L’axe Evita-Mossadegh

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L’axe Evita-Mossadegh

21 avril 2012 – La présidente argentine, Cristina Fernandez de Kirchner, ajouta son grain de sel au Sommet des Amériques en quittant la conférence avant son terme, parce que la présidence de la réunion avait du accepter le veto (prévu dans cette sorte de réunions) des USA pour qu’on n’y parlât pas des Maldivas, ou Malouines. Cela n’empêche que les Sud-Américain en ont déjà parlé entre eux et qu’ils tous soutenu la position argentine ; l’intervention US n’avait fait qu’ajouter, en provoquant le départ impromptu de Fernandez, à la complète déroute que fut ce sommet pour les USA.

Fernandez rentra donc à Buenos Aires pour prendre aussitôt la décision de nationaliser la compagnie pétrolière YPF, branche de la société pétrolière Repsol, espagnole mais surtout tendance “marché-Système”, avec les habituels ingrédients capitalistes, libéraux, etc. Les deux affaires (Malouines et nationalisation de YPF) sont évidemment liées, et pas seulement à cause de la présence de pétrole dans la zone des Malouines. Les deux affaires sont liées parce qu’elles font partie du mouvement général d’émancipation et d’affirmation de l’Amérique latine dont le Sommet des Amériques a été une expression remarquable.

L’Espagne et le Royaume-Uni ont réagi en condamnant la décision de Fernandez ; ces deux anciennes puissances coloniales, avec les directions-Système qu’il faut, ont en l’occurrence leurs intérêts mélangés lorsqu’on rapproche, comme l’évidence y pousse, les deux affaires déjà mentionnées de la nationalisation de YPF et des Malouines. Les USA ont protesté a à leur tour (voir Reuters le 18 avril 2012), parce que les USA s’occupent de tout et protestent à propos de tout, et, surtout, parce qu’ils s’estiment à juste raison comme le flic-en-chef du Système, responsable de la bonne marche du Système ; et la décision de Fernandez va contre la bonne marche du Système, comme le reste essentiellement en Amérique Latine. Puisqu’on se voyait à Bruxelles pour le sommet habituel des ministres des affaires étrangères de l’OTAN, Clinton et son homologue espagnol ont discuté de sanctions contre l’Argentine. Réflexe pavlovien typique des employés du bloc BAO travaillant pour le Système, qui montre que la mécanique des sapiens idoines est bien huilée. Les spécialistes observent néanmoins qu’il n’y a guère de moyens de pression contre l’Argentine (Reuters, le 18 avril 2012), ce qui réduisait cette rencontre au minimum syndical. Sous la direction successive des Kirchner mari et femme (Nestor jusqu’en 2007, Cristina lui succédant et réélue en 2011), l’Argentine a montré le peu de cas qu’elle fait des décisions et des règles unilatérales du Système, qui sont au seul avantage des tenants du Système ; et, cela, avec un réel succès, à commencer par la déclaration unilatérale argentine de liquidation de la dette imposée par l’agression systématique dont fut victime ce pays dans les années 1990.

• Par conséquent, l’intérêt de la chose est bien plutôt dans la signification fondamentale de cette décision de nationalisation, liée à la crise latente des Malouines, que Fernandez a récemment réactivée (voir notre texte du 14 février 2012). Sans réelle surprise, on a pu constater le très grand intérêt de la station TV iranienne PressTV.com pour cette affaire, avec plusieurs interviews sur le sujet. Un point très intéressant soulevé lors d’une des interviews a été l’analogie historique spécifiquement évoquée par un intervieweur de la station interrogeant le 19 avril 2012 l’activiste Richard Becker du groupement de la gauche dissidente américaine, A.N.S.W.E.R. (Act Now to End War and Stop Racism). La question, dont on lit ci-dessous des extraits de la réponse de Becker, portait effectivement sur l’analogie des nationalisations du pétrole, celles d’il y a 60 ans en Iran par le Dr. Mossadegh, et celle qui a été décidée par Fernandez («It kind of sounds familiar, doesn’t it when we go back [60] years in terms of what happened in Iran and the nationalization of its oil…»).

Becker : «[…I]t’s a very, very good reference point, I think that has been raised in the past in regard to what’s happened in recent years to Iraq and Libya and what happened 60 years ago in Iran.

»Of course the world was a much different place then and the US and British internationally organized embargo of Iranian oil after today’s BP was nationalized, they were able to bring down the government at that time; they were able to use that to create a lot of discontent and then the CIA overthrew the government of Mossadeq in 1953. Well, the world is a different place 60 years later and in Latin America there is a growing movement among a number of different governments to nationalize their resources, to take control of the resources and not have the continued imperialist exploitation continue in the way that it has for hundreds of years.

»And I think that the squeals of anger coming from the European capitals for any progressive-minded person, any justice-minded person should immediately alert us that something positive is happening. And that this is very much connected to the summit of the Americas which just took place, where all of Latin America stood on the issue of Cuba and on the issue of Cuba being brought into the summit, a number of countries threatening to boycott the next one if Cuba’s not brought in and also in relation to the continued British colonial presence in Malvinas Islands which rightfully belong to the people of Argentina.»

• Le même 19 avril 2012, PressTV.com interroge Shabbir Razvi, un commentateur basé à Londres. Ravzi insiste, pour sa part, sur un autre aspect évident de la décision de Fernandez, qui est la reconstitution de sa souveraineté nationale par l’Argentine. C’est un aspect d’un processus auquel on est désormais habitué en Amérique latine, d’ailleurs marqué, pour ce cas, par le soutien affirmé à la décision argentine de pays comme le Venezuela, l’Uruguay, la Bolivie, Cuba. Voici donc une partie de la réponse de Razvi à l’interview…

«So really what Argentina is trying to do and what Ms. Fernandez is really trying to do for Argentine is to take the sovereignty back. Although it is true, that it was her husband and herself who originally privatized this particular sector in the 90’s, but they realized that […] Repsol has not been investing in Argentine over the last twenty odd years, and what is also interesting to note is that the dividends that were being derived have mostly been paid out of Argentine.

»So you can see that there has been very little investment and at a wider level, if you like with Malvinas issue, with Britain putting pressure on Argentine, with the military activity taking place in Malvinas region and the whole issue of oil being under the seabed there.»

• Quelle est la signification de cette décision, quelles sont les perspectives qu’on peut en dégager ?, interroge à nouveau PressTV.com, cette fois en s’adressant à Allen Roland, activiste US travaillant en Californie (le 20 avril 2012). Roland étend la perspective au-delà des frontières argentines, plaçant la décision de Fernandez, liée toujours à la crise des Malouines, dans une dynamique d’opposition générale au Système où le BRICS a sa place… C’est “the big picture”, comme l’on dit, et c’est une situation de perte de contrôle accélérée de ses avantages extérieurs par le bloc BAO.

«…Well, I see one thing, I see a healthier Argentina, which really needs to happen. South America… remember , your BRIC[S] nations are the growing block against the West so that's what the West is really afraid of is the fact that the BRIC[S] nations are getting stronger and stronger – Brazil, Russia, India, South Africa, China – that's what they're really afraid of. The big political picture is this – the West is losing control and this is a strong move by Argentina and I think a very popular move at home, that's all that matters; and if they're drilling their oil, which they should be doing.»

• Un dernier point, enfin, en revenant sur la personnalité de la principale protagoniste de cette affaire, Cristina Fernandez. Roland la qualifie évidemment de nouvelle Evita, en référence à l’héroïne nationale («And she of course has got a great deal of popularity, the new Eva Peron in Argentina and it's a strong move on her part»). Cristina-Evita, c’était déjà un des thèmes de notre article déjà référencé…

«De l’autre côté, du côté argentin, il y a la présidente, il y a Cristina Fernandez de Kirchner, que la presse britannique a prestement baptisée (référence Thatcher) “The iron lady of the Malvinas” (The Independent du 11 février 2012). D’accord, il est question de Thatcher (“la dame de fer”), mais en beaucoup plus attractive, – Cristina étant à peu près aussi sexy que Maggie ne l’était pas du tout.

»Mais Cristina, femme de tête même si de tête agréable, est aussi une personnalité de poids. Succédant à la présidence à son mari Nestor en 2007 sur l’insistance de celui-ci, qui aurait pu pourtant briguer un second mandat, elle a subi en 2010 un terrible choc avec la mort du même Nestor Kirchner (depuis ce deuil, elle ne s’habille plus que de noir). Cela a donné à la Cristina sexy une dimension tragique qui, éventuellement, la rapprocherait par sa propre voie de l’héroïne du pays, Evita (l’héroïque et exceptionnelle femme du médiocre Peron).

»Comme elle (Evita), bien entendu, Cristina est de tradition péroniste, et son surnom est devenu “Botox Evita” (Evita “reliftée” ?), après le “Bimbo” platement hollywoodien dont on l’avait affublée ; Cristina devenue tragique montrant qu’elle a quelque chose de la femme de fer (Maggie), sous une enveloppe plus agréable. Il existe ainsi une veine de la femme argentine, héroïque et politique. Celle-là, Cristina, pourrait s’arranger des Malouines pour soigner sa légende, et parce que, après tout, c’est une grande cause, parce que c’est une “juste cause” du point de vue argentin.»

…On observera donc que Cristina Fernandez a ajouté les pétroles nationalisés aux Malouines, ou Malvinas, à son arsenal, pour faire d’elle une Evita postmoderniste qui conserverait toutes les vertus héroïques de la très fameuse “madone des descamisados” (les “sans-chemises”). Mais là, à ces personnalités et à l’image d’héroïsme qui les drape, s’arrête la comparaison. A la fin des années 1940 et jusqu’à sa mort d’un cancer en 1952, Maria Eva Duarte de Peron était, avec son mari-président, bien seule sur le continent sud-américain. De même en était-il du docteur Mossadegh, en Iran, dans une région toute entière sous la domination des groupes pétroliers anglo-saxons. On pourrait considérer que, comme Cristina vis-à-vis d’Evita, les Iraniens d’aujourd’hui estiment poursuivre le même combat que Mossadegh en 1953 (l’analogie devrait faire défaillir nombre d’habitués des salons, qui ne pensent que “démocratie” et son contraire avant de penser Système et antiSystème), mais dans des conditions extérieures également bien différentes ; tout comme l’Amérique latine d’aujourd’hui, le Moyen-Orient de 2012 offre bien plus d’opportunités à cet égard que celui de 1952-1953, et en pleine ébullition dans ce sens. (En 1952-1953, la seule “ouverture” parallèle à la situation iranienne était égyptienne, avec le coup des jeunes “officiers libres” accouchant d’un Naguib, puis d’un Nasser ; mais il n’y avait aucune logique antiSystème entre cette nouvelle Egypte et l’Iran de Mossadegh, d’ailleurs prestement réexpédié d’où il venait par le coup d’État CIA-MI6 de 1953 mettant en selle le jeune Shah Reza Pahlevi, un homme sûr…)

L’analogie entre ces années 1945-1953 et aujourd’hui est donc marquée de contradictions, mais ces contradictions illustrent également la logique de l’évolution de la dynamique historique, se transmutant ces dernières années en logique métahistorique dès lors qu’apparaît l’enjeu de la bataille autour du Système. Par-dessus tout, en effet, il y a une similitude dans les ambitions et les nécessités, car il s’agit aussi bien de la même volonté de reconquête ou de réaffirmation de la souveraineté en prenant le pas sur les pressions du Système… Car, en 1945-1953, le Système est déjà en place, avec les USA puissance incontestée et incontestablement dominatrice de la planète, disposant déjà de tout son corpus idéologique et structurel qu’on lui connaît aujourd’hui, décidée à l’imposer au reste du monde et ainsi de suite.

Une ceinture antiSystème

On se doute bien, puisqu’on en fait la remarque à propos du rapprochement analogique des ayatollahs et du docteur Mossadegh (“l’analogie devrait faire défaillir nombre d’habitués des salons, qui ne pensent que ‘démocratie’ et son contraire avant de penser Système et antiSystème”), qu’il y aura, qu’il y a bien des réticences dans les esprits, essentiellement américanistes-occidentalistes même antiSystème, à accepter cette ligne de raisonnement, dès lors qu’on en accepte toutes les conséquences. Elle est pourtant, cette ligne de raisonnement, absolument obligatoire si l’on veut parvenir à une efficacité antiSystème. Le Système est un phénomène universel (“globalisé”), qui ne s’embarrasse pour lui-même d’aucun interdit idéologique ni d’aucune contrainte morale, étant issu d’une dynamique (le “déchaînement de la Matière”) par définition étrangère à ces classifications. Par contre, il utilise avec brio les interdits idéologiques et les contraintes morales pour emprisonner ses adversaires dans des contraintes et des contradictions mortelles, totalement artificielles mais totalitaires dès lors qu’on les accepte.

Les lignes qui sont en cours d’élaboration, que ce soit au niveau d’un continent (l’Amérique latine) ou d’une organisation qui s’ébauche (le BRICS), ou de telle ou telle crise (l'Iran), écartent nécessairement ces interdits idéologiques et ces contraintes morales, et même, s’il le faut, des affrontements géopolitiques qu’on croirait inscrits dans le marbre du temps (comme entre l’Inde et la Chine). L’Amérique latine est faite d’une mosaïque de régime qui allaient à l’origine, d’une façon ou d’une autre, de la gauche radicale à la droite extrême, mais qui, peu à peu, se sont regroupés et se regroupent sous deux bannières, – le populisme (le mot ne fait pas vomir dans ces contrées) et l’antiaméricanisme plus ou moins exprimé ; et sous un impératif absolument supérieur, – la souveraineté et l’identité nationales. Ces pressions, que l’arrogance et les maladresses américanistes favorisent fort heureusement, obligent de plus en plus puissamment à la solidarité continentale qui, à son tour, dans un mouvement d’auto-alimentation, renforce la tendance antiSystème aux dépens des contraintes artificielles, idéologiques et morales. Comme nous l’écrivions à propos du Sommet des Amériques, cette mécanique antiSystème n’a même plus besoin d’un Chavez, comme c’était le cas jusqu’en 2006-2008, pour animer cette dynamique. («Le regroupement se fait d’une façon très accélérée, avec même les conservateurs jusqu’alors pro-US qui intègrent le bloc latino-américain dans sa logique antiaméricaniste. Bientôt, ils pourront dire, comme au temps des révolutions, “Nous sommes tous des Hugo Chavez”.») Aujourd’hui, Cristina-Evita ne connaît absolument pas la solitude que connaissait Evita, et son coup d’éclat pour récupérer la souveraineté sur les productions énergétiques argentines devra naturellement et nécessairement être soutenu par les autres pays du continent, comme sa position sur les Malvinas l’est désormais. Le même processus est en cours au sein du BRICS, entre des pays aussi différents que la Chine communiste, la Russie démocratico-autoritaire, l’Inde démocratique, le Brésil et l’Afrique du Sud présidentialistes (voir le dernier ralliement de l’Inde sur la question syrienne). Les pays d’Amérique latine ont aujourd’hui, comme interlocuteurs de plus en plus présents, des pays comme la Chine et l’Iran, sans qu’aucun préjugé idéologique n’interfère. De ce point de vue, les “pays émergents” sont notablement en avance sur l’opposition antiSystème au sein du pays du bloc BAO ; aucun préjugé, aucun mot d’ordre idéologique ne les contraint. On observera qu’en plus de cette unification d’une résistance antiSystème, l’effet (d'une façon remarquable en Amérique latine) est celui d’une certaine régulation naturelle des différents régimes en présence, qui évoluent de plus en plus vers un modèle central, avec des régimes présidentialistes forts à base démocratique, s’éloignant des excès de droite et de gauche de la période précédente où l’activisme du capitalisme yankee et de ses divers bras armés (CIA et supplétifs chez les tueurs locaux) entretenaient le désordre et les méthodes brutales et dictatoriales.

Au contraire, c’est un phénomène remarquable que l’emprisonnement, dans les pays du bloc occidentaliste-américaniste, des forces antiSystème, qui luttent contre le conformisme étouffant et asséchant du Système, tout en succombant elles-mêmes, épisodiquement et selon les domaines, au diktat idéologique de l’étouffement et de l’assèchement. La situation est à cet égard caractéristique aux USA et en France. Aux USA, les réticences, voire les diffamations idéologiques obsessionnelles de la gauche antiSystème contre Ron Paul, et son étatisme contre-productif dans un pays dont le centre fédéral sans aucun caractère régaliens n’a comme fonction que de renforcer les constituants du Système, ont obligé la tentative du candidat républicain à rester dans le cadre du Système (le parti républicain). En France, le candidat Mélenchon, dont les tendances souverainistes très larges et très riches sont évidemment antiSystème, s’interdit tout élargissement de son action en désignant comme son ennemi numéro un la seule autre force antiSystème du pays (le Front National). Pourtant les uns et les autres, notamment à gauche dans les deux cas cités, ne cessent de dire leur admiration pour les pays d’Amérique latins ; c’est particulièrement le cas d’un Mélenchon, qui a eu des contacts précis avec Cristina Fernandez, dont il admire le brio dans ses relations avec les médias ; le même Mélenchon, lorsqu’il s’agit de l’Iran, retombe dans les litanies de l’anti-cléricalisme extrêmement primaire et s’appuie encore, occasionnellement, pour justifier son hostilité à l’Iran, sur le grossier et grotesque montage du discours d’Ahmadinejad type-“rayons Israël de la carte”, qui relève dans sa psychologie faussaire du niveau Sarkozy-Netanyahou (même un ministre israélien comme Dan Meridor ne se donne même plus la peine de sembler y croire).

On voit que certains ont encore du chemin à faire, dans une époque où le temps presse, dans les pays qui ont produit ou facilité la production du Système et devraient être les mieux à même de connaître sa nature faussaire et trompeuse. Même l’argument du conformisme tactique (sacrifier à certaines obligations-Système aux niveaux idéologique et “moral” pour garder une “visibilité” dans le domaine de la communication) devra un jour ou l’autre être abandonné. Il suffirait pour cela d’une claire et franche exposition publique de ce qu’est le Système, ce qu’est la dialectique de la démocratie et du reste dans le Système, ce que sont les priorités qui en découlent, pour franchir le pas qui sépare la résistance passive et inefficace de l’insurrection active et dévastatrice.

L’Argentine devrait être un bel exemple pour eux. Sortie manu militari d’un régime qui avait subi les assauts habituels du conformisme-Système (l’Argentine de Peron, accusée d’être pro-nazie puis d’accueillir des nazis en fuite, par un département d’État qui applaudissait par ailleurs aux remarquables résultats de l’opération Paper Clip entreprise par l’OSS puis la CIA pour “exfiltrer” avec promesses de nombreux privilèges un nombre impressionnant de savants nazis, von Braun en tête), l’Argentine eut sa dose de dictature militaire soutenue par les USA ; puis elle eut sa dose de “capitalisme du désastre” (voir La Stratégie du choc, de Naomi Klein) ; enfin, il y eut l’insurrection des époux Kirchner, refusant tout simplement toutes les règles et contraintes du Système. L’exemple vaut la peine d’être médité, surtout s’il n’est pas, comme c’est le cas, une exception heureuse, mais une avancée dans une sorte de ceinture antiSystème qui est train de se boucler, tout autour du globe, tout autour du bloc BAO comme centre du Système, sur son flanc sud. A cet égard, c’est comme si l’on remontait le temps, jusqu’aux années 1945-1952, selon l’inattendu axe Evita-Mossadegh… Mais cette fois selon une dynamique exactement inversée, affirmant comme un argument de fer le principe de la souveraineté contre des pays du bloc BAO occupés à s’en laisser dépouiller par leur propre Système, comme s’ils étaient honteux d’exister en tant que tels ; mais cette fois, au lieu de subir la crise d’une exploitation par le Nord, portant cette crise de la contestation du Système au cœur du Système, en une “crise haute” qui est effectivement l’attaque fondamentale contre le Système