GW-2004 entre l’Irak et l’économie

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GW-2004 entre l’Irak et l’économie


11 mai 2003 — Il en faudrait bien peu pour que la position triomphante de GW Bush pour 2004 devienne catastrophique et intenable. Jamais un président n’a autant dépendu des événements et de la façon dont ces événements seront “exploités”, — c’est-à-dire, manipulés, modifiés, adaptés aux circonstances, etc. Cela est dû à l’insignifiance du personnage et à l’absence de toute politique qui lui soit propre. Le gouvernement n’a jamais été aussi morcelé entre différents pouvoirs d’influence, donc lui aussi incapable de mettre en oeuvre une politique cohérente et suivie. Deux situations essentielles pour la réélection de GW continuent à se détériorer régulièrement.

• La situation en Irak, avec une évolution qui continue à évoluer de façon persistante vers l’aggravation. (Divers points d’aggravation, que ce soit la poursuite régulière et endémique des incidents, avec la perte récente de deux soldats américains abattus à Bagdad, avec le retour de la prostitution, de la pornographie, etc, avec la poursuite de la prise du pouvoir par le clergé chiite. Face à cette situation, le pro-consul US en place mais en attente d’être remplacé, le général Garner, a annoncé qu’ il se donnait, ou donnait aux Irakiens, ou donnait au Ciel, jusqu’au 15 juin pour restaurer la stabilité en Irak.

• La situation économique aux USA, qui continue à se dégrader régulièrement, avec notamment une accentuation du chômage, d’ailleurs selon une répartition inégale qui crée des points de tension régionaux. (Voir le cas de New York City, où le chômage officiellement de 9%, — contre 6% de moyenne nationale, — dépasse en réalité, et largement, les 10%.)

Le grand stratège du destin de GW est son conseiller politique Karl Rove. (Elisabeth Drew en fait un formidable portrait, ainsi que de la façon dont il a “fabriqué” GW dans une récente parution de The New York Review of Books.) Rove avait conclu que la guerre contre l’Irak, menée dans les temps, allait écarter les mauvaises nouvelles économiques, voire, même, allait servir à redresser l’économie, au moins jusqu’à la réélection. L’orientation actuelle ne satisfait pas vraiment Rove. A cet égard, notre évaluation est la suivante :

• D’une part, la guerre contre l’Irak a été trop courte, compte tenu de l’impact médiatique favorable qu’une guerre aussi évidemment acquise à la gloire américaine apporte au président, compte tenu aussi, comme on commence à le constater, que l’après-guerre est la partie la moins favorable du programme. (Mais ce dernier point n’est pas dans les cartons de Rove qui, comme tout bon Américain, ne doute pas que le “désordre créateur”, la démocratie-CNN, le dollar et le reste doivent irrésistiblement séduire l’Irakien de base. Cela ne se passe pas comme cela pour l’instant.) C’est le même scénario que l’Afghanistan qui est rejoué, en plus pressant parce que la guerre d’Irak est encore plus courte. C’est un problème inattendu pour Rove et pour ses plans de campagne.

• D’autre part, l’économie ne va vraiment pas bien et continue d’aller de moins en moins bien, et l’effet-guerre sur l’économie est étique, voire squelettique. Certes, quelques grosses sociétés vont voir leurs bénéfices augmenter en Irak. Ce n’est pas suffisant pour proclamer que le bonheur est de retour. Le déficit et l’endettement sont colossaux. Les dépenses du Pentagone, notoirement improductives et de plus en plus sans utilité directe réelle, malgré le choeur des experts sur le miracle technologique permanent du Pentagone, commencent à être un poids mort de gaspillage considérable.

Considérant ces divers aspects, comment faire pour tenir jusqu’à novembre 2004 ? A partir de cette question sans réponse sympathique, on peut prévoir une nouvelle poussée de fièvre pour une nouvelle guerre (plutôt l’Iran ou la Syrie que la Corée du Nord, qui est un client sérieux). Il se pourrait que Rove estime que c’est le meilleur moyen de faire réélire GW. Ainsi vont les affaires de la civilisation occidentale. (Ou bien : « Et c’est ainsi qu’Allah est grand », comme disait Alexandre Vialatte.)