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15589 juin 2018 – Au départ, c’était net, clair, digne et d’une cooltitude infinie puisque émanant de Sa Grâce Insurmontable, Barack H. Obama : on liquidait les Russes du G8 et on passait au G7, point-barre, point-Barack. C’était en 2014, du temps où il y avait encore quelques restes épars de civilisation-Système, c'est-à-dire un peu d'ordre dans les rangs. Cela faisait sérieux. C’était planté net dans un tapis de ces FakeNews-là qui n’avaient pas encore reçu leur nom de baptême, auxquelles il était de bonne tenue de croire. Le bon ton était enfin de conclure : “Enfin, nous voilà ensemble, entre amis et complices, sans trouble-fête suspect. Nous allons pouvoir faire du bon travail et sauver la civilisation.”
Comme The Times they are a changin’... Voyez comment se passe une vraie jam session aujourd’hui, simplement en préparation de la réunion des G, et goûtez la différence.
D’abord, il y a Bruno Lemaire sortant de la réunion des ministres, une semaine avant le pow-wow des grands chefs, et contenant difficilement son ire, pour finalement lâcher la flèche du Parthe : “On pourrait tout aussi bien faire un G6+1 !” (C’est-à-dire, voulait-il dire : un G7-1, ce serait plus juste.) A partir de là, tout alla très, très vite.
Hier, Macron, arrivé en avance au Canada, sortait d’une réunion avec le jeune Premier ministre canadien et déclarait lors de sa conférence de presse que si les choses continuaient de la sorte, eh bien il serait impossible d’arriver tout de même à un communiqué commun, parce que à ce moment on pourrait bien faire un communiqué à 6, Trump et ses dingueries restant de son côté, mis à l’index. Cette proposition tonitruante recueillait l’approbation entière de l’ami Justin.
De son côté,The-Donald ne reste pas inactif, on l’imagine aisément. D’abord, il est furieux et il le fait bien savoir : un communiqué sans moi ! Vous plaisantez ? Nous aurons un communiqué à 7, et comment ! Croyez-vous donc qu’on puisse mettre si aisément la Grande République de côté ? On frémit à la pensée des bagarres qu’il faudra endurer à propos de chaque mot du communiqué en question ! Puis The-Donald enchaîne : et puis d’ailleurs, pourquoi un G à 7 ? Alors qu’au départ, si je me souvent bien de la chose, il s’agissait d’un G8, non ? Eh bien, rappelons les Russe, et refaisons un G8, vite fait !
Là-dessus,The-Donald s’engage dans une diatribe passionnée et, à chaque mot, on voit qu’il boit du petit lait, parce que chaque mot représente pour lui un couteau qu’il plante dans le dos de son prédécesseur tant haï, l’ex-président qui continue à prendre des postures présidentielles, – l’homme qui mit les Russes à la porte, et réintégrer les Russes pour The-Donald ce serait d’abord un énorme coup de pied au cul du 44èmePOTUS...
« Que ça vous plaise ou non— et peut-être que cela n'est pas politiquement correct — mais nous devons diriger le monde. Et il y a le G7, qui avant était le G8 et qui a chassé la Russie, et il doit faire revenir la Russie parce qu'on a besoin de la Russie à la table des négociations... La Russie doit être présente à cette rencontre. Pourquoi tenons-nous une telle rencontre alors que la Russie en est absente? Je vais le recommander, ça dépend d'eux, mais la Russie doit être présente à cette rencontre, la Russie doit être de la partie. »
Grande surprise et désarroi d’assez bonne tenue chez les 6 autres (suivez le décompte avec une certaine attention, s’il vous plaît). On se dit qu’il faut réagir, au cas où The-Donald serait sérieux, puisqu’il se trouve que cela lui arrive ces derniers temps. Le Canadien, dont il ne faut jamais oublier qu’il a un important électorat ukrainien (réfugiés) refuse tout net une réintégration de la Russie. Conte, le nouveau venu italien avec un sacré bagage pro-russe, saute sur l’occasion et proclame que oui, è benvenuto, faisons revenir nos amis russes. Les deux grands formats du groupe, la Kaiserin et le président verticalo-jupétérien, se réunissent en urgence et proclament que, – pas question ! Les Russes ont été exclus du G8 devenu ainsi G7 et on ne revient pas sur une telle décision d’une façon aussi légère, alors que la Crimée continue à se balader toutes voiles dehors. Je soupçonne que cette position des deux n’a pas grand’chose à voir avec les Russes et la Crimée, et tout avec ce The-Donald qui se croit tout permis et lance des initiatives comme des gamins laissent échapper leur Ballon rouge.
(Et les Russes, qu’est-ce qu’ils disent de tout cela, eux ? Peut-être bien que Poutine a pouffé nerveusement, je ne sais. Dans tous les cas, on a fait dire que là, vraiment, non, c’est impossible pour eux de se libérer, d’autres trucs ont été prévus et cela a donné, en version officielle, du type ça ne mange pas de pain mais un “G“ c'est un peu léger pour mettre tout sens dessus-dessous : « Le Kremlin a réagi à cette déclaration en affirmant que “la Russie était focalisée sur d'autres formats, en dehors du G7”. »)
Pour l’instant, à deux-trois heures de l’ouverture de ce G7 de légende on en est là, – à moins que j’ai raté l’un ou l’autre chapitre, et alors je suis sûr qu’on me pardonnera, non ? Il paraît que le sort du monde dépend de cette fiesta, je veux dire de cette réunion (« mais nous devons diriger le monde », a bien dit The-Donald, non ?).
Que voulez-vous que le commentateur ajoute à tout cela ? Qu’il fasse de graves et très élaborés analyses, avec des réflexions pleines de connaissances assurées sur la stratégie des uns et des autres ? Vous croyez vraiment que cela vaut la peine, et, surtout, croiriez-vous une seule seconde que cela corresponde à la vérité-de-situation comme on dit dans ces pages ? Ou bien ne vaut-il pas mieux prendre sa guitare et écouter Mary Travers avec ses deux compères Peter Yarrow et Noel “Paul” Stookey, – ces trois-là qui me sont restés tout au fond de ma nostalgie de jeune homme, – chanter The Times they are a changing’... Parce que, cette fois, cela pourrait être vrai, absolument vrai, une massive vérité-de-situation...
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