fait transiter $40 millions dans les caisses de je ne sais quel parti conservateur turc pour je ne sais quelle élection présidentielle turque des années 1980, le tout saupoudré de diverses commandes de F-16). Pour DD, les Forces Aériennes Turques étaient une extension directe de l’USAF, à un degré absolument inconnu en Europe ; lui-même en témoignait avec des arguments, ayant été dans la Force Aérienne Belge, puis avec GD négociant avec la Force Aérienne. A cette lumière, on comprend qu’une telle structure, renforcée à partir de 1999 par d’autres structures dites de l’“État parallèle” (*) de Gülen et de son mouvement transnational et islamiste Hizmet, activé et soutenu par la CIA, ait largement perduré, Erdogan ou pas Erdogan ; et l’on comprendrait sans trop être contraint que Incirlik ait été le centre de coordination du putsch de la semaine dernière, tout comme ne paraît plus si folle ni grotesque l’idée que le pilote de F-16 qui a abattu un Su-24 russe en novembre dernier l’ait fait sans passer nécessairement par l’approbation d’Erdogan... »

On a sans doute remarqué que l’achat de S-300 (système de même catégorie que le S-400) par la Grèce, bien avant (en 1996 !) l’affaire S-400/Turquie, ainsi par deux pays ex-communistes devenus membres de l’OTAN (Bulgarie et Slovaquie), ne souleva guère de vague, bien qu’il s’agisse également d’un pays de l’OTAN de la Guerre froide. Ce qui précède, entre autres faits et situations, montre pourquoi la Turquie, outre sa position stratégique, sa puissance militaire, etc., était un sujet extrêmement sensible pour les USA et le CMI, et qu’il y ait eu ces réactions à ces proijets de faire emplette de S-400. Ce point a évidemment pesé lourd dans la réaction négative, puis furieuse des USA, à partir des années 2015-2016, – et cette attitude étant sans doute “opérationnalisée” par le soutien actif de ce qu’oin peut deviner être l’OTAN et la CIA, au putsch anti-Erdogan de juillet 2016.

Depuis 2015-2016, et, d’une manière infernale d’insistance et de menace, depuis l’arrivée de Trump, la Turquie est l’objet de pressions extraordinaires de la part des USA, spécifiquement sur ce point de l’achat des S-400.Voilà qui justifie largement qu’on attache une importante particulière à la concrétisation de cet achat de S-400, qu’on s’en explique plus avant et qu’on le considère comme une défaite majeure des USA. Nous avons attendu pour un tel commentaire la livraison des premiers éléments de la commande turque (qui devrait être suivie d’une commande de S-500), qui opérationnalisent la transaction de manière irréversible. Nous sommes dans le domaine de la quincaillerie à l’origine, mais nous sommes aussi et d’abord bien au-delà : domaine de la communication, et du symbolisme du fait que les USA ont fait de l’affaire un enjeu colossal ; domaine de la stratégie fondamentale de l’hégémonisme US en crise profonde, avec peut-être à la clef, sans doute, et même très probablement, – l’appartenance de la Turquie à l’OTAN, sa mise en cause, un possible départ de la Turquie, mais qui ne serait plus une crise limitée à un pays, mais l’amorce d’une crise centrale du système de l’américanisme et de l’existence de l’OTAN.

L’idéal du simulacre par les armes

Il est donc clair que les S-400 et la Turquie constituent pour les États-Unis un cas très particulier, et même un événement à la fois stratégique et métahistorique, donc fondamental. Pour quelles raisons, un tel jugement ?

Expédions rapidement l’aspect de la quincaillerie, tout en notant qu’il est, pour la bureaucratie du CMI et du Pentagone, d’une importance absolument considérable. Il est évident que les S-400 posent un problème préoccupant par rapport aux F-35 théoriquement destinés à la Turquie, notamment par les interférences électroniques et l’identification des caractères d’une soi-disant invisibilité (on dit “furtivité”, pour faire chic et stealthy) de l’avion. Même si l’on est en droit de se demander pourquoi la bureaucratie US s’inquiète tant de la vulnérabilité électronique d’un tel fer à repasser (le F-35) qui n’a besoin de personne pour connaître tous les ratages du monde, on conviendra qu’il suffit de restreindre l’accès des Turcs au F-35 jusqu’à ne pas leur livrer, – ce qui va sans doute être fait, – pour protéger la virginité de l’oiseau rare. Le problème second de la non-intégration du S-400 dans le système de défense de l’OTAN, s’il ne peut être résolu, ne sera pas résolu et deviendra, si l’on s’en tient au point de vue de l’OTAN sur sa propre gloire et sur sa puissance, un problème pour la Turquie plus que pour l’OTAN... En attendant, on verra si la Turquie fait toujours partie de l’OTAN.

Dans tout cela, rien d’insurmontable, rien qui justifie l’extraordinaire fureur, les pressions incroyables, que la perspective du S-400 suscite aux USA à l’encontre de la Turquie. Il y a donc autre chose.

L’attitude actuelle des États-Unis, faisant du choix du S-400 par la Turquie une calamité de l’ordre de la Fin des Temps, commença à s’affirmer en 2014-2015. C’est alors que se produisirent plusieurs évènements.

• Avec la crise ukrainienne, le “coup de Kiev”, etc., se développa une activité de communication tendant à effacer tous rapport avec la réalité au profit du développement de narrative dans le cadre de la construction de simulacres. Nous parlons bien là, exclusivement et avec force, des pays du bloc-BAO, et nous avons défini ce phénomène notamment au travers de concepts tels que “déterminisme-narrativiste” et “vérité-de-situation”. Il s’agit à partir de là de la reconstruction complète d’une “réalité” fictive, rendue possible grâce à la puissance du système de la communication.

• En même temps, dans cette même époque, notamment avec la prise de contrôle de la Crimée par les Russes qui prit totalement l’OTAN par surprise, il apparut que la puissance militaire russe s’était notablement améliorée, notamment du point de vue qualitatif, et menaçait très sérieusement, sinon surpassait les capacités manœuvrières et guerrières du bloc-BAO.

• Ainsi la création de narrative et d’un simulacre devait avoir pour but, d’une part de dissimuler la puissance russe afin de ne pas la faire supérieure qualitativement à celle de l’Ouest (celle des USA), tout en lui reconnaissant un degré de malfaisance s’accordant avec l’état d’esprit russe (poutinien) et désignant la Russie comme l’ennemi public, sinon métaphysique n°1. Le diable, en somme, était invité à cautionner le simulacre...

A côté des diverses mesures conjoncturelles contre la Russie-diable, telles que les sanctions, les manipulations du dollar, les guerres commerciales, qui pouvaient être prises, – surtout à partir de l’administration Trump, – pour entretenir ce simulacre, la mesure structurelle fondamentale qui devait être envisagée était une domination absolue de la production et de l’exportation d’armement, entretenant une mythique absolute dominance du point de vue militaire dans le sens le plus large. Cette domination ne devait et ne pouvait s’opérationnaliser que contre le principal concurrent politique des USA, la Russie-diable. C’était appliquer à toutes les catégories d’armements essentiels la recette technique de marketing impératif et comminatoire du JSF : présenté à la fin des années 1990 comme l’avion du XXIème siècle, dont toutes les forces aériennes qui comptent seraient équipées, sous contrôle US, il n’était pas question que les pays désignés, comme vassaux obéissants des USA, songeassent à un autre achat que celui du JSF

(Que le JSF soit un sabot, un fer à repasser, une innommable catastrophe extrêmement coûteuse, n’a strictement aucune importance. De même pour toutes les autres catégories d’armement, où les USA sont dépassés dans divers domaines... Nous sommes dans un simulacre et ce qui compte est que la bannière étoilée claque au vent des $milliards et des exportations.)

Le principal concurrent à cet égard, le démolisseur de simulacre, encore plus que la Chine, ne pouvait être que la Russie, – elle l’a montré depuis avec le développement extrêmement rapide et efficace des armes automatiques (missiles) hypersoniques. Il était donc absolument nécessaire de mettre en place un contrôle absolu de toutes les exportations d’armement de puissance significative, au profit (dans tous les sens du mot) du CMI. Cela serait fait par les moyens les plus brutaux, les plus crus, bien dans les façons du président Trump : des pressions, des menaces proches de la force, des sanctions économiques pour les pays stratégiques qui achèteraient des armements russes, et non des armements américanistes.

Ainsi se comprend la campagne effrénée lancée depuis 2-3 ans, et dont la Turquie avec ses S-400 est l’une des victimes expiatoires favorites pour toutes les raisons qu’on a déjà détaillées ; et plus encore si la démarche traîtresse s’exerce dans un domaine que les Russes dominent de la tête et des épaules, qui est la guerre anti-aérienne ; c’est une raison supplémentaire pour partir en guerre contre les faux-frères qui mettent en péril le simulacre de la mythique absolute dominance. Le simulacre est d’une telle puissance, et si grande la croyance quasiment mystique dans la supériorité américaniste, dans la nécessité des “gentils“ de se regrouper sous la bannière étoilée dans des “systèmes“ divers, qu’on en vient à regrouper théoriquement et “à l’insu de leur plein, gré” les “méchants”, ceux qui choisissent le S-400 par exemple, dans des ensembles contre-système (ou dura-t-n antiSystème ?) qui deviennent des organisations ennemies de la civilisation. Certes, ce faisant l’on renforce les choix de systèmes russes en leur donnant une dimension politique qu’ils n’avaient peut-être pas au début, on donne aux “méchants” des arguments et des moyens pour se regrouper effectivement au niveau politique et stratégique, et se renforçant d’autant... C’est l’habitude du système de l’américanisme d’ainsi se fabriquer des ennemis, et qui a dit que la surpuissance du Système ne nourrissait pas son autodestruction ?

... Ainsi avons-nous appris il y a peu (le 27 juin 2019) que la Turquie, comme l’Inde si l’Inde persiste dans sa démarche sacrilège, devient membre apostat d’un système dit-Full Spectrum Defense érigé contre l’organisation vertueuse de la Full Spectrum Dominance qui témoigne de la supériorité et de l’exceptionnalisme américaniste :

« Mais dans ce cas des S-400, le “plan” systématique et immuable de la bureaucratie technologique américaniste se retourne contre elle en prenant une dimension inattendue. Pour notre compte, c’est la première fois 1) que nous entendons parler de la Full-Spectrum Defense ; et 2) que nous réalisons par conséquent combien ceux qui choisiraient/choisissent (?) le S-400 (l’armement anti-aérien russe), dans ce cas la Turquie et l’Inde, se trouvent nécessairement destinés à devenir des adversaires de la Full-Spectrum Dominance qui est nécessairement la doctrine qu’exsude toute la bureaucratie de sécurité nationale. Cette production de la bureaucratie est impérative dans la mesure où elle implique symboliquement une domination totale des USA dans tous les domaines de la bataille et qu’il s’agit du credo absolument imparable, indestructible de la susdite bureaucratie. [...]
» ...Du coup, le domaine de la réflexion dans le cadre du simulacre où évolue la puissance des USA vue par eux-mêmes (les USA) s’élargit et l’affaire prend une toute autre dimension puisqu’on apprend, – la Turquie et l’Inde en premier, – que ces deux pays font partie de l’ensemble Full-Spectrum Dominance, ou plutôt qu’ils en feraient partie s’ils décidaient finalement au profit d’une quelconque quincaillerie US de ne pas acheter des S-400 (mais, au fait, ils vont l’acheter si ce n’est déjà fait, non ?) ; ainsi, s’ils n’en font plus partie (du Full-Spectrum Dominance), ils apprennent qu’ils en faisaient partie... C’est de la métaphysique-simulacre pure du domaine militaro-industriel qu’il s’agit.
» On comprend alors que l’hostilité qu’engendrerait le refus éventuel d’abandon du S-400 par la Turquie et l’Inde est un événement catastrophique absolument considérable, et pour des raisons stratégiques non moins formidables. Ce refus constituerait du point de vue de la bureaucratie un acte d’hostilité volontaire et impardonnable à l’encontre des USA. C’est le principe du “qui n’est pas avec nous est contre nous” multiplié d’abord par la haine de la Russie, ensuite par la croyance en la technologie US, enfin par la justesse absolument métaphysique de la doctrine de la ‘Full-Spectrum Dominance’. »

Ainsi la Turquie est-elle entrée dans le cercle du diable, dès l’heure où les premiers éléments du système S-400 furent débarqués sur son sol, et toute l'habileté louvoyante et ondulante d'Erdogan n'y pourra plus rien...

 

Note

(*) Dans le texte initial, PhG emploie effectivement l’expression “État parallèle”. En fait, on pourrait employer l’expression devenue depuis fameuse d’“État profond”, car c’est effectivement en Turquie, dans les années 1990, qu’elle est apparue.

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