The Fog of the Circus

Journal dde.crisis de Philippe Grasset

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The Fog of the Circus

17 janvier 2020 – Le processus de mise en accusation pour la destitution du président Trump a commencé hier, avec tout le cérémonial pompeux du transfert des deux Articles de mise en accusation de la Chambre vers le Sénat, des prestations de serment, etc. Personne ne sait exactement, et sans doute elle non plus, pourquoi la Speaker de la Chambre, Nancy Pelosi, a attendu plus d’un mois pour accomplir cet acte qui ouvre le “procès” du président. (« Yesterday, Nancy Pelosi finally decided to move forward with the impeachment process after an inexplicable delay », écritZeroHedge.com). Ainsi vogue ce grand événement, entre incertitude et insaisissabilité.

C’est mardi que les débats devraient commencer, – sans doute, peut-être, dis-je prudemment tant je patauge dans la complexité kafkaïenne des règles du Congrès. Tout le monde sait que cette mise en accusation de Trump concerne une conversation téléphonique avec le président ukrainien Zelenski, mais tout le monde a oublié pourquoi et comment on parvient à la mise en accusation ; par ailleurs, tout se passe comme si cela n’importait guère... Une procédure de destitution devrait nous apparaître un acte extraordinairement grave et sérieux, et c’est le cas pour mon compte, et pourtant le terme qui revient le plus souvent dans les titres pour cette affaire est le mot “cirque”. (Titre de l’article déjà référencé : « Welcome To The Circus: Trump’s Impeachment Trial Begins Thursday With ‘Ceremony & Formality’. »)

Non seulement “cirque” mais terra incognita également, disons “the fog of the circus” comme il y a “le brouillard de la guerre”. Le site renommé dedefensa.org a écrit un certain nombre d’articles sur le sujet et je ne suis pas plus avancé pour autant. Je crois même avoir reculé à cet égard, au point d’avouer que je n’ai jamais été aussi indécis et aussi ignorant de l’importance, de l’effet, des conséquences et des suites d’une situation crisique que dans ce cas en théorie considérable. On comprendra aisément que ce sentiment est parfaitement à l’image du personnage central, l’original et rocambolesque président Trump, à l’image de “D.C.-la-folle” qui nous occupe depuis au moins quatre ans, à l’image enfin d’une époque crisique absolument insaisissable, lorsque le Temps a décidé comme en ce début des années 2020 de déclencher “la rébellion du temps”.

Il ne s’agit pas d’une situation exceptionnelle, je veux dire que je ne suis pas dans ce cas précis exceptionnellement mauvais ou exceptionnellement inexistant car je pense qu’en vérité la même situation affecte tous les jugements. On observe d’ailleurs la confusion la plus complète dans les commentaires, y compris dans le chef de gens qui sont hors de l’influence délétère de la presseSystème. Un exemple intéressant de cette situation cde la perception et du jugement, qui n’engage en aucune façon la moindre critique de ma part à l’encontre de l’un ou l’autre, se trouve dans deux articles paru quasi simultanément.

• Sur son site, Tom Luongo annonce que nous nous dirigeons vers “un moment dangereux” : « Le procès en destitution de Trump débutera au Sénat la semaine prochaine et il est clair que ce ne sera pas une promenade de santé pour le président. » Le 24 septembre 2019, lorsque la procédure fut lancée, Luongo écrivit qu’un “coup d’État” contre Trump était lancé et il écrit hierque c’est plus que jamais le cas.

• Pour savoir ce que pense Graham Dockery, journaliste irlandais et commentateur sur RT.com, il suffit de lire le titre de son article de ce jourqui nous dit à peu près tout : « Impeachment circus begins in earnest, and will change nothing », – “et cela ne changera rien du tout”.

Ici un coup d’État, là rien, absolument rien de changé... Deux avis aussi tranchés venant de deux commentateurs qui occupent une position politique assez proche d’hostilité plus ou moins affirmée au Système, annonçant exactement le contraire sur un cas d’une importance formelle incontestable, voilà qui est inhabituel et remarquable... Mais dans notre époque, le “remarquable“ ne se remarque même plus et le procès en destitution soulève à peine l’intérêt de notre presseSystème quant à cette si étrange perception qui fait qu’on en arrive à de telles contradictions sans pouvoir émettre un seul avis critique, une seule mise en cause sérieuse de l’une ou l’autre thèse.

Moi-même, je renouvelle mon aveu de complète incapacité d’en juger sérieusement, de donner un avis circonstancié sur le cas et d’avancer rationnellement l’hypothèse d’une issue. C’est bien cela, le rationnel, qui manque à l’analyse ; la raison humaine s’avère totalement impuissante à trancher, même si elle ne cesse d’avancer des outils pour faire avancer le discours du plaideur et pour faciliter sa diffusion. Cela fait qu’un Luongo et un Dockery sont tous deux armés pour développer un argument solide et incontestable et proposer deux conclusions absolument contraires.

Alors, je crois qu’aucun des deux n’a tort et qu’on ne peut donner raison à aucun des deux. La raison, absolument subvertie par le Système, nous a définitivement désertés et la solliciter pour assurer son jugement relève d’une dangereuse imprudence. Le seul conseil de la raison que j’entends aujourd’hui est bien celui-ci, comme on jette une bouée vers un homme à la mer : “Toi, tu ferais bien de ne pas trop compter sur moi et de chercher d’autres voies que la mienne”. 

Cela fait que j’en reste à ce jugement du  1erjanvier 2020, concernant l’impeachment en tant que parabole de la globalisation et de la modernité, – car ce sont bien elles que représente la raison sous d’autres oripeaux et qui tombent sous le jugement prémonitoire de Pascal : « C’est bien le signe que l’événement touche les plus habiles comme les plus médiocres, donc qu’il s’agit d’un événement hors des normes de la raison, celle dont Pascal disait : “Que j’aime à voir cette superbe raison humiliée et suppliante !” »

Ce texte parlait de l’“impeachment du Système”. Je crois que le débat sur l’impeachment  ou non du président Trump est le signe le plus flagrant et le plus convaincant que la destitution de la raison est désormais un fait avéré. Comme elle le conseille elle-même, il nous faudra chercher ailleurs.

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