SitRep-USA2020 : nausée démocrate et virtuelle

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SitRep-USA2020 : nausée démocrate et virtuelle

La convention 2020 du parti démocrate se déroule dans une atmosphère à la fois cotonneuse, impalpable et insaisissable, et dans une chape de plomb chargée jusqu’à la gueule d’un politiquement-correct tous-azimuts et dans tous les sens (antiraciste, antisuprémaciste, antitrumpiste, belliciste, féministe, etc.). Tous les acteurs de la convention, intervenant par vidéo puisque l’événement compose gracieusement et essentiellement une ‘vidéo-convention’, apparaissent ainsi d’autant plus dans un état de zombification avancée ; c’est confirmer l’observation que la ‘zombification’ touche essentiellement les cadres du Système, et beaucoup moins le public qui s’occupe surtout à s’ébrouer dans l’incertitude, l’angoisse, la colère et l’incompréhension.

Par contre, à la convention démocrate virtuelle, tout le monde est content. “Après tout, faisait remarquer un conseiller de l’équipe organisatrice, le fait que ce soit une télé-convention pour l’essentiel nous facilite drôlement le travail. Plus de gaffe à craindre, tout est visionné à l’avance, un vrai rêve, non... ?”

On peut donc passer aux choses sérieuses...

« L’élément le plus notable de la procédure d’hier [à la convention démocrate] a été la décision de présenter des remarques de l'ancien général Colin Powell et une vidéo soulignant "l'amitié improbable" entre Biden et l'ancien candidat républicain à la présidence et le sénateur John McCain.
» Une administration Biden/Harris, ont souligné les démocrates, serait prête à faire la guerre.
» Dans ses remarques, Powell, qui a été secrétaire d'État sous l'administration de George W. Bush, a déclaré que Biden, en tant que “commandant en chef”, “fera confiance à nos services de renseignement” et “tiendra tête à nos adversaires avec force et expérience. Ils sauront que nous ne plaisantons pas”. »

Ces remarques de Powell, l’homme qui est venu à l’ONU en février 2003 pour nous montrer des fioles pharmaceutiques achetées sans ordonnances et des tuyaux en aluminium d’occasion comme preuve de l’existence des armes de destruction massive (ADM) de Saddam nécessitant une attaque selon « nos services de renseignement » auxquels, semble-t-il, Trump ne fait pas confiance, – ces honteuses remarques-bouffe de l’ancien secrétaire d’État qui nous a déjà confiés que cette séance à l’ONU resterait comme une tâche indélébile dans sa carrière, nous a rappelés que les consignes du Système est de bien s’ébrouer dans les excréments qu’on a laissés traîner, – sur consigne du Système également. Powell, en bon militaire, s’est exécuté, devant un public virtuel programmé sur l’enthousiasme.

En plus de cette grande vedette de l’État de Sécurité Nationale qu’est le républicain Powell venu saluer ses frères démocrates et antitrumpistes/antiracistes, diverses personnalités, diverses occurrences, ont été utilisées et développées dans le sens de montrer que Biden est un formidable guerrier, un ami des plus farouches fauteurs de guerre du Congrès et de Washington D.C., un futur président qui n’hésitera pas une seconde à lancer l’une ou l’autre guerre de plus.

Il s’agit du tour d’honneur classique consacrée au destin guerrier des USA, dont on estime que Trump a failli de le suivre dans les règles tandis que Biden, pendant les quelques semaines de son mandat, ne manquera pas de s’y conformer une fois que les cases à cocher lui auront été montrées. Voici encore quelques paragraphes de l’article de WSWS.org qui est l’un des rares commentateurs à avoir identifié cette dimension guerrière dans la séance virtuelle d’hier de la convention virtuelle, d’un parti virtuel et de son candidat virtuel... En effet et pour l’instant, Biden est toujours le candidat désigné du parti démocrate.

... Pour WSWS.org, ce qui importait hier c’est donc qu’on a entendu battre les tambours de la guerre. Bien entendu, c’était la démarche classique du parti démocrate, devenu le ‘War Party’ par excellence (Obama a été le turbo-continuateur élégant et efficace de GW, dont il est devenu l’ami), pour rassurer l’appareil de sécurité national et remercier le Pentagone, la CIA, les amis divers, y compris l’USAF dont l’ancien chef d’état-major fait partie des républicains ‘#NeverTrump’, pour leur soutien constant dans la lutte contre le Satan de la Maison-Blanche.

« Les remarques de Powell avaient été précédées par un discours de John Kerry, secrétaire d'État sous Obama, qui a aidé à superviser l'opération de changement de régime en Ukraine en 2014, menée par des groupes fascistes, et la guerre civile soutenue par les États-Unis en Syrie. Kerry a dénoncé la politique étrangère de Trump, en mettant l'accent sur ce qui est considéré au sein des agences de renseignement militaire comme l'attitude insuffisamment agressive de l'administration envers la Russie. “Nos intérêts”, a déclaré Kerry, ‘“ne peuvent pas se permettre quatre années supplémentaires de Donald Trump”.
» Kerry a fait référence à la bonne marche de la “boussole morale” de Biden, citant son soutien à la guerre en Yougoslavie à la fin des années 1990, tout en évitant de faire référence à son vote pour autoriser l'invasion de l'Irak.
» Kerry a été suivi d'un segment vidéo mettant en scène le républicain Chuck Hagel, ainsi que des diplomates de carrière sous les Républicains et les Démocrates, dont Brett McGurk (le plus ancien conseiller civil ayant supervisé la guerre en Irak et en Syrie, remontant à l'administration Bush) ; Marie Yovanovitch (ambassadrice américaine en Ukraine sous Trump et témoin dans le procès de destitution de l'année dernière) ; Jack Weinstein (général de l’armée de l’air américaine et officier de haut rang chargé des armes nucléaires) ; et Rose Goetemoeller (ancienne secrétaire générale adjointe de l'OTAN jusqu'en 2018).
» Tous ces responsables ont insisté sur le fait que Biden avait “pris des décisions difficiles” (Yovanovitch, faisant référence à l’opération de l’administration Obama en Ukraine) et qu'il n'y avait “personne de plus qualifié ... pour être assis dans le fauteuil présidant les réunions de crise dans la salle de la Maison-Blanche réservée à cet effet” (Hagel). Ils ont reproché à Trump d’avoir développé “un festival de câlineries avec les dictateurs” (Goetemoeller, en référence à la Russie) et d'être “un très-grave danger pour la sécurité nationale” (McGurk).
» Après l'intervention de Powell, les démocrates ont diffusé la vidéo “l’amitié remarquable” de Biden, pour [le républicain] McCain, l’un des bellicistes les plus féroces du Sénat américain, qui a constamment plaidé pour l'agression contre l'Iran, la Russie et la Chine, avant sa mort en 2018. Même s'ils étaient membres de partis différents, a expliqué Cindy, la fille de McCain, les deux hommes ont apprécié les nombreux dîners amicaux pris en commun.
» On a la nette impression que si les démocrates pouvaient faire parler George W. Bush ou John Bolton à la convention, ils sauteraient sur l’occasion. Peut-être que cela pourrait se faire... »

Cette convention étrange, en bonne partie virtuelle comme l’est sans doute la ville de Milwaukee, où elle se tient virtuellement, apparaît comme une étrange parodie-bouffe de ce que devrait être la narrative courante du Système dans une année électorale aux USA, où tout devrait se dérouler “selon le plan prévu”, sans désordre, sans Covid, sans Trump, et la nation enfin réconciliée sous la bannière étoilée. Ce non-évènement qui est en général, pour chacun des partis, une occasion d’interpréter le fonctionnement grossier et vulgaire de la démocratie américaniste, entre démagogie et corruption, au milieu des flons-flons et des discours chargés d’une hypocrisie patriotarde, est un des signes les plus bruyants de la ‘Normalité’ américaniste. Que cet événement soit aujourd’hui réduit à cet avorton de fausse couche virtuelle nous offre par sa petitesse et son artificialité un formidable contraste avec une situation désespérante de désordre où s’effondrent les USA comme dans un marais puant, où les plus riches et les plus fidèlement New-Yorkais quittent aujourd’hui la grande ville symbolique du nouveau-monde, parce qu’elle est devenue vide et invivable, – et d’ailleurs, certainement pas pour rejoindre Chicago ni Los Angeles-Hollywood, à peu près dans le même état, et avec les mêmes fuites des plus représentatifs de leurs habitants.

Le plus étonnant, peut-être, se trouve dans les commentaires, sérieux comme on n’imagine pas et ignorant les divers épisodes du désordre américaniste, des “experts” français des USA. Il fallait entendre le “coup de cœur” de Jérôme Joffrin, hier à 17H45 sur LCI, parlant avec des larmes dans la voix de l’intervention iconique de Michelle Obama à la convention. Le Grand Reconstructeur de la gauche (Joffrin) apparaît comme un leader fort, musclé comme une asperge à la flamande et avec la colonne vertébrale aussi ferme qu’un éclair au chocolat, transparent pour qu’on puisse voir au travers et tant d’autres choses... Joffrin a jugé “admirable” le discours de Michelle qui, manifestement, est de l’avis de 56% des citoyens US qui envisagent de voter pour Biden : s’ils le font, c’est « parce qu’il n’est pas Trump ».

Pour l’instant, malgré les bruits de couloir, Biden reste en selle. Si, réellement, le parti démocrate ne se décide pas, ou bien ne parvient pas à éliminer Joe, il est bien possible qu’on aille vers sa désintégration (celle du parti puis du pays), – même si Biden était élu. La question posée par Tom Luongo il y a deux semaines reste absolument d’actualité : « Mais comment peuvent-ils choisir Biden comme candidat ? » Effectivement, comment ces gens peuvent-ils effectuer leur ‘devoir américaniste’ dans un tel simulacre ? Comment un Chuck Hagel, par exemple, un des républicains les plus sérieux et les moins bellicistes de ces vingt dernières années (et très-éphémère ministre de la défense) peut-il avoir enregistrer la vidéo citée dans le texte ? Même les Soviétiques avec leur Brejnev empaillé sur la fin, avaient le soucis de ne pas trop le sortir ni mème en parler.

...Eux pas, qui ne doutent de rien finalement, retranchés dans leur inculpabilité et leur indéfectibilité, ces traits caractéristiques de la psychologie de l’américanisme. Ils accompliront la prophétie de Lincoln. (Refrain : « Si la destruction devait un jour nous atteindre, nous devrions en être nous-mêmes les premiers et les ultimes artisans. En tant que nation d’hommes libres, nous devons éternellement survivre, ou mourir en nous suicidant . »)

 

Mis en ligne le 19 août 2020 à 18H20