Tourbillon crisique-53 : Merkel, isolationnisme, Panmunjom 

Journal dde.crisis de Philippe Grasset

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Tourbillon crisique-53 : Merkel, isolationnisme, Panmunjom 

17 juin 2018 –Le recours à la “rubrique dans la rubrique” (Tourbillon crisique dans le Journal-dde.crisique) s’impose de plus à moi, comme les évènements eux-mêmes. (Cette abondance justifiant l’apparition de titres accompagnant la rubrique numérotée.) C’est le signe de la maturation à une très grande vitesse de la Grande Crise d’Effondrement du Système (GCES) dont le moyen opérationnel est évidemment l’accélération du tourbillon crisique. Dont acte, même s’il s’agit d’une confirmation de ce que j’écrivais dans le Tourbillon crisique-49.

L’illustration sollicite ici trois évènements, qu’ils soient directs ou décrits par un commentaire.Ils sont liés les uns aux autres, ils ne peuvent être que liés parce que c’est la raison d’être à la fois météorologique et métahistorique du “tourbillon crisique” : tout se touche, tout se tient, tout influence tout, tout s’explique par tout. Une vision intégrée de la GCES est, sinon chaque jour, dans tous les cas constamment nécessaire pour permettre une juste appréciation de l’événement dès qu’un événement d’importance se produit. Plus que jamais, chaque jour davantage, l’actuel (“l’actualité”) renvoie directement à la métahistoire.

Le premier cas est celui de Merkel, dont a déjà vu qu’elle est plongée dans une grave crise interne. Kai Whittaker, un député de son parti (la CDU), – cette fois, ce n’est pas un canard (FakeNews, comme disent les zombies), – a résumé hier la situation : « Nous sommes dans une situation grave parce que la question de la crise migratoire est devenue une question de pouvoir ... La question est de savoir qui dirige le gouvernement ?Est-ce Angela Merkel ou est-ce Horst Seehofer ? Tout le monde reste sur ses positions... [...] [...I]l se pourrait bien qu’à la fin de la semaine prochaine nous ayons une situation nouvelle. Probablement un nouveau chancelier. »

Imagine-t-on ce que signifierait le départ de Merkel dans de telles conditions, alors que Seehofer, patron de le CSU bavaroise, fait face à des élections régionales au début de l’automne et, craignant de ne plus avoir la majorité avec un AfD triomphant, ne cesse de radicaliser sa position ? C’est la possibilité du basculement de l’Allemagne dans ce qu’on doit désormais nommer “le camp populiste”.

Le deuxième cas est un article de l’ancien diplomate et conseiller républicain au Congrès, James George Jatras, « It’s Time for America to Cut Loose Our Useless So-Called ‘Allies’ ». L’intérêt de cet article est à mon sens d’être archétypique d’une vision isolationniste d’un type absolument nouveau, que je qualifierais d’“activiste” dans le sens d’une rupture réaliste mais complète des liens “privilégiés” sans nombre qui unissent les USA à des régions et à des partenaires (dont les Européens au premier rang) au nom de principes et d’intérêts vieux de près de trois-quarts de siècle, – une sorte assez curieuse sinon audacieuse, et nouvelle certes, d’“isolationnisme engagé”...

Je m’arrête à cet article car il faut bien essayer, d’un instant à l’autre , de comprendre la profondeur et la vitesse des changements en cours. Il se pourrait bien qu’on trouve là la description de l’Amérique telle que le comportement fait pour être imprévisible, la brutalité, le caractère hypomaniaque (maniaque contrôlé) associé à une vision extrêmement réaliste de l’économie de Trump sont en train de la modifier profondément. Tout se passe comme si Jatras nos offrait une clef pour comprendre des conséquences extraordinaires mais désormais concevables du désordre trumpiste qui est, désormais lui aussi, la principale dynamique dans le tourbillon crisique, secouant avec une fureur étonnante le très vieux “Nouvel Ordre Mondial” que l’establishment atlantiste n’a cessé de nous offrir depuis quelque part entre 1945 et 1950.

Parmi les bruits de cette fureur, il y a les échos de la rencontre de Singapour, entre Trump et Kim, qu’un républicain anti-Trump cité par Jatras qualifie d’“axe des trous du cul”, ou “CRANK” (*), – pour China-Russia-America-North-Korea. Drôle d’alliance, non ? Cette rencontre, ce « Trump-Kim geopolitical reality-TV show » a ouvert un nouveau front de crise à Washington, pour la simple cause, nous dit Pépé Escobar, de la présence du point 3 du communiqué commun : « La réaffirmation de la ‘Déclaration de Panmunjom’ du 27 avril 2018 où [la Corée du Nord] s’engage à travailler à la complète dénucléarisation de la péninsule coréenne ». Cet engagement implique bien entendu la dénucléarisation de la Corée du Nord, mais aussi celle de la Corée du Sud, c’est-à-dire le départ des forces US de Corée du Sud.

Voilà pourquoi “D.C.-la-folle” résonne d’une nouvelle polémique furieuse à la suite du reality-show historique de Singapour, parce que tout ce qui se rapproche d’une perspective de paix et de stabilité dans le monde, notamment mais essentiellement par le moyen du retrait de troupes US, est dans la capitale du Système un motif de profonde terreur. Une crise de plus dans la suite crisique interminable, comme une basse continue démente, qui règne à “D.C.-la-folle” : ainsi le clown-et-bouffon, The-Donalds’avère-t-il aussi un véritable terroriste, de la pire espèce. Qui arrêtera jamais le tourbillon crisique ?

Note

(*) “Crank” : on dit que ce mot, outre de désigner une manivelle, désigne une “personne stupide”, “complètement tombée sur la tête”.

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