Analyse de la culpabilité US dans la crise géorgienne

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C’est également aux USA qu’on trouve, comme autant de traces précieuses, les analyses les plus complètes et les plus rigoureuses de la “culpabilité US” dans l’actuelle crise géorgienne. “Culpabilité US”, c’est le titre de l’analyse, excellente en tous points, que donne Steve Clemons le 9 août sur son site The Washington Note. Il lie justement cette crise à l’affaire de l’indépendance du Kosovo, et à la façon dont certaines propositions russes de compromis furent écartées sans le moindre ménagement par la partie US: «Georgia-Russia Clash: American Culpability and the Kosovo Connection»

La parole à Steve Clemons, qui nous donne une note d’analyse dont pourraient s’inspirer nombre de dirigeants européens, pour éventuellement tirer quelques conclusions sur la façon de traiter avec les Russes.

«…My own view is that the U.S. has displayed a reckless disregard for Russian interests for some time. I don't like Russia's swing to greater domestic authoritarianism and worry about its stiffened posture on a number of international fronts – but Simes convinces me in his important Foreign Affairs essay, "Losing Russia," that much of what we are seeing unfold between Russia and Georgia involves a high quotient of American culpability.

»When Kosovo declared independence and the US and other European states recognized it – thus sidestepping Russia's veto in the United Nations Security Council – many of us believed that the price for Russian cooperation in other major global problems just went much higher and that the chance of a clash over Georgia's breakaway border provinces increased dramatically.

»By pushing Kosovo the way the US did and aggravating nationalist sensitivities, Russia could in reaction be rationally expected to further integrate and cultivate South Ossetia and Abkhazia under de facto Russian control and pull these provinces that border Russia away from the state of Georgia.

»At the time, there was word from senior level sources that Russia had asked the US to stretch an independence process for Kosovo over a longer stretch of time -- and tie to it some process of independence for the two autonomous Georgia provinces. In exchange, Russia would not veto the creation of a new state of Kosovo at the Security Council. The U.S. rejected Russia's secret entreaties and instead rushed recognition of Kosovo and said damn the consequences.

»Now thousands are dead. The fact is that a combination of American recklessness, serious miscalculation and over-reach by Georgian President Mikheil Saakashvili, as well as Russia's forceful reassertion of its regional national interests and status as an oil and gas rich, tough international player means America and Europe have yet again helped generate a crisis that tests US global credibility.

»I think that Saakashvili who has been agitating for Georgia's membership in NATO just lost his chance with his own reckless behavior. Saakashvili's decision to send tanks into South Ossetia gave Russia the trigger that it may have wanted to send in more of its own troops and weapon systems. Russia was ready. Putin, now prime minister of Russia but still the center of power, was relaxing and chatting with George W. Bush in the bird's nest Olympic stadium in Beijing looking quite in control and confident.»

On aura lu tout cela avec à l’esprit le fait, – non pas la spéculation, mais le fait avéré, que nombre de dirigeants et hauts fonctionnaires européens, lorsqu’ils soutinrent le processus menant à l’indépendance du Kosovo, savaient parfaitement la finalité déstructurante de l’initiative, son illégitimité par rapport aux normes internationales, son profond déséquilibre par rapport aux intérêts russes, sa charge explosive pour les relations à venir avec la Russie. Nous insistons sur ceci qu’il s’agit d’un fait avéré. Le jugement était courant dans les milieux européens, qu’on concluait, sur un ton désolé : “Mais nous ne pouvons pas faire autrement que de suivre les USA”. (Pourquoi? Pas de réponse.)

Le drame de la servilité et de l’aveuglement de la diplomatie européennes, notamment dans l’affaire du Kosovo qui conduit directement à la crise géorgienne mais aussi dans tout le reste depuis 17 ans, ce n’est pas le drame de l’inculture et de la sottise par autisme comme dans le cas de la diplomatie américaniste, c’est le drame de la lâcheté psychologique. La plupart d’entre eux savaient parfaitement où tout cela nous menait. Ils l’ont chuchoté à quelques confidents et ils ont suivi, la mort dans l’âme mais le verbe haut, – pour que le public soit rassuré et les Américains contents.


Mis en ligne le 10 août 2008 à 15H11