Dramaturgie-bouffe autour de Cuba

Journal dde.crisis de Philippe Grasset

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Dramaturgie-bouffe autour de Cuba

17 juillet 2021 – Je serais incliné à penser qu’il n’y a pas d’affaire qui, mieux que l’actuelle crise cubaine par rapport aux USA, présente l’extraordinaire ambiguïté des temps, la complète marche inversionniste des événements. Même pour moi, qui ai une grande souplesse de jugement entre mes deux pôles d’activisme, – Delenda Est Systema et l’inconnaissance, – l’exercice est à la fois périlleux, exemplaire et délicat à traiter.

Vous m’avez sans doute lu à ce propos et perçu que je n’ai pas hésité une seconde. Je me répète (un de mes exercices favoris pour les distraits) :

« Par conséquent, ma position générale est favorable à Cuba, en plus d’une espèce d’empathie affective pour cette aventure castriste. Cette attitude se retrouve dans mon jugement sur les événements actuels, qui sont de toutes les façons antiaméricanistes puisqu’antiSystème, par conséquent jugement favorable à Cuba.

» Ce qui est remarquable, c’est que je me trouve alors en opposition avec un segment politique US que je soutiens d’habitude, toujours par rapport au Système. Je me trouve plutôt du côté du gouvernement Biden dans sa dimension idéologique (critiqué pour n’être pas assez dur dans cette affaire), du côté d’un Sanders et d’une Alexandria Ocasio-Cortez. Il y a encore d’autres contradictions, au sein de la Grande Gauche wokeniste américaniste, ne serait-ce après tout que le zèle de la presseSystème à faire gonfler le simulacre de la “révolution de couleur” alors que la gauche démocrate, avec l’administration Biden que la presseSystème soutient d’habitude avec tant de constance, est plutôt favorable au régime par alignement pavlovien. (Il y a en fait bien plus de différences qu’on n’en décompte entre cette gauche des démocrates et le régime cubain, mais qu’importe pûisqu’il s’agit d’évolutions de communication attachées à) des perceptions absolument subjectives.) [...]

» Nous ne sommes pas au bout de l’imbroglio encombré d’un nombre impressionnant de nœuds gordiens. Il faut savoir slalomer, avec un seul but : Delenda Est Systema. »

Si je reviens là-dessus, ce n’est pas tant pour me justifier puisque je me suis déjà assez expliqué et qu’il n’y a vraiment rien qui doive être justifié tant est libre le champ des spéculations dans ces temps subjectivistes où la vérité n’existe plus que pour ceux qui parviennent à saisir habilement, au vol, une vérité-de-situation. Reste qu’il y a de nouvelles prises de position, qui sont remarquables, qui montrent qu’on se trouve peut-être, – possiblement, soyons prudents, – au départ d’une nouvelle crise spécifique... (Crise dans la crise, dans la Grande Crise, disons au troisième échelon, mais crise tout de même, ou bien appellerions-nous cela un “avatar crisique” plus ou moins durable ?)

L’ambiance, la montée crisique comme d’habitude avec le goût du paroxysme, se trouve bien résumée par deux nouvelles.

• La première est l’annonce par les BLM (Black Live Matters) d’un soutien inconditionnel à Cuba, dans une phraséologie évitant de trop s’aventurer dans les nuances entre “peuple cubain” et “gouvernement cubain”, et appuyant essentiellement sur l’embargo que les USA imposent à ce pays depuis plus d’un demi-siècle. Cet argument est évidemment difficilement réfutable, qui brouille toute possibilité d’un jugement circonstancié sur les responsabilités de l’actuelle situation et sur la légitimité des actuelles structures.

Vis-à-vis de cette prise de position des BLM, les réactions des conservateurs, populistes et trumpistes surtout, ainsi que nombre de dissidents anti-wokenistes, sont extrêmement vives et dans une orientation assez classique et assez peu intéressante, essentiellement basé sur l’anticommunisme venu des glaces anciennes de la Guerre Froide.

« L’organisation Black Lives Matter a publié une déclaration dans laquelle elle s'aligne clairement sur l'oppression brutale du peuple cubain par le gouvernement marxiste dans tout le pays, ce qui a suscité de nombreuses réactions, mais n'est guère surprenant étant donné que BLM a été fondée par des marxistes convaincus. », écrit P.J. Watson sur son site ‘PlanetNews’, publiant un texte fait uniquement de tweets (hostiles au gouvernement cubain, bien entendu).

• La seconde est un ensemble de pressions dans nombre de segments de la classe politique, à commencer par le maire de Miami, d’origine cubaine et né d’une famille anticastriste. Francis Suarez, né aux USA, est d’origine cubaine par son père Xavier (qui fut également maire de Miami), les Suarez faisant évidemment partie de la fraction anticastriste des Cubains de Floride, pour la plupart ayant fui Cuba pour des raisons politiques. Suarez est extrêmement belliciste dans sa rhétorique anticastriste/anticommuniste ; il est soutenu bien entendu, mais d’une façon indirecte pour ne pas être englobé dans une rhétorique trop guerrière, par le gouverneur DeSantis, dont on connaît l’essentiel rôle actuel dans l’opposition intérieure à Biden, au wokenisme et à toute la dynamique qui les entoure.

« Dans une interview accordée à Fox News mardi, le maire Francis Suarez a plaidé en faveur d'une intervention militaire américaine et a énuméré des exemples de guerres américaines antérieures impliquant des frappes aériennes. Lorsqu’on lui a demandé s’il suggérait que les États-Unis bombardent Cuba, M. Suarez a répondu : “Ce que je suggère, c’est que cette option doit être explorée et ne peut pas être simplement écartée comme une option qui n'est pas sur la table.”

» “Et il y a une variété de façons dont les militaires peuvent le faire. Mais c'est quelque chose qui doit être discuté et qui doit être considéré comme une option potentielle en plus d'une variété d'autres options qui peuvent être discutées”, a-t-il ajouté.

» Dans une autre interview accordée à Fox Business News mardi, Suarez a de nouveau plaidé pour une intervention militaire américaine. “Les États-Unis sont intervenus en Amérique latine à de nombreuses reprises et ont connu un grand succès”, a-t-il déclaré. Faisant référence à la guerre froide, Suarez a déclaré que Cuba était une menace pour les États-Unis parce que ce pays “exporte le communisme dans tout l'hémisphère”.

» Heureusement, il ne semble pas que l’administration Biden ait l'intention d’envahir ou de bombarder Cuba. Le département d’État a déclaré mardi qu'il étudiait les moyens de “soutenir” le peuple cubain, mais qu'il minimisait l’impact de l'embargo américain imposé à Cuba depuis des décennies. »

Ce texte est publié par le site libertarien de droite Antiwar.com, et l’on n’est pas sans remarquer que l’annonce que l’administration Biden n’a sans doute pas l’intention d’envahir Cuba est précédé d’un “Heureusement” significatif. On comprend que ce simple mot signifie que ce site n’est pas partisan d’une intervention à Cuba, exprimant ainsi sa position antiguerre intangible depuis sa création (notamment par Justin Raimondo) en 1996. Ainsi, même dans un texte venu de la droite conservatrice concernant une intention ultra-agressive d’un groupement qui se classe comme républicain et conservateur, on distingue indirectement une forte divergence, celle des libertariens antiguerre, qui conduit à suggérer rapidement et paradoxalement, sinon par défaut, que l’administration Biden a une politique raisonnable.

Laquelle administration se débat pour montrer un semblant de mécontentement vis-à-vis du gouvernement cubain tout en évitant toute condamnation et mesure de rétorsion sévère pour ne pas susciter le mécontentement de sa gauche, et particulièrement du mouvement wokeniste/BLM. Finalement, la ligne idéale, à la fois prudente et gauchisante, est bien représenté par un tweet à la fois... très prudent et un peu gauchisant, de Ben Rhodes, conseiller du président Obama et resté très proche de lui :
« Le peuple cubain souffre doublement d’un gouvernement répressif et d’un cruel embargo. Il mérite une politique qui renforce son pouvoir et l’aide à améliorer ses conditions de vie. » (Avec ça, on ne mange pas trop de pain, même si l’on goûte tout de même la saveur de l’appréciation “cruel embargo” de la part d’un homme qui fut aux affaires, immédiatement à la droite du Seigneur [Obama-Saint] pendant huit ans, pendant que l’embargo si cruel se poursuivait sans qu’il n’y ait jamais eu de la part de l’exécutif d’intention sérieuse de l’abolir.)

Le principal problème pour l’administration Biden poursuivant sa politique de réaction “molle”, c’est qu’elle risque de mécontenter fortement les Cubains vivant aux USA, et, au-delà, influencer négativement la communauté Latinos ; déjà, sa décision de ne pas accueillir de Cubains se réfugiant aux USA par mer, alors qu’elle ouvre par ailleurs complètement sa frontière Sud aux migrants, n’a pas provoqué un effet exaltant dans la communauté Cubano-Latinos. Ce risque de dégradation des relations existe également entre Latinos et Africains-Américains organisés principalement au sein des BLM, à la suite de la prise de position des BLM. C’est tout le schéma multiculturaliste des démocrates qui peut se voir ébranlé, alors que les conservateurs poussent au feu là où ils le peuvent, éventuellement pour diviser leurs adversaires pour ceux des conservateurs qui ont une réflexion tactique.

On comprend qu’arrivé à ce pont, et si ce malaise se poursuit, il est de moins en moins nécessaire de se prononcer, de prendre parti dans la crise, – ici, je parle pour moi, selon les conditions que j’ai évoquées. On retrouve en effet les conditions de la crise intérieure US d’une façon directe, et l’important est alors d’observer les conditions supplémentaires de dégradation de cette situation intérieur que provoquerait cette crise cubaine.

L’inévitable “colour revolution

Renversons maintenant le sablier de l’analyse, pour un point de vue complètement différent.

Sur ces événements se greffe la thèse de troubles organisés à Cuba par les forces habituelles du DeepState obsédées par la tactique de la révolution de couleur dont, pourtant, les résultats sont bien loin de ce que recherchent ces mêmes forces du même DeepState. C’est un facteur important, qui a pris ces derniers jours une audience de plus en plus pressante.

Le très-bon site Strategic-Culture.org a adopté cette approche, par le biais de deux de ses excellents collaborateurs :
• Finian Cunningham, le 15 juillet, qui développe ce qu’il juge être l’évidence d’une “révolution de couleur”, à l’occasion de l’aggravation de la situation de la pandémie-Covid à Cuba. Cunningham argue notamment que les troubles ont été précédés par la mise en place très rapide d’un ensemble massif de réseaux sociaux poussant à l’émeute, par une coalition d’acteurs dont les USA seraient le principal. (Cela se conçoit absolument : le DeepState peut agir comme il lui plaît et bon lui semble, à l’insu de Biden [ce n’est pas difficile], des démocrates, des BLM, bien qu’il soutienne à fond tout ce beau monde en temps normal)  ;
• Joaquin Flores, le 14 juillet, développe une très longue analyse, plaçant la crise cubaine au sein d’un vaste plan de déstabilisation lancé par diverses puissances institutionnalisées dans le style ‘Geat ReSet’, cherchant à installer des conditions capitalistiques extrêmes, et bien entendu principalement par le canal de groupes (officiels et autres) aux USA, et donc crise cubaine nécessairement organisée de l’extérieur.

Enfin, Strategic-Culture.org présente la synthèse de ce point de vue dans un éditorial qui place la crise cubaine en perspective, depuis l’assassinat de Kennedy, et notamment à la lumière des dernières révélations faites par le réalisateur Oliver Stone. On trouve ici la fin de l’éditorial du 16 juillet :

« ... [JFK] souhaitait normaliser les relations avec [l’URSS et Cuba] et éviter un engagement militaire au Viêt Nam. Près de trois ans après le début de sa présidence, le 22 novembre 1963, la CIA assassinait Kennedy en plein jour à Dallas, avec plusieurs tireurs clandestins. L'infortuné Lee Harvey Oswald fut  présenté comme le tireur isolé dans le cadre d’une campagne médiatique grotesque, puis d’un ‘cover-up’ officiel par la Commission Warren et son ridicule simulacre de la “balle magique”. Le réalisateur américain Oliver Stone a rappelé cet événement odieux dans une interview accordée aux médias cette semaine.

» La politique américaine de “regime change” a eu sa référence centrale aux États-Unis en 1963 avec l’assassinat du président Kennedy. Ce n’est pas une théorie du complot. C'est un fait. [...]

» Cuba est étranglé depuis six décennies par un embargo commercial illégal des États-Unis, malgré les appels répétés d'une majorité de nations à l’assemblée générale des Nations unies pour que ce blocus cesse. Le traitement barbare de Cuba par Washington est une expression de longue date de l’objectif de changement de régime dans ce pays socialiste, car il constitue un affront à l’arrogance impériale de l'Oncle Sam. Cette semaine, le président Biden a eu l’audace de qualifier Cuba d’“État failli”.

» La politique américaine de “regime change” n’est pas seulement destructrice et antidémocratique pour le reste du monde. Elle s'attaque aux droits fondamentaux des citoyens américains qui, en réalité, ne vivent pas dans une démocratie mais plutôt dans une oligarchie dirigée de manière irresponsable par une tyrannie de l'État profond [DeepState]. Comprendre ce qui se passe à Cuba est instructif à plus d’un titre pour prendre conscience du problème systémique du pouvoir américain et de la manière dont il doit être vaincu. »

On voit qu’avec cette analyse de la crise cubaine, on se trouve dans un tout autre domaine que celui qui est évoqué dans la première partie de cette page. Il faut noter qu’il n’y a pas unité autour de cette analyse dans les milieux indépendants et de la dissidence, au contraire de la plupart des circonstances du même genre, dominées par le soupçon de la “révolution de couleur” ; par exemple, Tom Fowdy, sur RT.com, dès le 12 juillet, qui ne croit pas à une telle action et estime simplement que Cuba est confronté à une aggravation de la pandémie à cause du blocus US interdisant l’acheminement de certains produits, cela exacerbant une crise sociale.

Dans le cadre de ma démarche, il importe peu qu’il y ait ou pas “révolution de couleur” ; ce qui importe est qu’il y ait débat sur la possibilité d’une telle manœuvre, dont vous remarquerez dans cette approche de Strategic-Culture.org qu’aucun élément de la crise intérieure US n’est sollicité de sa participation.

(Nota Bene à ce point – Mon jugement instinctif est qu’il y a implication des États-Unis, comme une sorte d’initiative pavlovienne, on dirait un spasme, – dès qu’il y a des troubles qu’on a causés ou pas, on alimente le feu, notamment avec des dollars parce que le billet est un excellent combustible. Qu’il y ait intention originelle et action organisatrice pour susciter les troubles est une autre question, que je laisse de côté comme de peu d’intérêt pour moi qui ne prétends en aucun cas au rôle d’historien convenable. Je n’ai nul besoin de démontrer l’éventuelle culpabilité [active ou passive qu’importe] de Washington D.C., – toujours présumé coupable et même “verrouillé coupable” par automatisme de la chose. Cela est fait sans souci de “leur justice” ni de “leur vérité”, en bon “immoraliste nietzschéen” adoptant pour preuve ultime le “si non è vero, è ben trovato”, qui implique que, dans le monde la communication et au vu des activités subversives désormais immémoriales des USA, l’apparence suffit à dire le vrai, – et par conséquent, puisqu’il s’agit effectivement de Washington D.C., c’est vérité-de-situation point  final.)

Mélangez le tout et secouez...

Mon propos, à moi, est bien de ne pas séparer l’élément “crise intérieure US” qui a suscité les diverses positions, contradictions, déclarations, etc., qu’on a vues en première partie, et l’élément “avatar-crisique”-“crise cubaine, recette ‘colour revolution’” ; au contraire, mélanger les deux éléments, secouer, voir le cocktail qu’on obtient... Extrêmement goûteux.

Faire et réussir ou rater une “colour revolution” à Kiev, à Teheran, à Caracas ou à Tbilissi, cela n’a rien à voir avec une “colour revolution”, réussie ou ratée, réelle ou pas, à La Havane. La perception intérieure aux USA, et par conséquent celle des politiciens démagogues, est complètement différente parce que Cuba c’est Cuba, qui fait complètement partie de l’histoire intérieure des USA. Peu importe donc que la “colour revolution” ait lieu ou non, encore en cours ou ratée, etc. ; l’important est qu’on en parle dans ce sens, donc que la perception aux USA incorpore cette possibilité qui devient alors un élément véridique de la situation politique intérieure des USA. Cela fait que cette “colour revolution”-là rencontre les affrontements en cours aux USA et, finalement et au bout du compte, elle les exacerbe.

On l’a déjà vu, cela conduit à des renversements d’alliance, dans mon chef en tout cas, puisqu’il s’avère que l’essentiel des gens de la droite populiste-trumpiste US en est encore à voir, lorsqu’on parle de Cuba, du communisme type années Eisenhower/Kennedy menaçant partout, et particulièrement dans les restes de la révolution castriste. Ils ne s’aperçoivent pas (sauf les libertariens d’Antiwar.com) qu’ils se retrouvent du côté des machinistes-manipulateurs d’une éventuelle “colour revolution”, laquelle qui serait le fait des globalistes (avec leurs complices et serviteurs de bien piètre caractère de la presseSystème) dénoncés par eux-mêmes (les populistes-trumpistes) comme leur pire ennemi-sataniste. Tout cela étant perception et la communication régnant, cela devient une vérité-de-situation bien embarrassante.

Au reste, de l’autre côté, le paradoxe de la position stratégique n’est pas moins évident. Les BLM, enfants-chéris des globalistes et de la mode-wokeniste qui fait frissonner toutes nos élites, soutiennent un gouvernement dont leurs amis globalistes veulent la tête. Sans doute les BLM se croient-ils vraiment marxistes, et croient-ils vraiment que les marxistes règnent en maîtres à La Havane. Bref, on est en plein dans les années 1950, pour affronter des problèmes des années 2020, – et alors, comment reprocher à quiconque de ne rien saisir de la moindre vérité-de-situation qui le met en porte-à-faux ?

Le résultat, c’est un beau désordre, condition favorite de la Grande Crise. Je veux bien, comme l’indique Strategic-Culture.org, que le pauvre Biden ait finalement qualifié Cuba d’“État failli” et de “gouvernement communiste”, mais contraint et forcé et du bout de ses lèvres chuchotantes, tant on a vu qu’il est mal à l’aise sur ce terrain ; quant à accélérer l’interventionnisme, peut-être jusqu’à une opération militaire que réclament les Sanchez et autres anticastristes de Floride sur fond d’une union de certaines bases populaires républicains-démocrates, comme si les USA pouvaient retrouver une “union nationale” dans une telle absurdité-irréelle...

A moins qu’il y aillent vraiment ?! Ils nous referaient une “Baie des cochons-2.0”, car les milices cubaines sont d’un autre niveau et d’une autre trempe que les néo-nazis de l’armée ukrainienne, et comme d’autre part l’habileté conquérante des forces US est décidément bien connue... Dans ce royaume d’Absurdie, la moindre hypothèse, et surtout la plus folle, est à considérer, tandis que rien n’est assuré ni prévisible en aucune manière ; reste dans tous les cas que la perception encaisse toutes ces absurdités comme autant de possibilités, et réagit à mesure.

Tenez, pour terminer, un extrait de l’article de Michael Tracey sur ce rassemblement à Union City, dans le New Jersey, rassemblement républicain-démocrate qui était en réalité “Cubains-anticastristes de tous les partis”, avec l’un ou l’autre officiel, dont Brian Stack, ancien maire de Union City et sénateur de la législature de l’État du New Jersey ; quelques remarques à la fois anachroniques et désabusées, ou bien démagogiques as usual, montrant bien que toute l’attention des USA est dans ses propres querelles intérieures, que la crise cubaine ne ferait qu’ajouter un peu de sel sur une plaie béante, que même la rhétorique de la splendeur interventionniste de ce faux-Empire est passée à l’heure du retrait piteux de l’Afghanistan...

« Étant l'un des rares anglophones à s’adresser au rassemblement, Stack s'est vraiment lâché et a explicitement appelé à une invasion militaire américaine de Cuba. “De la même manière que nous avons libéré d'autres pays”, m’a-t-il dit ensuite. “Nous aurions dû être à Cuba il y a de nombreuses années... tout comme nous y sommes allés et avons libéré le Koweït”. Il a poursuivi : “Cuba, sans aucun doute - ce devrait être une démocratie. Et nous avons maintenant une grande opportunité avec quelque chose qui se trouve à 90 miles des Florida Keys, d’en faire une démocratie.”

» A la question (posée par moi) de savoir si les récentes inventions militaires américaines devaient inspirer confiance dans la réussite de ce plan qu'il proposait, Stack a répondu : “Écoutez, je ne suis pas ici pour juger les invasions dans le monde.” [...]

» Mais, et c’est peut-être le plus important, Union City est la base politique du sénateur démocrate du New Jersey Bob Menendez, ancien collègue de Biden au Sénat et actuel tout-puissant président de la commission des relations étrangères du Sénat. Il a précédé Stack en tant que maire d'Union City. Si Menendez adopte généralement une ligne dure prévisible sur la politique cubaine, tout comme sur la plupart des autres questions de politique étrangère, y compris Israël et l'Iran, il s’est jusqu’à présent abstenu de suivre les traces de Stack en d’approuvant une intervention militaire pure et simple. (Bien qu'il ait proclamé cette semaine sur MSNBC, “Nous devons défier le régime”, mais on ignore ce que cela signifie exactement). Voici ce que m’a dit Juan Pachon, un porte-parole de Menendez :

» “Pour répondre à votre question, le président Menendez a été absolument clair lors d’une rencontre avec la presse en début de semaine en disant qu'il n’y aura PAS d’invasion ou d’intervention militaire à Cuba. Je vous laisse le citer, mais il a rappelé que même les présidents les plus hostiles au régime et les plus anticommunistes, depuis Reagan, n’avaient jamais envisagé cette possibilité. Pour mon patron, c’est exactement le type de rhétorique et de théories que le régime [cubain] veut promouvoir.” »

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