Trump-USA : gare au socialisme

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Trump-USA : gare au socialisme

A côté des analyses de convention faites à partir des diverses narrative que le système de la communication a développées à propos de Trump, il est vrai qu’un thème extrêmement nouveau est apparu dans le discours sur l’état de l’union du président Trump : la peur de l’installation du socialisme aux USA. C’est notamment le site WSWS.org qui met la chose en évidence, avec à-propos sinon gourmandise, – drôle de mot pour qualifier un jugement trotskiste… 

Quoi qu’il en soit, l’analyse du site trotskiste est tout à fait juste pour ce cas en mettant en évidence cette caractéristique exceptionnelle du discours sur l’état de l’Union, et elle surpasse très largement tout ce que la presseSystème peut lourdement accoucher en guise de commentaires convenus. Elle est parue ce 6 février 2019 sous le titre de « État de peur : Trump lance une longue tirade contre le socialisme »

« Au milieu de la charade habituelle, cynique et hypocrite, du discours sur l'état de l’Union de Trump la nuit dernière, – les hosannas, les ovations et les chants de "USA !, USA!" lancés par les sénateurs et représentants réunis, – le président a fait une déclaration remarquable qui en dit long sur l'état de la politique américaine et les véritables préoccupations de l'élite dirigeante.

» Pour la première fois de l'histoire des États-Unis, un président des États-Unis, dans un discours télévisé à l'échelle nationale, a dénoncé le soutien populaire croissant au socialisme. “Nous sommes alarmés par de nouveaux appels à adopter le socialisme dans notre pays”, a déclaré Trump. Il a promis, “Ce soir, nous renouvelons notre détermination à ce que l'Amérique ne soit jamais un pays socialiste”. Son auditoire, qu'il soit démocrate ou républicain, a marqué son approbation par des salves d’applaudissements.

» Derrière l’habituel torrent d’inévitables déclarations selon lesquelles “l’état de l’union est solide”, les remarques de Trump avaient le caractère d’un discours prononcé par le bunker. La classe dirigeante craint non seulement les défis de plus en plus importants posés à sa position mondiale, mais plus encore, les signes d'un mécontentement social croissant et du regain d'activité des grèves.

» Les politiciens du Parti démocrate comme Bernie Sanders et Alexandria Ocasio-Cortez, – qui a profité d’une interview à la suite du discours sur l’état de l’Union pour se dissocier du socialisme, – ne sont à l’origine de cette peur, la cause en est plutôt ce que la classe dirigeante voit se dérouler dans les villes du pays… »

Le dernier argument ci-dessus de WSWS.org est moins convaincant que l’analyse générale sur l’importance du discours. On retrouve la tendance systématique des trotskistes à dénigrer tout ce qui ne ressort pas de la plus grande pureté doctrinale : pour eux, les seuls socialistes possibles aux USA, outre eux-mêmes bien entendu, sont des personnes directement issues de la classe ouvrière, sans aucun lien avec le système capitaliste sinon les liens de sujétion auxquels elles sont soumises. Il n’est pas question d’accorder le label de “socialiste” aux nouveaux jeunes démocrates “de gauche” apparus avec la vague anti-trumpiste de 2015-2016, et bien entendu à AOC (Alexandria Ocasio-Cortez) plus qu'à tout autre.

L’argument est de peu de valeur, parce qu’il ne tient aucun compte du climat régnant à “D.C.-la-folle”, qui conduit à toutes les surenchères possibles. On a eu un aperçu de ce climat lors de la cérémonie du discours elle-même, pourtant d’habitude célébré dans la pompe la plus bombastique qui sied aux mœurs et coutumes de l’“Empire”, chacun devant se tenir aussi coi qu'une carte postale de vacance. On y vit la démocrate Nancy Pelosi, Speaker de la Chambre et ennemie n°1 de Trump, faire un geste d’applaudissement très singulier, rappelant soit les habitudes du golf, soit les insultes gestuelles classiques (“Fuck you”, par exemple ?). La séquence a été très largement diffusée, jusqu’à faire de Pelosi la véritable héroïne de la soirée.

C’est dans ce climat et à cause de ce climat que des surenchères très “socialisantes” ont déjà été largement diffusés, de la part de plusieurs candidates à l’investiture démocrate de 2020 (la chose semble être particulièrement prisée chez les candidates féminines). Quelles que soient les convictions des personnages politiques en cause, il reste que la montée aux extrêmes est une constante de la vie politique washingtonienne actuellement. L’aile gauche très dynamique du parti démocrate s’est résolument engagée sur une voie de type “socialisant” parce que l’argument est aujourd’hui très efficace et très répandu dans les milieux anti-Trump les plus extrêmes. Contrairement à ce que semble croire WSWS.org, il ne s’agit nullement de manipulation de la part du parti démocrate, mais bien plutôt du contraire : le parti démocrate qui est en plein désordre, est de plus en plus manipulable et manipulé par son aile gauche.

Même si la tirade de Trump contre le socialisme a été applaudie au Congrès lors du discours (mais assez tièdement par les démocrates), il reste que cet argument (le “socialisme”) apparaît de plus en plus comme l’argument anti-Trump par excellence. Ce n’est pas un affrontement d’idéologies, c’est un affrontement de personnes, et surtout de haines personnelles ; mais la tension est tellement forte qu’elle peut effectivement conduire à des dérives nettement socialistes dans le chef des démocrates, selon les circonstances des présidentielles de 2020, et cela même sans l’aval des trotskistes.

 

Mis en ligne le 6 février 2019 à 14H58