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• Surprise en Pologne, comme partout ailleurs : mais dans cas, contrairement à la Roumanie, le coup a réussi. • L’élu président de Pologne est une surprise de la droite tradi-populiste. • Nawrocki avait reçu, le mois dernier, le soutien de Donald Trump qu’il était allé visiter à la Maison-Blanche : « Vous gagnerez », lui affirma Trump, pour une fois bien inspiré. • Selon certains commentateurs, Nawrocki aurait de bien séduisantes idées : par exemple, réussir un coup comme Nixon avec la Chine en poussant en faveur d’une réconciliation avec Moscou.
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Pendant que nous avions le dos tourné à suivre les péripéties de l’attaque anglo-ukrainienne contre des bombardiers stratégiques russes via des drones du SBU, la Pologne votait. Par rapport à ce qu’on pouvait imaginer il y a trois semaines, si nous avions eu un peu de temps pour imaginer, ce fut une surprise assez remarquable.
Pour nous, la surprise est également plutôt agréable. Finalement, entre ça et les magouillages MI6-SBU, – il y a une sorte de génie de la perfidie chez les habitants du corps du renseignement britannique post-Blair [le MI6 dans ce cas], la perfidie d’Albion portée au centuple de la tradition, – nous donnerions bien une importance supérieure à l’élection polonaise ; élection au deuxième tour des présidentielles, de Karol Nawrocki, candidat dit-conservateur et que nous aurions tendance à qualifier de traditionnaliste (‘tradi’), et peut-être à la façon de Guillaume Faye, archéo-futuriste...
Candidat indépendant sorti des sollicitations de la Toile et de ses réseaux, Nawrocki s’est trouvé soutenu par le parti Loi & Justice (PiS), qui semble avoir pour l’instant un peu délaissé son soutien hystérique à l’Ukraine, comme on le verra plus loin. Arrivé à une brillante et fortement inattendue seconde place au premier tour, son succès d’hier démontre une fois de plus, comme en Roumanie, malgré les trahisons qui ont suivi, – qu’il suffit qu’un candidat au profil aisément populiste sorte le bout de son nez pour qu’il soit immédiatement sollicité.
Quelques mots des gens de RT.com pour nous présenter cette victoire de Nawrocki qui met un peu de plomb assez lourd dans l’aile du sémillant Premier ministre, l’hyper-européiste Donald Tusk, et donc dans celle des quatre frères Dalton qui sont à la conquête du monde via les bases stratégiques russes. (On remarquera qu’il s’agit d’une victoire avec une couleur MAGA assez accentuée, ne serait-ce que par le biais de l’ingérence grossière, voulue et assumée comme telle et comme outil politique, par les Américains de Trump dans les affaires d’un pays européen.)
« Le candidat conservateur Karol Nawrocki a été élu président de la Pologne au second tour dimanche, battant de justesse le maire centriste pro-UE de Varsovie, Rafal Trzaskowski.
» Selon la Commission électorale nationale, Nawrocki a obtenu 50,89% des voix, tandis que Trzaskowski en a recueilli 49,11%. Le taux de participation s'est élevé à 71,63%, l'un des plus élevés des récentes élections polonaises. Trzaskowski a obtenu de bons résultats dans les grandes villes, tandis que Nawrocki a dominé dans les zones rurales et auprès des électeurs plus âgés.
» Soutenu par le parti d'opposition Droit et Justice (PiS), Nawrocki a fait campagne sur un programme axé sur les valeurs catholiques, une plus grande souveraineté nationale et un rééquilibrage des relations de la Pologne avec l'UE. Il dirige l'Institut de la mémoire nationale, un centre de recherche financé par l'État, chargé de promouvoir l'histoire polonaise et d'enquêter sur les crimes commis en Pologne pendant l'occupation nazie et l'ère socialiste.
» Nawrocki a rencontré le président américain Donald Trump à la Maison Blanche le mois dernier. “Le président Trump a dit : “Vous gagnerez” », a-t-il déclaré plus tard aux médias polonais, selon Reuters. »
Mais que vaut, que peut décider et faire un président en Pologne ? En Pologne, il ne s’agit pas d’un système type Vème république, où la présidence détient tous les pouvoirs politiques essentiels. On parlerait plutôt d’une 4,5ème république, à mi-chemin entre la Quatrième et la Cinquième.
Voyez ce rapport candide et honnête, comme d’habitude, que nous en fait notre aimable Wiki-global :
« Le président de la République a le pouvoir de nommer le président du Conseil, mais dans la pratique, il donne généralement la mission de former un gouvernement au chef de la majorité à la Diète.
» Le président de la République peut avoir l’initiative législative. Il a également la possibilité de l'influencer directement en utilisant son veto pour arrêter un projet de loi, mais son veto peut être annulé par la majorité des trois cinquièmes de la Diète. Avant de promulguer une loi, le président de la République peut également demander au Tribunal constitutionnel de vérifier sa conformité avec la Constitution, qui dans la pratique porte une influence décisive sur le processus législatif.
» En tant que représentant suprême de l'État polonais, le président de la République dispose de plusieurs prérogatives :
- il ratifie et révoque les accords internationaux ;
- il nomme et rappelle les ambassadeurs et accepte les accréditations de représentants des autres États ;
- il décide des remises d'ordres et de distinctions ;
- il attribue la nationalité polonaise et autorise la renonciation de celle-ci ;
- il dispose du droit de grâce présidentielle sur une personne condamnée par la Justice, bien que ce droit nécessite la consultation officielle du ministre de la Justice.
» Le président de la République est aussi le commandant suprême des Forces armées : il nomme le Chef d'état-major général et les commandants de toutes les branches de services ; en temps de guerre, il nomme le commandant en chef des Forces armées et peut ordonner la mobilisation générale.
» Le chef de l'État exerce ses fonctions avec les institutions suivantes : la chancellerie du président de la République, le Bureau de la sécurité nationale, et enfin l'Organe des conseillers du président de la République. »
Bien, il y a tout de même de quoi ennuyer passablement Tusk, d’autant plus que cette élection a une signification politique radicale avec le fait de l’élection d’un populiste trumpiste-tradi. C’est la politique étrangère qui doit nous intéresser, d’autant que c’est sur cet écueil monstrueux que le PiS est allé se fracasser en facilitant le retour de Tusk. Le PiS, évidemment de tendance tradi et trumpiste-tradi, s’avisa pourtant de complètement épouser la politique globaliste de soutien à l’Ukraine. C’est la haine antirusse aussi stupide qu’aveugle des jumeaux Jarosław et Lech Kaczyński qui conduisit cette orientation et fit exploser la majorité qui avait jusqu’alors soutenu le PiS. Justement, c’est de ce côté, nous voulons dire de l’Ukraine et de l’antirussisme, que Nowacki pourrait apporter du nouveau.
Bien, – et cela dit, – pourquoi Nixon, comme indiqué dans le titre ?
Le “cas Nixon” a été largement créé et entretenu par le DeepState d’alors. Nixon, homme pragmatique et étranger aux coteries de la côte Est, avait une véritable vision de la politique extérieure qu’il appuyait sur des conceptions gaulliennes (grand admirateur de De Gaulle). L’ambassadeur de l’URSS à Washington Anatoli Dobrynine, une de ces éminences grises fameuses de la Guerre froide, a écrit dans ses mémoires que s’il n’y avait pas eu le Watergate, il y aurait eu une bonne chance que Nixon et Brejnev s’entendent et le réformisme gorbatchévien se serait installé, dans des conditions bien meilleures, dix ans avant l’aventure-Gorbatchev.
Mais il y eut bien le Watergate qui n’est pas nécessairement ce qu’en dit l’histoire officielle nourrie à l’eau bien douteuse de la presseSystème. Le livre ‘The Silent Coup’ de 1992, de Len Colodny et Robert Gettlin, a donné une version inédite du Watergate, avec un rôle inédit dévolu à Bob Woodward (Woodward-Bernstein, du Washington ‘Post’, qui eurent la peau de Nixon). Nous écrivions le 25 septembre 2009 :
« Woodward est l’archétype du vrai-faux héros journaliste de la narrative américaniste, à l'audition de laquelle nos intellectuels germanopratins béent d’admiration, avec le Premier Amendement en bandoulière. Le héros du Watergate, qui a reçu tous les lauriers et s’est bâti une fortune sur cette gloire, à la différence de son compère Bernstein qui eut la peau de Nixon avec lui, Woodward, donc, est un ancien agent du renseignement naval, proche du chef d'état-major de la Navy devenu président du Joint Chiefs of Staff (JCS) d’alors (l’amiral Moorer en 1970-74), avant d’entrer au Post et de se retrouver avec l’affaire du Watergate. L’élimination de Nixon, à partir d’informations obtenues plus par des complicités suscitées directement et indirectement par le JCS que par des vertus journalistiques et progressistes, tombait à pic pour les militaires qui craignaient de fortes réductions du budget du Pentagone et un arrangement avec l'URSS. »
Pourquoi ressortir le montage anti-nixonien du Watergate à propos du nouveau président polonais ? Pour mettre en évidence les idées réformistes de Nixon en politique extérieure, qui s’accompagnaient d’une politique intérieure assez proche du populisme trumpiste, – et ainsi retrouver Nawrocki comme lui-même l’envisagerait...
Sans le Watergate qui fut machiné comme on l’a vu, un développement comme celui qu’évoque Dobrynine aurait permis d’éviter le kidnapping de la politique extérieure US par les neocon qui disposaient à cette époque d’une influence quasi-nulle, et l’installation d’un antirussisme dément. De là, on passe effectivement à l’idée d’une politique nixonienne que pourrait rechercher Nawrocki. L’idée se trouve exposée dans un commentaire de l’auteur et historien, le Docteur Miechał Krupa (voir sur X), le commentaire repris par Larry Johnson sur son site le 31 mai 2025. (Le texte de Krupa fut écrit après le premier tour qui créa la surprise de la deuxième place de Nawrocki ; il devient encore plus intéressant à la lumière de l’élection de Nawrocki.)
« Alors que la Pologne évolue dans l'un des contextes géopolitiques les plus précaires d'Europe depuis la fin de la Guerre froide, l'idée d'une initiative polonaise indépendante en faveur du dialogue avec la Russie peut paraître radicale, mais peut-être pas impossible. Dans ce contexte, la figure de Karol Nawrocki, directeur de l'Institut polonais de la mémoire nationale (IPN) et désormais deuxième au premier tour de l'élection présidentielle, offre un scénario hypothétique intrigant : une initiative nixonienne – une ouverture audacieuse et complètement à contre-courant faite à Moscou – pourrait-elle être lancée non pas par un homme politique traditionnel, mais par un historien bénéficiant d'un soutien public croissant et d'une influence symbolique ?
» Avec un second tour prévu dans deux semaines, Nawrocki est désormais un candidat sérieux à la présidence polonaise. Sa campagne, axée sur la souveraineté nationale, l'identité historique et la diplomatie pragmatique, a trouvé un écho auprès d'une partie de l'électorat lasse de l'orthodoxie des deux partis et de la dépendance géopolitique. Si l’on considère également que Nawrocki aura besoin des voix combinées des deux candidats anti-establishment, le conservateur libertaire Sławomir Mentzen et le traditionaliste convaincu Grzegorz Braun, arrivés respectivement en 3e et 4e position avec un total d’un peu plus de 21 % des voix et dont les électeurs sont très las de continuer à soutenir l’Ukraine et d’envoyer des troupes polonaises dans ce pays assiégé, alors un tel scénario n’est pas si farfelu. »
Tout cela pour nous signifier que, dans cette période d’ultra-vitesse des événements, il faut nécessairement, à chaque instant, consulter le “temps long” de l’histoire pour mieux éclairer sa lanterne et trouver quelque vérité-de-situation qui soit bonne à dire. On pourra alors constater, notamment, que les complots ont largement devancé les complotistes, que les grands affrontements de l’histoire ne datent pas d’aujourd’hui, que la Guerre froide, avec tous ses travers, peut s’imposer comme un modèle qui n’a jamais empêché les adversaires au plus haut niveau de se parler, et ainsi de suite. A cette lumière, notre époque a un teint de malade profond
Cela évidemment admis, il reste que cette petite raie de lumière, – une de plus, dira-t-on, alors que les portes claquent si bruyamment, – a un attrait considérable. Imaginez un instant le président de la république polonaise allant visiter son homologue à Moscou. Qu’avez-vous à sourire ? Il y a dix-huit ans, c’est un Tusk enthousiaste qui nous annonçait sa prochaine visite à Moscou. C’est ça, le “temps long” de l’Histoire dans cette époque hyper-rapide.
Mis en ligne le 2 juin 2025 à 18H20