RapSit-USA2023 : Destitution au long cours

Journal dde.crisis de Philippe Grasset

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RapSit-USA2023 : Destitution au long cours

17 décembre 2023 (15H40) – Bien qu’elle fasse l’objet d’une publicité médiatique extraordinairement minimaliste jusqu’à sembler ne plus exister que comme dans un miroir déformant et réducteur, l’enquête de la Chambre des Représentants sur la mise en accusation du président Biden dans but d’envisager une destitution est aujourd’hui, aux USA, l’élément de crise le plus important et le plus prometteur.

Ce qui est important, – pour l’instant dans tous les cas, – c’est moins le résultat que la stabilité institutionnalisée du processus. Cela est rendu possible grâce au nouveau Speakerde la Chambre, – le républicain Mike Johnson, de la droite populiste pro-Trump, relativement inconnu et pour cela élu sans réel obstacle après une période de grand chambard et le départ de McCarthy, – un Johnson qui se révèle extrêmement coriace et résilient. Le silence effectivement extraordinaire de la presseSystème US (fidèlement suivie par sa consœur européenne) témoigne de l’embarras des démocrates dans cette bataille : seul le silence permet de n’en point trop parler. Les amateurs pourront comparer avec le brouhaha qui accompagna les deux enquêtes en mise en accusation contre Trump, pour des motifs conjoncturels dérisoires par comparaison.

Plusieurs points de l’atmosphère, des circonstances et des perspectives doivent être mis en évidence. On poursuivra et conclura par un article de Jonathan Turley exposant son argumentation en faveur du processus en cours, assortie de sa conviction aisément perceptible de la justesse d’une mise en accusation “sérieuse”, – c’est-à-dire ayant plus de fondement institutionnel et juridique que les accusations contre Trump. L’article de Turley n’est pas sensationnel au sens commun de la communication mais il donne un aperçu convaincant et particulièrement bien argumenté de la solidité du dossier. Cela participe bien entendu à ce que nous désignons plus haut comme “la stabilité du processus”.

• Cette “stabilité” est en soi un point important de la situation générale. Dans l’atmosphère chaotique et l’état politique fluide qui prévalent à Washington, avec l’intensité des antagonismes politiques développés des deux côtés, elle constitue une référence importante à laquelle les adversaires de Biden et de son clan, de sa “Famille” au sens mafieux du terme, peuvent se rallier dans certains épisodes d’extrême instabilité. Bien évidemment, cet aspect est et va être de plus en plus combattu par la presseSystème à 100% pro-Biden ; mais son problème est qu’en agissant de la sorte, elle fait de facto une publicité de communication au processus et perd son principal atout qu’est le silence.

• Le processus institutionnalisé peut conduire à des réactions dommageables du président du point de vue de la communication, d’autant plus certes qu’on se trouve dans une période pré-électorale cruciale. Il le peut d’autant plus qu’un des effets de son état de santé est une humeur souvent incontrôlable. L’attitude de Biden vis-à-vis du cas de son fils, qu’il défend becs et ongles, rend effectivement très incertaines et potentiellement très dommageables ses réactions à l’avancement de l’enquête de la Chambre, avec tous les effets publics possibles. Le site ‘Axios.com’ a signalé récemment cette extrême sensibilité du président, évidemment largement aggravée par son état de santé, à tout ce qui concerne les mises en cause de son fils qu’il juge aveuglément “injustes”.

« Seul l’entourage le plus proche du président Biden ose l’informer ou tenter de discuter avec lui des problèmes juridiques de Hunter, au risque de déclencher chez lui de furieuses crises de colère, ou au contraire de le plonger dans une sorte d’état d’atonie. »

• Quel peut être l’avenir et le résultat final pour cette procédure ? Aucune indication précise pour les deux questions, difficultés sans doute considérables pour mener le processus au terme dans les règles classiques, – et, par ailleurs et au contraire, aucune importance. Ce qui importe, c’est l’apport ainsi fait au formidable désordre mis en place par l’extravagante présidence Biden. Il faut voir les choses en perspective inversée : si l’on tient que ce “processus institutionnalisé” est par définition un élément d’ordre, alors l’on dit que cet élément d’ordre est un formidable facteur de désordre du “formidable désordre” actuellement en place et en cours. Tout est incertain dans ce cas, dans la perspective et la spéculation : l’éventuelle destitution, l’éventuelle succession (le nom de Kamala Harris lestée de toute son incompétence soulèvera une tempête politique jamais vue auparavant), l’éventuel état d’urgence selon la période où une décision serait prise. Dans ce cadre général que nous privilégions, il est évident que même une décision favorable à Biden, – sans spéculer sur les effets au niveau des élections présidentielles, – soulèverait une tempête.

Note de PhG-Bis : « Ainsi devrions-nous, si nous avions quelque raison, considérer cet événement qui a démarré un peu comme quelque chose de secondaire, qui a bénéficié du silence-total bienveillant de la presseSystème libre et démocratiquement morale, qui n’apporte rien en lui-même parce que les événements généraux sont d’eux-mêmes trop rapides pour attendre des décisions parlementaires et juridiques de cette importance, – mais qui a un formidable pouvoir de détonateur. C’est une détente d’un fusil armé, une mèche allumée d’une bombe “de fabrication artisanale” (les meilleures), une provocation du Ciel pour mettre à jour le formidable désordre du monde américaniste-occidentaliste, – car, bien sûr, l’Europe suivrait tout cela comme une aimable horde de moutons bêlants...

» C’est dans tous les cas le sentiment de PhG, qui tient l’actuel président des États-Unis, du fait même de ses innombrables vices et faiblesses, de son exceptionnelle inconscience avec un sens aiguisé par l’âge de l’irresponsabilité, comme une poutre-maîtresse de la GrandeCrise. Les plus grandes choses ont nécessairement besoin des artefacts les plus dérisoires, fussent-ils humains comme l’on dit que ‘Ol’White Joe’ s’entête à être. C’est le pari du chroniqueur : tout se joue dans ce centre satanique de cette époque folle, avec le fou du roi qui a pris la place du roi.

» Ce tour personnel ainsi transmis à cette intervention justifie de placer cet ensemble d’écrits au sein du ‘Journal dde-crisis’, et non dans la seule rubrique RapSit-USA2023, – même si le titre rappelle cette classification. »

Voici donc, ci-dessous, l’article de Jonathan Turley sur l’enquête lancée contre Biden. On le complètera d’un autre article qu’il vient de publier sur un nouvel avatar de Hunter Biden, qui peut ajouter quelques répliques supplémentaires au « théâtre de l’absurde » qui fait salle comble à Washington, – pluis que jamais ‘D.C.-la-folle’. On rappelle ce qu’il nous est déjà arrivé de dire : l’un des premiers constitutionnalistes du pays régulièrement consulté par le Congrès, Turley est loin, très loin d’être un ami de Trump. C’est un démocrate bon teint mais plutôt ‘old school’, du genre qui s’attache au texte de la Constitution des États-Unis ; il ne s’en cache pas comme il ne cache pas la piètre estime où il tient les Biden du fait de leur corruption colossale, au risque d’essuyer des critiques de “son camp”, – dont il n’a cure...

PhG – Semper Phi

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Les trois mythes de l’innocence

« Vous trouverez ci-dessous ma chronique (légèrement mise à jour) dans le New York Post sur trois mythes largement répétés dans l’enquête de destitution de Biden. Ces fausses narrative ont été répétées avec empressement dans les médias malgré l’absence de fondement juridique ou factuel. Dans le but d’introduire un minimum de réalité dans ce débat, voici pourquoi ces défenses sont illusoires.

Voici l’article :

« Avec l’approbation formelle de l’enquête de destitution sur la conduite du président Joe Biden, l’inquiétude et le déni à Washington ont atteint un niveau presque hystérique.

Malgré des preuves accablantes d’une opération de trafic d’influence corrompue de la famille Biden valant des millions de dollars, pas un seul membre démocrate n’a voté pour une enquête sur ces allégations.

Près de 70 % des électeurs (et 40 % des démocrates) pensent que Biden a agi de manière illégale ou contraire à l’éthique, ou les deux.

Pourtant, tous les démocrates ont voté pour arrêter toute enquête plus approfondie.

Même à notre époque aveuglément partisane, ce n’est pas une attitude facile à rationnaliser.

C’est pourquoi les députés répètent trois mythes comme un mantra sur la Colline.

La litanie se poursuivra probablement à mesure que la Chambre s’efforcera d’obliger les principaux partis à témoigner.

Dans mon audition lors de la première audience d’enquête sur la destitution de Biden il y a quelques mois, j’ai déclaré que la nécessité d’une enquête était évidemment satisfaite par la preuve de ces paiements massifs et les contradictions des affirmations passées du président.

En effet, au moins quatre articles de mise en accusation pourraient être établis si la Chambre confirme des faits critiques.

C’est le but d’une enquête : exiger non pas une mise en accusation mais des réponses. C’est pourquoi j’ai encouragé la Chambre à tenir ce vote formel.

Il faudra cependant écarter trois mythes.

• Joe Biden n’a pas bénéficié du trafic d’influence

Après des années passées à réprimer ce scandale, les médias et même certains démocrates admettent désormais que Hunter Biden et ses oncles sont impliqués depuis longtemps dans du trafic d’influence.

Les États-Unis mènent depuis des années des efforts mondiaux visant à criminaliser et à dissuader cette forme courante de corruption.

Des témoignages récents d’associés de Biden ont confirmé qu’ils vendaient “la marque Biden” et que Joe Biden convoquait régulièrement des réunions et rencontrait des associés.

La dernière ligne de défense a consisté à affirmer que même si des millions de dollars ont pu être envoyés aux membres de la famille Biden dans le cadre d’un trafic d’influence brutal, il n’y a aucune preuve que Joe ait réellement bénéficié de cet argent, contrairement à ses enfants, frères et petits-enfants.

Cette fausse narrative se répète malgré le fait que les tribunaux ont rejeté cette affirmation dans des affaires pénales réelles.

Non seulement les paiements versés aux enfants et aux autres membres de la famille ont été considérés comme des avantages pour un accusé, mais il en va de même dans les mises en accusation.

J'ai été avocat principal lors de la dernière mise en accusation judiciaire jugée devant le Sénat.

Mon client, le juge G. Thomas Porteous, avait été mis en accusation par la Chambre pour, entre autres choses, les avantages reçus par ses enfants, notamment des cadeaux liés à un mariage.

• Il s’agit des addictions de Hunter, pas des actions

Les démocrates insistent une fois de plus sur le fait qu’une opération complexe de trafic d’influence de plusieurs millions de dollars était simplement le produit du fait que Hunter était un toxicomane avéré et peu conscient de ses responsabilités depuis des années.

L’argument va évidemment dans les deux sens.

Même si Hunter était un toxicomane ne pensant qu'à sa prochaine dose, cela ne fait que souligner que ces personnalités étrangères donnaient des millions pour avoir accès à son père, et non pour les conseils ou l'expertise de son fils.

Mais le propre avocat de Hunter a réfuté cette affirmation en affirmant dans l’affaire des armes à feu de Hunter qu’il était sorti de sa dépendance juste à temps pour signer le formulaire d’arme à feu prétendument faux.

Une grande partie de l’inconduite s’est produite lorsque Hunter était, selon la narrative de ses propres avocats, soudainement lucide et responsable.

Les éléments de preuve démentent les affirmations selon lesquelles Hunter n’était pas responsable de ces transactions ni du trafic d’influence sous-jacent.

Cela montre un effort conscient et organisé avec la participation de ses oncles et, dans certains cas, de son père.

Les efforts visant à présenter Hunter comme un drogué aux aux manipulations boursières ne correspondent pas aux preuves alors qu'il parcourt le monde pour rencontrer des personnalités corrompues et sécuriser des millions.

• Tout tourne autour du camion de Hunter

Le dernier mythe est particulièrement exaspérant.

Le comité de surveillance de la Chambre des représentants a publié de nouvelles preuves montrant des paiements au président à partir des comptes professionnels de Hunter.

Le comité a utilisé les paiements pour montrer que ces comptes professionnels étaient utilisés pour des paiements personnels et qu'il y avait un mélange de fonds.

Les démocrates et les médias se sont immédiatement accrochés aux paiements dans le cadre desquels Hunter aurait remboursé des prêts pour l'aider à payer son camion.

Des membres du comité ont déclaré à la Commission des Voies et Moyens qu’il s’agissait simplement de “l’amour pour son père” et non de quelque chose de répréhensible.

C’est un effort cynique de se concentrer sur quelques milliers de dollars tout en ignorant les millions que les comités ont détaillés au cours de mois d’enquête.

Les membres démocrates donnent l’impression que l’enquête de mise en accusation est basée sur quelques prétendus paiements de camions. Ce n'est pas le cas.

Les paiements du camion ne représentent qu'une poignée parmi les innombrables transferts trouvés sur ces comptes vers Hunter ou les membres de sa famille

Le fait est que le produit du trafic d'influence pourrait avoir été utilisé pour rembourser le président, qui soutenait les membres de sa famille.

Les dollars sont fongibles. L'argent de ces comptes a été mêlé à des dépenses personnelles, y compris des paiements au père de Hunter.

Une fois de plus, le président Biden serait considéré comme bénéficiant des millions de dollars destinés à sa famille, même en l'absence de paiements directs.

La question qui se pose est celle de sa connaissance et de son implication, et non celle de ces avantages.

Le fait qu'aucun démocrate n'exige de réponses sur cette corruption est décevant mais peu surprenant.

Mais Biden est maintenant confronté à une enquête de destitution qui exigera enfin des réponses, et non des mythes, sur l'opération de trafic d'influence de la famille Biden. »

Jonathan Turley