Notes sur la métaphysique du Rafale (dde.crisis)

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Notes sur la métaphysique du Rafale (dde.crisis)

Nous avions choisi, il y a quelques années, un texte extrait de la rubrique de defensa, de notre Lettre d’Analyse de defensa & Eurostratégie (dd&e), comme une sorte de “déclaration d’intention” pour dedefensa.org, ou bien, comme cela est plus solennellement écrit, – Notre raison d’être. (Voir, en tête de notre page d’accueil, notre texte Introduction, renvoyant à ce texte reprenant l’extrait de dd&e du 10 juillet 2005). L’introduction dit ceci (avec notre souligné en gras pour cette occasion, pour introduire notre dde.crisis du 10 mars 2012) :

«Cet extrait de la rubrique de defensa de notre numéro 20, Volume 20, du 10 juillet 2005, de notre Lettre d'Analyse de defensa & eurostratégie, nous semble assez bien correspondre, dans l'esprit qu'elle exprime, à l'esprit justement que nous avons voulu insuffler à notre site dedefensa.org dès l'origine. Ce texte figure donc, à la fois, pour votre information courante, autant que pour satisfaire votre curiosité intellectuelle à propos de ce nous sommes, ou prétendons, ou espérons être. On y trouvera, mélangés, curieusement pour certains, Péguy et les “antimodernes”, Joseph de Maistre, les avions de combat Rafale et JSF...»

…C’est donc l’“évaluation” (en termes métaphysiques et nullement “opérationnels) du Rafale que nous nous sommes proposés de faire, avec ce numéro du 10 mars 2012 de dde.crisis. Nous y sommes conduits par les évènements qu'on sait, absolument terrestres et mercantiles (voir notre F&C du 1er février 2012, sur le choix du Rafale par l’Inde) ; nous entendons, pour l’occasion, «aborder des domaines qu’il est fort peu courant de voir convoqués lorsqu’il s’agit de cette masse de quincaillerie sophistiquée qu’est habituellement un système d’armes. Certes, nous allions déjà dans ce sens en juillet 2005 ; nous entendons, aujourd’hui, en mars 2012, aller naturellement plus loin, radicalement plus loin.»

…Et nous poursuivons, dans ce même texte de la rubrique de defensa, de dde.crisis du 10 mars 2012 :

«[N]ous restons fidèles à notre méthodologie qui deviendrait presque une doctrine… […] C’est-à-dire que nous entendons développer notre réflexion, qui aura nécessairement une dimension métaphysique, à partir d’évènements incontestablement et extrêmement terrestres et temporels. Ces évènements concernent l’avion de combat français Rafale et l’un des domaines spécifiques les plus triviaux du domaine général où évolue cet artefact, qui est celui de l’exportation, – domaine mercantiliste, aux pratiques douteuses et également basses, où s’exercent les intérêts les plus sordides et se manifestent les comportements les plus pauvres parmi ceux dont est capable la nature humaine, pour un dessein qui n’est en général rien moins que glorieux, qui est lui aussi bas et sordide. Il n’est pas simple, ni assuré en aucune façon, d’aborder des évènements dont la ligne de pensée imposée semblerait être fondamentalement matérialiste, et dans une des régions les plus basses du domaine, et certainement une des plus proches du système du technologisme, en prétendant les hausser comme nous prétendons le faire…»

Méthodologie, c’est-à-dire “doctrine”

Envisager l’hypothèse qu’une méthodologie peut devenir une “doctrine”, c’est, pour notre cas, constater que la pression des évènements, leurs singularités diverses jusqu’à être opposées, la rapidité de leur évolution conduisent nécessairement à des appréciations et à des mesures qui, au lieu de s’en tenir à leur constat, produisent des situations extraordinairement nouvelles. L’histoire courante se transmue et ne peut plus échapper à une interprétation métaphysique. C’est le cas ici, avec l’exemple d’un artefact fondamentalement matérialiste, directement issu de ce qu’il y a de plus violent et de plus pressant (le système du technologisme) dans le legs du “déchaînement de la Matière”, débouchant directement sur l’hypothèse d’une transcendance accordée aux productions du Principe fondamental.

Cela ne peut être possible qu’à cause du caractère extraordinaire de l’époque que nous vivons, fondamentalement eschatologique et d’une accélération de l’“histoire devenue Histoire”. Ce caractère extraordinaire de l’époque, justement, impose nécessairement des démarches de cette sorte, seules capables de rendre compte de lui (ce caractère extraordinaire).

«Cette rapidité de la circonstance, qui est la Chute en l’occurrence, est, pour notre méthodologie, presque aussi importante que la circonstance elle-même. C’est elle qui détermine la nécessité de considérer les évènements les plus bas comme des phénomènes qui ont une influence directe, immédiate et positive sur les considérations les plus hautes. Il s’en déduit, pour notre compte, que cette “accélération de l’histoire”, qui est le résultat du phénomène décrit, transforme l’histoire en une Histoire majusculée, c’est-à-dire une histoire où intervient directement et sur le champ, et quasiment sous nos yeux et pour nos esprits, la métaphysique. L’histoire devenue Histoire est en fait une métahistoire, où les évènements terrestres et temporels, jusqu’aux plus bas, ont aussitôt, instantanément, dans le fait même, une dimension métaphysique qui peut être distinguée. C’est à ce point, pensons-nous, que notre méthodologie peut prétendre être interprétée, et devenir effectivement une doctrine.»

Le paradoxal “ultime rempart de la souveraineté”

Dans le choix paradoxal que nous avons fait de rapprocher décisivement un artefact technologique et purement matériel de la transcendance, il y a tout de même des circonstances terrestres favorables. Il y a la spécificité de l’aviation, née dans des circonstances particulières, avec des apports culturels non négligeables (en France, au début du XXème siècle). D’un autre côté, ce domaine, l’aviation, au travers de l’opposition de deux pays qui s’y distinguèrent, – la France et les USA, – traduit une opposition de conceptions du monde : historique et transcendantale pour “la Grande Nation”, moderniste, matérialiste et technologique pour “la Grande République”…

A cela, il faut ajouter les spécificités de “l’avion de combat” tel qu’il est devenu dans l’évolution de notre contre-civilisation. Nolens volens, cette avancée extrême du technologisme est investi d’une mission “souveraine”, un des ultimes remparts de la souveraineté opérationnellement et spatialement définie.

«A côté de cela, ou au contraire de cela, dans le monde oppressant, dangereux et maléfique de l’“idéal de puissance”, l’avion de combat se trouva investi d’une fonction spécifique du fait de ses performances avancées intrinsèques. Il devint le moyen central, dans sa mission spécifique de maîtrise et de contrôle de l’espace de l’entité (la nation) qui l’utilisait, de protection et d’affirmation de la souveraineté et de la légitimité de cette entité. Ainsi de son paradoxe principal : cette machine, plus machine qu’aucune autre machine, plus technologique qu’aucune autre également, était également le garant de principes identitaires et structurants qu’en général le système du technologisme tente de réduire pour parvenir à l’entropie nihiliste qui est le but fondamental du Système, en tant que relais de la “Matière déchaînée”. On reconnaît dans ce paradoxe une dynamique d’inversion désormais classique, et souvent rencontrée, dans nos descriptions, qui est la tendance de la dynamique de surpuissance du Système à se transformer en dynamique d’autodestruction, souvent en produisant ou en protégeant ce qu’elle devrait normalement détruire.

»L’avion de combat est un exemple achevé, sans doute le plus significatif de ce phénomène, en ce qu’il rassemble en lui-même l’avancement le plus marqué du système du technologisme, donc le plus déstructurant et le plus dissolvant des principes, et la protection de ce qu’il reste (de très lointain, certes) des principes “opérationnalisés” du Principe unique. Il s’agit des principes de souveraineté et de légitimité, définissant le principe d’identité, tous ces facteurs structurants qui permettraient à une entité, dans une situation idéale dont nous sommes bien loin, à s’affirmer par souscription et participation dans un courant plus haut qui ramène au Principe unique.»

Le cas français de restauration de la souveraineté

Nous analysons également la façon dont la France, selon une dynamique unique de restauration de sa souveraineté et de son identité à partir de 1958 (après une préparation paradoxale de cette initiative sous la IVème République), utilisa la matière brutale de la technologie de l’armement pour renforcer cette démarche. Il s’agit d’une circonstance métahistorique unique dans une période historique où triomphait le technologisme du “déchaînement de la Matière”.

«…[I]l n’existe pas d’exemple d’une nation qui, comme fit la France à partir de 1958, ait entrepris, sans évènement absolument catastrophique pour imposer une telle démarche, de chercher et de réussir à restaurer une souveraineté et une légitimité qui se trouvaient certes diminuées, mais nullement réduites. Cet homme est au cœur du projet ; Charles de Gaulle est un homme de la Tradition, dont on a dit qu’il tenait René Guénon pour un de ses inspirateurs. Ce grand esprit doté de la force du réalisme, réussit au-delà de toute espérance, insufflant un esprit nouveau et plus haut, et prouvant par là que les principes opérationnels découlés du Principe unique ne sont jamais inaccessibles, même dans les périodes les plus basses.

»Il fit avec les moyens du bord. C’est-à-dire qu’il réussit le prodige d’employer les moyens les plus avancés, les plus dissolvants en théorie de tous les principes qu’il voulait restaurer, pour restaurer ces principes ; l’armement nucléaire, l’armement avancé, dont l’avion de combat certes, disséminé par l’exportation, etc. C’est un prodige de réussir un processus d’inversion quasiment parfait, en n’utilisant strictement que les seuls produits, les seules “armes” de son véritable adversaire. Ce personnage “maistrien” appliquait parfaitement les principes du comte Joseph, en mobilisant “les scélérats” pour le profit du Principe.»

“Projection de force” contre “projection de souveraineté”

La politique gaulliste, ou “gaullienne”, d’exportation des armements, si fameuse, si célébrée et si critiquée, se traduit pour nous en une démarche fondamentalement inverse à la démarche américaniste du genre, à la politique américaniste en général, à l’expression terrestre de la dynamique-Système que représente l’américanisme. A la conception américaniste-Système de “projection de force”, qui se réfère à l’“idéal de puissance”, s’oppose la conception gaullienne de “projection de souveraineté”, correspondant à l’idéal de perfection”. (Voir Guglielmo Ferrero.)

«La stratégie des USA […] est celle de “la projection de force” ; cela est normal, puisqu’on ne projette que ce qu’on a. Nous confirmerions, selon cette logique, que la stratégie ontologique de la France est la “projection de souveraineté”. […]

»L’expression de “projection de souveraineté” n’implique nullement qu’on “projette” sa propre souveraineté sur les autres, mais qu’on “projette” un principe, c’est-à-dire qu’on le diffuse. Alors que la “projection de force” implique une projection de soi-même comme une pression contraignante, la “projection de souveraineté” implique la projection d’un principe d’indépendance et de souveraineté qu’on applique à soi-même (pour son propre bénéfice), et dont on offre à d’autres (aux acheteurs) l’application pour leurs propres bénéfices. La démarche est ici, impérativement, du renforcement d’un principe dont on n’est, par définition, ni le maître exclusif, ni le bénéficiaire exclusif, puisque le principe définit par son essence la diversité des identités, et leur respect en tant que telles. (1)

»Ce que visait évidemment la politique gaullienne, c’était la démarche de renforcement d’un principe qui était installé à nouveau au cœur de la position politique, et même métapolitique, de la France. Plus ce principe était renforcé, plus la position métapolitique de la France était forte…»

De Gaulle contre la postmodernité

Cet épisode gaullien des années 1960 ne définissait rien de moins que l’affrontement de la souveraineté, c’est-à-dire du legs du Principe unique et de la Tradition, contre la “postmodernité”… Nous définissons cela (la “postmodernité”) à notre façon, – puisque, dans cette matière poético-philosophique, chacun a la sienne ; et nous rappelons notre conception des rapports paradoxaux de De Gaulle avec son époque, l’homme de la Tradition subissant, sous sa propre direction de la France, la plus décisive des attaques de la postmodernité développée selon des conceptions purement françaises…

«[N]ous proposerions notre propre définition : la postmodernité entérine la convulsion psychologique (plus très loin de la pathologie), sanctionnée par une pensée impérative dans ce sens, selon laquelle la modernité existe infiniment et éternellement, qu’elle ne peut plus être contestée en aucune façon, – cette pensée impérative et définitive selon laquelle rien d’autre hors d’elle-même (la modernité) n’est concevable, rien d’autre hors d’elle-même n’a existé, rien d’autre qui ne soit elle-même ne pourra jamais exister. C’est, à notre sens, le principal acquis de “Mai” (la signification ontologique du mouvement de mai 1968 à Paris), et son édit impératif établissant son empire sur le monde.»

…Ce qui n’empêcha pas, paradoxalement ou bien conformément à l’équation dynamique de surpuissance-dynamique d’autodestruction, du Système, et conformément aussi à l'ambivalence extrême de la France, de laisser ouverte la porte à l’évolution des legs de la Tradition, sous la forme paradoxale identifiée. Il s'agit bien de l’avion de combat, survivant bientôt sous la forme du Rafale

«Mais nous allons de paradoxe en paradoxe. La “victoire” de “Mai” et la proclamation de la postmodernité constituaient une victoire de type virtualiste, qui n’exigeait en rien une tabula rasa et se contentait du monde éternel de type virtualiste. De cette façon furent préservées les rares et paradoxales (suite) représentations terrestres, voire technologiques, des principes restaurés de la Tradition. C’est ainsi que l’avion de combat, tel que nous l’avons décrit comme enjeu de la souveraineté, survécut...»

De la “glaciation” postmoderne à la rupture de 2008

Nous examinons comment la situation des avions de combat, telle que nous les avons identifiés, et notamment l’antagonisme implicite JSF-Rafale, évolua selon l’antagonisme Système (modernité dans sa phase postmoderne)-Principe (souveraineté). Entrés dans l’après-Guerre froide, nous vîmes s’établir en quelque sorte une “glaciation” du marché des avions de combat… «[L]es paramètres prospectifs complètement spéculatifs et virtualistes (6.000 exemplaires vendus, dont 3.000 à l’exportation, vie opérationnelle au moins jusqu’en 2075, etc.) établissaient une captation et un hermétisme total du marché des avions de combat pour le XXIème siècle. Littéralement, il devenait impossible de penser le XXIème siècle en matière d’avions de combat hors du JSF. Cet automatisme de pensée s’élabora à la fin de la décennie des années 1990 et régna sur les esprits exactement jusqu’à l’été 2008…»

On se rappelle effectivement que c’est à cette période (été 2008) que le JSF commença à être attaqué, mis en cause, contesté, mis à nu dans sa catastrophique réalité ; on se rappelle, notamment, les attaques de Bill Sweetman à cet égard (voir le 6 août 2008 ou/et le 23 septembre 2008). Ce n’est pas un hasard si, entre ces deux dates référencées (8 août et 23 septembre 2008) s’ouvre la crise financière de Wall Street (le 15 septembre 2008). Tout change et il s’agit précisément du même phénomène ; le Système entre officiellement dans sa phase transformatrice, de la dynamique de surpuissance en dynamique d’autodestruction.

«…Tous ces évènements parcellaires sont liés par un destin commun, qui dit le même verdict sur le sort du Système. La problématique des avions de combat reflétait, à son niveau opérationnel, le destin de la crise terminale de notre contre-civilisation.»

Le Rafale contre la France

Arrivant à la situation présente, avec la perspective de succès à l’exportation du Rafale, après pas loin d’un quart de siècle d’attente, nous constatons que le destin de cet artefact initialement fait de pure “matière déchaînée” mais élevé par la transcendance au rôle de porteur de principes fondamentaux prend son envol au moment où la France, qui est la productrice de tout cela, s’abîme dans la période qui est la plus catastrophique de son histoire, – bien plus qu’au temps de Jeanne, bien plus que lors de la collaboration, dont elle prend le relais en se magnifiant d’être tombée si bas, – les hérauts de cette bassesse étant évidemment de confortables dénonciateurs de la collaboration, qui n’ont jamais mis leur vie en jeu pour se défaire de cette tare immonde du goût de la trahison de soi-même, et même la perpétuant en pire deux tiers de siècle plus tard… (Nous attendrons le résultat des présidentielles pour voir comment évolue cet intéressant phénomène.)

«L’orientation politique française, la situation culturelle et sociale, la situation de la psychologie essentiellement, sont aujourd’hui catastrophiques et indescriptibles selon les engagements à la fois de soumission au Système et d’orientation destructrice et dissolvante. Dans le destin de cette nation existent de nombreux avatars catastrophiques, notamment d’alliances de trahison d’une partie de ses forces, avec l’alliance avec l’ennemi du jour, cette démarche connue sous le nom de “parti de l’étranger”, – la chose embrassant autant les ralliements pro-anglais au XVème siècle, pro-espagnols au XVIème siècle, jusqu’à la collaboration de 1940. Ce qui existe aujourd’hui en France passe l’argument de tous ces épisodes, étant d’une autre nature par son abaissement et sa proximité du “déchaînement de la Matière”, par son engagement non plus dans des alliances impies mais dans sa transformation temporaire en expression de la catastrophe eschatologique. La seule comparaison valable de la situation actuelle est celle de la Révolution, dans sa dimension déstructurante et dissolvante de la civilisation (la Révolution, comme une des matrices du “déchaînement de la Matière”).

»Bien entendu, la situation française actuelle est évidemment une situation qui s’insère parfaitement dans la situation de la Chute représentée par l’effondrement du Système. En quelque sorte, la France rejoue sa partition catastrophique de la Révolution, dans la situation extrême de l’effondrement du Système dont cette Révolution fut, avec la Révolution américaniste et la révolution de la thermodynamique, la matrice indiscutable. On pourrait même y distinguer une concentration, due à la contraction du temps et à l’accélération de l’Histoire, des conditions de préparation de la Révolution, et de la Révolution elle-même, semblant s’intégrer en une même masse dissolue, avec l’influence du parti des salonards et l’investissement de la direction politique par les “scélérats” selon Joseph de Maistre, – tout cela, sans besoin d’autres précisions sinon celle de l’évidence, avec un niveau infiniment plus bas que celui des hommes du XVIIIème siècle et de la Révolution. La rapidité du processus de transformation catastrophique de la France, en quelques années au lieu de quelques décennies, rend compte de ce même phénomène d’accélération de l’Histoire qui prend un caractère irrésistible. Pour autant, et puisqu’il s’agit de la France comme entité exemplaire des soubresauts de l’Histoire, “irrésistible” ne signifie pas “irréversible”.»

Comment la matière échappe à la Matière

Le 10 septembre 2010, nous consacrions la rubrique de defensa de dde.crisis à “la source de tous les maux”, à l’“expression du Mal” selon notre démarche, – dito, la Matière, qui mérite une majuscule pour l’occasion… Que se passe-t-il ? Nous avons assez signalé que l’avion de combat, spécifiquement l’avion de combat français, et encore plus spécifiquement puisque l’époque le veut, le Rafale, est un pur artefact de matière, pur produit extrême du système du technologisme, un des deux piliers du Système qui est lui-même l’expression courante et postmoderniste du “déchaînement de la Matière”, selon notre rangement métahistorique.

L’exemple de l’avion de combat, et du Rafale, tel que nous l’avons développé, nous conduit à observer que,«de la Matière peuvent sortir des accès non négligeables à la Tradition, ou à des principes qui lui sont liés. Cela ne signifie aucunement que l’on puisse parler de la Matière comme d’une entité éventuellement ouverte à la transcendance (une entité éventuellement métaphysique) mais, d’une façon complètement différente, qu’il peut y avoir transmutation de la Matière dans certaines circonstances, en quelque chose d’autre qui peut s’ouvrir à la transcendance. Ce phénomène est évidemment le signe d’une époque en complète dissolution, avec le principal facteur de dissolution (“la Matière déchaînée”) suscitant une dynamique qui peut effectivement aboutir à une situation qui lui est fondamentalement antagoniste (on retrouve l’évolution dynamique de la surpuissance en autodestruction).»

Il s’agit ainsi d’avancer sur la voie de l’exploration de ce qu’on doit entendre précisément par “Matière” comme représentation et expression du Mal. Le cas envisagé montre qu’il faut nécessairement considérer cette sorte d’évolutions considérables, et précisément dans une époque de si complet bouleversement qu’est la nôtre, où le “déchaînement de la Matière” approche des confins de sa surpuissance, pour verser dans l’autodestruction de sa Chute.

«L’aventure du Rafale telle que nous l’avons décrite […] elle est assez avancée pour qu’on lui prête une signification fondamentale, qui n’est possible qu’en raison de l’exceptionnalité du temps métahistorique et eschatologique que nous vivons, – un temps métahistorique qui reflète la chute d’une fin de cycle. Cette exceptionnalité est rendue encore plus visible, et renforcée à nos yeux et en elle-même, par la rapidité du processus, et la publicité qui en est faite par le système de la communication. […]

»[Elle] nous montre qu’on peut même avancer l’hypothèse que la Matière, lorsqu’elle a été modifiée de façon à intégrer, symboliquement ou par tout autre avatar de son destin et de son évolution, des caractères structurants dont certains principes dont on peut avancer qu’ils sont en filiation du Principe unique de la Tradition, la Matière donc est transmutée elle-même en un facteur structurant renvoyant à ce Principe. La puissance de cette Matière qui n’est plus Matière représentative et productrice du Mal est telle qu’elle résiste à toutes les attaques de dissolution de la Matière demeurée en l’état initial de productrice du Mal, négatif et prédateur. On peut alors constater la puissance du Principe et, également, la solidité du réceptacle ainsi transmuté… […]

»De ce point de vue, la Matière transmutée en quelque chose d’autre et devenue vertueuse, est alors souvent supérieure même à l’élément humain qui prétend la dominer et lui donner son sens, alors qu’il est avéré qu’il ne distingue plus lui-même ce sens. Dans le cas du Rafale, cet artefact de Matière qui s’est détaché de la Matière est décisivement supérieur aux dirigeants français et à ses concepteurs, qui ont totalement chuté pour être prisonnier de la Matière productrice du Mal…»

 

Note

(1) Nous devons signaler, à notre plus grande confusion, une faute très grave pour le sens de la chose, que nous avons relevée à partir du texte initial de notre publication dde.crisis du 10 mars 2012, page 6, première colonne, troisième paragraphe, qu’on retrouve ici en extrait. Initialement, nous avions ceci (souligné en gras le mot fautif et, plus loin, le mot modifié dans le sens juste.)

«…la projection d’un principe d’indépendance et de souveraineté qu’on applique à soi-même (pour son propre bénéfice), et dont on offre à d’autres (aux acheteurs) l’application pour son propre bénéfice.»

En fait, il fallait lire car c’est bien préférable, en retrouvant le vrai sens du propos : «…la projection d’un principe d’indépendance et de souveraineté qu’on applique à soi-même (pour son propre bénéfice), et dont on offre à d’autres (aux acheteurs) l’application pour leurs propres bénéfices.»

…Avec toutes les excuses d’une plume parfois inattentive parce que, sans doute, pressée par le temps.

 

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