RapSit-USA2020 : La sécession libertarienne

Brèves de crise

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RapSit-USA2020 : La sécession libertarienne

Au travers de l’intervention de deux commentateurs qui ont une certaine influence dans le monde des médias indépendants et antiSystème, dans le désert aride de la bienpensance-zombie de ceux de la presseSystème, on voit se développer une idée particulièrement intéressante dans le climat actuel d’affrontement et de haine. L’on retrouve cette idée de la sécession, qui nous semble l’enjeu fondamental de cette crise, que pourtant ni Biden ni Trump n’abordent d’une façon explicite, avec une volonté affirmée dans ce sens, qui en dit long ; cela, même si tous leurs efforts aboutissent à renforcer cette même idée dont personne ne parle officiellement (sauf l’État du Texas, dans son communiqué suivant la décision type-Ponce Pilate en cavale de la Cour Suprême).

Tom Luongo,  pourtant toujours mesuré et ‘professionnel’ dans le sens de la froideur ou de la distance de l’émotion que peut prendre ce mot, s’enflamme sans s’oublier à l’idée de ce qui est in fine la sécession, mais qui apparaît alors comme beaucoup plus profond que la sécession qui causa la guerre du même nom en 1861. Il s’agit du sentiment qui l’habite, d’appartenir à une tradition originelle de l’Amérique, celle qu’on pourrait qualifier de ‘démocratie localiste’, à-la-Jefferson, s’opposant à la fédéralisation financière avec concentration dans un pouvoir central fort, tel que le défendit Hamilton à la même époque des Pères Fondateurs.

Il s’agit de quelque chose de bien plus fort que ce qui oppose en principe les démocrates et les républicains, ou Biden et Trump, et qui s’exprime par des haines en apparence irrationnelles, mais alors mieux explicables par les puissantes références au passé qui sont proposées, qui pèsent sur tous les acteurs de cet événement, qu’ils le veuillent ou non, qu’ils en aient ou non conscience... Dans ce cas, Luongo parle en libertarien qui serait un véritable héritier d’un Jefferson-localiste (Jefferson dans sa dimension d’adepte de la démocratie localiste) ; l’on comprend alors combien le terme ‘libertarien’, chargé de tradition, est aussi étranger au terme ‘libertaire’ utilisé en France à la sauce postmoderne s’accommodant fort bien de la recette-wokeniste.

Le titre de son texte est significatif à cette lumière, surtout qu’il s’accompagne sur son site d’une illustration où l’on voit un ‘être humain’ (plutôt genrisé-masculin), à l’entrée ou plutôt à la sortie d’une grotte que l’on pourrait croire être celle de Platon : « End the Great American Myth: Secession, Not Revolution »

« Ainsi, pour moi, l’idée que les États-Unis se séparent en plusieurs parties a été une constante compagne pendant la majeure partie de ma vie adulte. Et, en tant que libertarien, je pense toujours en termes de sécession d’abord, plutôt que de révolution. Cette idée est assise sur mon épaule et me chuchote à l’oreille la vérité de ce qui est devant nous.
» Nous sommes arrivés à un moment très important de l'histoire du monde. C'est ce moment où les promesses du libéralisme classique échouent face à un cauchemar totalitaire rampant.
» L'Amérique, en tant que mythologie, a toujours été la “maison qui brille sur la colline” pour cette idée éclairée où les souhaits de l'individu créent pour sa béatitude la communauté et la culture qui sortent le monde d’un état de nature hobbesien.
» La guerre de tous contre tous, (bellum omnium contra omnes).
» Mais l'Amérique en tant que mythologie et l’Amérique en tant que réalité sont deux terribles bêtes très différentes. C’est cette différence qui est aujourd'hui exploitée par la ‘Davos Crowd’ pour mettre en route (‘ReSet’) le processus de leur prochaine manigance [d’un gouvernement globaliste]»

Dans ce même article, Luongo enchaîne en introduisant un autre commentateur libertarien indépendant fameux sur les réseaux, Brandon Smith, qui soutient dans un très récent article que les conservateurs sont entraînés aujourd’hui dans un piège. Son idée est illustrée d’exemples très concrets de mobilisation armée qu’il a lui-même constatés ici et là, et notamment dans son État du Montana. Il évoque ces cas de déplacements massifs de population (par exemple, ceux qui quittent la Californie en train de se transformer en un ‘État communiste’), qui constituent l’équivalent psycho-sociologique d’un véritable auto-nettoyage ethnique : « Des millions d'Américains épris de liberté quittent les comtés et les États de gauche, emportant avec eux leurs richesses et leurs entreprises, pour se rendre dans des régions plus conservatrices où ils se sentent plus en sécurité. Il n'y a pas eu d'immigration idéologique de ce type aux États-Unis depuis plus d'un siècle. La réalité est que les conservateurs se rassemblent (FINALEMENT) et qu’ils commencent à travailler ensemble pour leur propre sécurité. »

Luongo obserbe que, dans son article (« The “New Confederacy”? Yes, It’s Time For Conservatives To Unite Against The Globalist Reset »), Brandon Smith, bien loin de se poser comme partisan de Trump contre Biden mais plutôt adversaire des deux, « évoque le piège où les conservateurs sont entraînés aujourd'hui. Il soutient, de manière très convaincante, que la “droite” se radicalise et envisage une guerre civile armée pour combattre les idiots utiles de l’extrême-gauche idéologique dans une orgie de violence.
» “Pour être clair [écrit Brandon Smith], je pense que ce qui se passe, c’est que les conservateurs sont poussés et provoqués, non pas à se séparer et à s’organiser, mais à se centraliser. Je pense qu'ils veulent que nous soutenions des actions comme la loi martiale qui serait considérée comme totalitaire. Les conservateurs, les seuls défenseurs acharnés des libertés civiles, utilisant la répression militaire et abandonnant la Bill of Rights pour maintenir le pouvoir politique ? A long terme, c'est un rêve devenu réalité pour les globalistes. Et malgré la foi des trumpistes, il y a beaucoup trop d’élites bancaires et de globalistes au sein du cabinet de Trump pour garantir que ce pouvoir ne sera pas abusé ou utilisé contre nous tôt ou tard.” »

Dès lors, Brandon Smith en vient à son idée de ‘Nouvelle Confédération’, qui signale évidemment à tous le souvenir symbolique du Sud de1861 mais sans qu’il soit le moins du monde question de ces esclaves dont se repaît le wokenisme en oubliant commodément tout ce que ce phénomène a concerné de peuples et d’empires oppresseurs autres que ceux de la traite transatlantique ; le souvenir symbolique de 1861 où la question de l’esclavage n’était nullement la question centrale, mais un prétexte du conflit, car il n’en fut pas fondamentalement question en 1861, jusqu’à la fin 1862, lorsque Lincoln-devenu-dictateur, sortit de son chapeau l’Emancipation Act actant l’abolition, pour verrouiller l’engagement anti-sudistes des autres État de l’Union qui suivaient des voies de plus en plus diverses dans le conflit.

Pour Brandon Smith, il s’agit bien de la sécession selon-Luongo, ou de la ‘Confédération’ que le Texas propose aux États qui voudraient le rejoindre s’il prenait la voie de la sécession après le vote-félon de la Cour Suprême il y a deux semaines... Brandon Smith rejette avec fureur les accusations de fascisme lancées contre les conservateurs et les populistes, puisque justement le mouvement qu’il décrit rejette absolument le gouvernement centralisateur, – nécessaire à tous les totalitarismes, – que l’extrême-gauche démocrate veut au contraire mettre en place... Et l’on mesure également, à cette  occasion, combien la crise-Covid est au centre de cette politique révolutionnaire par impulsion centrifuge, combien, elle est politisée jusqu’à s’imbriquer totalement dans la Grande Crise de l’Effondrement du Système.

« Les communautés devront construire leurs propres économies localisées, en utilisant le troc et le commerce et peut-être même en créant des monnaies locales (avec un peu de chance, soutenues par une sorte de marchandise). Elles s’isoleront économiquement du confinement afin de le défier de manière pratique. Sinon, toute personne qui ne se conforme pas aux passeports médicaux et à la régulation de la sociabilité se verra refuser l'accès à l'économie contrôlée par l’establishment et mourra de pauvreté. Nous devons créer des alternatives. Nous devons offrir aux gens un choix hors de la tyrannie, sinon beaucoup suivront la tyrannie.
» Enfin, les communautés conservatrices vont devoir assurer leur propre sécurité. Quelle que soit la façon dont la situation électorale se termine réellement, même si Trump reste à la Maison Blanche et refuse de céder, la loi martiale est un scénario inacceptable. Les conservateurs n’en ont pas besoin. Nous devrions mettre en place une sécurité localisée (les ‘milices’) composée de toute personne valide de la communauté qui souhaite s’y joindre. Ces milices devraient se constituer en organisations non officielles, car il est peu probable que les politiciens de l'État les sanctionnent.
» Ce n’est pas grave. Nous n’avons pas besoin qu’on sanctionne notre propre sécurité et notre défense. Comme je l’ai dit, nous pouvons nous en occuper nous-mêmes.
» Les gauchistes nous appelleront “chemises brunes”, mais ce sont eux qui ont prouvé à maintes reprises qu'ils étaient violents et totalitaires, et leurs accusations sonnent creux. Les médias nous appelleront la “nouvelle Confédération”, ce qui est amusant car la majorité des confédérés propriétaires d’esclaves d’origine pendant la guerre civile étaient des démocrates.
» Nous mettrons de côté cette ironie et soulignerons que les gens ont un droit inhérent à l’autodéfense et à la liberté face à l'oppression, et qu'aucun d'entre nous n'est propriétaire d’esclaves. Quiconque appelle à la Reset globaliste est un ennemi des droits individuels, et quiconque tente d'imposer une tyrannie médicale est du mauvais côté de l'histoire et de la moralité.
» Ils peuvent nous appeler comme ils veulent et faire des comparaisons historiques erronées jusqu'à ce qu'ils aient le visage bleu ; cela ne changera pas le fait que nous cherchons à être libres et qu'ils cherchent à nous enlever cette liberté. C'est tout ce qui compte. »

Il nous apparaît que la rencontre de deux commentateurs réputés comme ‘sérieux’ dans les réseaux asociaux, individualités antiSystème-indépendants ou antiSystème-dissidents (*), constitue un signe d’une évolution intéressante et profonde de la perception de la Grande Crise. (Nous préférons juger sur la qualité, à partir de sources connues, étant plutôt dans l’espérance du “règne de la qualité” que dans l’acceptation du règne de la quantité. Par conséquent, une rencontre de jugement de Smith et de Luongo nous importe beaucoup plus qu’une élection fraudée ou qu’un sondage truqué, ou qu’une table  ronde sur CNN ou sur LCI.)

Luongo-Smith nous sortent de l’ordinaire hystérique de la Grande Crise et de l’interminable duo Trump-Biden, pour nous suggérer, plus inconsciemment qu’en conscience, que nous en venons à l’essentiel de l’essence même de cette Grande Crise. Il ne fait aucun doute que l’évolution décisive de la Grande Crise doit passer, sans aucun doute, par la désintégration de la puissance américaniste, d’une façon ou l’autre (destruction, division, etc.). On sait combien ce point est pour nous essentiel, combien il conditionne tout simplement la sortie d’une civilisation qui n’est désormais plus qu’un crise (la Grande Crise, certes), dont l’issue est d’une façon naturelle l’entropisation du monde.

 Ils nous signalent également, pour ce qui concerne l’opérationnalité de la chose, qu’il va nous falloir, – nous parlons ici pour la France et pour les conceptions réellement antiSystème, -indépendante et -dissidente, – penser les éléments de la Grande Crise en nous débarrassant absolument de tous nos anciens concepts, complètement dépassés, bien plus dépassés encore lorsqu’ils s’affichent globalistes et postmodernes.

On observera que le chemin qu’envisagent Luongo-Gordon est redoutablement étranger des conceptions françaises accrochées à l’État-nation. Les deux commentateurs nous disent leur détestation de l’Etat-central, alors que toute la tradition française, et bien avant la sanglante et épouvantable bouillie de 1789-1793, est fondée sur cette idée. Les emportements lyriques concernant la “République”, la “laïcité”, et même le “souverainisme” centralisateur de ce point de vue parigot-centré, constituent pour les véritables déconstructeurs de cette épouvantable puissance américaniste qui dévaste le monde et fait le lit du globalisme en même temps, les archétypes du vice en matière d’organisation politique. Leurs arguments méritent d’être considérés, en se disant notamment que n’importe quel adversaire du système de l’américanisme centralisé, même s’il nous paraît dangereux, ne peut pas être tout à fait mauvais.

 

Mis en ligne le 26 décembre 2020 à 12H05

Note

(*) Nous gardons à l’esprit et sous la plume cette qualification d’‘antiSystème-indépendant’ qui fera une expression de complément pour notre ‘arsenal dialectique’ ; dans le même esprit, on peut envisager ‘antiSystème-dissident’, en souvenir des résistants russes du temps du Samizdat, ou ‘antiSystème-résistants’, qui n’avaient nul besoin de ‘complots’ à vaincre pour résister contre le Monstre et la Bête. Ces expressions un peu plus complexes mais précises, pour tenter de nous détacher, de nous dégager, de nous désengluer, de nous distancier enfin du  flot de cette marée sans cesse montante de la rhétorique soi-disant ‘anti-système’ existant dans le pullulement d’affirmations de révolte ou de critique, comprenant les complotistes échevelés et les nihilistes soi-disant anti-système que l’on rencontre à foison, en abondance, se recopiant les uns les autres, festoyant en cercle vicieux autour d’explications aussi fabriquées que le simulacre dont ils affirment vouloir la destruction.