Feu contre feu

Journal dde.crisis de Philippe Grasset

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Feu contre feu

Le censeur-Artificial Intelligence de Yutube eut l’heureuse idée de placer l’événement de dévastation  sous les auspices de 9/11, – Notre-Dame définie par les tours de Manhattan, – suggérant à ceux qui n’y pensaient pas encore l’idée du complotisme. Ils se sont excusés, mais il reste que la bêtise de la modernité-FakeNewsiste a tenu à figurer dans l’éventail des sentiments innombrables de cette tragédie extraordinairement chargée du symbolisme de la métaphysique de l’Histoire et de la foi. 

Le poids du symbole pèse autant sur nos consciences et sur nos âmes que l’incendie lui-même, dont on a peine à qualifier le sens que nous sentons obscurément : le Feu de Dieu ou le brasier du Diable ? A cette heure de ce jour où un “président” devait parler, dans une telle occurrence de la Semaine Sainte pour les chrétiens qui sont eux-mêmes les légataires religieux de Notre-Dame, dans ces temps-là du Grand Trouble, au cœur d’événements terrestres empreints de la folie tourbillonnante de la Grande Crise, comment écarter une immense interprétation symbolique, où chacun mettra pêle-mêle ses croyances, ses passions, ses angoisses, ses espérances et ses désespoirs ?

Ce n’est pas le passé qui s’embrase pour menacer de disparaître, c’est le passé qui se rappelle à nous. En même temps qu’il semble se détruire, nous sommes conduits à observer qu’il existe bien puisqu’une partie de lui a subi l’attaque du feu et que le feu ne brûle que ce qui existe. La question qui vient naturellement est de savoir ce que nous avons fait de ce passé lorsqu’on contemple le présent sur quoi il débouche. Chacun a sa réponse toute prête ; vous permettrez que je réserve la mienne par loyauté pour la durée qu’il faut respecter avant d’émettre un jugement.

A côté de quoi et évidemment contre cette objurgation à la réserve, comment éviter les interrogations angoissées qui sonnent comme des réponses, les observations catastrophées qui impliquent la nécessité du jugement qu’on devine ? La religion catholique et chrétienne était en lambeaux, elle est désormais en cendres. La question se presse dans nos esprit : que faire de ce monde qui nous tend le symbole de l’éradication de ses origines par le feu ? La tentation est inévitable de faire de l’événement mystérieux dans son si puissant sens symbolique qu’il nous écraserait, un élément de nos affrontements politiques, un objet de manipulation, un brasier de nos folies les plus échevelées. Il y en a qui s’y activent, on s’en doute : les “communicants” excellent dans le réductionnisme, – reductio ad nihilum.

Pour mon cas, puisque ce journal est personnel, je répète que je préfère retenir mon jugement après avoir ressenti le poids du symbole. Ce poids est si lourd, il convoque tant d’interprétations, de fureurs et de ferveurs, il est à la fois si ancien et si complètement dans le brasier de la crise de la modernité, ce poids est bien trop lourd pour trancher dans le vif d’un événement qui est si haut au-delà de notre entendement. Pour autant, me dis-je en moi-même, je sais bien dans quel sens je penche. Ainsi en est-il des réactions et des effets d’un tel événement dont le poids symbolique est habité de la rage de l’incendie destructeur et de la puissance du souvenir ressuscitant le passé que l’incendie ravive. Tout cela se heurte et se carambole dans l’occasion d’un événement extra-ordinaire, dans un lieu, dans un temps, dans des événements qui ne le sont pas moins.

Je reste interdit mais assez confiant. Parfois, c’est la juste réponse de circonstance, laquelle vous laisse libre de disposer de votre attitude et de comprendre le jugement qui se forge en vous. Ce n’est pas une attitude religieuse, c’est une attitude de la foi qui est en vous, cette “foi” qui vient du mot latin fides pour “confiance”. Je veux dire qu’il y a des événements aussi extraordinaire que leur symbolisme, qui sont faits pour éveiller dans les consciences et dans les âmes une lucidité qui servira à jeter un regard plus acéré et tragique sur le monde, pour enfin saisir dans quelle tragédie le monde se trouve emporté. La cathédrale est immémoriale d’ancienneté, son incendie est complètement dans la postmodernité, jusqu’à donner l’occasion à la marque des enfers de leur Artificial Intelligence chargée d’algorithmes de se signaler, – elle qui « ne peut s'empêcher de laisser échapper toujours quelque sottise, qui est comme sa signature... »

Il n’empêche, et même si des âmes brûlent d’angoisse et de frayeur sacrées : peut-être le feu de Notre-Dame serait-il comme quelque chose qui détruit décisivement l’incendie du sortilège de 9/11 ? Feu contre feu.

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