2011, année de l ‘“Internet nuclear bomb”

2011, l’année de la “révolte des jeunes” via Internet, voilà la prédiction de Gerald Celente. (Nous avons parlé à plusieurs reprises de ce prévisionniste, fondateur de du Trends Research Institute.)

Il s’agit d’une interview de Celente diffusée le 10 janvier 2011 sur la chaîne Russia Today, et dont la substance est reprise par RAW Story, le 11 janvier 2011.

«“[The Internet is] exposing the corruptness, the ineptitude and the double dealing going on that [governments] don't want the public to know about,” he told RT. “The more freedom of information that goes out, they're going to start using cyber war and the war on terror to take that Internet freedom away from America.”

»He predicted a rising tide of government and private intervention online, with entities acting alongside each other to shut down speech they dislike. “But in 2011, the game's gonna run out,” he said. “On one end, it's a wake-up call and on the other hand it's [an effort to] screw the people.”

»“What we saw in England, again with ‘off with their heads,’ what we saw in Italy with the students taking to the streets, you're gonna see in Spain, you're going to see in Ireland. You already saw it in France. Figure it out… The US is going to be slower, but it's going to happen here at a different level. Remember, the US has been beaten down and pushed down. You're going to see a revolution world-wide. What's going to unite them in this cause is another major trend: Journalism 2.0.

»“The Internet has become the great connector. They all know what's going on. They're all Facebook. They're all together. They have a system where they're interacting and relating. It's a different kind of social network than the other one, but the same.”

»He added that cyber war and cyber crime – the likes of which targeted companies that refused to do business with WikiLeaks – will escalate throughout the year. “The worse conditions get, the more you're going to see cyber crime. The worse economic conditions go globally, the more you're going to see cyber wars. It's going to be a new element of warfare. It's an Internet nuclear bomb waiting to go off. You can bring down entire financial systems, stop bank transfers. You can blow apart, without ever having to light a fuse, a whole stock exchange... Every major computer-connected industry or service is a potential target for cyber war.” He predicted that government-sponsored cyber war would ultimately follow economic sanctions that fail to produce desired results.

»Celente also predicted the rise of “progressive libertarians” in the US, which had already begun as early as 2007 when Rep. Ron Paul (R-TX) became popular among not just conservatives, but progressive youth as well. The hybridization would be “libertarian in the sense of government staying out of people's lives,” he said, and progressive “with the government having control of issues where they can make a difference.”»

Notre commentaire

@PAYANT Comme l’on sait, Celente est apprécié comme un prévisionniste un peu marginal mais néanmoins institutionnalisé, avec à son actif diverses prévisions qui se sont confirmées parfois d’une façon spectaculaire. Dans le cas mentionné ici, pour ce qui concerne les prévisions qu’il fait, les risques qu’il prend sont assez réduits, tant les orientations qu’il suggère paraissent assez évidentes… Au reste, il n’y a pas lieu de lui en faire reproche. Simplement, il s’agit du constat que les événements s’organisent effectivement dans ce sens, qu’ils prennent une orientation de plus en plus affirmée, selon des processus qui correspondent également à l’évidence des moyens et de l’efficacité de la lutte contre le Système qui devient une sorte de mobilisation de plus en plus affirmée. Plus que de “cyberguerre”, nous parlerions, de façon plus générale, du principe général selon lequel la puissance se concentre aujourd’hui dans les moyens de communication et dans le système de la communication qui anime ces moyens, – tout cela faisant que les conflits tendent à se dérouler effectivement au niveau des réseaux de communication. (C’est typiquement une situation de l’ère psychopolitique.) Il serait également moins question de guerre qu’éventuellement de guérilla et, surtout, d’insurrection non contre une situation classique de puissance mais contre une situation d’emprisonnement par un Système.

Bien sûr, WikiLeaks-Cablegate est passé par là, mais aussi la formation du phénomène du “système antiSystème”, qui est la clef de la structure efficace contre le Système. Celente évoque des “réseaux” de “jeunes” qui n’en sont pas vraiment, qui ont la “forme” informelle si caractéristique d’Internet et des systèmes antiSystème, le terme “jeunes” étant également lui aussi d’une imprécision caractéristique de notre époque… Cette imprécision, qui pourrait être jugée comme un vice de langage et de pensée, n’en est pas un dans les circonstances présentes, et dans le contexte où évoluent les prévisions de Celente. Peu nous importe que Celente ait raison ou tort en l’occurrence, quant aux événements qu’il annonce, car il reste ceci qui est essentiel : le prévisionniste Celente, séduit comme nous le sommes tous plus ou moins par les formidables effets de WikiLeaks (Pour ces effets, référez-vous par exemple aux nouvelles sur les mesures exigées par l’administration Obama contre WikiLeaks), s’inscrit automatiquement par ses propres prévisions dans le “système antiSystème” qui s’est formé autour de WikiLeaks. Ses prévisions, appuyées pour ce qui est de leur crédit sur les références solides de certaines de ses prévisions antérieures, participent avec force à la fragilisation du Système en répandant un peu plus l’idée de sa vulnérabilité à l’action générale des réseaux inspirés par WikiLeaks et, plus généralement, par la puissance insaisissable que semblent constituer ces liens innombrables tissés à travers le monde par le réseau Internet envahi d’imprécations, de menaces contre le Système, d’appels à la mobilisation, etc. Ce qui compte ici pour l’instant n’est pas tant les événements qui se produiront, que l’effet immédiat sur la psychologie, y compris la psychologie du Système-en-soi, devant cet activisme insaisissable et si menaçant. On peut même avancer que cet effet sur la psychologie est lui-même générateur de nouvelles déstabilisations qui accéléreront ou créeront certains processus de regroupements antiSystème, et par conséquent participeront à la création d’événements plus ou moins annoncés, par Celente ou par d’autres. Nous ignorons si 2011 sera l’année où explosera l’“Internet nuclear bomb”, mais elle est certainement une année de plus où la psychologie va continuer à se charger d’une véritable puissance nucléaire destinée à exploser pour faire exploser le Système…

Là-dessus, le deuxième aspect des prévisions de Celente est bien plus sérieux, en un sens bien plus fondé. Lorsque Celente évoque la montée des libertariens aux USA, autour d’un Ron Paul qui représente une valeur fondamentale de la critique antiSystème, il évoque un fait beaucoup plus concret, beaucoup plus solide. Ron Paul est ce personnage que l’on connaît, avec une carrière qui a pris soudain des dimensions nationales, avec une nouvelle position de force au cœur du Système, notamment à la tête de la sous-commission de la Chambre chargé de faire un audit de la Federal Reserve, et avec certains projets particulièrement déstabilisants. C’est à ce point que les prévisions de Celente rencontrent une réalité en marche aux USA, qui est cette réalité d’une poussée en train de devenir formidable contre le centralisme fédéral, contre la monstruosité du Système qui tient “le centre”, en faveur d’une logique de dévolution des USA et de fractionnement décisif de la principale puissance qui anime le moteur déstructurant du Système.

Mis en ligne le 12 janvier 2011 à 11H23