La différence hispanique

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La différence hispanique


20 février 2003 — Les résultats d’un sondage récent aux USA montrent une tendance politique remarquable de l’électorat d’origine hispanique. Ces résultats, présentés dans le Washington Post du 18 février, à partir de dépêches AP et Reuters, sont ainsi commentés  :


« Hispanics are cooler to the prospect of war against Iraq than the overall U.S. population, fearing among other things a loss of jobs and a greater crackdown on illegal immigration, according to a survey by the Pew Hispanic Center.

» Only 48 percent of the total Latino population favor the use of U.S. ground troops to remove President Saddam Hussein from power in Iraq, the Feb. 13-16 poll by the research organization revealed. The support was slightly lower among foreign-born Latinos (46 percent) than their U.S.-born counterparts (52 percent), but both groups lagged behind the stronger support for military action revealed by other recent national polls.

» A Gallup/CNN/USA Today poll conducted Feb. 7-9 showed 63 percent supported armed action against Iraq, and a CBS/New York Times survey registered a 66 percent backing. »


Bien sûr, c’est la relativité des résultats qui nous intéresse ici, et pas leur signification politique (savoir de quel soutien à quelle guerre il s’agit, avec ou sans résolution ONU, etc). Cette différence qui varie de 12 à 20% et se situe par conséquent en moyenne à 15%, entre les Américains en général et les Hispaniques de façon spécifique, est très significative. (Il faut en plus pondérer dans le sens d’un renforcement de cette différence dans la mesure où les 63%-66% d’opinions favorables à la guerre représentent celle de “tous les Américains”, Hispaniques compris, avec leur soutien beaucoup plus réticent — sans rien savoir d’une spécificité éventuelle du vote noir, moins probable tout de même. Cela implique que les Américains blancs, les WASP d’origine anglo-saxonne et assimilés, sont beaucoup plus fortement partisans de la guerre. Il serait logique d’ajouter un dixième du résultat pour compenser cette situation et approcher du sentiment des Américains WASP seuls, ce qui nous conduirait à une hypothèse chiffrée de 69%-74% favorables, par rapport aux 48%-52% des Hispaniques.)

Quelques remarques s’imposent  :

• Le patriotisme US est beaucoup moins fort chez les Hispaniques, même chez les “ born in USA”, qui restent beaucoup plus proches de leurs compatriotes de nationalité et de culture, que de ceux de leur nationalité acquise. (La logique de l’argument favorable de l’intégration US réussie serait que les “born in USA” soient quasiment à la moyenne US, soit au-delà de 60%).

• La perception des US comme une “patrie alimentaire” apparaît également confirmée. La guerre contre l’Irak est perçue en fonction de données régionales et locales précises (niveau de l’emploi, immigration illégale), qui concernent le sort des Hispaniques aux USA. Il n’y a pas d’appréciation de politique extérieure américaine ou de sécurité nationale des USA. Cela confirme le portrait majoritaire des Hispaniques passant et/ou s’installant aux USA pour des raisons alimentaires et gardant cette préoccupation à l’esprit de façon majoritaire.

• D’une façon générale et en fonction du déluge de l’information pro-guerre et des pressions du conformisme, cette attitude des Hispaniques, qui se rapproche plutôt de l’attitude des nations européennes, est un témoignage de leur capacité de résistance culturelle aux pressions de la vie américanisée.

D’une façon générale, ce sondage commence à ouvrir la voie à une hypothèse d’une minorité hispanique (de plus en plus puissante démographiquement) pouvant constituer un bloc d’opinion politique homogène, et d’une opinion politique qui s’écarterait notablement de la politique du système de l’américanisme. A terme, c’est un problème politique d’une importance considérable.