RapSit-USA2023 : Un ami de Trump

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RapSit-USA2023 : Un ami de Trump

Le rapport Durham a fait énormément de bruit à Washington D.C., même si certains le jugent quelque peu incomplet par intérêt (Mercouris & Christoforou) et d’autres bien trop oublieux du rôle de la CIA (Larry S. Johnson). D’autre part, il n’épargne pas certaines entités qui, non seulement le méritent, mais font de plus partie des cibles favorites, sinon essentielles, de Donald Trump. Le cas qui nous occupe implique le sénateur républicain Lindsay Graham qui, s’appuyant sur le rapport Durham, dénonce effectivement le FBI et la presseSystème, pour leur action conjointe dans le montage du ‘Russiagate’.

Le cas Graham est intéressant lorsqu’on sait que ‘Russiagate’ est l’opération et le montage de simulacre grossier qui constitua une des moteurs psychologiques principaux de l’antirussisme de ces dernières années, menant jusqu’à la guerre d’Ukraine... Et lorsque l’on sait également que Graham est l’un des plus acharnés partisans de l’Ukraine de Zelenski, du soutien à l’Ukraine, de la guerre contre la Russie “jusqu’au dernier Ukrainien” ; et lorsque l’on sait parfaitement que ni l’Ukraine, ni Mister Z. ne sont la tasse de thé de Trump, – qui a par contre une certaine estime pour Poutine.

Mais voyons ce que nous dit Graham :

« “Qu'avons-nous appris du rapport Durham ? Que le New York Times et le Washington Post ont reçu un prix Pulitzer pour avoir écrit un tas de conneries à caractère politique”, a déclaré Graham lors d'une interview accordée à Fox News. “Lorsqu'il s'agit de parler de Donald Trump, les grands médias n’existent plus”.

» Graham, un républicain de Caroline du Sud, a fait valoir que les médias devraient rendre leurs prix parce que tout l'épisode du Russiagate était basé sur des mensonges et un programme politique antiTrump. Le rapport de 300 pages publié lundi par l'avocat spécial américain John Durham a conclu que le FBI ne disposait pas de preuves suffisantes pour justifier son enquête dite "Crossfire Hurricane" et n'a pas pris la peine de corroborer les informations suspectes fournies par les ennemis politiques de M. Trump.

» Graham a déclaré que les conclusions de M. Durham étaient “dévastatrices et accablantes pour l'État de droit en Amérique”, mais les médias traditionnels et les dirigeants du parti démocrate ont refusé de les prendre au sérieux. Il a demandé au procureur général des États-Unis et directeur du FBI, Christopher Wray, de présenter des excuses aux personnes dont la vie a été ruinée par Crossfire Hurricane.

» “Ne serait-il pas bon que l'agence présente ses excuses à ceux dont la vie a été gâchée ? a demandé M. Graham. Ce serait bien que Garland prenne son téléphone et dise : ‘Je suis désolé de ce qui vous est arrivé’. Ne serait-il pas agréable que la presse admette qu'elle s'est trompée ? Rien de tout cela ne se produira”.

» Au lieu de cela, les républicains se mettront en colère et des millions d’Américains douteront de l'intégrité du système judiciaire américain. “C’est un dommage existentiel pour le FBI”, a déclaré Graham, qui s'est présenté contre Trump lors de l'élection présidentielle de 2016. “Il sera difficile de convaincre quiconque est conservateur ou de tendance modérée que le FBI est sur la bonne voie, en particulier s'ils ont encore le pouce sur la balance en ce qui concerne l'enquête sur Hunter Biden”.

» Les démocrates et les médias marginalisent le rapport Durham parce qu’“ils veulent juste s’en prendre à Trump, et ils se fichent éperdument de la manière dont on s’y prend”, a déclaré M. Graham. Il a ajouté que les associés de Trump qui ont été lésés par Crossfire Hurricane devraient “poursuivre en justice” les autorités fédérales chargées de l'application de la loi.

» “Quelqu'un doit être tenu pour responsable de l'utilisation de la loi comme arme politique et de la destruction de la vie d'innocent”. »

On remarquera que l’hostilité de Graham pour la presseSystème rejoint celle qu’exprime Jonathan Turley. Bien que tous deux très intéressés par les questions constitutionnelles et juridiques, les deux hommes sont pourtant de profils très différents, l’un (Graham) étant parlementaire et républicain, l’autre (Turley), universitaire et démocrate.

Tous deux sont incontestablement des membres éminents de l’establishment américaniste. Ainsi apparaît-il incontestable que l’on se trouve devant le type de contradiction de plus en plus présente, entre les membres de l’establishment en général, élites et élitesSystème, qui ne sont pas théoriquement adversaires d’une communication favorable au Système, mais qui supporte de moins en moins les moyens de plus en plus grossiers, – sorte de Grand-Écart de l’infamie, – employés dans ce but. Il s’agit dans ce cas d’une mise en cause de la “grande presse” (la presseSystème), accusée de ne plus tenir son rôle de “Quatrième Pouvoir”.

Le cas de Graham nous retient essentiellement par rapport à ses positions favorables à l’Ukraine et férocement antirussistes, alors qu’il dénonce le ‘Russiagate’ qui est la voie psychologique principale menant, aux USA, au soutien sinon au déclenchement de la guerre en Ukraine. Certaines interprétations sont tentantes à propos de Graham, sur base d’une opération de désinformation, ou complotiste si l’on veut. On en donne ici une esquisse sommaire mais très significative, venue d’un lecteur du texte de RT.com dont nous avons donné un large extrait :

« Graham est un homme rusé. Il parle comme un conservateur légitime sur les questions intérieures pour s'attirer les faveurs des conservateurs américains, et c'est son appât ; cependant, il change constamment d'objectif pour manipuler l'élan conservateur en soutenant des guerres malhonnêtes pour un gouvernement qui, sur le plan intérieur, agit traîtreusement avec les conservateurs. Graham est un monstre. Il est comme un séducteur d'enfants qui enseigne aux enfants de six ans à aimer les adultes qui les violent. »

C’est une explication bien sommaire, répétons-le, et selon nous largement fantaisiste qui nous est proposée. C’est pourtant souvent celle que l’on rencontre, à moins simplement qu’on ne choisisse le silence et qu’on s’abstienne d’expliquer cette contradiction des positions de Graham (par ailleurs voix importante au Sénat, sénateur de grande influence).

Insondable mystère

On le dit ici et on le redit, car ce n’est pas la première fois que l’on rencontre cette situation, et particulièrement avec un homme comme Graham. L’un des plus portraits les plus significatifs de cette situation de contradiction donnée sur ce site, le fut par PhG dans son ‘Journal-dde.crisis’ du 28 septembre 2018, lors des auditions pour la nomination du juge Brett Kavanaugh comme Juge à la Cour Suprême. Ici ne figure pas l’ambiguïté et la contradiction politique, – dans tous les cas, pas directement, – et ce que nous observons essentiellement c’est la franchise et la conviction de la personne (Graham soutenant à fond un acte de Trump président contre les démocrates qui sont ses habituels coreligionnaires pour soutenir les guerres extérieures) :

« Certes, peu m’importe Kavanaugh, sa nomination ou pas, sa culpabilité ou pas dans les affaires évidemment sexuelles qui ont fleuri au moment de cette audition, comme dans une symphonie bien ordonnée, comme des brins de muguet sortant de terre au 1er mai. Ce qui m’importe ici c’est l’incroyable traitement qui lui a été appliqué, sous forme d’un McCarthysme postmoderne d’une violence, d’une obscénité, d’une impudeur extraordinaires, toutes ces choses qui portent la marque d’une décadence s’oubliant en un effondrement de toutes les valeurs. (Voir les interventions des sénateurs Feinstein, Croker, Leahy, Durbin, tous démocrates bien entendu. Et certes, si la situation était renversée, les républicains feraient de même.) 

» ..Et c’est à la suite de l’intervention de Durbin que l’on vit Graham entrer en scène : pendant autour de quatre minutes, Graham, au comble de la fureur, a reproché avec une justesse infaillible et des mots tonnés comme un Bossuet en chaire, leur comportement aux sénateurs démocrates, comme

» “le plus anti-éthique, le plus scandaleux que j’ai rencontré depuis que je suis en politique”.

» Quelques heures plus tard, sur FoxNews, il dira que ce fut

» “l’un des plus grands moments de ma carrière”.

» Quoi qu’on en dise, quoi qu’on en pense, quelque valeur qu’on attribue à ces divers facteurs, à tous et à chacun d’entre eux, et même si l’on ne leur attribue que la pensée du simulacre ou de l’arrogance, – le Sénat, le système de l’américanisme, la Cour Suprême, les dépositions sous serments, le sénateur Lindsey Graham, etc., et puis la corruption, les institutions moquées, la vanité aveugle  de l’hybris, l’entropisation de la modernité dont l’Amérique est à la fois le nom et la Gloire, – quoi qu’il en soit, reste que ces quatre minutes sont admirables parce que c’est un moment de Vérité, ce que je nomme, une vérité-de-situation sans aucun doute... »

Aujourd’hui, nous nous trouvons vraiment face à une contradiction politique considérable, pour le même homme qui peut être conduit à cette sorte d’emportement à la fois remarquable et producteur considérable d’influence :

• Les parti-pris de Graham pour l’Ukraine sont parmi les plus violents, les plus hystériques à Washington ;

• Trump est totalement indifférent au sort de l’Ukraine, comme il l’est du sort de l’OTAN, et s’il faut pourtant s’intéresser à cette guerre (s’il était à nouveau président), ce serait sans aucun doute Washington et sa politiqueSystème qu’il mettrait en accusation, d’ailleurs non sans un certain délice ;

• Graham prend à fond parti pour Trump dans toutes ces affaires du ‘Russiagate’ lancées contre Trump, qu’il dénonce comme des montages alors qu’elles sont utilisées comme certaines des accusations les plus violentes contre les Russes.

Nous nous trouvons à la croisée de plusieurs dynamiques : l’incontestable caractère maléfique, sinon satanique de la politiqueSystème de Washington, qui séduit des attitudes affectivistes ; les mystères des comportements individuels, notamment au travers de questions politiques dont les liens avec des engagements politiques contradictoires sont brouillés par l’affectivisme justement.

Il est évident que l’intrusion d’acteurs incontrôlables, hors-Système pour les questions politiques, – un Trump ou un Kennedy, malgré leur appartenance évidente à l’establishment, – apporte un degré de désordre qui fait perdre le sens et l’orientation des choix à faire. C’est d’ailleurs bien un signe, non seulement de la décadence mais de la dégénérescence, du pourrissement par la perversité du Système, que de telles intrusions aient lieu et perdurent, – Trump est sur le devant de la scène depuis plus de sept ans !... Et Graham le belliciste antirusse le soutient plus que jamais !

 

Mis en ligne le 18 mai 2023 à