L’UE à la CIA: eh, vous, là! Dites-nous ce qui se passe chez nous!

Comme on a beaucoup insisté de divers côtés, les ministres de l’UE se sont décidés à s’ébrouer, sur le mode : comment ? Des camps de la CIA chez nous? Qu’est-ce à dire ?

Scrogneugneu… D’où cette lettre que nous nous permettrons de juger surprenante, des ministres des affaires étrangères de l’UE, sous la signature de leur président en exercice (Jack Straw), adressée à Washington.

D’après EU Observer de ce jour : « EU member states have agreed to send a joint letter to the US government, asking for clarification about the alleged existence of CIA interrogation camps on EU territory. (...) The EU wants Washington to clarify media and NGO reports that its intelligence branch, the CIA, has detained top Al Qaeda suspects somewhere in eastern Europe.

(...)

» “If these reports were true, it is better that there is clarity” [Dutch foreign minister Bernard Bot told journalists on Monday (21 November),] adding that too many stories were “singing around” over the topic. Mr Bot said the letter would also state that the EU would be “concerned” if the reports were found to be correct.

» The move by EU governments follows criticism of too little action being taken by Brussels in this matter, with the commission shrugging off calls for a thorough investigation into the camps. Meanwhile, an increasing number of reports have emerged in the European press on CIA planes using European airports to carry terror suspects. »

Lettre étonnante, certes. Oui, c’est fort bien que les ministres, pressés de toutes parts de faire leur métier dans une occurrence si infâme, se préoccupent d’interroger nos amis d’outre-Atlantique. Maintenant, mesurez le ridicule de cette lettre, — ou bien, non, voyez plutôt la lumière qu’elle dispense sur la réalité de la souveraineté de nos dirigeants sur leurs propres pays. Nous demandons à Washington ce qui se passe sur nos territoires. Mr. Bernard Bot fronce les sourcils et va interroger Condi Rice à propos d’un avion de la CIA qui se serait trouvé à Schipol pendant deux jours la semaine dernière. Qui contrôle Schipol? Condi Rice? Langley, CIA? Mr. Bernard Bot ne peut-il interroger de façon comminatoire la direction néerlandaise de Schipol?

Ah oui, on comprend. Si Mr. Bot avait fait cela et avait obtenu de Schipol la réponse, par ailleurs évidente, que, oui, effectivement, un avion de la CIA a transité à Schipol la semaine dernière… Qu’est-ce qu’il ferait alors, Mr. Bot? Il rappellerait son ambassadeur à Washington? On préfère envoyer une lettre. On croira Washington « at face value », comme dit Solana, lorsque Washington nous dira que, — c’est OK, tout va bien sur vos territoires européens, la CIA a vérifié.

Mis en ligne le 22 novembre 2005 à 17H14