La vérité par la puissance

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La vérité par la puissance


12 octobre 2002 — Le sympathique institut américain FAIR-L (“Fairness & Accuracy In Reporting”) relève un dialogue très significatif entre Connie Chung, anchorwoman à CNN, et un parlementaire US. L'analyse de FAIR-L date du 10 octobre et l'entretien date, lui, du 7 octobre.

Chung est un charmant oiseau des îles exotiques (pardon, une Asian-American) et vedette (anchorwoman) de la soi-disant information télévisée aux USA. Elle fut pendant quelques années, de 1993 à 1996, partenaire au JT de CBS de l'inamovible Dan Rather ; c'est-à-dire qu'elle fut en fait la sous-fifre et la faire-valoir de Rather jusqu'à ce que celui-ci ne souffrît plus de seulement risquer de ne plus avoir la vedette. Chung est alors partie pour d'autres studios, pour échouer à CNN, avec un salaire plantureux approchant le $million. Cela pour dire, en résumé, que Chung en connaît un bout sur le système.

Chung a compris que la “vérité” dans le système virtualiste de l'américanisme tient, non pas à la propagande, non pas à la déformation mesurée, etc, mais à la répétition massive d'une chose baptisée pour l'occasion “information”. Cette chose dite et répétée avec toute la puissance d'un appareil de communication finit par prendre sur le “marché” de l'information la place de cet appareil de communication, c'est-à-dire la première place si cet appareil est en puissance le premier sur le “marché” de l'information. C'est alors ce qu'on nomme la vérité et même, pour être plus sûr, la vérité “objective”.

La CIA, au niveau de la communication (diffusion massive de la “chose-information”) ne fait pas le poids face au président qui, avec ses acolytes habituels (secrétaire d'État, secrétaire à la défense), dispose d'un formidable appareil de communication ; ce point est, bien entendu, encore plus vrai lorsqu'il s'agit d'un parlementaire rapportant s'appuyant sur des informations qu'il a reçues lors d'auditions secrètes de dirigeants de la CIA. Par conséquent, pour Chung, le président l'emporte massivement. Il dit la chose qui va être massivement présente sur le marché, donc la “chose-information”, qui devient vérité. Chung, qui a le sens de la formule, parle donc de “respect” du aux déclarations du président et il doit être bien compris que c'est le respect qu'on doit aux plus grands CEO américains, qui dirigent les entreprises qui ont investi massivement le marché pour y tenir la première place.

D'où ce dialogue de Chung avec ce parlementaire, en l'occurrence assez obscur et qui a l'incroyable inexpérience de songer à balancer entre les affirmations du président et celle que lui a donné la CIA lors des auditions de la Commission de la Chambre sur les questions de renseignement, dont il fait partie. (On connaît la polémique qui est venue sur la place publique entretemps, que nous avons exposée ici [le 10 octobre] et là [le 11 octobre]). Le parlementaire est manifestement débordé par la conviction de l'anchorwoman de CNN sur la façon dont il faut traiter l'information venue du président. Il est question effectivement de respect pour le “produit” qui tient par sa puissance la première place sur le marché de l'information, et par conséquent respect pour le CEO de cette entreprise qui tient les tous marchés comme chacun sait, — America Inc. (On note même que la malheureuse oiseau des îles/Asian-American manque de suffoquer à l'idée que le parlementaire peut mettre en doute une déclaration de GW. Signe que nous sommes sur le terrain de la conviction et de la meilleure conscience du monde.)

(Le dialogue est relevé, de manière critique comme on s'en doute, par FAIR, et nous publions ci-dessous une partie de l'analyse de FAIR en date du 10 octobre.)


« Connie Chung: Skeptical of Skepticism

» October 10, 2002

» On her October 7 broadcast, CNN's Connie Chung took a U.S. congressmember to task for doubting George W. Bush. After Rep. Mike Thompson (D.-Calif.) told Chung that there seemed to be no evidence that Iraq posed an immediate danger to the people of the United States or its allies, the anchor responded, “Well, let's listen to something that President Bush said tonight, and you tell me if this doesn't provide you with the evidence that you want.”

» She then aired a clip from the speech that Bush made in Cincinnati: “Some al Qaeda leaders who fled Afghanistan went to Iraq. These include one very senior al Qaeda leader who received medical treatment in Baghdad this year and who has been associated with planning for chemical and biological attacks.

» “We've learned that Iraq has trained al Qaeda members in bomb-making, in poisons and deadly gases. And we know that after September 11, Saddam Hussein's regime gleefully celebrated the terrorist attacks on America.”

» After this soundbite, Chung continued: “Congressman, doesn't that tell you

that an invasion of Iraq is justified?”

» Thompson began to respond: “Connie, we haven't seen any proof that any of

this has happened. I have sat through all the classified briefings on the Armed Services....”

» But this questioning of what Bush said appeared to be too much for Chung.

She interrupted Thompson's answer, saying, “You mean you don't believe what President Bush just said? With all due respect....you know... I mean, what...”

» Faced with Chung's obvious alarm that someone might not take Bush's word

as definitive proof, Thompson tried to reassure her: “No, no, that's not what I said.... I said that there has been nothing in the committee hearing briefings that have substantiated this. If there is substantiation, we need to see that in Congress, not hear it over the television monitor.”

» Later in the broadcast, Chung returned to the question of whether Thompson trusted Bush, suggesting that skepticism toward Bush was equivalent to an endorsement of Saddam Hussein: “Congressman Thompson, there are those who believe that you and your two colleagues who went to Iraq came back with the basic position of President Bush may be trying to tell you something that in his effort to get approval for an invasion in Iraq, that you shouldn't believe. So it sounds almost as if you're asking the American public, 'Believe Saddam Hussein, don't believe President Bush.'” »