Tourbillon crisique-42

Journal dde.crisis de Philippe Grasset

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Tourbillon crisique-42

24 janvier 2018 – Il s’agit d’une phase particulièrement remarquable du “tourbillon crisique”. On observe la réactivation parallèle dans un nouveau paroxysme commun de deux centres crisiques essentiels, comme si deux volcans qui semblaient dans une phase d’accalmie relative se réveillaient parallèlement dans deux brutales éruptions :

• d’une part, la situation syrienne, avec l’opération turque lancée contre les Kurdes qui sont largement soutenus par les USA embarqués dans un effet-domino de trahisons multiples, dans ce qu’on pourrait qualifier de “complot” américaniste pour une partition d’une bande de territoire syrien avec une “armée” de 30 000 hommes qui ressemblerait à une recomposition d’une sorte de Daesh-2, tout cela avec un avenir hautement fantaisiste et incertain, mais aussi de nouveaux désastres (US) à venir ;

• d’autre part, la communication d’un mémorandum aux parlementaires de la Chambre des Représentants, mettant en évidence ce qu’on pourrait désigner comme un “complot” impliquant notamment le FBI et le département de la justice rassemblés dans ce qui est désigné comme une “société secrète” contre le candidat devenu président Donald Trump.

C’est bien un signe de “tourbillon crisique” dans une dynamique de surpuissance inédite qu’on distingue dans l’emploi actif et très exposé de la technique dite du “complotisme”, très déstabilisatrice quand elle est à ciel ouvert. Dans ce cas, le “complotisme” devient, dans le rapport qu’en fait la communication-Système, sinon vertueux dans tous les cas innocent par rapport aux anathèmes déversés depuis l’attaque du 11 septembre contre les hypothèses “complotistes” venues d’adversaires du Système. La simultanéité des deux éruptions alimentées par des démarches aussi risquées et suspectes témoignant du désordre et de la perversion extraordinaires du Système, signale une pression grandissante et formidable des événements. Il apparaît ainsi manifeste que leur fonction est orientée vers l’accélération de l’effondrement du Système.

A côté des conseils de retenue et de prudence à tous, les Russes ont désigné un seul coupable en Syrie : les USA, qui ont armé les Kurdes et les autres (djihadistes, ex-Daesh, etc.). Les thèses sont nombreuses pour faire porter la responsabilité de cet aventurisme sur la dislocation du pouvoir de l’américanisme, son éparpillement dans des centres devenues incontrôlables. Le constat nous renvoie bien entendu à la recrudescence de la crise washingtonienne, qui dépend des mêmes impulsions de désordre. L’effet est similaire, à la fois tourbillonnaire et autodestructeur, du tourbillon dévorant ses propres enfants comme le Cronos du mythe ou la Révolution française vue par Joseph de Maistre.

Le moteur est essentiellement psychologique, avec une domination écrasante de la maniaquerie obsessionnelle dans la pathologie maniaco-dépressive qui caractérise “D.C.-la-folle”, qui se manifeste en tout ou en partie, quelle que soit l’orientation de telle ou telle partie. Les deux tourbillons évoluent selon les normes de la chose : la “politique” est caractérisée par l’obsession, que l’on retrouve dans les deux épisodes, — et qui vaudrait dans n'importe quel autre (Poutine, Kim, etc.) car l'objet de l'obsession est interchangeable.

Dans le cas syrien, c’est l’obsession anti-Assad qu’aucune explication rationnelle ne parvient évidemment à éclairer (voir Philip Geraldi, « Détruire la Syrie : pourquoi Washington hait-il Assad ? » : « Les États-Unis n'ont pas de politique cohérente, ni d'intérêt national à rester en Syrie, mais les étranges alignements politiques qui semblent se dérouler dans et autour du Bureau ovale ont suscité le désir de détruire un pays et des peuples qui ne menacent en rien les Etats Unis. »). Dans le cas washingtonien, ce sont les comportements complètement illégaux explicables par la seule obsession maniaque anti-Trump, d’ailleurs constamment excitée par la maniaquerie narcissique du président qui permet d’obtenir un schéma pathologique complètement fermé, quasiment parfait (voir cette citation de Justin Raimondo où notre souligné en gras dit l’essentiel : « Quand cette crise sera terminée, – si jamais elle se termine, – le Congrès devra rassembler tout son courage et examiner exactement ce qui s’est passé. Nous avons besoin d’un nouveau Comité Church pour reprendre le contrôle du FBI et de la CIA – et des 16 autres agences de renseignement que nous persistons inexplicablement à entretenir »).

Dans les deux cas, la maniaquerie obsessionnelle entretient des politiques tourbillonnaires, tournant sur elles-mêmes avec des objectifs que ce mouvement renforce au lieu de les réduire. Le résultat est une dynamique crisique constante, le tourbillon crisique générant constamment des relances de crises de plus en plus complexes et hermétiques, donc par définition insolubles. Ce qu’on doit observer avec intérêt, c’est l’usure accéléré du Système dans ce processus, accélérant par conséquent le processus d’effondrement.