Apologie de Macron

Journal dde.crisis de Philippe Grasset

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Apologie de Macron

28 février 2024 (13H00) – Le gamin a fait des vagues. Il est content et sa maman l’a certainement félicité, avec quelques gâteries à l’appui ; au fond, j’en suis sûr, tout au fond de lui-même il jubile. Alors, on le prend au sérieux, non ? Ce n’est pas de Gaulle, mais bon, – pas si loin, dans un autre style, plus pentu en un sens, plus de sorties en boite à partouze, plus hussard que cuirassier, tel le Céline des quartiers chics et de “la banque” (comme on disait du temps des 200 Familles qui faisaient ‘Les grandes Familles’)... Ni slalom géant ni slalom spécial, – mais “un slalom de dingue” ! Et puis un côté “La Garde meurt mais ne se rend pas” ou conseiller financier de la division SS ‘Charlemagne’ qui défend son Führer-Zelenski jusqu’à son dernier bunker.

Moi j’avoue, au départ je ne l’ai pas pris au sérieux, c’est-à-dire au tragique. Quand j’ai lu la nouvelle, – s’il le faut on bouffera du moujik au petit déjeuner, – je me suis dit :“C’est du vrai Macron, rien à dire” Et puis : “Ca va nous faire une Troisième dernière ? Et alors ? Tout a une fin et il faut savoir, comme dit le grand poète Charles Aznavour, ‘quitter la scène’”.

Et puis, je me suis pris un peu plus au sérieux en prenant Macron un peu plus au sérieux. Et s’il y pensait vraiment ? Si son hypothèse, toute encombrée qu’elle est d’ambitions et d’arrogances accessoires, comme celle, dérisoire, de présider au destin de l’Europe, était fondée sur la perception qu’il faut se préparer à prendre les armes directement contre l’envahisseur barbare venu du fond des grandes steppes désolées ? A y penser, diable, cela est très possible. Il est, je veux dire qu’il devrait être notoire que Macron est l’homme le plus mal informé de France de la situation réelle en Ukraine, manquant de maturité et de culture dans une mesure telle qu’il est bien incapable de comprendre ce qu’est la force inhérente et métaphysique de la Russie, comme le caractère catastrophique du conflit nucléaire. Toutes ses sources, qui lui font croire à la puissance de son information, sont toutes orientées et filtrées par ses courtisans de façon à lui faire entendre la seule musique que ses oreilles acceptent. Par conséquent, la conviction est loyale, la franchise est complète, l’imbécile s’exprime sans entraves.

Cela n’empêche qu’on n’a pu empêcher qu’arrivent jusqu’à lui les  bruits des victoires russes depuis Avdeyevka et soudain se sont emparées de lui, successivement, – la panique de voir la marche victorieuse des Ukrainiens jusqu’à Moscou et au-delà soudain entravée, – et l’ivresse d’être celui qui volerait au secours de ceux qui sont ainsi frappés par l’infamie. Sa proposition est donc bien sérieuse et, sérieusement, elle fut prise comme telle. On put alors décompter les dissidents incurables (la Slovaquie en tête) et les pétochards révélés (Suédois, Polonais, Italiens, Allemands, Britts, Tchèques, etc. y compris cette grande courgette cuite à la vapeur de Stoltenberg de l’OTAN, – euh, à peu près tout le monde plus ou moins).

Le grand exploit de Macron, au niveau de la communication, ce fut d’engendrer la plus folle des séances Christoforou-Mercouris jamais vues, où l’on vit le second d’habitude sérieux comme un pape incapable de retenir des emportements échevelés entrecoupés d’éclats de rire nerveux sous les ricanements de satisfaction du premier. Je crois qu’ils se moquaient absolument et sans dissimulation et je n’en fus pas contrarié, écartant les derniers restes de mes élans de patriote un peu rance...

Le seul moment de sérieux est au tout début, avant de passer à la vitesse supérieure et de décrire l’état pourtant indescriptible du mélange de panique, de colère et de peur, des différents chefs de guerre européens :

Christoforou : « Alexander, je vais juste vous demander ce que vous faites de la déclaration de Macron...

Mercouris : « Oh, je pense que c’est une réaction de panique devant la façon dont la situation en Ukraine est en train d’accélérer hors de leur contrôle ... [...]

» Je voudrais juste ajouter un dernier mot : pour que Macron panique à ce point et ait convoqué cette réunion d’une façon si pressante, une telle précipitation suggère qu’ils ont reçu des informations d’Ukraine montrant que la situation est encore pire que celle que nous connaissons nous-mêmes, nous qui suivons les choses jour après jour, heure après heure... »

Et pourtant, cette page de journal que vous lisez prétend être une apologie... Et pourtant, il me faut bien justifier mon titre de façon décisive, n’est-ce pas ! Eh bien, je vais vous dire où, selon moi, se trouve “la vertu de Macron”, celle qui mérite une “Apologie”, quelque part entre et au-delà de ‘Apologie de Socrate’ et ‘L’Apologie de Raymond Sebond’. Nous y sommes.

C’est en ceci que Macron, avec son esclandre extraordinaire et sa panique qui ne l’est pas moins, – par les effets de raffut et d’agitation dialectique et médiatique obtenus, – a donné vie à l’hypothèse jusqu’alors considérée comme une ‘Fantasy’-bouffe d’une guerre directe contre la Russie. Il a poussé le bouchon un peu trop loin, et justement dépassant le stade de la ‘Fantasy’ pour atteindre celui de la réelle possibilité d’une guerre avec la Russie. Il a montré “dans le dur” l’extraordinaire impasse psychologique et opérationnelle où se trouvent l’Occident et la Russie par la faute entière et exclusive du premier, avec la seule “stratégie de survie” concevable si l’on suit la logique de l’escalade qu’instaurent ces projets, conduisant à l’extrême à rien de moins que l’enterrement à petites pompes de la survivance de l’espèce humaine. Comme trouvaille, cela vaut bien celle du transhumanisme, n’est-ce pas ?

Comprenez-moi bien : je n’applaudis pas à l’homme ni à son acte. Au contraire, je mets au crédit d’une intelligence si complètement pervertie qu’elle en devient stupidité et aveuglement complets, cette idée folle de la possibilité d’une guerre dont il serait le général commandant en chef, et ainsi, chemin faisant, et donc au crédit de cette même intelligence devenue stupidité et aveuglement complets, cette idée folle de la réalisation bien concrète dans les esprits de la possibilité en vérité opérationnelle de cette folie. Là est l’événement, le Grand Événement, involontaire, inconscient, irresponsable, – toutes ces vertus cardinales du mini-président en toc, – l’événement dont se sont aussitôt saisi les forces supérieures et terribles qui nous précipitent dans la GrandeCrise pour nous purger de tous  nos vices, bassesses et difformités infâmes.

Gloire au Camarade-Président Macron ! Il ne nous manque plus que son Petit Livre Rouge devenu Arc-en-ciel !

Car je prétends, moi, que c’est un pas en avant immense qui a été franchi, ce pas décisif où l’on brise avec panique, colère et grande peur un faux miroir, un terrible miroir déformant, qui vous renvoyait une image faussaire, trompeuse et sans pitié, un simulacre de réalité. Désormais, nous savons qu’il s’agit bien de la guerre... Et que cela nous ait été exposé par l’idiot dont parle Shakespeare n’a guère d’importance ; on dira que c’est “un idiot utile”, et voilà que tout est dit... « Une histoire, racontée par un idiot, pleine de bruit et de fureur, et qui ne signifie rien. »

« She [The Queen] should have died hereafter ;
There would have been a time for such a word.—
To-morrow, and to-morrow, and to-morrow,
Creeps in this petty pace from day to day,
To the last syllable of recorded time ;
And all our yesterdays have lighted fools
The way to dusty death. Out, out, brief candle !

Life's but a walking shadow ; a poor player,
That struts and frets his hour upon the stage,
And then is heard no more : it is a tale
Told by an idiot, full of sound and fury,
Signifying nothing
. »

« ...La vie n’est qu’une ombre errante ; un pauvre acteur
Qui se pavane et frétille une heure durant sur la scène
Et qu’ensuite on n’entend plus ; c’est une histoire
Racontée par un idiot, pleine de bruit et de fureur,
Et qui ne signifie rien
. »

Qui pourrait croire que la reine morte, – comme celle de Montherlant, – est la guerre à venir, et Macron un Macbeth transformé en idiot racontant sa propre histoire “qui ne signifie rien” ? Nous sommes dans les temps des grandes folies du monde.

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