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1093La grève générale de 24 heures du 2 novembre à Oakland, – la première depuis 65 ans dans ce grand port californien, – a-t-elle été un succès, au sens habituel du mot pour une grève ? Question à $64.000, personne ne semblant capable de répondre. Par contre, le mouvement de grève lancé par Occupy Oakland à la suite des violences des 25-26 octobre a mis en évidence l’extraordinaire confusion, le désordre régnant du côté de la maire Jean Quan dont personne ne sait précisément quelle politique est la sienne dans cette affaire, – et, par conséquent, le désordre qui régna hier et qui règne encore à Oakland, entérinant de ce point de vue une victoire de Occupy Oakland. (Malgré des débordements de fort peu d’intérêt, avec quelques vitres cassées, de la part de grouype incontrôlés, qualifiés d’“anarchistes”.)
Dans un texte du 3 novembre 2011, décrivant la façon dont les protestataires avaient occupé et, semble-t-il, bloqué le port de Oakland, la correspondant de Russia Today Lucy Kafanov notait :
«The RT correspondent notes the enormous contrast between the heavy-handed tactics employed by the Oakland Police Department (OPD) last week, when a tough crackdown resulted in several hundred arrests and injury to an Iraq war veteran, on the one hand, and the massive yet peaceful demonstration in the city port, with almost zero police presence, on the other.»
Cette absence de la police est-elle une tactique délibérée de la maire, ou bien simplement un résultat du désordre, ou le fait du désarroi des policiers eux-mêmes ? Mystère, semble-t-il ; dans tous les cas, un autre texte de Kafanov, en date du 2 novembre 2011, détaille la confusion régnant chez les policiers, quant aux consignes de la mairie et à leur mission ; il s’agit là, non pas d’opinions, ou de témoignages informels, mais bien de communications officielles.
«The optimism of the protesters is in contrast to the confusion shown by Oakland’s mayor, Jean Quan, in her handling of the ongoing movement. Given the differing moods of the involved parties, even the demonstrators themselves were not sure what the day would bring.
»On November 1, Quan issued a statement saying: “It is my hope that tomorrow's general strike is peaceful and places the issues of the 99 per cent front and center. I am working with the police chief to make sure that the pro-99 per cent activists – whose cause I support – will have the freedom to get their message across without the conflict that marred last week's events.”
»Though she offers her support today, a week ago she was the one to order that the encampments of protesters in city parks be raided by police. Authorities from 17 different agencies aided in the crackdown, after which Scott Olsen ended up in a critical condition. While the Iraq War veteran has shown remarkable recovery in the days since, what lies ahead for the Occupy movement still seems uncertain.
»The mayor’s approach has also failed to impress Paul Junge, the public policy director of Oakland’s Metropolitan Chamber of Commerce. “Your lack of clarity is putting our shared future in Oakland at risk,” Junge wrote to the mayor in a letter this week. “We want to be clear: should Wednesday's planned protests go awry, someone will need to be held accountable.”
»Also on November 1, the Oakland Police Officers’ Association issued an open letter in which they admitted that they were not sure what to make of the mayor’s handling of events either. “As your police officers, we are confused,” reads the letter. It goes on to note that all city workers, except for police officers, were told they could take November 2 off to participate in the general strike. “That’s hundreds of city workers encouraged to take off work to participate in the protest against ‘the establishment',’” the letter goes on. “But aren’t the mayor and her administration part of the establishment that are paying city employees to protest? Is it the city’s intention to have city employees on both sides of a skirmish line?” “It is all very confusing to us,” the letter concluded.»
• Là-dessus, pour ajouter à la confusion, il y a ces nouvelles, du même 3 novembre 2011, d’une attaque violente de la police, soudain mobilisée et rassemblée, contre une zone où campaient 100 à 150 protestataires, investie par 200 à 300 policiers, dont nombre d’entre eux avaient leurs badges et leurs noms masqués, – ce qui semblerait figurer une sorte de raids un peu à la manière des forces spéciales, avec une centaine d’arrestations… «According to unconfirmed reports, many police officers are not wearing badges and have tape covering their names. Police officers are using tear gas and bullets which, basically, consist of heavy pellets of cloth… […] According to the latest reports, the protesters’ camp, known as the “Occupation Plaza”, is police-free right now, while the crowd in the area is getting increasingly agitated, with people chanting “We are Oakland!”»
En grève ou pas, Oakland ? Dans tous les cas, dans un désordre extraordinaire, – qui semble donc régner dans la ville, non pas du fait de Occupy Oakland, mais du fait d’abord des autorités, entre la maire Quan qui ordonnait le 24 octobre l’évacuation manu militari du site Occupy, puis qui affirmait sa solidarité avec Occupy après la grave blessure du Marine Scott Olsen, qui ne donne semble-t-il plus aucune consigne précise pour maintenir l’ordre durant la grève générale du 2 novembre, sinon d’annoncer qu’elle “encourage” une participation à la grève de la part des divers salariés dans la ville, – sauf les policiers qui, eux, n’y comprennent plus rien. La Chambre de Commerce, elle, élève une protestation contre la maire Quan tandis que le port d’Oakland, lui, semble et bien bloqué, – ou bien peut-être pas, qui sait… Tandis qu’on signale ce “raid” policier dont nul ne sait d’où il vient et qui l’a ordonné, – ou s’il s’est ordonné de lui-même, après tout.
Il y a eu des manifestations, et l’on avance le chiffre de 10.000 personnes. Effectivement, les protestataires d’Occupy exultent car, plutôt qu’une grève classique en bonne et due forme, ils ont obtenu la mise en évidence du désordre et de la division des autorités, de l’incompétence par manque de coordination et par indécision de la direction de la ville.
Ainsi, Oakland, les 2-3 novembre, ressemble à un symbole de la situation générale des USA à l’heure d’Occupy. Le mouvement reste parcellaire, insaisissable dans ses évolutions et dans ses intentions, mais il obtient la mise en évidence du désordre de l’establishment devant ces actions, avec des divisions incroyables dans son sein. La maire Quan est complètement écartelée entre la nécessité assez molle de maintenir l’ordre, et la nécessité de plus en plus impérative de figurer d’une manière démagogique au côté d’un mouvement qui a le vent en poupe dans le système de la communication. On voit se confirmer l’évolution de la situation, qui conduit beaucoup plus à placer le pouvoir devant ses contradictions, qu’à développer un mouvement (du côté d'Occupy) tentant de “remporter” directement des “victoires” dans le sens habituel des actions de rues, que ce soit un grève ou une émeute. On admettra une fois de plus, à la fois l’originalité de la situation, et l’efficacité de l’action d’Occupy, dont on peut être moins sûr que jamais qu’elle soit précisément planifiée, mais qui semble invinciblement et mystérieusement attirée par la tactique de l’objectif indirect de provoquer désordre et discorde chez l’adversaire. Il y a ainsi une logique en marche, qui semble à la fois être générée par le mouvement Occupy mais d’une façon assez inconsciente, simplement en suivant les pressions du système de la communication, à la fois nourrie par une direction du Système qui ne sait absolument pas comment réagir. Il est manifeste que la formule est excellente, sinon idéale, dans la mesure où elle n’handicape en rien le mouvement Occupy, où elle ne l’implique pas dans des actions violentes qui le dévaloriseraient et lui feraient perdre sa popularité, tandis qu’elle met à nu l’inconsistance et l’incompétence du pouvoir. Très vite, les slogans d’hostilité au “1%” développés par les “99%” vont ajouter aux accusations de corruption, de cupidité, etc., ceux d’incompétence dans l’exercice de leur pouvoir.
Il est possible, comme l’estime Patrick Buchanan, que le mouvement Occupy débouchera finalement sur des affrontements très violents. Mais ce sera, au vu des événements actuels, dans des conditions particulièrement désastreuses pour le pouvoir, parce que celui-ci s’avère incapable de maintenir un ordre qui rendrait inacceptable aux yeux d’une majorité le désordre des “99%”, et par conséquent ce pouvoir porterait par avance la responsabilité de désordres qui viendraient de ses réactions tardives et contradictoires.
Mis en ligne le 3 novembre 2011 à 15H57
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