Cette presseSystème de merde me fatigue

Journal dde.crisis de Philippe Grasset

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Cette presseSystème de merde me fatigue

14 juillet 2021 – J’ai reçu ma carte de journaliste professionnel en décembre 1967 ou au tout début 1968 (vérifiez si ce n’est pas une FakeNews, les gars). J’avais 23 ans. Jusqu’à ma retraite légale, j’ai porté ce titre – avec une certaine fierté à peu près jusqu’aux “années Gorbatchev”, puis en l’ayant perdue dans l’esprit et la chose devenue un fardeau à partir des années 1990. Aujourd’hui et retraite bien entamée, je ne suis plus rien à cet égard, et bon débarras ! Cela me permet d’être bien plus qu’un “journaliste professionnel”, un commentateur libre de la presse dissidente.

J’ai mis à la poubelle avec un délice inattendu ce titre qui est aujourd’hui un complet déshonneur pour l’essentiel de ce qu’on lit dans la “grande presse”, dans la presseSystème devenue un extraordinaire rassemblement d’esclaves hallucinés, vivant dans un monde tout entier régi par ce remarquable déterminisme-narrativiste impliquant une “servilité volontaire” ;  mais en plus, en toute inconscience et simulacre de bonne foi parce que de surcroit ces tristes bouffons de quelque roi enfui y croient et que leur volonté est réduite à l’état de réflexe pavlovien ; chez eux, on est esclave pavloviennement... On n’en est d’ailleurs pas mécontent et l’on affiche les causes philosophiques de cette satisfaction (je parle pour le “camp du Bien”, cet étrange canular qui ramène la travail de la communication au niveau d’un infantilisme infatué favorisé par l’affectivisme régnant dans la modernité-tardive).

Cet accès de sainte & saine-colère m’est venu à la lecture d’un articlede RT.com (les seuls dans les médias anglophones d’un standing international à montrer avec constance un certain respect pour les vérités-de-situation). Le titre, je ne vous le traduit pas parce qu’il faut garder en original les traces hurlantes de l’infamie, et j’y ajoute quelques tweets de journalistes non-conformes :

RT.com : « Western media use images of PRO-government rally, protest in Miami to illustrate Cuban unrest as Havana warns of ‘soft coup’ »

Ben Norton : « La désinformation sur Cuba est si flagrante : le journal britannique néolibéral pro-guerre The Guardian a utilisé une photo de Cubains se ralliant avec le drapeau du 26 juillet (le nom du mouvement révolutionnaire fondé par Fidel Castro) et a faussement affirmé qu'ils étaient “des manifestants anti-gouvernementaux”. »

Alan MacLeod : Une tonne de “Corporate Medias”[presseSystème], dont le Financial Times, Fox News, The New York Times et The Guardian ont utilisé une photo d'un rassemblement PRO-gouvernement à Cuba pour illustrer leurs articles sur les manifestations antigouvernementales, prétendant faussement que les foules immenses sont du côté des États-Unis. » (Pour l’instant, seul le Guardian a édité une rectification)

MacLeod toujours :« [Voici] des choses choquantes et qui donnent à réfléchir sur les droits de l’homme à Cuba . On y trouve même un immense camp de prisonniers où des gens du monde entier sont emmenés, torturés et détenus indéfiniment sans jugement... » (Pour la visite, rendez-vous à la baie de Guantanamo, dans l’enceinte de la Guantanamo US Army Base.)

C’est tout de même une singulière performance dans le chef d’un travail bâclé, pour des professionnels du simulacre, d’ainsi nous balancer tous la même image, venue de la photographe d’AP Eliane Aponte, prise lors d’une manifestation pro-gouvernementale, dimanche dans le pays de Cuba. (RT.com ne précise pas si Aponte a transmis cette photo en FakeImage, ou bien s’ils se tous saisis de la chose sans y jeter un coup d’œil, persuadés que toute manif à La Havane est, selon la consigne, évidemment anti-gouvernementale.)

Parmi les glorieux guerriers de l’information, donc, le GuardianFox News, le Financial Times,  le New York Times, le Washington Times, l’officiel (USIS) Voice of America à deuxoccasions. CNN a fait différent, plutôt dans la délicate nuance géographique ; le réseau s’est servi sur place, à Miami : une photo AFP d’une manif anticastriste à Miamiprésentée comme une photo d’une manif antigouvernementale à La Havane.

Et ainsi vogue la galère...

... Mais faisons dans l’ambiguïté nuancée

Là-dessus et une fois fois apaisée cette saine & sainte-colère. Je m’attarde à quelques considérations sur le fond de cette affaire cubaine..

Soutenue par réflexe pavlovien par le département d’État (sans doute également producteur d’un soutien actif aux manifestants anticastristes, toujours le réflexe pavlovien de la “colour revolution”, – sans doute marron-Havane), cette agitation cubaine nous confronte à des contradictions bien dans l’air du désordre du temps. Ainsi nous voit-on changer de bord, dans une de ces occasions que j’ai souvent évoquées où les frontière entre Système et antiSystème se brouillent, bougent et s’échappent, jusqu’à s’inverser.

Il est évident pour moi que Cuba, qui a fait une “révolution communiste” (qui ne l’était pas au départ et l’est devenue à cause de l’hostilité US) avec des aspects positifs, a sa position d’abord définie par la complète et constante pression que les USA exercent sur lui, avec plus d’un demi-siècle d’embargo. C’est une des plus belles et durables performance de lâcheté et de cruauté de la part des USA, donc du Système.

(Tiens,Oliver Stone nous révèle qu’avant son assassinat, Kennedy voulait, parmi ses projets de détente radicale avec le monde communiste, supprimer l’embargo contre Cuba.)

Par conséquent, ma position générale est favorable à Cuba, en plus d’une espèce d’empathie affective pour cette aventure castriste. Cette attitude se retrouve dans mon jugement sur les événements actuels, qui sont de toutes les façons antiaméricanistes puisqu’antiSystème, par conséquent jugement favorable à Cuba.

Ce qui est remarquable, c’est que je me trouve alors en opposition avec un segment politique US que je soutiens d’habitude, toujours par rapport au Système. Je me trouve plutôt du côté du gouvernement Biden dans sa dimension idéologique (critiqué pour n’être pas assez dur dans cette affaire), du côté d’un Sanders et d’une Alexandria Ocasio-Cortez. Il y a encore d’autres contradictions, au sein de la Grande Gauche wokeniste américaniste, ne serait-ce après tout que le zèle de la presseSystème à faire gonfler le simulacre de la “révolution de couleur” alors que la gauche démocrate, avec l’administration Biden que la presseSystème soutient d’habitude avec tant de constance, est plutôt favorable au régime par alignement pavlovien. (Il y a en fait bien plus de différences qu’on n’en décompte entre cette gauche des démocrates et le régime cubain, mais qu’importe pûisqu’il s’agit d’évolutions de communication attachées à) des perceptions absolument subjectives.) 

Dans tous les cas, cette administration Biden qui applaudit officiellement mais du bout des doigts aux manifs antigouvernementales de Cuba, annonce en un “même temps” très macronien qu’elle interdira toute entrée aux USA de réfugiés politiques venus par mer(ce qui concerne complètement d’éventuels Cubains antigouvernementaux en fuite, ce me semble). Les Cubains fuyant le pays n’ont donc plus qu’à débarquer au Mexique pour entrer aux USA par leur frontière Sud (toute grande ouverte sous l’aimable surveillance de Kamala Harris, comme l’on sait).

Nous ne sommes pas au bout de l’imbroglio encombré d’un nombre impressionnant de nœuds gordiens. Il faut savoir slalomer, avec un seul but : Delenda Est Systema.