Notes sur quelques bras d’honneur...

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Notes sur quelques bras d’honneur...

• “Bras d’honneur”, c’est-à-dire les signes et les actes divers, qui s’accumulent, montrant que l’influence des USA se désintègre à une extrême rapidité. • On mentionne bien sûr l’actuelle tension au Moyen-Orient, avec la Turquie attaquant des bases de milices kurdes imbriquées dans des déploiements US (pour piller le pétrole syrien). • On observe la dégradation accélérée des relations, d’une part entre pays-membres au sein de l’UE, d’autre part entre l’Europe et les USA au sein du bloc-BAO. • On attend avec intérêt la visite du président chinois Xi à Ryad, dans un faste et un cérémonial qui marqueront un rapprochement extraordinaire (et l’agonie du pétrodollar) entre l’Arabie et les pays arabes avec les organisations nées du tandem Russie-Chine et qui représentent de plus en plus le “Grand Sud” : les BRICS et l’OCS. • Ce retournement du monde est d’abord défini, notamment par les Chinois comme par les Russes, comme un refus de la modernité morphant en une postmodernité globalisante et niveleuse de toutes les cultures et toutes les traditions, et la mise en évidence des “États-civilisationnels”.

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26 novembre 2022 (18H40) – Nous sommes à l’heure où le Sénat des États-Unis trouve 16 de ses 30 dignes membres de la commission des forces armées de la Haute Assemblée, pour envoyer une lettre au Pentagone lui demandant de livrer au président ukrainien Zelenski des drones ultrasecrets MQ-1C ‘Gray Eagle’ capables de voler 30 heures et 3 000 kilomètres, sans doute pour frapper le Kremlin, surtout s’il vous plaît sans déclencher la Troisième Dernière. Le Pentagone fait dire, en réponse officieuse, que “Oups ! On va voir mais on va chercher à développer une version de ce fameux drones sans les secrets qui ne doivent pas tomber dans les mains des Russes” . Cela ferait quelques dizaines de $millions en plus [pour Lockheed-Martin et Raytheon] pour faire un super-drone moins bon que l’original, et plus d’un an de délai ; délai pendant lequel les forces  russes du Général Armageddon seraient priées de ne pas lancer l’offensive finale...

A Washington et à ‘D.C.-la-folle’, la dynamique bureaucratique de la corruption fonce à un train de sénateur.

Après cette goûteuse entrée en matière et pendant ce temps-là et cette nouvelle sensationnelle de l’institution démocratique du Congrès sur laquelle veille le Complexe Militaro-Industriel (CMI), d’autres nouvelles constituant l’essentiel de notre texte méritent le développement, comme autant d’actes d’insolence à l’encontre de l’hégémonie américaniste. L’Histoire devenue métahistoire, en effet, se déroule à une vitesse considérablement élevée. Les USA, essoufflés et les artères encombrés, peinent à suivre en rêvant à l’actualisation (‘to update’) de leur gloire passée, lorsqu’ils disaient en toute sérénité, – rappelez-vous ces paroles considérables d’il y a à peine vingt ans, lorsque nous étions bien jeunes...

« Nous sommes un empire maintenant et quand nous agissons nous créons notre propre réalité. Et alors que vous étudierez cette réalité, – judicieusement, si vous voulez, – nous agirons de nouveau, créant d’autres nouvelles réalités, que vous pourrez à nouveau étudier, et c’est ainsi que continuerons les choses. Nous sommes [les créateurs] de l’histoire... Et vous, vous tous, il ne vous restera qu’à étudier ce que nous avons [créé]. »

Erdogan s’en-va-t’en-guerre

Car il se trouve que le Calife-Général Erdogan commence à en avoir vraiment assez de son allié et cher compagnon de l’OTAN. Il le dit de plus en plus vertement : “Rien, entendez-vous, rien n’arrêtera notre juste volonté de riposter à l’infamie des attaques terroristes, fussent-elles fomentées par on ne sait qui...”. Erdogan parle d’or, il en connaît un bout dans ce type de pratique, – mais dans ce cas, il s’agit d’un homme qui choisit de plus en plus nettement son camp, et notre sens stratégique doit effacer toutes les critiques tactiques que nous avons pu formuler contre le président turc.

« La Turquie est déterminée à “éradiquer” les terroristes, où qu'ils se trouvent et quels que soient leurs partenaires, a déclaré vendredi le président Recep Tayyip Erdogan.

» Ses commentaires interviennent après que Washington a protesté auprès d'Ankara au sujet d'une frappe aérienne qui a “directement menacé” les troupes américaines travaillant avec les milices kurdes en Syrie.

» “Peu importe avec qui les terroristes sont de connivence, la Turquie les tiendra toujours responsables de chaque goutte de sang qu'ils versent”, a déclaré Erdogan dans un discours prononcé au chantier naval d'Istanbul. Le président turc a rejoint le premier ministre pakistanais Shehbaz Sharif pour l'inauguration solennelle du "PNS Khaibar”, l'une des quatre corvettes qu'Islamabad a commandées à la Turquie.

» Erdogan a également déclaré que “personne ne peut faire la leçon à la Turquie, qui est le seul allié de l'OTAN à avoir combattu Daesh corps à corps et à avoir été victorieux”, en référence au groupe terroriste État islamique (EI, anciennement ISIS). »

On ne nous croira pas sur parole mais on nous entendra si nous disons que ces opérations turques sont effectuées en pleine coopération, d’une part avec l’Iran, d’autre part avec la Russie [axe Teheran-Ankara-Moscou, bientôt tous compagnons des BRICS++]... Un des lecteurs-commentateurs du texte de RT.com (dit-“Jack Cartwright”, bien connu de nos lecteurs), que nous soupçonnons (façon de parler) d’être au courant de beaucoup de chose, – donc à consulter et à méditer, concernant ces deux messages qui proposent deux dimensions des coopérations en cours dans la région. Le bras d’honneur fait aux USA est à plusieurs doigts...

« Comme les déclarations publiques turques semblent être en phase avec l'Iran (jusqu'à présent), je suppose que l'Iran est le superviseur des opérations sur le terrain en Syrie. Totalement légal du point de vue de la souveraineté de la Syrie. » [...]

« Ils disent que c'est la plus grande attaque jamais vue dans l'histoire de la Turquie. Ce qui est logique, tout en faisant des rapports constants [au ministre russe de la défense] Shoigu. Je reconnais la touche de l'expertise du Capitaine Armageddon [le Général Sourovikine, actuel – et “brutal”, comme l’écrit le gentil et objectif RFE/RL, – commandant-en-chef en Ukraine, qui a commandé le corps expéditionnaire russe en Syrie en 2015]. »

L’Europe, en cocu(e) métahistorique

Il faut élargir cette sorte de situation à l’ensemble du bloc-BAO, comme nous avons coutume de la désigner. Neuf mois après le début d’une guerre qui devait acter la fin des prétentions russes, d’abord par l’effondrement de l’économie russe (triste Lemaire), puis la fin de toute tentative de rassemblement anti-occidental, c’est tout le contraire, dans tous les domaines, qui se produit à une extraordinaire rapidité.

• La situation interne de l’UE ne cesse de se dégrader, non seulement objectivement (crise de l’énergie et le reste), mais aussi entre pays-membres eux-mêmes, ou entre pays-membres et Bruxelles. Les querelles grandissent et touchent d’innombrables domaines, tandis que la machine de la communication répète comme une hébétude cosmique les incroyables simulacres décrivant une guerre en Ukraine qu’on peine à distinguer telle qu’on la décrit, et que les chefs de gouvernement et divers ministres se rendent régulièrement à Kiev comme l’on fait un pèlerinage.

• La situation transatlantique (entre l’UE et les USA) tourne brusquement d’un alignement complet qui ne fut jamais qu’un simulacre et s’effrite à une effrayante rapidité, en une acrimonie et une récrimination extraordinaires... Et lorsqu’on parle de cette situation au président Biden, comme lors du G20 de Bali où le bloc-BAO (le G7) a été mis KO par le refus des autres de le suivre, il se passe ceci que « Biden semble tout simplement ne pas être au courant ». (Ce qui prouve que Biden est bien l’homme de la situation et le président qu’il nous faut, – qu’il soit donc réélu en 2024...)

Tout cela bourdonne partout, dans tous les couloirs et les marches des assemblés, au milieu de la grandiose bouffonnerie d’un Parlement Européen proclamant à une majorité démocratique considérable que la Russie est un “État-terroriste”... Sommes-nous au bout du tunnel du ridicule cosmique de l’Occident ? En ont-ils conscience ?

Note de PhG-Bis : « Je donne ici, confidentiellement, les ‘éléments de langage’ comme l’ont dit, exprimés par PhG, donnant son sentiment assez net sur la position des Européens... C’est un peu brut de fonderie, et même de décoffrage : “ Combien de temps faudra-t-il supporter la dictature d’une si universelle sottise, manipulée par une bande de gredins incultes et prétentieux ? L’avalanche emporte tout ! Jamais aussi grotesque cocu que l’Europe n’a gémi avec tant de hargne de la souffrance des effets innombrables de ses propres lâchetés et du poids considérable de sa propre sottise... Un cocu pareil, c’est métahistorique.” »

Pour sembler sérieux en donnant la sorte de références que les journalistes-Système s’enorgueillissent de présenter aux ‘fact-checkers’ qu’ils se sont choisis eux-mêmes et qui en font leur beurre, voici quelques échos... Ils viennent d’une source (RT.com) censurée par la moralité du Camp du Bien, qui ne fait que reprendre les principaux éléments d’une source issue du cœur du Camp du Bien (‘Politico’)...

« Les hauts fonctionnaires de l'UE sont en colère contre l'administration du président américain Joe Biden, arguant que Washington tire profit du conflit ukrainien et des problèmes économiques du bloc, a rapporté Politico jeudi, citant des sources.

» Un haut fonctionnaire interrogé par le média a déclaré que les États-Unis profitent le plus du conflit car “ils vendent plus de gaz et à des prix plus élevés, et parce qu'ils vendent plus d'armes”.

» Le fossé transatlantique croissant repose sur plusieurs facteurs. Les sanctions occidentales imposées à Moscou en raison de sa campagne militaire en Ukraine ont provoqué d'importantes perturbations dans les livraisons de gaz de la Russie vers l'Europe, et l'UE dépend désormais du gaz américain, qui est vendu à un prix quatre fois plus élevé qu'il ne coûte aux États-Unis.

» Le président français Emmanuel Macron a qualifié cette pratique de “non amicale”. Cependant, une source de Politico a indiqué que, lorsqu'il a été confronté aux dirigeants de l'UE lors du sommet du G20 sur ce problème, Biden “semblait tout simplement ne pas être au courant”.

» Une autre question épineuse est la loi américaine sur la réduction de l’inflation, un système d'incitation qui offre d'énormes subventions et des allégements fiscaux aux entreprises vertes. Bruxelles craint qu'il ne soit potentiellement ruineux pour l'économie du bloc, car il pourrait donner aux fabricants américains de véhicules électriques un avantage sur leurs homologues européens sur le lucratif marché américain.

» “Nous sommes vraiment à un moment historique”, a déclaré un fonctionnaire de l'UE à Politico, affirmant que ces désaccords pourraient saper les efforts occidentaux pour soutenir l'Ukraine et l'alliance transatlantique elle-même. “L'Amérique doit réaliser que l'opinion publique est en train de changer dans de nombreux pays de l'UE”, a-t-il ajouté. »

Xi et ses amis Arabes

Élargissons encore le champ de nos infortunes et jetons un coup d’œil sur la “visite historique” du Chinois Xi à Ryad, où il ira recueillir avec son impassibilité coutumière les projets d’adhésion au SCO et aux BRICS du roi du pétrodollar, qui nous concocterait bien un pétro-BRICS pour changer un peu, c’est-à-dire pour nous “dédollariser” comme l’on vous fait sortir d’une prison.

L’excellent M.K. Bhadrakumar nous avait déjà tracé le cadre général de cette visite qui a évidemment une importance historique, – “métahistorique”, dirions-nous, selon une définition désormais habituelle de ces temps-devenus-fous qui ne cessent d’empiler des prolongements extraordinaires. Cette visite, du 5 décembre, est ainsi présentée par l’ancien diplomate indien (sur ‘OrientalReview.org’, en français sur le ‘Sakerfrancophone’) :

« C’est un symbole très puissant que le président chinois Xi Jinping ait fait le choix de réserver à l’Arabie Saoudite sa première visite à l’étranger après le Congrès du Parti. À en croire le Wall Street Journal, cette visite devrait se produire début décembre, et des préparations intenses sont en cours en vue de l’événement.

» Le quotidien cite des personnes bien au fait des préparations, selon quil’accueil [réservé au dirigeant chinois] va sans doute ressembler” à celui accordé à Donald Trump en 2017 de par son faste et son apparat.

» Il est aisé de prédire que la rencontre va centrer ses échanges sur la trajectoire à venir de l’alliance pétrolière sino-saoudienne — ou plutôt, l’établissement d’une alliance pétrolière comparable au cadre russo-saoudien de l’OPEP Plus. Cela étant dit, le contexte géopolitique de la prochaine visite de Xi est particulièrement riche en réalignements dans la région de l’Asie Mineure, et son impact sur le monde peut amener des conséquences profondes. »

Là-dessus, on apprend que les perspectives s’élargissent encore, lorsqu’Alexander Mercouris nous présente la surprise que les Saoudiens préparent pour Xi, c’est-à-dire une invitation lancée à tous les pays arabes, – y compris la Syrie, peut-être bien ! – de venir saluer le président chinois et discuter avec lui de l’avenir des choses dans ce monde si étrangement secoué d’extraordinaires bouleversements.

Chacun sa civilisation

Ces bouleversements, justement, sont parfaitement conceptualisés par la présentation que fait Alastair Crooke de la démarche chinoise, qui se place sans aucun doute dans la perspective de « l’État-civilisation(nel) ». Il fait litière du « fantasme occidental » de la promotion de la postmodernité, privée de toute culture, satisfaite de son nihilisme et qui suffirait à séparer la Chine de la Russie pour la dissoudre dans les hyper-entreprises américanistes... Le phénomène qui se déroule sous nos yeux aveuglés ne répond nullement à cette définition.

« ...Le point le plus important ici est que les anciennes civilisations blessées se réaffirment : La Chine et la Russie en tant qu'États organisés autour de la culture indigène, – ce n'est pas une idée nouvelle. Il s'agit plutôt d'une idée très ancienne : “N'oubliez jamais que la Chine est une civilisation, – et non un État-nation”, répètent régulièrement les responsables chinois.

» Le passage à la situation d’État civilisationnel souligné par ces officiels chinois n'est pas un artifice rhétorique mais reflète quelque chose de plus profond et de plus radical. La transition culturelle fait des émules dans le monde entier mais son radicalisme inhérent est largement ignoré par le public occidental.

» Des penseurs chinois, tels que Zhang Weiwei, accusent les idées politiques occidentales d'être une imposture; de masquer leur caractère idéologique profondément partisan sous un vernis de principes prétendument neutres. Ils disent que le montage d’un cadre universel de valeurs, – applicable à toutes les sociétés, – est terminé.

» Nous devons tous accepter que nous ne parlons que pour nous-mêmes et pour nos sociétés.

» Cette situation s'explique par le fait que les non-Occidentaux voient clairement que l'Occident post-moderne n'est pas une civilisation en soi, mais plutôt quelque chose qui ressemble à un “système d'exploitation” déculturé (technocratie managériale). L'Europe de la Renaissance était composée d’États civilisationnels, mais le nihilisme européen qui a suivi a modifié la substance même de la modernité. L’Occident fait cependant la promotion de sa position sur les valeurs universelles, comme s’il s’agissait d’un ensemble de théorèmes scientifiques abstraits ayant une validité universelle.

» La promesse que les modes de vie traditionnels pourraient être préservés par l'application à grande échelle de ces normes occidentales intentionnellement laïques, – qui exigent d'être appliquées par la classe politique occidentale, – s'est avérée être une vanité fatale, affirment ces penseurs alternatifs.

» De telles notions ne se limitent pas à l'Orient. Samuel Huntington, dans son livre ‘The Clash of Civilizations’, a affirmé que l'universalisme est l'idéologie de l'Occident conçue pour affronter les autres cultures. Naturellement, tous ceux qui ne sont pas occidentaux devraient, selon Huntington, considérer l'idée d'un “monde unique” comme une menace.

» Le retour à des matrices civilisationnelles plurielles vise précisément à briser la prétention de l'Occident à parler, – ou à décider, – pour d'autres qu'eux-mêmes.

» D’aucuns verront dans ce défi russo-chinois une simple joute pour l’“espace” stratégique, une justification à leurs revendications de “sphères d’intérêt” distinctes.  Pourtant, pour comprendre son aspect radical, nous devons nous rappeler que la transition vers les États de civilisation équivaut à une résistance totale (sans guerre) de la part de deux civilisations blessées.  Les Russes (après les années 1990) et les Chinois (lors de la Grande Humiliation) le ressentent profondément. Aujourd'hui, ils ont l'intention de se réaffirmer, en clamant avec force : “Plus jamais ça !”

» Ce qui a “allumé la mèche”, c’est le moment où les dirigeants chinois ont vu, en termes très clairs, que les États-Unis n'avaient absolument pas l'intention de permettre à la Chine de les dépasser économiquement. La Russie, bien sûr, connaissait déjà le plan visant à la détruire. Il suffit d'un minimum d’empathie pour comprendre que la récupération d'un profond traumatisme est ce qui lie la Russie et la Chine (et l'Iran) dans un “intérêt” commun qui transcende le gain mercantile.  C'est “cela” qui leur permet de dire : “Plus jamais ça !”... »

Que reste-t-il de nos amours ?

Cette vision, qui nous convient parfaitement, – aussi bien l’analyse que l’argument, – laisse ouverte la question qui se dessine, comme on l’a vu plus haut : dans cette évolution, et alors qu’il semble devoir se désintègrer sous nos yeux, que reste-t-il du bloc-BAO ? On se surprendra peut-être nous-mêmes, – ce n’est pas sûr, – à écrire que cette question ne vaut pas vraiment pour l’Europe. Que l’UE se dissolve ou éclate, comme elle pourrait en prendre le chemin actuellement, n’est pas la mort de l’Europe mais la mort de l’UE, – et donc une fort bonne chose. Les pays d’Europe survivront, chacun à sa façon, certains en retrouvant peut-être des bonheurs passés.

C’est poursuivre la thèse que nous présentons dans le ‘Glossaire.dde’ consacré au ‘bloc américaniste-occidentaliste’. Pour nous, et contrairement aux apparences bien vigoureusement soutenues par tous les agents d’influence américanistes chez nous, notamment nos dirigeants et les élites-Système, les USA ne dominent nullement l’Europe d’une main de fer ; on le voit d’ailleurs plus haut, cette main de fer se révéler pleine de coton et bien rouillée... Les USA dominent l’UE, comme l’UE singe les USA, parce que les USA et l’UE c’est la même chose.

Le vrai problème qui se pose devant cette fantastique évolution, c’est celui de l’évolution des USA, – ou comment les USA vont-ils disparaître (parallèlement à l’UE, bien entendu) : par dissolution, par explosion, par digestion, par fornication ? En effet, les USA sont ce formidable simulacre d’attraction qu’est la modernité, – les USA sont la modernité même, et l’idée centrale qui apparaît est que la modernité ne résistera pas à l’émergence des États civilisationnels. Le problème sera aussi difficile à résoudre pour nous-Européens, pour les Européens qui ont cru à l’UE parce qu’ils croient aux USA, c’est-à-dire à la modernité, – parce qu’ils y “croient” comme l’on est catholique zélé ou musulman intransigeant.

Cela nous ramène à cette remarque essentielle, qui l’est toujours restée chez nous, depuis la fin de la Guerre Froide :

« Nous l'avons déjà écrit et nous le répétons avec force : il ne peut y avoir, aujourd’hui, d’événements plus important pour la situation du monde qu’une dynamique de dislocation des USA. Nous pensons que la crise actuelle est à la fois, et contradictoirement, formidablement amplifiée et formidablement bloquée dans sa compréhension par la puissance de la communication. Ce phénomène ne cesse de dramatiser et d’attiser les conditions de la crise tout en renforçant la pression du conformisme de la pensée dominante pour ne pas mettre en cause les éléments qui sont les fondements de cette crise.

» L’un des fondements est psychologique, avec le phénomène de fascination – à nouveau ce mot – pour l’attraction exercée sur les esprits par le “modèle américaniste”, qui est en fait la représentation à la fois symbolique et onirique de la modernité. C’est cela qui est résumé sous l’expression populaire mais très substantivée de American Dream. Cette représentation donnée comme seule issue possible de notre civilisation (le facteur dit TINA, pour “There Is No Alternative”) infecte la plupart des élites en place; elle représente un verrou d’une puissance inouïe, qui complète d’une façon tragique la “fascination de l’américanisme pour sa propre destinée catastrophique” pour former une situation totalement bloquée empêchant de chercher une autre voie tout en dégringolant vers la catastrophe. La fin de l’American Dream, qui interviendrait avec un processus de parcellisation de l’Amérique, constituerait un facteur décisif pour débloquer notre perception, à la fois des conditions de la crise, de la gravité ontologique de la crise et de la nécessité de tenter de chercher une autre voie pour la civilisation – ou, plus radicalement, une autre civilisation. »

L’idée centrale est bien entendu que, ni les liens transatlantiques, ni les USA eux-mêmes ne résisteront à une telle rupture qui signifie l’échec de l’universalisme américaniste-occidentaliste. Pour les Européens qui, depuis l’origine des USA, ont vécu pour une part dans un état de fascination des USA, – leur ‘American Dream’, – un tel événement sera un formidable choc psychologique, ressemblant au niveau individuel, à la rupture d’une passion amoureuse dévorante ; les Européens, prêts à toutes les soumissions pour conserver leur passion américaine... Qui dira ce que tout cela nous apportera ? En attendant...

Note de PhG-Bis : « Pour illustrer cette tragédie-bouffe à l’échelle cosmique et métahistorique qu’est le sort final des USA, qui est une question d’une véritable fascination amoureuse, PhG évoque cette phrase, ce vers de ce qui lui semble une excellente formule d’analyse psychologique justement de la fascination d’une passion amoureuse, dans le répertoire des chansons de Bob Dylan, ex-poète révolutionnaire des fameuses années 1960 devenu Prix Nobel, dans son ‘Don’t Think Twice, It’s All Right’ :

» “I gave her my heart but she wanted my soul”... »