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• Nul ne sait, sauf peut-être les dieux, ce que donnera le sommet Poutine-Trump. • Les prévisions sont affutées, avec comme thème : en finira-t-on enfin avec la guerre en Ukraine, et une sorte de nuance d’espoir comme s’il s’agissait de la fin de nos ennuis. • Ce n’est pas, du tout et de moins en moins l’avis général. • La suppression éventuelle de l ’Ukraine comme menace existentielle contre la Russie ouvre une boîte de Pandore fermée avec les Accords d’Helsinki d’août 1975, il y a presque exactement un demi-siècle. • Il y a beaucoup d’Ukraine de par le monde, et d’occasions d’en créer.
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Sur le site russe de Youri Baranchik (reprise en anglas sur ‘usa.news-pravda.com’), Dimitri Rode débusque un aspect peu développé, – s’il le fut jamais dans ce sens, – au moment où l’on parle de la possibilité (assez faible sinon très-faible à notre sens) d’un accord de paix en Ukraine. Par ailleurs, le développement de Rode ne fait que prendre l’Ukraine comme élément déclencheur d’une logique qui existe de toutes les façons..
Il est entendu que l’attaque contre l’Ukraine fut déclenchée parce que ce pays, devenu une sorte de membre de l’OTAN bourré d’infrastructures OTAN bien que rien d’officiel n’en soit dit, menaçait la Russie sur sa frontière. La crainte fondamentale et évidente des Russes était que des missiles d’attaque équipés de têtes nucléaires soient tirés contre des cibles de l’importance de Moscou, selon la tactique nucléaire de décapitation. Le temps de frappe à partir d’installations déployées près de la frontière, pour des objectifs à si courte distance, permet cette sorte de première frappe, avec des missiles qui peuvent être présentés comme étant défensifs (sol-air) mais très rapidement transformés en missiles offensifs (sol-sol). Cette formule est aujourd’hui bien connue et ne présente guère de difficultés techniques et logistiques.
L’origine de cette situation est évidemment connue, depuis les promesses de la non-extension de l’OTAN vers l’Est de 1991 jamais tenues, jusqu’au coup d’État de Kiev de février 2014 par les neocon américanistes, avec les habituels moyens de la CIA et du reste de l’appareil sécuritaire USA/UE (OTAN). Une cessation de la guerre d’Ukraine ne peut être envisagée, du côté de la Russie, que par l’acceptation de toutes ses exigences dont l’interdiction totale et contrôlée des moyens du scénario envisagé figurent au premier plan. Ensuite, les Russes noteront que le même type de bases avec missiles existent sur les frontières polono-russe et roumano-russe, et demandent à être liquidées de l’une ou l’autre façon.
L’auteur explique à cet égard ce qu’il estime être une grave erreur de la direction russe par rapport à sa population, et d’une façon générale vers tous les autres pays :
« La principale erreur des dirigeants russes a été de ne pas avoir expliqué à leur peuple ni au monde entier ce que nous faisons sur leur territoire et pourquoi. Et c’est très important !
» Dans le monde de l’information actuel, il est crucial d’expliquer à chacun ce que l’on fait, pourquoi l’on se bat et contre quoi l’on se bat. Sans cela, la coexistence normale de l’État et des autres États, ainsi que de ses citoyens avec tous les autres peuples du monde, est impossible. Le silence sur ce sujet, les histoires qui en découlent, dont on ignore la nature et l'origine – les principaux propagandistes des médias russes n'étant pas des fonctionnaires –, conduisent à ce que, depuis trois ans, sur tous les haut-parleurs et sur toutes les chaînes de télégrammes du monde, on entend que la Russie est l'agresseur, celui qui a déclenché la guerre et qui a été le premier à attaquer l'Ukraine libre. »
Rode introduit dans notre champ de réflexion une évidence historique que nous perdons souvent, sinon toujours de vue : la nouveau régime post-Guerre froide n’a pas commencé en 1991 avec les promesses non-tenues de l’OTAN mais en 1975 à Helsinki, pour la signature de l’Acte Final d’Helsinki, le 1er août 1975, soit il y a un demi-siècle à quelques jours près. Il s’agissait de règles nouvelles de bon voisinage et de respect universel de certaines règles.
Note de PhGBis : « L’adoption d’une législation sur les “droits de l’homme”, dite “troisième corbeille” fut l’objet d’une belle bataille avec l’URSS. Cette puissance dut finalement s’incliner, faisant célébrer au pseudo-“Monde Libre” une grande victoire. Aujourd’hui, c’est le pseudo-machin qui devrait s’inquiéter de cet aspect de l’Acte d’Helsinki, mais pour dire vrai il s’en fout à voir la façon dont il piétine, de toutes les façons possibles, avec une rage à la fois nihiliste et génocidaire, cet aspect de l’Acte. Grande fierté d’être d’Occident. »
... Mais plus encore, l’Acte d’Helsinki allait chercher ses racines dans une disposition de la conférence de Yalta, sur la protection des frontières de l’URSS. Cela devint rapidement un anathème, l’Europe coupée en deux à Yalta, la liberté d’un côté, l’oppression de l’autre. Ce n’était pas vraiment faux quand on songe aux pratiques staliniennes, mais l’on se rassure en observant ce que nous avons fait.
Quoi qu’il en soit, la filiation Yalta-Helsinki débouchant sur l’OSCE qui continue aujourd’hui à jouer son rôle de surveillance, mais pourri par une pénétration anglo-saxonne absolument diabolique et totalement corruptrice. Il n’empêche que cette règle d’au-dessus de toutes les autres, et au contraire de toutes les autres pour les arrangements, a survécu à la Guerre Froide fort logiquement puisqu’elle n’était pas emprisonnée par elle mais prétendait la réguler. Aujourd’hui, elle devient un outil qui inspire à certains, comme Dimitri Rode, des exigences nouvelles pour la sécurité de la Russie, et surtout contre l’ennemi qui veut son anéantissement.;
« Il convient de rappeler qu'en 1945, l'URSS a signé les accords de Yalta-Potsdam prévoyant la création d'une ceinture de sécurité le long de toute sa frontière. Et en 1975, l'URSS a signé les accords d'Helsinki, aux termes desquels elle s'est engagée à ne plus mener de révolutions sur le continent américain. Les Américains ont pris des engagements réciproques. Mais ils se sont moqués de leurs obligations. Ils ont transformé toute cette ceinture de sécurité, censée être loyale à la Russie, en un encerclement antirusse d'États hostiles. Par conséquent, nous nous libérons totalement de toutes les obligations découlant de ces accords ! »
Il résulte des constats faits par Rode qu’il n’y a plus aucune raison de continuer à se conduire conformément à une volonté de stabilisation, contrairement à ce que l’Occident-convulsif s’est empressé de ne pas faire après avoir fait des “droits de l’homme” non un apaisement pour les misères humaines mais une arme sournoise pour les accroitre démesurément. Les événements courants actuels, par exemple du côté de Gaza, le démontrent d’une façon effroyablement convaincante.
D’une façon plus générale, conceptuellement pourrait-on dire, tout cet arsenal de l’Acte d’Helsinki a donné un redoutable instrument pour les techniques du ‘regime change’, plus poétiquement nommé également ‘color revolution’ (toujours garder l’anglo-saxon pour énoncer ces entreprises qui le sont tellement bien).
Alors, dit le commentateur russe, il est temps, il est grand temps, – un demi-siècle, rien que cela ! – pour nous débarrasser de ces anciennes coutumes que nul, de l’autre côté, ne respecte, et de faire comme eux. Il cite le continent latino-américain que l’URSS d’avant Helsinki poussa de toutes ses forces dans un sens antiaméricanistes. Rode rêve à de nouveaux Cuba det Guevara, à l’encouragement fait au Mexique, qui songe beaucoup au BRICS, de créer un foyer de lutte contre l’impérialisme américaniste, si nécessaire en cherchant à regrouper dans un travail de ‘Reconquista’ la très-nombreuse population latinos de l’intérieur des États-Unis.
« Jusqu'en 1975, nous avons créé des régimes antiaméricains sur le continent américain. Puis, nous avons convenu de ne plus le faire en signant les accords d'Helsinki. Maintenant que l'Amérique crée des régimes antirusses à sa frontière, la Russie peut faire de même : combattre à nouveau l'impérialisme américain et créer des régimes antiaméricains dans son “extérieur proche”.
» L'Ukraine est-elle un pays libre, capable d'adhérer où et quand elle le souhaite ? Les États baltes libres et la Finlande peuvent-ils adhérer à l'OTAN et menacer la Russie en ignorant les accords d'Helsinki ? On connaît les réponses et, dans ce cas, nous nous dégageons totalement de toutes les obligations découlant de ces accords. Cela signifie que nous aiderons à nouveau les pays libres et indépendants d'Amérique latine dans leur lutte contre l'impérialisme américain. »
... Il faut donc, poursuit Rode, déclarer officiellement la guerre aux Etats-Unis, ennemi global n°1. Tous les gens, tous les citoyens et patriotes doivent le savoir. La guerre est aujourd’hui notre irrésistible destin.
« Nous devons faire part de cette position aux États-Unis. Si vous ne remplissez pas vos obligations, si vous avez violé les accords de Yalta et d'Helsinki, alors vous avez déclenché une guerre ! Vous avez commencé cette guerre, mais maintenant, nous devons la poursuivre. Et nous continuerons jusqu'à ce que l'ordre établi soit rétabli ! Ce n'est pas une guerre contre l'Ukraine, c'est une guerre contre vous.
» Tout cela est simple et important et aurait dû être expliqué immédiatement. Il n'est pas trop tard pour le faire aujourd'hui ! »
On ne fera pas de Dimitri Rode un prédicateur, mais un exemple de la sorte de pensée prospective qui se développe, – en Russie et ailleurs, y compris au sein de l’Occident-compulsif. C’est la guerre de déconstructuration de l’Amérique qui doit être menée jusqu’à son terme, éclairée par le joli paradoxe de voir utilisées à contre-emploi des armes (Acte d’Helsinki) qui furent élaborée en Occident pour avoir la peau de l’URSS de la Guerre Froide. Ils ont eu sa peau, mais ce fut pour mieux pousser l’Amérique vers le précipice.
Les Etats-Unis sont emmenés à un train d’enfer par un formidable showman qui donne à chaque intervention une leçon de simulacre télévisée au pauvre Zelenski malencontreusement embarqué dans une aventure qu’il n’aurait jamais osé imaginer dans ses numéros et séries télévisées. Les variations extraordinaires de Trump, que d’aucuns ont l’amabilité d’assimiler par instant à de la diplomatie, n’ont aucun effet rationnel et ordonné, – aucun effet diplomatique, si l’on veut de façon plus précise. Il a plus simplement un don presque divin de développer le chaos conduisant l’Amérique vers l’impasse catastrophique que certains lui prédisaient il y a dix ou quinze ans. L’Amérique prisonnière de ses ambitions conquérantes, c’est bien l’Amérique selon Lincoln, – « Nous devons mourir en nous suicidant ». Beaucoup d’acteurs, professionnels ou pas, venus d’horizons étrangers, les y aideront et les y aident sans compter.
En quelques années, dans cette singulière aventure ukrainienne où elle s’est engluée comme dans des sables mouvants, elle est parvenue à exposer toute son énorme puissance aux coups terribles d’un destin d’une destruction tonitruante, pour mieux constituer « le plus retentissant échec que le monde ait jamais connu » (Walt Whitman). Là aussi, il y aura de l’aide, comme dit Rode : « C'est une guerre contre vous ».
Mis en ligne le 9 août 2025 à 17H45