En voilà un qui voit loin-près de nous

Journal dde.crisis de Philippe Grasset

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En voilà un qui voit loin-près de nous

21 octobre 2020 – On sait maintenant de source directe sinon de source sûre, plusieurs choses d’une incontestable importance :
1) le président Trump sera réélu, d’une façon qui ne laissera aucune ambiguïté ;
2) l’élection conduira à une insurrection civile, puis à une guerre contre Israël (pourquoi ? Comment ? A préciser) ;
3) cette guerre sera aussitôt suivie, sans contradiction logique ni nécessité d’explication de notre chef, par une période de paix notable mais, nous semble-t-il (plutôt parole d’instinct, d’après ce que je ressent), – assez courte ;
4) puis nous aurons la Fin des Temps, – point final.

Comme on le voit c’est encore, une fois de plus, les USA qui tiennent le premier rôle, même s’il s’agit de destruction, mais sans doute d’une façon qui sauverait la mise à l’honneur de la ‘nation exceptionnaliste’. C’est pourquoi le Bonne Nouvelle, même si nécessairement de nature transnationale et supranationale, et qui aurait pu être classée dans notre rubrique RapSit-USA2020 en raison de ce contexte si évident, est finalement annexée par moi-même, pour mon Journal-dde.crisis, pour qu’on puisse mieux en goûter tout l’effluve et le fumet ; pour que l’on puisse mieux jouer avec la matière du sérieux extrêmement douteux ou de la gravité extrêmement pressante, cachés l’un ou/et l’autre, de la chose.

La personne qui nous dit tout cela n’est pas n’importe qui, ni une personne de peu d’inférence, et pour son importance dans la communication, rien de moins que le pasteur évangéliste (et même télé-évangéliste) Pat Robertson ; 90 ans, bon pied bon œil et pas de Covid, créateur du genre télé-évangéliste avec la première chaîne mise en service fin des années 1950, richissime cela va de soi, ami des présidents des USA depuis longtemps et personnage central de la droite radicale chrétienne aux USA, avec comme position celle d’un “sioniste chrétien”.

Le courant “sioniste chrétien” est un courant religieux « selon lequel la création de l'État d'Israël en 1948 est en accord avec les prophéties bibliques et prépare le retour de Jésus comme Christ en gloire de l'Apocalypse.
» Cette croyance se distingue du soutien apporté par d'autres chrétiens à Israël et au sionisme pour des raisons autres que religieuses. Par sa lecture fondamentaliste de la Bible, elle se distingue également du caractère ‘non religieux’ du sionisme. Les évangéliques considèrent que l'existence même de l'État d'Israël ramènera Jésus sur terre, le fera définitivement reconnaître comme Messie et assurera le triomphe de Dieu sur les forces du mal, pendant que le peuple juif se convertira au christianisme. »

Le prédicateur a donc détaillé sa vision des événements de ces prochains mois, selon des sources qu’il assure excellente, puisqu’on y compte directement et quasi-exclusivement celle de la Voix de notre-Lord Soi-Même. Dans cette “étrange époque”, pourquoi y aurait-il à douter d’un pronostic si clair et si accordé au sens des choses ? En quoi vaut-il moins que les décharges d’ordures avariées et agressivement puantes qui constituent le courant de notre information libre et si consciente de ses valeurs, et si campée sur la raison et la Morale, de notre presseSystème BOA-globaliste ? En quoi le pasteur Robertson serait-il plus jobard et tordu, plus hypocrite et prisonnier de ses croyances, et en un autre mot un peu leste mais bien fourre-tout,  plus con, que le comité éditorial du New York Times-Le Monde ? Poser la question...

L’article RT.com (encore eux, certes) qui apporte la chose du pasteur Robertson, met l’accent sur le calme apaisé avec lequel le prédicateur apporte les sources de la Clarté Divine sur nos perspectives puis donne quelques précisions qu’on jugera anecdotiques ou polémiques c’est selon, mais toujours dans cette atmosphère de calme apaisée du type “de toutes les façons, ne vous inquiétez pas, tout est déjà décidé, et quasiment plié, déjà-fait quoi !”....

« La prospective apaisée de Robertson sur des événements mondiaux aussi radicaux a rapidement suscité des commentaires sur Twitter, avec de nombreux utilisateurs se plaignant d’un véritable kidnapping de la réalité au profit d’une ‘légitimité religieuse”.
» De nombreux commentateurs ont plaisanté en disant que le lien de Robertson entre la réélection de Trump et l'apocalypse ainsi décrite était une raison suffisante pour inciter à voter pour Joe Biden à la place.
» Comme de nombreux autres magnats télé-religieux, Robertson est renommé comme un fervent partisan du président Trump. Les deux hommes semblent cependant s'être brouillés l'année dernière, lorsque le pasteur a affirmé que le président “perdait le mandat du ciel” en ordonnant le retrait des troupes américaines de Syrie [et donc en perdant une occasion de lancer une guerre où Israël aurait sa part très belle]. »

J’ignore s’il est rassurant de savoir en plus,
1) que Robertson prédit la fin du monde assez régulièrement depuis les années1970 (mais l’on observera que certains, et pas des moindres, la prédisent depuis l’origine du monde) ;
2) qu’il l’a déjà prédite précisément pour 1982, puis pour 2007 ;
3) que 1982 était une année de pression maximale de la tension vers la possibilité d’un affrontement nucléaire à cause de la crise des missiles en Europe (dite “crise des euromissiles”) ; que 2007 fut l’année de la plus grande possibilité d’une attaque à très grande échelle des USA contre l’Iran, là aussi avec probable intervention d’Israël.

Tout cela étant bien entendu, lu et relu, cette intervention de Robertson ne saurait surprendre puisqu’il en est coutumier et qu’il ressemble tellement à l’image avinée qu’on se fait de ces charlatans de l’esprit le plus bas, qui vous parlent d’une tradition si bien adaptée aux pratiques modernistes de tous ordres, du fric-TV aux attaques déstructurantes de l’époque Bush et de la constante agressive israélienne. En un sens, c’est dire qu’on a les prophètes (sans majuscule) qu’on mérite. Mon impression est tout de même que cette médiocrité manifeste n’empêchera pas que cette prévision sera plus entendue que d’autres, en d’autres occasions.. Question d’époque.

Et puis, on le sait, les gens sont moutonniers, sans grandeur, effarés de ce qu’ils ressentent sourdement autour d’eux, effrayés de perspectives qu’ils n’osent mesurer à leur aune véritable. Il ne manque pas de commentateurs, autour d’eux, surtout parmi ceux qui font profession d’être de leur parti, de les soutenir, de les aimer même, pour les considérer aussitôt avec le plus grand mépris, parce qu’ils ne font rien, parce qu’ils ne se révoltent pas. Nous avons beaucoup, comme cela, d’imprécateurs de malheur qui dénoncent les hérétiques du courage de la révolte, eux, ces imprécateurs qui restent en arrière pour avoir plus de champ et mieux asséner leurs leçons. Je ne sais ce qui me soulève le cœur le plus haut, des vrais-collabos qui dénoncent une révolte qu’ils craignent tant de voir éclater, ou des faux-résistants qui accablent le tout-venant pour ne se pas révolter comme eux-mêmes recommandent de faire sans rien faire.

Mais tout cela n’est qu’anecdotique. Ce qu’il me paraît intéressant d’observer, c’est combien cette intervention d’un personnage aussi psychologiquement corrompu et intellectuellement pauvre qu’un Robertson, est susceptible d’accroître le sentiment d’irrémédiable catastrophe chez les faibles psychologies et les pauvres esprits des citoyens. Cela est dit comme d’un incident exemplaire de l’atmosphère et de ses potentialités telles qu’imposées par une époque volontairement délétère sinon pestilentielle et diabolique, corruptrice des psychologies,  et cela n’est dit nullement comme d’une orientation, d’un élan, d’une prévision.

Il me paraît simplement de fait que cette sorte de prévisions est en parfaite correspondance avec l’esprit du temps, ou si l’on pouvait dire le “dés-esprit du temps”, – la “pauvreté d’esprit”, la “faiblesse d’esprit”, toutes ces choses sans les vouloir, sans y céder, mais simplement comme effets du tourbillon tempétueux qui, dans ces temps morbides et catastrophiques, nous entraînent dans ce trou noir du monde parsemé des restes d’une civilisation qui se désintègre.

Vraiment, je n’ai aucune estime, aucun sentiment de respect pour un personnage tel que Robertson, dans le chef de ce qu’il représente à mes yeux (même si je parle par ouï-dire et par ce que je crois être d’intuition, mais je ne m’adresse qu’à la face publique qu’il nous offre). Je me le figure comme une sorte de faux-prophète en fer-blanc, un marchand du-temple tombé dans le bazar de récupération des déchets plastiques, un imposteur des restes d’une tradition fracassée et absolument souillée, retapée complètement moderne, dans ses aspects les plus bas et les plus vulgaires. Peut-être, – bis repetitat, – suis-je injuste en appréciant de la sorte, mais je ne fais que dire un “ressenti” comme ils disent comme une vertu, qui est d’abord un ressentiment du fond de l’âme. Il importe dans ces remarques que je fais, plutôt de distinguer combien l’ampleur de la terrifiante puissante des événements se saisit de nous, par les jugements les plus hauts et les impulsions les plus basses. Tout y concourt.

Il est extrêmement malheureux qu’il faille notamment trouver des signes de l’ampleur cosmique et métaphysique de la catastrophe qui nous défait, des signes marqués d’une si grande bassesse et d’une si piètre trace de l’esprit. La vulgarité de ces circonstances me glace et me conduit à penser que nous avons pour le moins ce que nous avons mérité, et que nous méritons plus médiocre, plus bas encore. C’est quelque chose de terrible, pour qui affronte avec une belle conscience une punition du Ciel d’une telle ampleur, de voir des êtres, – méritent-ils ce titre de gloire d’‘être’, car ‘sont-ils’ seulement ? – y réagir avec des sentiments et des comportements d’une telle pauvreté. Il s’agit bien du “dernier homme” de Nietzsche, de l’homme démocratique, l’homme-simulacre, aussi jetable que du plastique non-recyclable.

Peut-être, après tout, que le révérend Pat Robertson est de mon avis...