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492218 novembre 2018 – Le discours de Macron au Bundestag, hier, au sonnant de midi + 1, voulait rendre un ton solennel, plein d’une espérance forcée et grandiose au bord d’un précipice dont tout le monde ressent la proximité. Cela se lit dans la phrase qui a rencontré une certaine unanimité de la citation : « L’Europe et en son sein le couple franco-allemand, se trouvent investis de cette obligation de ne pas laisser le monde glisser vers le chaos. »
Pour cette rude tâche, Macron a longuement encensé l’Allemagne pour ses capacités inégalées de repentance, et il a exalté l’avenir suggéré par cet exemple en citant Goethe qui nous ramène nécessairement à la nostalgie d’un passé disparu, lorsque l’Europe existait vraiment, – je veux dire dans les âmes et dans les grands esprits, pas chez les comptables et chez les courtisans. Il a évoqué les poètes morts injustement à la guerre déclenchée selon lui (Macron) par les folies nationalistes des nations et, pour illustrer cet exemple du côté français, il a choisi Charles Péguy, le poète mort au champ d’honneur le 5 septembre 1914 pour la défense de la nation française (« Et puisla mystique du nationalismel’a saisi... », selon Bainville). “En même temps”, comme dit notre-président.
Solennité, gravité certes, mais que de bien frêles épaules craquant sous la pression des contradictions qu’il a énoncées, en alignant avec une imperturbable conviction des vérités métahistoriques sorties du dictionnaire des citations, des analyses du plus complet simulacre et des conclusions authentifiées par la bureaucratie de Bruxelles. “En même temps” qu’il encensait l’Allemagne, Macron critiquait la France pour son indiscipline et, peut-être bien, pour ses poètes qui meurent au champ d’honneur pour la défense de la nation française ; car “en même temps”, de fait, la France craquait de toutes parts sous les coups des “gilets-jaunes” alors que tout le monde se posait la question : que nous annoncent ces “gilets-jaunes” ? Que vont-ils devenir ? Où vont-ils nous emporter ?
C’est à croire que la France a retrouvé son rang, pendant que son président poursuivait au Bundestag son errance mémorielle (mémoire de l’illusion européenne dans la République Universelle) commencée à Verdun... Par “son rang”, j’entends sa place dans les rangs de la contestation qu’on me permettra de qualifier d’antiSystème. Cela n’est nullement une spécialité française, contrairement à ce que les “experts”-Système se plaisent à répéter, puisqu’on comprend aisément que c’est le monde qui craque de toutes parts sous la violence de ses contestations-antiSystème, le monde qui, on nous l’a dit, « glisse vers le chaos », – à moins que l’Europe, l’Allemagne & Macron, certes...
La situation du monde, cela est juste comme l’observe d’un œil d’aigle le président français, se trouve sur une trajectoire chaotique d’une puissance et d’une détermination qu’on peut qualifier une fois de plus de “sans précédent”, – sans prendre de risque, ce jugement. Voyez, même la Ligue des Déstructurateurs que nous avions vu récemment se former entre les usual suspects dans le but de semer le chaos à coups de regime change, se trouve confrontée à une sorte de chaos interne puisque les États-Unis, l’Arabie Saoudite et Israël en dernier arrivé, chacun à sa façon, développe sa propre crise intérieure. Le monde brûle comme la Californie se consume, il assume ses décisions populaires à la façon du Brexit transformé en un nœud gordien, il menace, tempête et rêve d’une Grande Guerre Mondiale pour éliminer les fauteurs de trouble sans troubler vraiment le désordre bien tempéré du chaos qui poursuit sa glissade en attendant l’Europe. Et tant d’autres situations, vérités-de-situation...
Le monde avec sa Grande Crise d’Effondrement forment une énigme d’un poids que les frêles épaules de ce Macron né de la modernité ne peuvent prétendre porter ni supporter. Le discours de Macron était comme l’on trempe son doigt de pied dans l’eau brûlante (“le monde qui glisse”) pour l’en ressortir aussitôt en affirmant qu’elle est fort tiède finalement, grâce à ce qu’on est et ce qu’on lui promet. En un sens, j’ai trouvé ce Macron-là à la fois grandiose et grandiloquent dans son pathétisme, ce qui signifie à la fois, selon les deux sens de ce qui est pathétique, émouvant et désolant.
... Car enfin, je veux croire, moi, qu’il croit à ce qu’il dit, et alors, devant un tel simulacre involontaire de culture et une telle inversion inconsciente de la logique, on peut gager pour peu de risque que « L’Europe et en son sein le couple franco-allemand, se trouvent investis de cette obligation » d’accompagner le monde dans sa glissade vers le chaos. Ainsi se rachèteront-ils, Macron et le couple franco-allemand avec “en son sein l’Europe”, car ainsi auront-ils prêté une main secourable à la survenue du chaos qui est désormais le destin incontestable du monde, et le signe du destin fatal de cette contre-civilisation devenue obscène à force d'imposture.
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