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612617 mai 2019 – J’avoue ma persistante et durable stupéfaction pour ce qui concerne l’inculture extraordinaire dont fait preuve l’immense et écrasante majorité, du type-stalinien, de nos dirigeants, experts, commentateurs, généraux étoilés et ainsi de suite, ici en Europe et encore plus ici en France, lorsqu’il s’agit de comprendre exactement ce qu’est le Pentagone, et plus largement dit le Complexe Militaro-Industriel (CMI) des États-Unis d’Amérique. La bouche pleine du vertige crisique et tourbillonnant de la valse des $milliards, aucun de ces arrogants crétins et naïfs imbéciles, j’en jurerais, n’a eu l’audace de lire les quelques paragraphes du début du plus fameux discours du XXIème siècle sur la sécurité nationale ; discours daté du 10 septembre 2001, – non, non, surtout pas le 11, – et il est du secrétaire à la défense Rumsfeld, un dur de dur qui s’y connaissait.
« Notre sujet aujourd’hui est un adversaire qui constitue une menace, une sérieuse menace, contre la sécurité des États-Unis d’Amérique. Cet adversaire est un des derniers bastions de la planification centralisée. Il gouverne en édictant des plans quinquennaux. D’une seule capitale où il se trouve, il tente d’imposer ses exigences au travers des fuseaux horaires, des continents, des océans et au-delà. Avec une brutale constance, il bâillonne la pensée libre et détruit les idées nouvelles. Il désorganise la défense des États-Unis et met en danger les vies des hommes et des femmes en uniforme.
» Peut-être cet adversaire paraît ressembler à ce que fut l’Union Soviétique, mais cet ennemi s’en est allé : nos ennemis sont aujourd’hui plus subtils et plus implacables. Vous devez penser que je suis en train de décrire un de ces dictateurs décrépits qui survivent encore. Mais leur temps est passé, à eux aussi, et ils ne font pas le poids à côté de cet adversaire que je décris.
» Cet adversaire est beaucoup plus proche de nous. C’est la bureaucratie du Pentagone. Non pas les gens mais les processus. Non pas les hommes et les femmes en uniforme mais l’uniformité de la pensée et de l’action que nous leur imposons bien trop souvent... »
Le système de la communication américaniste, qui s’y connaît diablement en effet-Janus, n’est pas avare de cette sorte d’intervention. Les experts, chez eux, à côté de la corruption des diverses directions toutes prises dans les rets des tentacules du monstre (le CMI), ne sont pas nécessairement arrogants crétins et naïfs imbéciles qui vous chapitrent à propos d’une mythique “armée européenne” si semblable à l’image d’Épinal qu’ils se font du Pentagone. Ils savent de quoi ils parlent, comme le fait aujourd’hui Andrew Cockburn, lui aussi un dur de dur dans sa partie, décrivant le Pentagone en termes de pandémie dont serait porteur un de ces monstres sorti des enfers de Dante via le Mordor de Tolkien :
« Le complexe militaro-industriel (CMI)américain est devenu un organisme autonome doté d'un système immunitaire qui attaque et étouffe toute menace à son approvisionnement alimentaire, – l'argent des contribuables, écrit le célèbre analyste de la défense Andrew Cockburn.
» M. Cockburn décrit le processus qui permet aux entrepreneurs de la défense américaine de prospérer malgré le fait qu'ils manquent à maintes reprises des échéances et qu'ils produisent de l'équipement imparfait et surévalué. Le système a évolué pour devenir très bon pour se défendre, – tout en mettant le pays “dans une situation de défense extrêmement affaiblie”, écrit-il dans son dernier article de réflexion pour le magazine Harper's intitulé “L’infection du Virus Militaro-Industriel : Comment un budget de la défense colossal réduit les capacités de nos forces”.
» Cockburn, dont l'expérience de plus de 40 ans comprend de nombreux livres et publications sur le CMI américain, ses guerres étrangères et ses adversaires, examine l'état actuel des forces armées américaines, –du “désastre” sans précédent qu'est le chasseur F-35 aux quelques dragueurs de mines “délabrés”, en passant par une protection individuelle et des radios défectueuse dont les soldats américains sont équipés, – et il compare cet dévastation aux énormes factures que les contribuables ont à payer aux industries de défense.
» “Le CMI est tellement incrusté dans notre société qu'on ne peut l’en déloger et l’on peut dire que sa mission exclusive est son autoprotection et son expansion infectieuse, comme un mortel virus géant.”
» La “beauté” du système, souligne-t-il ironiquement, “réside dans sa nature d’auto-consolidation”. Chaque nouveau système, arme ou pièce d'équipement coûte jusqu'à deux fois plus cher que celui qu'il est censé remplacer, et il est souvent en proie à des vices de fonctionnement qui doivent être corrigés (pour de l'argent supplémentaire), ou il s’avère simplement pire que le système qu’il remplace. Les dépassements d’échéances et les correctifs post-déploiement gonflent les coûts encore plus, remplissant ainsi les poches des entrepreneurs de la défense... »
Ce qu’aucun d’entre eux, – arrogants crétins et naïfs imbéciles, – n’a l’esprit assez libre et ouvert à l’intuition pour admettre qu’il nous faut, pour comprendre le Pentagone et le CMI à l’instar d’un Rumsfeld (!) ou d’un Cockburn, et de tant d’autres comme unJames Carroll, revenir aux sources de notre civilisation antique et à ses représentations mythiques et monstrueuses dont elles chargeaient les malédictions qui la menaçaient. Le Pentagone est une Bête, éventuellement “immonde” pour faire plaisir à nos chèvres-idéologues des provinces parisiennes, et une pandémie cosmique venue des malédictions telluriques, sorte de “peste brune” pour les mêmes, dont le destin est de dévorer le monde comme Kronos ses enfants.
Certes, ce jugement est de l’ordre du symbolique, et plus encore j’y vois également de la magie noire en pleine activité et tout à fait postmodernisée, tout à fait “opérationnelle” comme l’on dit dans les salons à propos du F-35. Ce n’est pas pour rien du toutsi le Pentagone aux origines a beaucoup emprunté à la “science nazie”, poursuivant ainsi une tradition maléfique, assurant le relais de l’idéal de puissancede l’Allemagne hitlérienne aux USA de nos amours fascinées. “Arrogants crétins et naïfs imbéciles”, ainsi est constitué votre American Dream.
Il est impossible d’embrasser le phénomène dans toute son ampleur et sa sublime monstruosité si l’on ne se réfère pas à la métaHistoire dans sa partie la plus sombre, si l’on ne se réfère pas à la démonologie et sa bataille sans fin pour assurer l’entropisation des profondeurs. Du Pentagone dans toute sa puissance et sa représentation, l’on dira qu’il s’agit d’une démonologie incarnée. Nous vivons sous son empire parce qu’il nous tient sous l’empire de sa fascination. C’est la voie la plus sûre qu’ait trouvé le Système pour s’assurer de la servilité sans faille des élites-zombie.Le Pentagone est la cathédrale de notre postmodernité et lui, cette Notre-Dame du Potomac sous la protection de nos démons ; car si l’on tente de le détruire comme on le vit bien le 11 septembre, si le feu cherchait là une obscure vengeance, lui on le reconstruit à l’identique.
Mais qu’est-ce que cela prouve sinon l’asservissement de nos élites-zombie, ce qui ne surprendra personne tant est forte et entêtante la puanteur du corps pourri de l’Homme immortel ? Surtout, qu’est-ce que cela lui garantit, à lui, le monstre-Pentagonesque, alias-Moby Dick ?
Nous l’avions édifié sous la force et le knout du démon ; pour en être quitte, il faudrait que nous-mêmes, ses architectes, nous le détruisions comme l’on exorcise. Nous croire capable d’une telle audace et d’une telle liberté de caractère, c’est rêve pur, – American Dream... Par bonheur, il nous y aidera, le Pentagone, car son hybris, son virus mortel qui lui donne cette surpuissance productrice de de son auto-consolidation, suivra la voie inévitable des démiurges, de la surpuissance à l’autodestruction.
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