Le parti de l’obstructionnisme

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Répétons cette phrase de l’humoriste Bill Maher, qui décrit ainsi l’évolution de la situation politique aux USA après l’élection d’Obama: “Les démocrates sont passés à droite et la droite est passée dans un hôpital psychiatrique”. («As comedian Bill Maher recently put it, “The Democrats have moved to the right, and the right has moved into a mental hospital.”») Nous citions cela dans le texte consacré, le 22 juillet 2009 à la situation de blocage et de paralysie politique aux USA, caractérisée par un mot : “obstructionnisme”.

C’est le sujet que traite Michael Tomsaky dans l’Observer du 26 juillet 2009.

«[D]uring the Obama era, American conservatism – already fiercely ideological and obstructionist, operating according to sets of "facts" produced and paid for by oil companies, pharmaceutical manufacturers and other corporate interests – has contrived to go completely barmy.

»In most countries, you have two major political parties or broad factions. They disagree on many things. But both begin by accepting certain suppositions. I would imagine that in Britain, for instance, both Labour and the Tories think healthcare for all or at least most people is a good idea. They have different notions about how to do it, but the goal is agreed upon. I gather also that the Tories accept the basic idea that global warming exists and that man's actions have contributed to it.

»But American conservatism does not believe healthcare for all or most is a desired outcome at all. Conservatives believe people are responsible for their own healthcare, and that people who don't have it just aren't showing enough pluck and initiative. Last Thursday, one Republican congressman announced that the party wouldn't even offer its own version of healthcare legislation – and this man runs the party's so-called Solutions Group! And on climate change, of course, most deny its existence, and all deny that human activity has played any role in it whatsoever.

»I could give you 50 examples, but you get the idea. We have a party that lives in an alternate universe. Wondering why Obama and the Democrats are having trouble lately? They've committed their errors, and the party's genuine ideological diversity can make consensus hard to come by. But the big issue is this. The alternate-universe party represents the views of about 27% of the people, as nearly as I can tell. More will label themselves conservative in polls, but when you analyse the percentage of Americans who endorse the extreme views the GOP represents on a range of matters, it comes to a little more than quarter of the population. But the Republicans hold about 42% of the power in Washington, with the ability in Senate, according to that body's rules, to block almost anything, almost any time. […]

«Healthcare is socialism. Saving the auto industry is liberal fascism. Trying to halt global warming is both. Negotiating with Iran – I didn't even get to foreign policy – is proof that Obama wants to obliterate the US. And to top it all off, the Great Obliterator isn't even a citizen. Obama has to try to conduct the business of state with people who believe or lend cover to all these notions. Trust me. Be glad you have your Tories.»

Bien sûr, il s’agit des républicains, mais nous tendrions à ne pas concentrer la responsabilité générale sur un parti, sur une tendance. Tout le monde est complice dans la paralysie actuelle, chacun jouant son rôle dans la partition, les démocrates cédant, selon les circonstances, aux emportements hystériques et enfiévrés des autres, – comme ils l’ont fait pendant huit ans avec Bush, avec le plus grand zèle. Durant cette présidence, leur comportement fut souvent celui de la schizophrénie puisqu’ils soutenaient, souvent avec enthousiasme et ferveur, un gouvernement et une politique absolument rejetés par leur base électorale et contraires aux principes théoriques qu’ils affichent parfois en campagne électorale et qu’ils proclament lors des conventions nationales.

Les républicains appuient leur obstructionnisme qui nourrit leurs phantasmes sur une parcellisation du pouvoir, impliquant la multiplication des centres de pouvoir et la perte du sens d’un intérêt collectif. Cette parcellisation du pouvoir correspond également à une parcellisation sociale, sous forme de la communautarisation, où les démocrates portent la plus large part de responsabilités. Cette communautarisation est également un puissant ferment de parcellisation du pouvoir, qui complète, d’un point de vue social et culturel, celui que favorisent les républicains, souvent selon une approche économique et financière. Tout cela se traduit par la pertes des références de raison et de bon sens dans l'appréciation des grandes questions débattues.

Le mal est général et correspond à l’état du système en phase terminale, lorsque l’absence d’autorité et de légitimité régaliennes conduit effectivement à cette perte de sens collectif. Ce qui est remarquable, aujourd’hui, c’est que ce mal touche la psychologie collective jusqu’à faire ressembler celle-ci à une pathologie. Le jugement de Maher est particulièrement pertinent, pour caractériser le situation actuelle, notamment avec la présence de l’hôpital psychiatrique. Cela n’empêche donc nullement les démocrates eux-mêmes de ne plus être si éloignés de l’hôpital psychiatrique; ils y sont presque lorsqu’ils font avec Wall Street ce qu’ils ont fait, c’est-à-dire une “sortie de crise” qui prépare idéalement une crise encore plus grave; ils pourraient y venir de façon encore plus décisive si leur champion, le président BHO, s’enfonçait comme il commence à le faire dans une situation de blocage exacerbant la situation politique, – victime de l’obstructionnisme, et obstructionniste lui-même par une politique mettant elle-même en place les chaînes dont elle devient la prisonnière.


Mis en ligne le 28 juillet 2009 à 09H05