Le ‘ClownWorld’ d’Arestovitch

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Le ‘ClownWorld’ d’Arestovitch

• Allez donc imaginer ça : Kiev s’alliant à Moscou pour aller demander des comptes à l’Occident-dépressif ! • Eh bien, Alexei Arestovitch, ancien conseiller ultra-n°1 de Zelenski, aujourd’hui traître coutumier du même Zelenski, l’imagine tellement bien qu’il vous détaillera tous les aspects de son plan en gros plan et avec sous-titres si vous le lui demandez. • Bien sûr, tout ça ne fait pas sérieux, et le brillant universitaire turco-allemand Tarik Cyril Amar en fait brillamment le procès. • Mais allez savoir, avec le ‘ClownWorld’ de Kiev.

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Le texte que nous présentons ci-dessous est singulier à plus d’un titre, – pour son contenu, pour sa présentation et son orientation, pour sa publication. La vedette en est Alexeï Arestovitch, ancien conseiller très proche de Zelenski, qui a repris sa liberté, qui n’a cessé d’évoluer d’une façon singulière, selon des tracés peut-être sinueux et toujours surprenants, pour en arriver à la proposition qu’il fait, à la fin décembre, de rien moins qu’une alliance entre la Russie et l’Ukraine contre les États-Unis et l’Ouest-compulsif en général.

L’auteur du texte, très long, sur cette intervention d’Arestovitch est Tarik Cyril Amar, qui est présenté de la sorte (il est bon de garder l’exact intitulé de la chose) par l’éditeur de son texte (RT.com), avec notre commentaire :

« [H]istorien allemand travaillant à l'Université Koç d'Istanbul, sur la Russie, l'Ukraine et l'Europe de l'Est, l'histoire de la Seconde Guerre mondiale, la guerre froide culturelle et la politique de la mémoire...  – “citoyen allemand d’origine turque se montrant, sur son excellent site comme un brillant analyste de politique extérieure clairement et acerbement critique des USA. Sa propre présentation sur tweetX est des plus remarquables : ‘Néo-Gaulliste, de gauche. PAS avec l’Ouest”. »

L’auteur se montre impitoyable pour Arestovitch. Il ne lui passe rien, et d’abord la nouvelle “idée géniale” de ce monte-en-l’air de politiques aux multipless facettes : une alliance entre l’Ukraine et la Russie pour “poursuivre” les États-Unis et l’Occident, – et juridiquement parlant, devant une instance juridique, internationale sans doute ! s’exclame Amar. Il rigole et il fulmine à la fois, – il prend peut-être un peu trop au sérieux (nous voulons dire “au mot”) Arestovitch :

« ...Poursuivre l’Occident ? Où ? Dans quel tribunal ? Le même Occident qui n’a aucun problème avec le fait que l’Ukraine ou les États-Unis (ou les deux) fassent exploser les pipelines énergétiques vitaux de l’Allemagne – et de l’UE ? Ou l’Occident qui ignore la complicité de ses dirigeants dans le génocide israélien à Gaza, un crime explicitement proscrit – la complicité tout autant que l’acte lui-même – dans l’article III (e) de la Convention des Nations Unies sur le génocide de 1948? »

D’accord, Arestovitch est un rigolo, un simulateur, un clown grotesque, – mais dans un ‘ClownWorld’, comme dit Christoforou, dont Biden, Zelenski, Ursula & Cie ne sont pas les moins grotesques. Par conséquent, Arestovitch a bien son mot à dire, même s’il est bien le personnage que décrit Amar, et justement parce qu’il est ce personnage-là, si représentatif... D’ailleurs, et paradoxalement, il le conseille lui-même, Amar : “Il faut écouter cet esprit fertile...”

« Mais attendez, il faut écouter les considérations de l’esprit fertile qui a produit cette idée très originale. Il s’agit d’Alexeï Arestovitch, ancien conseiller du président ukrainien Vladimir Zelenski. Pas nécessairement (encore) connu en dehors de l'Ukraine, Arestovich était, jusqu'à très récemment, un homme d'une influence extraordinaire à Kiev, et l'a utilisé pour promouvoir énergiquement la guerre par procuration à laquelle il aimerait maintenant mettre fin et ensuite rejeter la faute sur l’Ouest seul. »

... Effectivement, il faut écouter Arestovitch de la même façon que l’Occident-compulsif a, pendant une quinzaine de mois, écouté Zelenski comme s’il s’agissait de Jesus au Mont des Oliviers. Donc, et en dépit du persiflage et du dégoût justifié d’Amar, il faut écouter les loufoqueries que nous sort Arestovitch. On comprend que Tarik Cyril Amar, avec son brio, son talent, ses connaissances et son espèce d’humour qu’ont les universitaires du ‘Sud Global’ qui n’ont pas le trou du cul corseté par le fil de fer des féministes et de la brigade des mœurs de la police wokeniste, – on comprend qu’il tire à boulets rouges sur ce clown d’Arestovitch.

Mais on comprend moins bien qu’il ne prenne pas en compte, lui Amar qui le sait bien, qu’un Arestovitch est malgré tout écouté et pris au sérieux ! Il l’est par l’armée des bureaucrates et experts arrogants et puants de la CIA et du MI6, du Foreign Office et du State Department, du Council of Foreign Affaires et du RUSI de Chatam House, des ‘Five Eyes’ et du Pentagone qui continuent à se prendre eux-mêmes au sérieux en fabriquant des simulacres à deux-balles et des montages de bandes dessinées hollywoodiennes dans cet océan de tueries, de merdes sordides, d’hypocrisies et du corruption, et de clowneries surtout, de clowneries grotesques et entremêlées, – on ne comprend pas qu’il ne comprenne pas, lui Amar, que jamais autant l’on ne fut, et de plus en plus chaque année, en pleine tragédie-bouffe ! Jamais autant !

La conclusion de Amar sur l’absurdité de croire que l’on peut imposer l’idée que l’Ouest-moraline doit beaucoup de compensations à la Russie et l’Ukraine pour tout ce qu’il a provoqué de pertes et de dégâts dans cette guerre nous paraît une spéculation un peu inutile. C’est là où la verve de haute volée du professeur d’université nous paraît être dépensée en vain, car le débat n’est pas sur ce point. Il est plutôt, involontairement pour Amar même si cela va dans le sens qu’il favorise, dans cette conclusion qui nous dit que, quoiqu’il arrive, c’est l’infamie de l’Occident qui sera mise en évidence...

« Tous deux [Arestovitch et l’intervieweuse Latynina] n'ont pas compris l'essentiel : ce que l'Occident vous doit ou ne vous doit pas n'a pas d'importance. L'Occident ne vous donnera toujours que ce qui est le mieux pour l'Occident (et cela signifie généralement les États-Unis). Et lorsque ce n'est “rien”, c'est ce que vous obtiendrez. Si seulement les anciens bellicistes arrogants comme Arestovich pouvaient enfin commencer à faire face à la réalité. Toute la réalité. »

Par conséquent et pour en finir sur le fond et la forme du texte, l’agressivité si intelligente de Tarik Cyril Amar à l’encontre d’Arestovitch a pour effet paradoxal d’attirer notre attention sur les balivernes de l’escroc, et même, – non pas de les prendre au sérieux, non, mais de prendre certaines auditions et attentions de certains autres au sérieux. Le récit plein de verve et de persiflage justifié de Tarik Cyril Amar nous conduit à penser qu’il y a, dans le discours d’Arestovitch et dans la place qu’on lui accorde, assez d’air et d’aire à la fois pour qu’on se dise que par certains côtés il pourrait bien être pris au sérieux.

Là-dessus s’inscrit une interrogation que nous nous faisons à nous-mêmes, avec notre expérience du journalisme et notre pratique de la technique des habitudes journalistiques de RT.com. La page d’accueil (“page une” ou “la une” en langage antédiluvien) de RT.com est structurée autour d’une double colonne centrale où se trouvent (sous forme de titre ou de phrase d’accroche sur une/deux lignes) les derniers textes mis en ligne, en général dix-onze, qui défilent à mesure. Il est extrêmement rare que l’un, d’entre eux y tiennent une place plus des trois-quarts d’une journée. Au-delà, si tel texte y est maintenu, il s’agit de la volonté des metteurs en page, c’est-à-dire de la direction, de laisser l’accroche du texte très visible. L’accroche du texte d’Amar sur Arestovitch a été mis en ligne, et donc en “une” le 30 décembre 2023 autour de 17H00. Il vient, à 12H00 ce jour du 2 janvier 2024, de disparaître de ces colonnes d’accroches où il est donc resté près de trois jours. C’est exceptionnel et indique un fort intérêt de la direction pour laisser ce texte très visible, très disponible.

... Non pas, à notre sens, qu’ils croient nécessairement à Arestovitch et à son idée précisément ; plutôt parce que, quelque part dans la direction russe, existe l’idée d’une sorte d’alliance entre la Russie et l’Ukraine (ce qu’il restera de l’Ukraine après que la Russie aura annexé sa partie Est) une fois Zelenski éliminé, et qu’il est bon que cette idée, Arestovitch ou pas, soit lue et entendue par le plus grand nombre de personnes et de lecteurs, et ainsi inscrite dans leur esprit dans la case des “possibles”

Même dans notre ‘ClownWorld’, – que dis-je, surtout dans notre ‘ClownWorld’ ! Rien ne doit être laissé au hasard, de toutes  ces incongruités-bouffes et choses baroques, fantasques, branquignolesques, funambulesques, – hurluberlu et compagnie... Ici ou là se trouve peut-être un schéma d’une possibilité à venir.

dedefensa.org

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Kiev avec la Russie contre l'Occident ?

L’Ukraine doit parvenir à un accord avec le président russe Vladimir Poutine, puis Kiev et Moscou doivent s’unir pour poursuivre l’Occident en justice.

Vous pensez peut-être que l’idée ci-dessus est plutôt radicale et inhabituelle. Poursuivre l’Occident ? Où? Dans quel tribunal ? Le même Occident qui n’a aucun problème avec le fait que l’Ukraine ou les États-Unis (ou les deux) fassent exploser les pipelines énergétiques vitaux de l’Allemagne – et de l’UE ? Ou l’Occident qui ignore la complicité de ses dirigeants dans le génocide israélien à Gaza, un crime explicitement proscrit – la complicité tout autant que l’acte lui-même – dans l’article III (e) de la Convention des Nations Unies sur le génocide de 1948 ?

Mais attendez, il faut écouter les considérations de l’esprit fertile qui a produit cette idée très originale. Il s’agit d’Alexeï Arestovitch, ancien conseiller du président ukrainien Vladimir Zelenski. Pas nécessairement (encore) connu en dehors de l'Ukraine, Arestovich était, jusqu'à très récemment, un homme d'une influence extraordinaire à Kiev, et l'a utilisé pour promouvoir énergiquement la guerre par procuration à laquelle il aimerait maintenant mettre fin et ensuite rejeter la faute sur l’Ouest seul.

Aspirant-universitaire raté et très vite dégagé, psychologue populaire à deux-balles (du genre comment manipuler les autres pour réussir), ancien militaire et presque certainement aussi officier du renseignement, blogueur et gourou de la géopolitique en herbe avec des opinions très adaptables et, bien sûr, Assistant de Zelenski de 2020 à 2023, Arestovich n'est pas seulement un individu mais un syndrome : il représente un type social, l'escroc intelligent mais psychopathiquement dénué d'empathie qui a réussi à exploiter impitoyablement la désorientation laissée par les sociétés post-soviétiques avec un cynisme froid. Cela aurait fait rougir Machiavel.

Aujourd’hui, il déplore que les Ukrainiens et les Russes s’entretuent en masse dans quelques villes de province. “Et pour quoi ?”, se demande-t-il. La réponse d'Arestovich est du genre de celle qui, il n'y a pas si longtemps, vous aurait valu d'être radié en Occident en tant que larbin et complice de Poutine : “Nous avons satisfait les grands patrons des obkoms de Washington et de Bruxelles – [un terme désormais péjoratif du lexique soviétique, désignant une administration de district] – qui se tiennent autour de nous et applaudissent, regardant deux singes armés de couteaux s’affronter”.

Le virage à 180 degrés d’Arestovich est une autre absurdité produite par la politique théâtrale de l’élite de Kiev. Mais, aussi grotesque que cela puisse paraître d'entendre cet ancien ultra-belliciste parler de paix et de qui est à blâmer, le contraste saisissant entre le vieux chauvin anti-russe Arestovitch et le nouveau, aspirant ami de la Russie et ennemi de l’Occident-collectif Arestovich fournit une mesure d’une précision déprimante du constat d’irresponsabilité de la politique ukrainienne sous le régime autoritaire de facto de Zelenski.

En 2019, c'est Arestovich qui a fameusement prédit une guerre importante et dévastatrice (au-delà du conflit qui a débuté en 2014) avec la Russie à propos de la tentative de l'Ukraine de rejoindre l'OTAN. Cela a finalement eu lieu en 2022 et sa capacité remarquable de prévision a conduit certains commentateurs occidentaux naïfs à s'extasier sur cette capacité remarquable de prévision.

Sauf qu’Arestovich n’a pas vraiment prédit la grande guerre de 2019. Au lieu de cela, il l’a vendue du mieux qu’il a pu. Écartant toute possibilité de mettre fin pacifiquement au conflit de moindre ampleur alors en cours avec les républiques du Donbass (Minsk II, ça vous tente ?), il a utilisé les arguments habituels sans fondement (“Poutine veut reconstruire l’Union soviétique, détruire l’OTAN”, “détruire L'UE, dominer l'Europe” et ainsi de suite, toutes les conneries alors à la mode d'Annalena Baerbock à Tim Snyder) pour présenter une escalade vers une guerre plus grande comme absolument inévitable. Non seulement Minsk II n'apparaissait guère sur le radar de ce grand stratège fantastique, mais également l’impossibilité de la neutralité pour l'Ukraine, induisant ses partisans en erreur en leur faisant croire que l'OTAN accepterait facilement (“tout est très simple maintenant”) l'Ukraine, même si elle avait des conflits territoriaux non résolus avec des insurgés internes ou avec la Russie.

Dans le même temps, Arestovitch présentait la future grande guerre comme une grande chance pour l’Ukraine. Après avoir posé la fausse alternative – du moins à l’époque – soit de rejoindre l’OTAN après cette grande guerre contre la Russie (qu’il pensait imprudemment que l’Ukraine gagnerait), soit d’être absorbé par Moscou dans un avenir proche, il a recommandé sans réserve la voie numéro un : la guerre avec la Russie. Même trois guerres successives de ce genre lui semblaient à la fois inévitables et souhaitables ; à l’époque, c’était sa vérité.

Enfin, il a également invité les Ukrainiens à se livrer au fantasme favori de l’Occident, à savoir que la Russie pourrait s’effondrer et subir un changement de régime. “Une sorte de libéraux” arriverait au pouvoir, a-t-il affirmé, et dirait “nous sommes à nouveau un beau pays”. Cette partie de son discours bidon en faveur d’un “non” catégorique à la diplomatie, au compromis et à la paix est particulièrement ironique aujourd’hui. Il vient d’annoncer un revirement total et complet dans une interview avec la journaliste et présentatrice russe Ioulia Latynina.

Latynina est, bien sûr, l’incarnation du genre de “libérale” (ou de “libertaire”, comme elle préfère être qualifiée) que presque aucun Russe ne peut supporter, et ce pour d’excellentes raisons. Après avoir reçu le “Prix de la liberté” en 2008 du Département d’État américain, elle a été une pourvoyeuse insatiable de la propagande de la droite du système occidentaliste, allant de la négation du réchauffement climatique, en passant par la conclusion que les pays pauvres n'ont pas besoin d'avoir trop de démocratie, jusqu'à une islamophobie presque obsessionnelle.

Même la bonne vieille Europe est encore trop indulgente envers les gens simples à son avis. Tout le charabia “social-démocrate” sur les droits de l’homme, etc. ne suffira pas à Latynina ; ses véritables “valeurs” européennes concernent la propriété, l’innovation et la concurrence. Voilà donc pour ces fantasmes de changement de régime. Arestovitch pariait sur le mode Latynina. Il n’est pas étonnant que la plupart des Russes, y compris ceux qui critiquent le président Vladimir Poutine, disent “n’importe qui sauf ça”.

Pourtant, lors de leur récent tête-à-tête sur YouTube, l'escroc ukrainien et la libertaire russe n'étaient pas entièrement d'accord. Latynina a estimé que l’idée d’Arestovich de s’associer à la Russie pour affronter les États de l’OTAN était quelque peu vouée à l’échec. De plus, aussi admirative qu'elle soit de l'Occident, elle a dû lui rappeler qu’il [l’Occident] “ne doit rien à l’Ukraine”. Emporté par sa nouvelle idée, Arestovitch a insisté sur le fait que l’Ouest devait effectivement quelque chose à l’Ukraine.

Tous deux n'ont pas compris l'essentiel : ce que l'Occident vous doit ou ne vous doit pas n'a pas d'importance. L'Occident ne vous donnera toujours que ce qui est le mieux pour l'Occident (et cela signifie généralement les États-Unis). Et lorsque ce n'est "rien", c'est ce que vous obtiendrez. Si seulement les anciens bellicistes arrogants comme Arestovich pouvaient enfin commencer à faire face à la réalité. Toute la réalité.

Tarik Cyril Amar

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