RapSit-USA201 : Carlson, la NSA & Poutine

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RapSit-USA201 : Carlson, la NSA & Poutine

Depuis une bonne semaine, il y a une “affaire Carlson”, du nom du présentateur vedette de FoxNews et l’une des personnalités les plus haïes par la gauche US et le wokenisme, à mesure de son formidable succès (autour de 4,8/4,9 millions d’auditeurs chaque soirée) et de sa position de droite extrêmement dure (et populiste). D’abord, il a annoncé qu’il était écouté et espionné (téléphone, courriel, etc.) par la NSA ; ensuite (hier), il a annoncé que la NSA avait fuité une information le concernant ; enfin, un peu plus tard dans la journée, cette fuite a été effectivement publiée par le site Axios.com et elle concerne des contacts pris par Carlson avec des officiels russes pour obtenir une interview de Poutine.

Précisions sur l’affaire à partir du site RedState.com, qui est naturellement favorable à Tucker Carlson, justement puisqu’il s’agit d’une grossière manœuvre de fuite organisée de la part d’une organisation officielle extrêmement puissante et n’ayant pas l’autorisation d’écouter des citoyens américains. A notre sens, lorsque règnent la machination illégale, la transgression des lois, l’organisation de l’attaque ad homines selon des motifs grossièrement faux, la subjectivité critique devient une sorte d’objectivité vertueuse en exposant une vérité-de-situation :

« Comme “RedState” l’a rapporté précédemment, les affirmations de Tucker Carlson selon lesquelles ses communications ont été espionnées et divulguées par la NSA étaient vraies. Axios a fait état de la fuite d'emails aujourd'hui, qui ne contenaient rien d'autre que la tentative de Carlson d’organiser une interview avec le russe Vladamir Poutine. Il est intéressant de noter que NBC News a interviewé Poutine il y a quelques semaines et qu'il n'y a rien d’anormal à ce qu'un présentateur cherche à obtenir une interview avec une personnalité jugée “adversaire”.

» Carlson a répondu via son émission (hier soir sur FoxNews) et, ce faisant, il a mis le feu aux poudres chez ses détracteurs et dans la communauté du renseignement.

» Comme le souligne Carlson, lorsqu’il a fait cette allégation pour la première fois la semaine dernière, les suspects habituels se sont empressés de le traiter de menteur en précisant que si c’était vrai, c’était forcément parce que Carlson faisait quelque chose de répréhensible. Maintenant, nous connaissons la vérité grâce à la décision d’“Axios” de jouer le jeu de la fuite illégale des e-mails de Carlson au lieu de faire ce qui doit être fait, et de dénoncer le gouvernement pour avoir espionné un collègue journaliste.

» Cela signifie que beaucoup de personnes qui avaient initialement des doutes sur l’affaire ont l’air de clowns ce soir et Carlson a continué à triompher en soulignant la motivation évidente de la fuite, – essayer de le dépeindre comme un agent russe.

» C’est une accusation de base que la gauche, facilitée par les hackers de gauche de notre communauté du renseignement, ne peut tout simplement pas ne pas utiliser. Bien sûr, Carlson essayait simplement de faire ce que NBC News avait fait auparavant, – obtenir une grande interview et des déclarations importantes. Mais en divulguant ses emails, la communauté du renseignement voulait faire croire que Carlson avait fait quelque chose de répréhensible. C'est un jeu insidieux et complètement anti-américain.

» Carlson a ensuite abordé le cœur du problème : les lois ont été violées. La NSA est tenue de garder secrète l’identité d’Américains écoutés dans la surveillance de personnalités étrangères. Ce n’est que par une demande de “démasquage” [révélation de l’identité de la personne écoutée] que son nom a pu être révélé. Après que cette demande ait été clairement faite, probablement par quelqu'un de l'administration Biden et qu’elle ait été signée par le directeur de la NSA, on a fuité cette information pour essayer de nuire à Carlson et à Fox News. C’est littéralement la saga Michael Flynn [en décembre 2019] qui se répète, sauf que Carlson va gérer cela de manière beaucoup plus intelligente (il ne va pas s'asseoir pour parler au FBI de sitôt, par exemple).

» Nos communautés de renseignement sont désespérément corrompues. Il n'y a pas moyen de les sauver. Elles doivent être complètement démantelées par le prochain président républicain. Quant aux hackers qui prétendent que ce n’est pas une mise en cause de la NSA de recueillir les communications d’un journaliste, de le démasquer, puis de les divulguer aux médias, ils sont de la pire espèce de lèche-bottes. Que notre gouvernement soit tombé aussi bas est un grand danger, et ceux qui le dirigent ont clairement l’intention de continuer à utiliser les mêmes schémas de “lynchage de communication” qu’ils ont utilisé avec Donald Trump. Cette démarche est totalement illégale et inique, et quiconque la défend est absolument méprisable. »

Cette affaire est largement reprise par les sites qui, en cette occurrence, doivent être considérée comme “dissidents” et antiSystème (ZeroHedge.com, RT.com par exemple). Elle doit être considérée comme l’occurrence la plus flagrante de l’illégalité dans laquelle travaillent les organisations officielles et des parti-pris idéologiques caractérisant ces activités, et certainement l’occurrence la plus spectaculaire en raison de la popularité et de la fonction de la personne visée.

Hier soir, Carlson a consacré toute son émission de présentation de l’actualité, le segment le plus regardé de FoxNews, à cette affaire. Il l’a fait notamment avec l’aide d’un allié de poids, Glenn Greenwald, l’homme qui a révélé et organisé l’action et la fuite d’un des plus célèbres “whistleblower” (lanceur d’alerte), Edward Snowden.

Glenn Greenwald nous avait auparavant informés qu’il avait reçu des tweets qualifiant Carlson de « personnalité télévisuelle nuisible » qui « s’adonnait à des contacts avec l’étranger » et avait donc été soumis à « une surveillance légitime ». Il est ensuite intervenu avec Carlson, lors du segment du présentateur de Fox.News, hier soir. Il l’a entièrement soutenu, définissant les préjudices dont Carlson a été l’objet comme « l’un des crimes les plus graves dans les règles imposées à la NSA, qui est de fuiter le contenu d’une communication qu’elle a interceptée entre un officiel étranger & un citoyen américain identifié ».

Une affaire ordinaire peu ordinaire

L’affaire Carlson-NSA, et plutôt Carlson-Greenwald vu le soutien apporté par le second au premier, n’est pas d’un type nouveau dans ces USA déchirés par l’antagonisme politique et l’abandon complet du moindre souci profond de légalité. Cette situation, nouvelle jusqu’à changer de nature dans son paroxysme à partir de pratiques politiques classiques d’affrontement impliquant les deux blocs opposés, est essentiellement le fait de l’idéologie de gauche (wokenisme) et du parti démocrate avec presseSystème assermentée ; elle fonctionne à l’abri devenu assez fragile d’un discours primaire de bienpensance peignant rapidement le simulacre de quelques couleurs (plutôt arc-en-ciel) de convenance. L’implication sans aucun effort de camouflage des organisations de sécurité nationale, essentiellement de renseignement (FBI, CIA, NSA), dans le sens de l’idéologie gauchiste actuellement au pouvoir aux USA, est une nouveauté de ces dernières années ; elle en arrive désormais à stupéfier les commentateurs indépendants dans son absence totale de retenue, son absence affichée de toute intérêt pour s’en dissimuler, là aussi derrière le rideau doucereux et translucide à force d’usages abusifs du “discours primaire de bienpensance peignant rapidement le simulacre de quelques couleurs (plutôt arc-en-ciel) de convenance”.

Bien entendu, ce qui est remarquable, – quoique là aussi pas nouveau, –  dans l’affaire qui nous occupe, c’est la personnalité des personnes visées, et le paroxysme (paroxysme du paroxysme) dans la visibilité de l’illégalité, dans la primarité sinon la bêtise de l’argumentation fabriquée et de la cause de l’action entreprise. En d’autres mots, nous en sommes au degré zéro de l’illégalité et au degré “infini” de l’irresponsabilité ; sorte de remake américanisé et, disons, colorisé et sanitarisé à la manière hollywoodienne, du “Zéro et l’infini” de Koestler décrivant, – comme ça se trouve, – l’univers stalinien.

Quelques remarques s’imposent :

• L’association d’un conservateur populiste de la droite dure et d’un progressiste pacifiste n’est pas totalement inédite, comme on l’a dit ; mais la célébrité, le professionnalisme et la popularité de Carlson et de Greenwald, indépendants d’esprit malgré leurs engagements, rendent cette association inédite et remarquable.

• Dans leur échange, les deux hommes dénoncent une situation où l’institution chargée de la surveillance des services de renseignement (le Congrès) est totalement inactive, jusqu’à pouvoir être accusée de complicité. Greenwald met nommément en cause le président de la commission sur le renseignement de la Chambre des Représentants, le démocrate Adam Schiff, qui devrait selon lui avoir d’ores et déjà engagé une procédure contre la NSA, ou à tout le moins une audition de son directeur pour obtenir des explications sous serment.

• Sur la manœuvre elle-même de la NSA, on peut évidemment s’interroger sur l’intelligence et le sens tactique des manipulateurs. Agissant par une fuite cousue de fil blanc contre Carlson après que celui-ci ait dénoncé l’écoute de ses communication, la mise en cause porte sur une accusation grotesque. Divers organismes et journalistes US ont déjà interviewé Poutine (jusqu’à un film en plusieurs épisodes d’Oliver Stone) ; tout récemment, ce fut NBC.News, organisme agréé de la presseSystème. Dans ce contexte on voit mal ce que la révélation que Carlson s’apprête à le faire peut constituer comme préparation d’une conduite fautive en quoi que ce soit du journaliste ; l’idée même en est tout simplement grotesque, l’interview de dirigeants étrangers, quelle que soit leur attitude vis-à-vis des USA, étant une pratique courante, sinon recommandée, du métier de journaliste.

• Carlson a bien détaillé la manœuvre lancée contre lui à partir des révélations du lanceur d’alerte, expliquant que le but de la NSA était de le faire passer pour un “agent des Russes”, selon la tactique bien connue et marquée par le génie du Russiagate déjà bien rancie.

« [Carlson] a ajouté que, même s’il n’était “pas embarrassé” par la possibilité d'une rencontre, il n’en a pas moins gardé le silence sur ses efforts, pensant que “toute forme de publicité contrarierait les Russes et rendrait l’interview moins probable”.

» Cependant, “l’administration Biden l’a découvert de toute façon en lisant mes courriels”, a poursuivi Carlson, alléguant également que le lanceur d’alerte lui avait dit que la NSA prévoyait de divulguer les communications à des médias hostiles afin de le dépeindre comme un “Américain déloyal” et un “agent russe”.

• On peut alors se demander que vaut le niveau intellectuel aussi bien des gens de la bande-Biden que de la NSA, pour déployer à découvert tout un processus d’illégalité et de subversion pour un but aussi éculé et incertain. Il y a là un terrain considérable d’irresponsabilité, voire de bêtise pure, ou bien alors une sorte d’auto-conditionnement qui fait croire aux manipulateurs qu’effectivement on croira que Carlson est un “agent russe”, voire après tout qu’ils croient vraiment qu’il est un “agent russe” puisqu’il veut interviewer Poutine, éliminant de leur processus intellectuel toutes les occurrences déjà signalées d’autres interviews de Poutine par des Américains, aussi bien que les fondements même du métier de journaliste, dans tous les cas quand existait la liberté de la presse. (La comparaison faite à propos de Carlson avec le général Flynn, – objet également d’une fuite concernant une conversation pourtant tout à fait justifiée qu’il avait eue en décembre 2016 avec l’ambassadeur de Russie, – n’est même pas vraiment pertinente : Flynn était le futur conseiller à la sécurité nationale de Trump déjà nommé, c’est-à-dire un officiel, tandis que Carlson est indépendant du pouvoir politique.)

• Enfin, on évoquera la possibilité d’une hypothèse selon laquelle Carlson a accepté la fuite, sinon l’a provoquée indirectement, parce qu’il estime qu’elle met bien plus en cause les services de sécurité et de renseignement, et l’administration Biden, que lui-même, sinon qu’elle l’avantage en faisant de lui une “victime” d’un système de surveillance devenu fou et s’avérant de plus en plus stupide. Ce serait alors l’idée qu’il était au courant depuis longtemps de sa mise sur écoute par la NSA, – ce qui relève de l’évidence pour un personnage de son  gabarit et de son engagement, sans nécessité de lanceur d’alerte ; qu’il aurait utilisé des moyens normaux de communication pour permettre les écoutes et susciter la fuite contre lui ; qu’il aurait éventuellement bénéficié des services du lanceur d’alerte depuis un certain temps pour effectivement monter son piège. Qu’est-ce qui est le plus intéressant pour sa stature et contre l’administration Biden : qu’il fasse son interview en paix ou qu’il réussisse à piéger la NSA dans une fuite grotesque ? Dans tous les cas, Carlson a bien entendu déclaré qu’il poursuivait son idée d’une interview de Poutine ; peut-être que le président russe jugera que l’occasion est bonne de rendre encore plus fous les fous de “D.C.-la-folle” ?

 

Mis en ligne le 8 juillet 2021 à 16H40