Le bloc-BAO contre Trump

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Le bloc-BAO contre Trump

11 novembre 2016 – Lorsque cet article qui nous sert de référence de départ pour ce texte parle des “European Politicians Terrified”, il parle de la vraie terreur, nullement celle de Daesh qui entretient leur narrative mais celle de l’élection de Donald Trump. Le constat de ZeroHedge.com (alias-Tyler Durden) est que oui, nos dirigeants, nos élites-Système sont terrifiés, mais principalement par le risque de contagion, la peur des “cygnes noirs” dans autant d’élections essentielles qui s’annoncent pour les pays européens. Le texte daté du 9 novembre dans la nuit (10 novembre pour nous) présente une longue série des réactions diverses des dirigeants-Système en Europe, ceux qui sont alignés non pas sur la ligne US mais sur la ligne globalisation-Système... Le “patron”, aujourd’hui plus que jamais avec Trump à la Maison-Blanche, ce n’est pas Washington mais bien le Système ; et nous écrivons cela précisément pour l’Europe (pour l’UE), pour bien marquer qu’il faut absolument ôter de son esprit l’antienne d’une Europe soumise aux USA, pour libérer cet esprit d’une référence de réflexion trompeuse qui empêche d'identifier immédiatement, selon les circonstances, l'“ennemi principal” et les alliés temporaires pivant devenir alliés principiels.

Voici la partie introductive du texte de Durden/ZeroHedge.com :

« First it was Brexit, then there was Trump. Two "shocking" events that nobody in the media, markets or punditry could admit could possibly happen. They happened... and that's just the beginning - as we showed last night, the political calendar over the next two years is only heating up, with countless potential "black swan" events - often involving nationalist tendencies or outright separatism, and further hits to the establishment status quo - on the horizon.

» Most of these events take place in Europe, a powderkeg of simmering anger and resentment built up over the centuries of artificially enforced borders cutting across religions, ethnicities and cultures, which has only been swept under the rug over the past several decades with the help of an artificial customs and monetary union which is increasingly unstable. As such, even the smallest domino can push the entire continent into a state of terminal socio-economic collapse.

» And both Europe, and the globalist establishment, know this.

» Which is why back in May, when Donald's Trump's victory in the U.S. presidential election seemed the remotest of possibilities, a senior European official took to Twitter before a G7 summit in Tokyo to warn of a "horror scenario".

» Imagine, said the official quoted by Reuters, if instead of Barack Obama, Francois Hollande, David Cameron and Matteo Renzi, next year's meeting of the club of rich nations included Trump, Marine Le Pen, Boris Johnson and Beppe Grillo: truly a horror for an exclusive group of aloof elitists who enjoy sneering on the same people whom they take advantage of every single day.

» A month after Martin Selmayr, the head of European Commission President Jean-Claude Juncker's cabinet made the comment, Britain shocked the world by voting to leave the European Union. Cameron stepped down as prime minister and Johnson - the former London mayor who helped swing Britons behind Brexit - became foreign minister. Now, five months later, with Trump's triumph over his Democratic rival Hillary Clinton, the populist tsunami that seemed outlandish a few months ago is becoming reality, and the consequences for Europe's own political landscape are potentially huge.

» This is why Europe is suddenly terrified that what until June seemed impossible, is now all too likely: in 2017, voters in the Netherlands, France and Germany - and possibly in Italy and Britain too - will vote in elections that could be coloured by the triumphs of Trump and Brexit, and the toxic politics that drove those campaigns.

» And, as Reuters writes, the lessons will not be lost on continental Europe's populist parties, who hailed Trump's victory on Wednesday as a body blow for the political mainstream. "Politics will never be the same," said Geert Wilders of the far-right Dutch Freedom Party. "What happened in America can happen in Europe and the Netherlands as well."

» Just like after Brexit, French National Front founder Jean-Marie Le Pen was similarly ebullient. "Today the United States, tomorrow France," Le Pen, the father of the party's leader Marine Le Pen, tweeted. [...]

» Daniela Schwarzer, director of research at the German Council on Foreign Relations (DGAP), said Trump's bare-fisted tactics against his opponents and the media provided a model for populist European parties that have exercised comparative restraint on a continent that still remembers World War Two. "The broken taboos, the extent of political conflict, the aggression that we've seen from Trump, this can widen the scope of what becomes thinkable in our own political culture," Schwarzer said.

» Perhaps it is not the "political conflict" or aggression from Trump that Daniela is worried about; perhaps it is the threat of a truly democratic vote in a world in which all the benefits of crony capitalism and suppressed representation have gone exclusively to the 1%, something which is now openly known and resented by the rest of the increasingly angry population. And, as both Brexit and Trump have shown, an angry, education population is the worst possible enemy of any elitist, globalist clique... »

On notera donc que la “terreur” signalée ici ne concerne pas le président Trump à la Maison-Blanche mais la contamination du “modèle Trump”. Le concept “Trump à la Maison-Blanche” est une autre affaire qui ne terrorise pas mais au contraire suscite la colère des “amis européens”. La chose était déjà explicité à propos de la lettre Junker-Tusk envoyée au président-élu Trump, lettre dont nous écrivions hier qu'elle pose les conditions pour qu'une présidence-Trump soit acceptable au sein du bloc-BAO : « Dans cette tâche exaltante, le parti républicain [US] est soutenu, encouragé, salué par les amis extérieurs, notamment l’Union Européenne qui s’est manifestée par une belle lettre des pieds-nickelés Junker et Tusk saluant la victoire de Trump à condition que ce soit une victoire de la démocratie, de “nos valeurs communes”, du libre-échange, de l’hyperlibéralisme, de la globalisation et ainsi de suite. Démarche classique de récupération... »

Certes, “démarche classique de récupération”, mais à partir de laquelle il faut tirer des réflexions en accord avec ce que nous esquissons plus haut ; il s’agit de montrer qu’il est question de bien plus que notre première réflexion qui nous conduisait à la rédaction de cette remarque ; ce n’est pas seulement une “démarche classique de récupération” pour tenter d’“amadouer” Trump.

A première vue, certains pouvaient en effet y voir une maladresse : drôle de façon d’“amadouer”, alors qu’il faut marquer un certain respect nécessaire avec le président de ce qui serait le pays-leader sur lequel tout le monde, en Europe, devrait s’aligner au bout du compte, at the end of the day ; drôle de façon d’“amadouer” en adjoignant aux félicitations une leçon de morale aussi impérative... C’est une orientation complètement différente, sinon opposé, que nous proposons dans notre interprétation complémentaire, après réflexion dans un autre contexte : cette lettre est un avertissement, une première sommation faite au président-élu des USA de s’aligner, – non sur l’Europe (l’UE), certes, mais disons sur le Système en général, dont l’UE devient le principal opérateur et le principal serviteur opérationnel puisque les USA sembleraient devenir “trumpistes”, – puisque les électeurs ont commis ce sacrilège proche de l’inexpiable d’élire Trump ... A moins, à moins, et c’est ce qu’enjoint la lettre comme une sorte d’ultimatum dans l’esprit de la chose, que Trump s’aligne en virant à 180 degrés et agisse selon les immuables consignes-Système.

(Certes, comme on le verra plus bas, on peut dire éventuellement, et même on doit parler, selon les circonstances, de consignes “globaliste” aussi bien que de “consignes-Système”, et d’autres concepts encore, toujours selon les circonstances. Nous employons notre concept-roi “Système” parce que toutes ces interventions, circonstances, etc., dont nous parlons, renvoient finalement au Système, et pour l’opposition, à l’antiSystème. Comme d’habitude, nous simplifions sans réduire, parce que cet affrontement colossal a effectivement cette simplicité : Système versus antiSystème. Dans le cas de la lettre à l’UE, ce ne sont pas des vassaux qui s’adressent [maladroitement] à leur suzerain mais des représentants du Système qui lancent un premier avertissement à un usurpateur antiSystème, puisque Trump à la Maison-Blanche c’est bien une usurpation.)

Pour ceux qui suivent cet événement selon sa vérité-de-situation et non selon la narrative-Système, ce qui devrait être au bout du compte l’aspect le plus étonnant de l'élection présidentielle USA-2016, exceptionnelle et sans précédent, autant que de son résultat exceptionnel et sans équivalent, c’est d’entendre parallèlement, dans d’autres occasions et d’autres événements qui ont suivi leur cours, se poursuivre la conception narrativiste dominante selon laquelle la prépondérance des USA sur l’UE et au sein du bloc-BAO continue à devoir être proclamée d’une façon indiscutable. Cette énorme puissance que sont les USA est pourtant dans une crise ontologique gigantesque dont les prémisses ou les à-côtés ont pu être appréciés dans sa perte prodigieuse d’influence dans la région stratégique essentielle du Moyen-Orient, dans les années 2013-2016. Quant à la campagne présidentielle USA-2016 elle-même, on put y relever des événements inédits comme celui d’y voir des exemples européens servir du modèle et de contre-modèle. Certes, le Brexit dont Farage était venu témoigner à la convention républicaine en juillet concerne les “cousins” britanniques, mais dans ce cas il s’agit bien d’une affaire européenne puisque l’acteur principal est bien l’UE qu’il s’agit de quitter. D’ailleurs, l’UE a été, a contrario, proclamée comme modèle pour l’organisation de l’Amérique du Nord puis des deux Amériques par la candidate démocrate, alors certaine d’être la future-présidente Clinton.

Par conséquent, qui domine qui ? Personne, sera notre réponse (le Système étant hors-sapiens, on s’en doute, et lui maîtrisant tout)... Les constats faits plus haut sur l’évolution de la position des USA ne signifient pas, dans l’esprit des directions-Système, une décadence et un effondrement US, mais bien autant d’erreurs des USA du fait de n’avoir pas complètement suivi les consignes du Système. Cas d’école, pour le souvenir et marquer que nous sommes déjà dans une époque très verrouillée à cet égard, où l’habitude de l’appréciation critique des USA s’est déjà affirmée : la fureur de notre président-poire dont les superbes Rafale étaient prêts à frapper Damas, lorsque Obama prit la décision, le 31 août 2013, de retarder la décision, puis finalement d’annuler la fiesta. USA ou pas, les Français, dont la direction est totalement acquise au Système, bloc-BAO, globalisme, etc., ont fait savoir discrètement aux USA ce qu’ils pensaient de leur comportement indigne, certainement pas comme un vassal s’adressant à son suzerain... Leur suzerain, leur maître, c’est le Système, et le visage ahuri-robotisé de Hollande est bien une physionomie-Système (nullement “délit de faciès” de notre fait dans cette remarque, mais “vertu de faciès”).

Par conséquent, il n’y a et il n’y aura pas d’alignement (de réaligement) du reste du boc-BAO sur les USA de Trump, – sauf UK peut-être, par réflexe de special relationships et par vertu de Brexit, – si Trump ne s’amende pas, et très vite. (On a peu de patience, en ce moment, dans les officines-Système.) Par contre, le bloc-BAO, et l’UE par conséquent, ne manqueront pax de prendre langue avec l’opposition qui est en train de se mettre en place contre Trump, qui va des pressions type-“révolution de couleur” aux coalitions de “niches” du Corporate Power, particulièrement Silicon Valley qui prend une place en pointe dans la bataille pour le globalisme complètement idéologisé, politisé et sociétal, et contre qui Trump est déjà en guerre. (Il s’agit d’un point d’une extrême importance, sur lequel nous reviendrons très vite et en détails, dans toutes les dimensions de ce cas.) Il est donc ici question d’une opposition postmoderne-classique qui nie la souveraineté, la légitimité, etc., telle que les USA eux-mêmes l’ont employée à maintes reprises contre nombre de pays et qu’ils retourneraient contre eux-mêmes dans ce cas... Ils feraient ainsi mentir la plaisanterie en vogue en Ukraine : “Pourquoi ne peut-il y avoir un Maidan aux USA ? Parce qu’on n’y trouve pas d’ambassade des USA...”

Il s’agit surtout de comprendre que l’ère classique de la “domination américaine” est complètement dépassée, après une période de préparation (voir plus loin), qu’il faut parler en termes fondamentaux d’affrontement Système versus antiSystème, soit dans ce cas globalistes-“sociétalistes” se référant aux “valeurs” contre souverainistes-populistes se référant aux principes. (Comme on l’a dit plus haut, les termes sont changeants selon les circonstances et la référence Système-antiSystème a une valeur universelle qui permet de simplifier le travail de la pensée.) On ne peut plus, si l’on est antiSystème comme nous le sommes, se dire désormais, comme nous évitons de le faire nous-mêmes depuis longtemps, “antiaméricain”, – mais on se peut dire “antiaméricaniste”, avec le terme “américanisation” comme faux-nez du globalisme.

Ainsi, aujourd’hui, avec Trump, les “américanistes” sont les ennemis jurés des Américains. Cela vaut pour nous, Européens : l’UE ne fera pas de concessions à Trump, elle ne s’alignera pas une seule seconde sur lui, attendant qu’il plie, qu’il se conduise lorsqu’il sera président comme il s’est conduit, humblement et sans éclat, avec le président Obama le recevant dans sa blanche demeure ; sans doute, on peut espérer que l’UE devra attendre longtemps que ce moment délicat pour le président-élu Trump devienne un comportement courant du préisdent Trump et, dès lors, l’affrontement USA-UE se développera. Par contre, cela va de soi mais cela doit être dit, les Européens-antiSystème n’ont pas de meilleurs alliés que les citoyens-Américains qui ont voté Trump, ou Clinton par erreur et aveuglement.

Trump trahit le bloc-BAO

A ce point du propos et en guise, ou à la place d’un commentaire largement développé dans ce qui a précédé, nous allons proposer un rappel historique correspondant à notre point de vue, pour tenter de mieux éclairer comment nous en sommes arrivés dans cette situation où nous sommes, où il faut cesser de craindre, de dénoncer, de mettre en cause, etc., la classique “domination américaine” qui n’existe plus en tant que telle. Nous allons le faire autour du concept du “bloc-BAO”  que nous employons régulièrement depuis 2010-2011.

En effet, nous avons pris l’habitude, jusqu’à en faire un sujet de notre rubrique Glossaire.dde (avec comme complément une “politique-Système”) de regrouper ce qu’on avait coutume de désigner comme “les pays occidentaux” sous l’expression sous forme de sigle “Bloc Américaniste-Occidentaliste” (BAO), ou “bloc-BAO” pour la facilité du langage et du rythme des mots. Nous avons insisté, dans cette définition sur la notion de “bloc”, qui implique dans notre esprit le caractère absolument essentiel qu’elle présuppose qu’il n’y a pas dans ce conglomérat de leadership irrésistible et incontestable de l’un sur les autres. C’est pour cette raison, comme nous venons de le faire dans la description opérationnelle de la situation, à l’heure de la crise ontologique où se trouvent aujourd’hui les USA avec l’élection de Trump, qu’il importe absolument de mettre en cause la notion classique, notamment dans la critique antiSystème, de “l’alignement de l’Europe sur les USA”. Cette mise en cause vaut pour tous les aspects de la politique (ou politique-Système) développée par le bloc-BAO, que ce soit en Syrie et au Moyen-Orient pour les interventions extérieures, que ce soit vis-à-vis de la Russie, que ce soit dans les négociations sur des accords de libre-échange, que ce soit dans l’application de la politique de l’affectivisme (ou “droitdel’hommisme”), que ce soit dans la politique du déferlement migratoire (“frontières ouvertes”), que ce soit dans la poussée révolutionnaire et déstructurante de type sociétal (démarche LGTBQ), que ce soit dans la tactique déstabilisatrice des “révolutions de couleur”.

On comprend bien entendu que cet ensemble de démarches caractérisant le bloc-BAO pourrait être regroupé sous le terme de “globalisme”, en rapport avec la notion géographique et économique de globalisation d’une part, avec la conception eschatologique et thaumaturgique que “le tout est de valeur et de nature différentes et supérieures à la simple addition de ses parties” d’autre part. Il ne s’agit pas d’un complot mais d’une conception du monde dans le chef d’une nouvelle religion de type satanique impliquant l’entropisation par déstructuration et dissolution. Par conséquent, au-delà du globalisme (contre le souverainisme principiel), on arrive à la simplification fondamentale du Système versus l’antiSystème.

C’est dans ce contexte qu’il nous paraît primordial de rappeler la genèse, la définition et les caractères de ce que nous nommons “bloc BAO”. Nous donnons ici des extraits concernant cet aspect de la définition du concept “bloc-BAO”, du texte du Glossaire.dde du 10 décembre 2016 ; c’est bien ce concept que Trump est soupçonné de vouloir trahir et, par conséquent, il est aussitôt mis en procès et sa position de président des USA, et également la puissance qui s’attache à cette fonction et aux moyens dont elle dispose, n’ont plus rien de l’influence irrésistible u’ils exerçaient...

« Cette constitution et cette substance du bloc BAO forment un thème sur lequel nous sommes revenus à plus d’une reprise, mais toujours d’une façon tangentielle, à l’occasion d’une autre réflexion. La dernière réflexion dans ce sens se retrouve dans le ‘dde.crisis’ du 10 juin 2012 (voir le 18 juin 2012...). Elle permet tout de même d’exprimer clairement les fondements du concept que représente pour nous l’idée de “bloc BAO”. Il s’agit d’un extrait de la partie intituléeUne civilisation de la terreur perçue comme vertu suprême, – Depuis 2008 et la crise financière, la situation psychologique a achevé de basculer, au profit de la terreur“, avec pour titre spécifique du passage “La crise de 2008 comme unificateur égalitaire du bloc BAO, ou la libération de l’asservissement US par l’absurde”.

» “Cette crise de 2008 et ses conséquences ont eu aussi, par le biais principalement de ce renouvellement spécifique de la terrorisation des psychologies des directions politiques et élites des pays du bloc BAO, un effet somme toute inattendu et original. La situation inégalitaire au sein du bloc BAO, entre les USA comme emblème de la surpuissance du Système et les autres pays (essentiellement européens) effectivement soumis au Système mais par l’intermédiaire de leur soumission aux USA, cette situation s’est radicalement transformée. Elle est devenue totalement égalitaire. Désormais, il existe une parité psychologique, un égalitarisme de perception de soi-même, entre tous les pays du bloc BAO, et singulièrement entre les USA et les autres pays du bloc. Nous ne parlons pas de situations stratégique, économique, militaire, etc., parce que notre discours est psychologique et parce que, et cela d’ailleurs justifiant notre méthode, tous ces domaines sont en flux constants et interdisent de fixer une situation ; nous parlons de la perception...

» “Désormais, tous les pays du bloc BAO au travers de leurs élites et des psychologies terrorisées de ces élites, se perçoivent égalitairement, c’est-à-dire essentiellement libérés des liens de domination et de sujétion entre les USA et les autres... Cela ne signifie nullement la fin de la corruption et de l’influence US, comme par le passé, mais, contrairement au passé, cette corruption et cette influence s’exerçant à l’avantage de tous et apparaissant de plus en plus invertébrées, de moins en moins spécifiques. De même observe-t-on une homogénéisation des conceptions et des politiques, simplement par disparition de la substance au profit de l’apparence et de l’image. On serait conduit à observer qu’il s’agit là de ce fameux phénomène d’entropisation, qui est le but poursuivi par le Système ; but au moins atteint avec les psychologies de ces élites, mais de plus en plus sûrement d’une façon contre-productive.

» “Cela peut sembler étrange à ceux qui continuent à évaluer les rapports des pays du bloc BAO en termes géopolitiques, stratégiques ou économiques, mais cela répond parfaitement à une évolution qui dépend désormais du système de la communication et s’exprime essentiellement par la psychologie. A cet égard, Barak Obama est un dirigeant américaniste idéal, par la souplesse et le détachement de son caractère, par sa recherche continuelle du compromis conçu comme moyen spécifique de gommer toutes les aspérités des apparences des relations. Cela n’empêche pas le Pentagone de poursuivre sa politique d’hégémonie bureaucratique par la multiplication de ses bases dans le monde, mais cette politique semble de plus en plus détachée de la direction politique US, voire de la politique spécifique des USA, permettant cet égalitarisme des directions politiques dont nous parlons. D’une certaine façon, c’est une globalisation qui s’est établi au sein du bloc BAO, ou bien une sorte de tissu de “global governance”, sauf que les fondations n’en sont ni la puissance de contrôle, ni l’autorité sur les populations et les pouvoirs qui les représentent, ni même le pouvoir tout court qui se dilue au profit des “centres de pouvoir” proliférant, mais bien cette psychologie terrorisée qui rend ce rassemblement incontrôlable et complètement improductif et stérile.

» Définition dans les grandes lignes

» Ayant ainsi fixé le cadre politique et psychologique de la naissance et du développement du bloc BAO, nous proposons maintenant une tentative de définition de la politique qu’applique ce bloc. Les paramètres de base, qu’il faut garder à l’esprit, sont essentiellement au nombre de deux :

» 1). Une terrorisation de la psychologie des dirigeants des pays et organisations du bloc. Cet aspect de la situation, l'idée de la terrorisation comme une pandémie de la psychologie, est un de nos arguments principaux pour l’explication de l’opérationnalisation de la situation actuelle, et il doit être traité à part. Cette terrorisation s’exprime à partir du Système vers les psychologies des élites des pays du “bloc BAO”, opérationnalisant ainsi l’influence directe du premier sur les secondes.

» 2). Le deuxième aspect de cette politique est l’égalitarisation, le nivellement de la politique qu’est la politique du bloc BAO, avec notamment l’effacement, d’ailleurs naturel et comme allant de soi, de la prépondérance US. En fait, plus personne n’a vraiment besoin d’imposer une “politique commune” qui semble couler de source et naître d’elle-même… Il existe désormais, depuis 2008-2010, une remarquable unité de pensée, de réflexe, d’attitude, entre tous les pays du bloc. (Le retour de la France au bercail fut le grand événement rupturiel à cet égard. Là aussi, nous croyions, dans notre grande naïveté, que cela serait l’épisode d’un homme, dito Sarko, comme l’on crut à l’épisode Bush aux USA, mais non cela était fondamental et substantiel. Trahissant tous les principes, comme cette exceptionnelle nation a l’habitude de faire dans ses périodes de basses eaux où elle devient le double inverti, l’épouvantable caricature de sa grandeur, la France a sombré dans la subversion d’elle-même et s’est imposée comme un des pôles du bloc ; comme une fille et comme une midinette, sans s’apercevoir de son infamie, toute fiérote de se croire l’égale d’elle-même avec sa si fameuse intelligence réduite au slogan ânonné par les salons parisiens. Son ralliement, qui est presque vécu dans leurs esprits réduits aux acquêts comme une affirmation de la grandeur et de l’indépendance françaises, a constitué le verrou ultime qui cimente le bloc. Dont acte.)

» Pour mieux expliciter et présenter, et définir enfin, cette “politique commune” du bloc BAO, on développe ci-dessous quelques traits qui nous paraissent importants. Tous, ils favorisent l’évolution de la politique vers les facteurs de l’émotion, de la passion, etc., abdiquant d’une façon systématique l’accès à l’intelligence, avec sa raison et son ouverture à l’intuition haute. La politique du bloc est coincée dans les bas-fonds de l’émotion primaire, ou fleur-bleue pour faire plus indulgent.

» • La politique disons “atlantiste” ou “occidentale”, avec domination des USA, est devenue la “politique du bloc BAO” en adoptant des thèmes centraux qui n’ont plus de rapports avec la politique de force qu’affectionnaient des gens comme Kagan et autres neocons du début de la décennie 2000 (du type “les USA sont sur Mars, l’Europe est sur Vénus”). Ces thèmes centraux sont essentiellement moraux, dans le registre humanitariste. Il ne s’agit plus de la “démocratie conquérante” de l’époque Bush, mais du “droitdel’hommisme” dans toute sa plénitude, laquelle inclut une dimension démocratique posée comme une évidence vertueuse objective comme l’est une patte molle. C’est une politique véritablement inspirée de caractères exceptionnellement mous, sinon caoutchouteux et adhérant à n’importe quelle circonstance, exprimés par une voix mâle, martiale et superbe (qui ne pense pas à BHL, ou Bernard-Henri Levy, se verrait difficilement pardonné), justifiant l’emploi de la force comme une chose qui va de soi et qui devrait l’être idéalement sans aucune contrainte. La vertu affichée de cette “politique” crée le Droit à chaque instant et selon les circonstances (le Droit constamment recréé selon la partition du bloc BAO, avec une seule constante qui est la majuscule) ; elle objective ceux qui s’en réclament en les dégageant de toute responsabilité. [...]

» • Enfin, et ceci se déduit évidemment de cela (qui précède), la politique est devenue, bien entendu, complètement soumise à l’affectivité, selon ce que nous en avons largement dit le 11 juin 2012 [Voir plus précisément et mis à jour, le Glossaire.dde sur l’“affectivisme”, le 5 octobre 2016.] A ce point, on peut repousser complètement le soupçon de “féminisation“ qui nous ferait classer parmi les relaps de la modernité et excommunier vite fait : tous, absolument tous, les hommes aussi bien, sont frappés par cela, et il n’y a plus de “féminisation” à cet égard mais, simplement, une pression constante de l’affectivité qui devient comme une formule universelle de tout acte politique. On comprend, bien entendu, à relire le texte auquel nous faisions référence, qu’il s’agit là du point fondamental de cette “politique du bloc BAO”, qui implique une soumission complète des psychologies au Système, et cela passant par cette prépondérance de l'affectivité sur la raison subvertie et devenue “idiote utile”.

» • Dans ce cadre totalement délétère, et pour ce qui nous concerne, “nous-Européens”, il n’étonnera personne que nous ajoutions un volet concernant une poussée vers l’abdication des souverainetés, qu’il faut résolument placer dans le cadre de cette constitution du bloc BAO. Aujourd’hui, l’idée du transfert de souveraineté des nations vers les institutions européennes pour renforcer une “politique étrangère commune” est l’un des grands thèmes en vogue des discours et des divers document de réflexion dans les milieux européens... »