De la guerre qui n’a pas eu lieu en Syrie

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De la guerre qui n’a pas eu lieu en Syrie

2 avril 2012 – La crise syrienne a atteint aujourd’hui un point de rupture de la séquence lancée dans le courant 2011, qui devait aboutir à la chute d’Assad. Cette rupture nous signifie que le cours de la crise est changé et que, selon la perception de l’événement, la chute d’Assad n’est plus du tout l’issue assurée de la crise, que c’est peut-être même, désormais, une des moins probables. (Patrick Cockburn, le 26 mars 2012 sur CounterPunch, cité dans le texte déjà référencé du même 31 mars 2012 : «The year-long effort to overthrow President Bashar al-Assad and his government has failed. […] The Syrian regime will not fall without a radical change in the balance of forces…»)

Un point intéressant dans cette évolution est “la guerre de l’information” sur l’évolution de la crise, guerre qui n’a pas eu lieu pour des raisons précises, qui a été remplacée par une “guerre de la communication” portant sur la perception de l’évolution de la crise que l’un des deux partis sur place (le régime Assad) n’a absolument pas compris, et que l’autre (les réseaux soutenant l’“opposition”) a très bien compris, – c’est-à-dire trop bien compris, jusqu’à croire que cette guerre-là, conduite sans aucune précaution, suffirait à l’emporter. Certes, ce type de schéma a déjà été largement expérimenté, développé, surtout depuis 9/11 et les bonnes résolutions sur l’usage systématique de la “non-vérité” (comme quelque chose n’ayant pas de relations avec la vérité, comme narrative, ou fable) ; cela, aussitôt annoncé en termes clairs, notamment par Rumsfeld. Comme il est logique selon notre programme-vertu de progrès indéfini, jamais la formule n’a été poussée à un tel degré de pureté, de dépouillement de toute interférence, qu’elle ne l’a été en Syrie ; rien que pour cela, il s’agit d’un évènement qu’il importe de saluer.

(On notera que nous prenons une attention extrême à séparer le concept de “guerre de l’information” du concept de “guerre de la communication”, – le second concept correspondant au “système de la communication”, comme nous désignons la chose, qui est complètement différent d’un “système de communication” au sens technique. Le système de la communication, et, par conséquent, la guerre de la communication, implique l’absence complète de ce qui est considéré comme référence objective pour l’information. Le système de la communication se caractérise alors par l’information elle-même dans la mesure du disponible et selon des références nécessairement subjectives allant de l’engagement idéologique à l’intuition haute ; par la communication de l’information subjective par les divers moyens techniques et humains, y compris ceux qu’on nomme “les réseaux sociaux” avec leurs diversités politiques et humaines ; par les interventions professionnelles ou pas de moyens imagiers inédits sur les lieux mêmes, et la mise en scène de scènes élaborées par ces moyens ; par le rôle fondamental de la psychologie, activement dans l’élaboration de toutes ces choses, passivement dans l’effet obtenu aussi bien sur ceux qui manipulent que sur ceux qui perçoivent l’effet de ces manipulations en y reconnaissant une manipulation ou en n’y voyant que du feu... Dans le système de la communication, l’information “brute” non objective, y compris une information brute qui serait l’objet d’actions de propagande dans un sens ou l’autre, est loin, très loin, d’occuper la première place de l’activité, au contraire de ce que l’on peut prétendre. Nous sommes conduits à considérer le système de la communication comme un phénomène nouveau, étrange, extrêmement vaste et puissant, et, surtout, extrêmement ambiguë dans ses effets [ce que nous nommons son caractère-Janus]. D’autre part, ses caractères si spécifiques et multiples font de lui-même une spécificité, un système autonome et indépendant, qui n’a plus qu’un très lointain rapport avec la seule question de l’information, déformée ou pas. Nous estimons que le “système de la communication” est, aujourd’hui, la principale source de la puissance.)

Divers documents ont été diffusés, ces trois ou quatre dernières semaines pour fixer des bornes chronologiques approximatives, qui constituent autant d’éléments épars de “la guerre de la communication”. Ils sont très divers et contrastés et brouillent considérablement le sentiment général sur la situation à laquelle s’intéressait le système de la communication (la situation humanitaire, la valeur morale respective des adversaires, la décision politique, dans l’ordre). Leur diffusion et les effets de leur diffusion marquent le point de rupture de la séquence indiqué plus haut. Nous donnons notre propre sélection dans un ordre chronologique.

• Le 13 mars 2012, Robert Mackey résumait, dans le New York Times, ce dont tout le monde était persuadée : “La Syrie est en train de perdre la bataille pour le contrôle de l’information” («Nearly 12 months into the uprising in Syria, government attempts to stifle news coverage by barring independent reporters from the country are still being confounded by a network of activists who have now posted more than 40,000 video clips on YouTube, offering glimpses of protests and documenting a violent crackdown on dissent.») Pour la plupart des lecteurs de cette sorte de texte, l’apparente objectivité du titre (“contrôle de l’information”), – malgré le paradoxe subversif de l’expression oxymorique comprenant le mot “contrôle” et le mot “information”, – se traduisait immédiatement en termes moraux. Nous transcrirons cette “apparente objectivité” dans ce sens “moral”, avec précaution en termes simples pour ne pas surcharger les esprits et les penseurs qui vont avec, de cette façon : “le méchant est en train de perdre la bataille pour empêcher qu’on sache qu’il est le méchant”.

• Pourtant, dans la même période nous séparant de ce 13 mars, diverses sources alimentaient un flot nouveau de mise en doute de la validité des matériels divers (employons ce terme plutôt que celui d’“informations”) utilisés par ceux qui croyaient, eux, être en train de gagner ce que le professionnel de service nomme “la bataille pour le contrôle de l’information”. (On a eu des échos de cela au niveau des médias, sur notre site, le 13 mars 2012 et le 16 mars 2012.) Certains articles ont donné des analyses descriptives très fouillées des moyens extrêmement exotiques, et suscités autant par une volonté de montage délibéré que par le goût du fun propre à l’esprit des “réseaux sociaux”, utilisés pour réaliser ce que les professionnels de la communication publicitaire nomme “création d’évènements”, sur vidéos diverses notamment, et des “événements” évidemment favorables à la cause anti-Assad. (On peut lire, le 27 mars 2012, un long article sur le site The Daily Beast à ce propos. Le titre, presque poétique et charmeur, mesure la couleur assez originale de l’entreprise consistant à mettre en scène les “témoignages” sur la “réalité virtualiste” de la chose : “L’embellissement sur enregistrement de la cause des rebelles syrien”.) Parallèlement, divers rapports ont commencé à paraître, relativisant la répartition des responsabilités des atrocités de ces affrontements. (Voir, par exemple, Russia Today, le 2 mars 2012.) Comme dans l’évolution de l’affaire libyenne, il est apparu que les rebelles n’étaient pas seulement des anges et avaient leur part dans les massacres.

• Le 27 mars 2012, Jason Ditz, sur Antiwar.com, éditait une très courte synthèse, comme fait excellemment ce site, sur ces pratiques de “communication” des rebelles, ou “opposition” au régime Assad. L’idée était que la censure exercée par le régime Assad contre les journalistes occidentaux avait été paradoxalement la cause de ce fait que les divers “faiseurs d’évènements” pro-rebelles étaient devenus pendant la séquence concernée la seule source d’“information” pour l’extérieur américaniste-occidentaliste, infligeant une défaite sévère de “communication” au régime Assad. C’était une explication plus sophistiquée du “La Syrie est en train de perdre la bataille pour le contrôle de l’information” du NYT.

«The Assad government’s censorship of private media has proven a boon for Syria’s rebel factions which have released video footage directly to a western media that has eagerly gobbled up first hand accounts. The problem is that the rebels have an agenda to sell, and new video evidence shows that they aren’t shy about making up facts on the ground to make the videos more exciting. […]

»The regime has regularly disputed the videos coming out of rebel factions, and in this case at least they seem to have a valid point. The authenticity of the footage in other videos may or may not be real, but certainly seems suspect. Which is of course why censorship programs have backfired in many cases. Iran had the exact same problem in 2009, when opposition factions had full control over the narrative in the Western media because of a ban on private journalists. These nations may fear the agendas of Western media outlets, but the practical consequence of banning them is to replace their message with a fully opposition manufactured one.»

• Le 29 mars 2012, Russia Today (RT) consacre un long texte à “l’autocensure des médias-Système” (notre traduction adaptée à notre langage courant). Cette autocensure fonctionne à plein, peut-être plus encore qu’au temps de la guerre en Irak, et, surtout, avec des moyens très différents et selon une démarche différente. Le fait de cette autocensure est avéré, d’abord parce qu’une version de l’affaire traitée est choisie d’une façon arbitraire, a priori et sans réel intérêt pour la réalité. RT cite le critique des médias Danny Schechter : «If you are extremely driven by a particular point of view, you tend to select facts that support your point of view. That makes you an advocate, it doesn’t make you a journalist.» Le processus lui-même est assez simple ; il s’agit d’un entraînement, suscité selon les lignes-Système habituelles, pour une cause ramenée d’une manière simpliste au manichéisme habituel, et exposée d’une façon “excitante”, selon les règles de l’entertainment, ou de l’hollywoodisme. RT cite le journaliste Matthew Lee : «A cynic would say, it’s such a popular issue in western capitals that the media decided to go all in, and you’ll see Anderson Cooper saying “I can’t believe it, this is the worst thing that’s ever happened. And its like, did you hear of Sri Lanka? Ever heard of the Congo? Have you heard of Sudan where 2 million people were killed?”» Tout cela conduit à l’acte pur et simple, et brutal sans nul doute, de la censure, avec le comportement qui va avec de la plupart des “journalistes”, et journalistes-Système ; et cette brutalité nous ramenant brutalement, c’est le cas, à la réalité… Voici donc l’aventure survenue à Sharmine Narwani, experte respectée du domaine et que nous avons nous-mêmes citée (voir le 26 mars 2012).

«Author and journalist Sharmine Narwani – contributor to the Huffington Post – says her Syria articles questioning the official story – were rejected. To Narwani, Western media coverage is a theatre of the absurd. “These people are flown in first class, they have staff, they have support staff for those staff members, they move in large groups. They have vans, and drives and translators. You’re not going in quietly. You’re coming in lights, camera, action”, she explained.

»Viewers are given little, if any, background to the issues causing the crisis. What's also missing is balance. “They’ll go straight to opposition leaders in X place. They’ll go straight for the things that validate their perspective, or the perspective of their Governments, frankly. Instead of seeking out alternative information, information that may be challenges the dominant narrative”, said Narwani.»

Fun et entertainment

Il est impossible de traiter cette question à la façon de ceux qui s’y trouvent impliqués, en noir et blanc, sur un mode manichéen, – que l’on soit pour l’un ou l’autre camp. On reconnaîtra à propos du cas lui-même qu’il y a eu et qu’il y a effectivement une distorsion considérable contre le régime Assad. (Sur le fond et sans qu’il soit nécessaire de s’y arrêter car là n’est pas notre sujet, il nous semble qu’il est concevable qu’on puisse considérer de bonne foi que, dans cette sorte de situation, des excès et des atrocités sont commises des deux côtés ; l’affaire libyenne est la plus récente référence historique en la matière.) On reconnaîtra également que la censure imposée par le régime Assad a sans aucun doute joué contre lui ; pour autant, il nous paraît impossible d’affirmer, tant s’en faut, qu’une attitude contraire aurait rétabli la balance des perceptions.

…Peu importe finalement, car ce qui nous importe vraiment est d’examiner le processus qui, à partir d’une situation de la communication complètement défavorable au côté Assad, conduit à une situation politique réelle qui ne lui est nullement défavorable sans pourtant qu’un acte décisif ait été posé par lui, dans le domaine concerné, pour y parvenir ; et qu’alors, effectivement, et là aussi sans bouleversement majeur, la défaveur pour lui de la situation de la communication s’étiole et perd de plus en plus de son impact. Nous allons exposer d’une façon hypothétique plusieurs éléments qui, à notre sens, expliquent cette évolution, qui pourrait paraître inattendue à première vue.

• Dans un premier sens, sollicité par la remarque sur l’attitude du gouvernement Assad (censure), il y a notre remarque centrale que cette décision est une fausse explication. (“[I]mpossible d’affirmer, tant s’en faut, qu’une attitude contraire aurait rétabli la balance des perceptions” en faveur d’Assad.) Ce qui est en cause ici est la délégitimation massive de tous les pouvoirs et la fin de toute référence objective, notamment pour l’information. Cela signifie, selon nous, que si des journalistes étrangers avaient été autorisés à opérer librement par le régime Assad, leurs rapports auraient été biaisés de la même façon. (Et, de la même façon, comme ce fut le cas, des chroniqueurs “dissidents” auraient affirmé qu’il y avait tromperie.) Ce qui compte dans ce cas c’est le triomphe, pendant un certain laps de temps, du système de la communication qui revient, dans ce cas, au triomphe d’une campagne publicitaire et de promotion. (Au lieu de :«That makes you an advocate, it doesn’t make you a journalist», dire plutôt : “Cela fait de vous un promoteur de relations publiques, pas un journaliste…”) Si nos gouvernements “démocratiques” du bloc BAO ont moins à souffrir de ce handicap, ce n’est pas parce qu’ils sont “démocratiques” (what a joke), ni moins encore légitimes (what a super-joke), mais parce qu’ils sont des créatures du système de la communication.

Ce qui a fait la puissance du système de la communication dans cette affaire syrienne, c’est qu’il s’est trouvé sur un espace libéré de toutes contraintes de référence au réel, puisque sans aucun principe référentiel (fin de l’objectivité), et donc dans un espace totalement livré à la technique de la communication. Notre hypothèse est que chez nombre de ces opérationnels faussaires fabricants de montages-vidéos et ainsi fournisseurs exclusifs de la presse-Système d’“informations” “excitantes” d’un point de vue promotionnel, on trouve à parts minoritaires égales une conviction (anti-Assad) et une “corruption missionnaire” (membres ou proches d’un service chargé de désinformation), et à part majoritaire souvent écrasante le goût et la virtuosité de la technique de communication, de la “création d’évènements” (ce que nous nommons le côté fun). On observera que ce dernier aspect se retrouve dans l’autre camp, sur d’autres champs de batailles : le succès des hackers type-Anonymous, qui met le FBI dans tous ses états, est également largement du au goût et à la virtuosité dans ce registre du fun, de la part de jeunes internautes qui sont prodigieusement experts dans le maniement des outils de l’Internet. Il s’agit d’une sorte de “facteur objectif” (pour une fois…) du système de la communication, retrouvé également dans les “réseaux sociaux”, qui va dans tous les sens à cause du caractère-Janus de ce système.

Ainsi, ce type de campagne ne garantit aucune conviction, aucune solidité sur le fond, mais bien la conviction de surface (une “écume de conviction” comme on dit l’“écume des jours”) que fournissent les activités de promotion publicitaire et de relations publiques. C’est le “règne de la quantité” : le poids et la masse de la répétition d’artefacts divers qu’on qualifie d’“informations”, mais qui ne le sont aucunement, constituent l’investissement (dans le sens d’une attaque réussie) par un climat d’entertainment d’esprits vides d’informations, d’expérience et de jugements, et fermés à toute intuition. Cela ne dure qu’autant que dure l’effet de masse. Cela ne fixe rien, et lorsque la quantité décroît à la suite de l’étiolement de l’excitation, l’intérêt fun et la conviction d’apparence s’étiolent à mesure, et l’entertainment ne l’est plus du tout. (Qu’on nous pardonne de parler entertainment et fun pour une tragédie qui voit la mort et la souffrance de tant de gens, et tant de destruction, mais c’est bien ainsi que “travaille” le Système. [«L’opinion publique, ça se travaille», disait en 1999 un officier de l’OTAN affecté au service de relations publiques et chargé d’“informer” le monde sur la guerre du Kosovo]. On jugera ainsi de sa grandeur et de sa beauté tragique, au Système.) En Libye, la farce macabre a réussi parce que BHL, Sarko et “les Rafale à contre-emploi” sont intervenus pour fixer la chose dans le domaine de la réalité sanglante, avec les moyens qu’il fallait.

• …Cette fois, le contraire s’est produit, et c’est le deuxième élément qui nous semble capital. Ce sont les Russes qui sont intervenus, et dans l’autre sens, démontrant complètement qu’effectivement “ce type de campagne ne garantit aucune conviction, aucune solidité sur le fond” et que, placé devant un obstacle sérieux, elle entre dans un processus de dissolution, comme c’est le cas actuellement où les commentaires divergents et critiques de la ligne anti-Assad se multiplient et où les “preuves” des massacres unilatéraux commencent à s’étioler. C’est-à-dire que s’est développé le même phénomène, mais à l’inverse, de ce qui est décrit plus haut, à propos de la Libye, avec l’intervention de “BHL, Sarko et ‘les Rafale à contre-emploi’”. La situation après le développement d’une campagne du système de la communication nécessite une intervention de la réalité, dont le Système ne doute pas qu’elle se fera dans le sens du terrain ainsi préparé (comme une campagne de promotion publicitaire et de relations publiques aboutit à la vente massive et immédiate du produit promu). Cette fois, l’intervention de la réalité s’est faite dans le sens contraire qui était attendu, sous la forme des vetos russe et chinois à l’ONU, en même temps que les Russes renforçaient militairement le régime Assad et déployaient d’une façon visible l’une ou l’autre unité navale à Tartus, et ainsi de suite.

Cela observé, il y a une chose plus intéressante encore à examiner, qui est la cause de l’engagement russe. La Russie, jusqu’à l’automne 2011, avait conservé une attitude réservée, malgré l’aggravation constante de la situation en Syrie, notamment pour le régime Assad. La réaction russe a commencé à peser à partir du tout début de 2012, avec l’envoi de moyens électroniques et de défense aérienne puissants, contrôlés par des techniciens russes, ce qui signifiait largement plus qu’un envoi d’armement, mais bien un engagement militaire russe spécifique. Ces actes reflétaient la maturation des analyses et les décisions russes élaborées en décembre 2011. Notre hypothèse à ce point est qu’il faut établir un lien avec la situation en Russie telle qu’elle est apparue avec les deux élections (législatives de décembre 2011 et présidentielles de mars 2012) et la perception d’une attaque contre le pouvoir en place par le système de la communication (voir notre texte du 14 mars 2012). C’est ce type de “guerre nouvelle” que Igor Panarine définissait à la fin février (voir le 3 mars 2012) de cette façon :

«The Russian leader should primarily recognize that ideology and information are the long-standing vulnerabilities of the Russian state, which caused it to collapse twice in the 20th Century. Therefore, it would be helpful for the development of Russian statehood if the government would establish a State Ideology (Spirituality, Greatness, Dignity) and set up a special mechanism for countering foreign media aggression through a set of administrative, PR and media-related measures. This would enable Russia to become a pan-Eurasian center of gravity in both economic and spiritual terms.»

Le 25 février, trois jours avant que Panarine ne s’exprime, le candidat Poutine avait exprimé son avis sur la politique US (du bloc BAO), notamment au Moyen-Orient, d’une façon qui liait cette analyse aux activités du système de la communication en Syrie, hors de toute référence objective et sans la moindre légitimité, et, par conséquence indirecte et selon la logique des situation, aux évènements de Russie où les mêmes activités du système de la communication étaient à l’œuvre. (Poutine, le 25 février : «“Under the guise of trying to prevent the spread of weapons of mass destruction, [the US] are attempting something else entirely and setting different goals – regime change,” news agencies quote Putin as saying. The Russian PM pointed out that US foreign policy, including that in the Middle East, was expensive, inefficient and largely unpredictable. Putin also added that, among other things, it may eventually disserve Israel. “They changed regimes in North Africa. What will they do next? In the end, Israel may find itself between the devil and the deep blue sea” he said.»)

Ainsi, selon notre hypothèse, tous les évènements de cette séquence, également du côté russe, sont à placer principalement sous l’égide du développement des activités agressives (anti-russes dans ce cas, comme elles sont anti-Assad en Syrie, et l’une comme l’autre orientées vers le “regime change”) du système de la communication. Il ne s’agit donc plus ni de censure, ni même de virtualisme, mais de l’activité de “création d’évènements” ayant comme but la déstabilisation par “regime change”, en une activité typique du Système. Dans ce cas, qui est de plus en plus courant et tend à devenir un “modèle” de l’action dissolvante du Système en général, la soi-disant “politique” du bloc BAO n’est qu’un legs de convenance donnant à nos directions politiques l’impression d’être d’une utilité quelconque, et d’une existence à mesure, dans cette très grande tragédie bouffe.

Nous avons une conviction intuitive ; une conviction intuitive est ce qu’elle est, elle ne se démontre pas parce qu’elle est l’ennemie de l’enquête habituelle d’une raison subvertie par le Système ; par conséquent, le lecteur la prend pour ce qu’elle est, selon ce qu’il en croit, jugeant en fonction de ce qu’il sait de cette sorte de démarche intellectuelle chez nous et de ses correspondances avec les évènements... Notre conviction intuitive est que, s’il n’y avait pas eu les “troubles publicitaires” qui ont touché la Russie à partir de fin novembre 2011, provoquant la prise de conscience mobilisatrice qu’on vient de détailler, les Russes n’auraient pas apprécié aussi gravement l’évolution de la situation syrienne, menaçant d’être un double en bien plus grave de l’évolution libyenne, justement à partir de cette période décembre 2011-janvier 2012, justement à cause essentiellement de cette activité subversive du système de la communication (contre la Syrie d’Assad et contre eux parallèlement). Le veto de l’ONU du 4 février 2012 couronna cet effort ; l’“hystérie” des réactions de quelques ambassadeurs des contrées américanistes-occidentalistes dans cette digne enceinte illustra la fureur du Système ainsi mis en échec, et le comportement désormais habituellement maniaque des sapiens de service.

Nous doutons que la direction russe ait réalisé clairement la circonstance que nous décrivons, menant à son action résolue, – quoique certaines personnalités russes peuvent nous réserver des surprises dans les domaines de la lucidité et de l’originalité du jugement, – mais nous ne doutons pas de la circonstance. Notre analyse donne la première place, dans cet affrontement, au système de la communication. On remarquera que ce système tient son rôle habituel de Janus puisqu’il est l’ordonnateur de ces déstabilisations, mais aussi celui qui donne indirectement l’alarme sur les effets des actions qu’il suscite, et les moyens de riposter contre ces effets.