Notes d’un jour à l’autre

Analyse

   Forum

Il n'y a pas de commentaires associés a cet article. Vous pouvez réagir.

   Imprimer

 1335

Notes d’un jour à l’autre

09 novembre 2016 – Nous nous proposons, pour nous faire patienter en attendant que se décantent les premiers effets de l’historique journée du 8 novembre 2016, de reprendre d’une façon générale la signification de cette campagne électorale USA-2016. (Elle en vaut la peine et nous la percevons, vue en perspective, non seulement comme “historique” mais comme “héroïque”.) Nous pensons que ce rappel permettra aux esprits de retrouver une perception plus générale, sinon globale, de la signification et de l’importance de cet événement qui s’est constitué à partir d’un nombre important de phénomènes tous plus “sacrilèges” les uns que les autres par rapport aux habitudes, aux us & coutumes, aux règles et aux diktats du Système.

Nous allons procéder d’une façon un peu différente de l’habitude pour nos Notes d’Analyse, en reprenant des extraits de textes que nous avons publiés sur cet événement, que nous jugeons assez significatifs pour permettre de présenter cette signification générale et cette importance de l’événement, – “cette signification générale et cette importance” selon nous, cela va de soi. Nous présenterons ces extraits avec des remarques et réflexions qui témoigneront de l’évolution de notre perception, mais aussi de la fermeté principielle de notre point de vue dans le suivi de la chose.

En tout cela, et dès l’origine de ce qu’on nommerait la “traçabilité de l’événement” (traçabilité du point de vue conceptuel bien plus que juridique), c’est-à-dire dès l’évidence de la position dominante (sondage) de Trump dans le parti républicain, et malgré sa position hors-parti, nous avons considéré cette élection comme fondamentale. C’est plus que jamais notre jugement, sans aucun doute, et cela à la lumière des effets qu’il faut en attendre bien entendu. Cette position contraste singulièrement avec ce que l’on vit, ce que l'on entendit et ce que l'on lut du courant général (presse-Système essentiellement mais aussi bien parfois ce qui se dit hors- ou antiSystème), – en Europe et singulièrement en France, où l’on ne traita l’“événement” que selon ses aspects anecdotiques sinon exotiques, en plus de la doxa robotisée débitée sans le moindre rapport avec une vérité-de-situation quelconque (refrain : fascisme, racisme, féminisme, xénophobie, etc.).

Il y aura cinq extraits qui, chacun, illustreront un des aspects essentiels de l’événement. Le rassemblement de ces éléments en un ensemble nous permettra de disposer d’une vision générale de l’événement, donc de l’enjeu de l’événement, donc de l’intensité du temps métahistorique que nous vivons.

USA ? Rien à signaler

Somme toute, nous pourrions relire sans trop de confusion ni trop nous ennuyer ce que nous écrivions, la première fois que nous écrivîmes quelque chose sur The-Donald (Trump) à propos de sa candidature pour les présidentielles USA-2016. A ce moment-là (juin 2015), le paysage intérieur des USA était désespérant pour ceux qui sentaient que tout existait pour susciter des changements gigantesques au coeur de cette puissance, ce qui est une condition nécessaire et sans doute suffisante pour achever la course de l’effondrement du Système ; ceux-là même qui, malgré ce constat, gardaient disons un soupçon d’amertume devant les tentatives déjouées et les occasions ratées, entre les débris du Tea Party, les souvenirs d’Occupy Wall Street, les éclairs d’espérance comme les événements de Madison dans le Wisconsin en février 2011, la belle chevauchée de Ron Paul entre 2008 et 2012, la formidable aventure d’Edward Snowden mettant à nu la NSA en juin 2013, tout cela à partir d’une crise (9/15 de 2008) où la Bête s’était montrée comme semblant brusquement terrassée, le ventre ouvert sur ses boyaux puants... De tout cela, il semblait ne plus rien rester, aucun signe de fureur et de révolte tandis que la situation ne cessait d’empirer, et la Bête pouvait sembler invincible à certains.

Nous n’avons jamais varié dans notre conviction que cette fulgurante surpuissance qui semble pour certains écarter tout risque d’effondrement, recèle tout au fond d’elle-même cet étrange et morbide penchant pour l’autodestruction que nous ne cessons de rappeler ; depuis que cette conviction a pris racine, nous nous sommes fait un devoir de vigilance à cet égard pour en guetter les premiers signes, de ce penchant-là, morbide et étrange, – et une vigilance du type-antiSystème, à ne pas confondre avec celle des zombies-Système en place dans les salons et les talk-shows, qui veillent à policer votre liberté de parole. Nous ne rations aucune occasion d’exprimer notre ardente espérance que, cette fois, avec ce petit grain de sable, ce pourrait être la bonne ; il y a, dans cet alacrité qui peut sembler illusoire à certains, au contraire la permanence d’une psychologie aux aguets, dont la pression elle-même entretient un climat qui peut devenir propice à l’activation décisive de la surpuissance-devenue-autodestruction.

Enter The-Donald

Ainsi ceci était-il donc écrit, dans dedefensa.org, le 20 juin 2015, à propos de Donald Trump qui venait d’annoncer sa candidature... (Nous y ajoutons en gras, ce qui ne l’était nullement dans le texte initial, les passages qui nous paraissent importants en ceci qu’ils correspondent à notre présent état de l’esprit, selon une psychologie nourrie à ce que nous jugeons être une intuition qui nous est donnée de l’extérieur qu’une telle chose, une telle catastrophe que représente notre époque, ne peut aller au terme de sa volonté de déstructuration et d’entropisation sans se heurter à l’obstacle de forces contraires et décisives qui sauraient animer et accélérer ce désir profond d’autodestruction de la Bête.) :

« Une de nos lectrices nous ayant demandé ce que dedefensa.org pensait de la candidature présidentielle du milliardaire Donald Trump, – qui n’en est pas à sa première tentative, – nous répondrons que nous ne savons (pas encore?) quoi penser sinon qu’une telle candidature ne peut en aucun cas être pire que toutes les autres réunies, et que l’extraordinaire incertitude de l’époque peut susciter des surprises. Trump est un “super-riche” (capital de $4,1 milliards), ce qui conduit finalement à une sorte de vertu puisqu’il s’agit de l’indépendance du candidat à l’égard de tout donateur, pouvoir d’intérêt, etc., et que Trump financera lui-même sa campagne. Autre vertu, l’establishment ne l’aime pas du tout, comme le signale l’appréciation du New York Daily New du pro-israélien Mort Zuckerman (la candidature Trump est “une blague” et Trump “un clown”). Les neocons le détestent parce qu’il a de bonnes relations avec Poutine et que son discours le rapproche d’un Pat Buchanan, populiste, un tantinet isolationniste et pas loin d’être protectionniste, soit un anti-globaliste (Trump n'aime pas les traités TPP et TTIP) et un adversaire décidé du multiculturalisme et de l’immigration (Trump a des plans grandioses pour boucler la frontière Sud des USA).

Trump est candidat pour les primaires républicaines (il le fut déjà en 1996 et n’y fut pas ridicule). Éventuellement, on pourrait croire que dans l’uniformité extraordinairement médiocre et corrompue de la politique US, Trump pourrait amener un peu de désordre bienvenu, de type antiSystème, au milieu du duel annoncé Hillary Clinton-Jeb Bush. S’il voit que le Politburo du parti républicain veut lui barrer la route, il peut choisir d’être candidat indépendant. Une analogie à cet égard est celle du milliardaire Ross Perrot, qui obtint un résultat remarquable de 18% de voix en 1992 comme candidat indépendant. Le temps d’alors était celui d’un désarroi US prononcé (“une crise d’identité”, écrivait William Pfaff), mais à des années-lumière du désordre de la Grande Crise générale d’aujourd’hui qui peut faire naître des circonstances exceptionnelles. Dans UNZ.com, Ilina Mercer fait un portrait somme toute flatteur de Trump, ce 19 juin 2015. »

Il n’y a que de la logique là-dedans, et aucun don de prophétie ni exceptionnelle vision de l’avenir : ce que nous écrivions sur Trump, nous aurions pu l’écrire pour n’importe qui d’autre présentant des caractères similaires. La raison en est ceci que notre logique, – c’est la seule vertu que nous nous reconnaissons dans cette occurrence-là, – est celle d’un seul mot d’ordre, d’une seule pensée, d’une seule conviction, peut-être d’une seule intuition : Delenda Est Systema.

Le chemin parcouru à cet égard en dix-sept mois est prodigieux. L’on doit envisager ce point particulier en fonction de l’évolution de la situation générale depuis 2014, précisément depuis le passage en pleine effervescence de la crise ukrainienne (coup de force de Kiev le 22 février 2014) parce qu’à ce moment s’ouvrit une nouvelle époque de la communication avec l’achèvement de la désintégration de la réalité (voir nos Glossaire.dde sur le déterminisme-narrativiste et sur Vérité-de-situation & Vérité). En 2014-2015, le désordre et ce qui tendait à devenir un “chaos-nouveau” se concentraient sur les zones extérieures aux USA (Europe/Grèce puis crise des réfugiés dans le bloc-BAO, relations avec la Russie/Ukraine, Moyen-Orient/Syrie), les USA dans leur état stagnant se trouvant relativement épargnés par le courant central de la dynamique de la Grande Crise Générale du système/de l’effondrement du Système. Par rapport à la période 2008-2013 (de la crise 9/15 de 2008 à la fin de la chevauchée Ron Paul et l’affaire Snowden), les USA s’étaient retrouvés dans une certaine paralysie-impuissance qui empêchait tout mouvement brutal ou changement important, mis à part les quelques incidents épisodiques opposant la communauté noire à la police dans une ville ou l’autre à propos d’une “bavure” policière.

Les USA suivaient bien entendu le mouvement interventionniste extérieur (Libye, Syrie, Ukraine), quand ils ne le conduisaient pas. Même là, d’ailleurs, on percevait une certaine paralysie-impuissance, d’ailleurs en concentrant l’activité sur la communication, et surtout indirectement, par le relais des emportements médiatiques anti-Assad et russophobes. Cette attitude pouvait d’ailleurs montrer un aspect excellent (pour notre point de vue antiSystème) dans certaines circonstances ; par exemple, ce cas où la pression de communication de l’opinion publique conduisit la direction-Système à abandonner un projet de frappe US contre la Syrie en août-septembre 2013, et confirma le président Obama dans sa politique principale qu’il exprima crûment et d’une façon provocante à un sénateur venu l’exhorter à lancer l’attaque malgré tout, malgré l’absence de soutien, malgré l’hostilité du public, etc. : « Quand on ne fait rien, on ne fait pas de conneries ! »

Les zombies-Système qui n’ont rien vu venir

En somme, Obama avait réussi lors de son second mandat à se transformer en une sorte de président-étouffoir, écartant toute décision sur les problèmes centraux de politique extérieure et intérieure, se repliant dans les contextes intérieurs sur des réactions de type sociétal à fleur de peau, avec pour les pimenter un Obamacare catastrophique, sans rien envisager de quelque façon que ce soit la moindre réforme de fond du système de l’influence corruptrice, du système financier et des complexes industriels divers qui ont envahi les USA comme un cancer généralisé en nourrissant une dette effrénée. L’impression qui sourdait de USA/Obama-II (2013-2015) était celle d’une usine à gaz catastrophique, mais assez discrètement catastrophique, et qui éventuellement coulait mais plutôt comme un Titanic assez discret. Nul n’imaginait, après l’avoir pourtant prédite tant de fois ou plutôt parce qu’on l’avait prédite tant de fois sans rien en avoir, qu’une colère révolutionnaire couvait avec cette violence collective d'elle-même et en elle-même ; et cette colère, “révolutionnaire” parce que la révolution se fait aujourd’hui au niveau de la communication, prit l’aspect d’un fantastique contrepied qui fit basculer le Système ; car enfin, comment donc n’ont-ils pas vu venir Trump, comment l’ont-ils laissé aller jusqu’où il a été, comment l’ont-ils laissé allumer la mèche d’une bombe dont les effets de l’explosion initiale ne sont pas prêts de s’apaiser mais plutôt s’opérationnalise selon le schéma classique de l’explosion en chaîne ?

Ainsi écrivions-nous, le 30 janvier 2016 :

« Plus que jamais, notre incrédulité sarcastique va à cette sorte de silence par désintérêt puis par intérêt fractionné qui élude, ou plutôt qui a éludé le seul problème essentiel surgi à l’occasion des présidentielles USA-2016 ; certes, nous ne disons pas, par exemple, “cette sorte de silence par désintérêt puis par intérêt fractionné qui permet, ou a permis d’éluder...”, comme s’il y avait eu une volonté délibérée à cet égard. L’évolution de notre appréciation des présidentielles US, suivant l’évolution de ces élections qui se trouvent de plus en polarisées autour de deux candidats à la fois improbables, inattendus et complètement stupéfiants par rapport au cadre et aux intérêts impératifs du Système, cette évolution nous conduit effectivement à conclure à ce point que ce silence n’était nullement volontaire pour l’essentiel, même s’il y a évidemment une partie plus ou moins grande, – mais qui reste minoritaire à notre sens, – d’un réflexe d’autocensure dans le chef des organes de communication du Système. Le fait est que nombre d’organes antiSystème, eux aussi, ont traité jusqu’ici ces élections de cette manière fractionnée qui, à notre sens, nous fait rater l’essentiel. S’en tenir à l’interrogation de savoir si The Donald est bien un clown et si Bernie Sanders est véritablement un “socialiste” (à la sauce-US), ou bien ne s’interroger sur rien et penser qu’ils n’ont par principe aucune chance aucun des deux, revient au même constat qu’on rate ainsi le principal enseignement de la campagne présidentielle aux US qui est déjà largement développée et qui s’est jusqu’ici imposée par son caractère exceptionnel. Ce constat est défini tout simplement, le plus simplement du monde par cette question qui constitue un passionnant mystère (nous nous y sommes déjà attachés le 15 janvier) : comment cette situation a-t-elle été rendue possible, ou comment le Système a-t-il laissé passer cela ? ... Et la réponse pourrait bien être, effectivement, que ce désintérêt et ce fractionnement de l’esprit, tous deux nés de l’infatuation c’est-à-dire de l’hybris que dispense le Système même chez certains de ces adversaires, ont constitué la cause essentielle de cet aveuglement devant “la montée des périls”. Il reste que les garde-fous, les dispositifs de sécurité, les automatismes de défense du Système n’ont pas fonctionné, et cela témoigne, comme nous le voyions dans le texte déjà cité, tout simplement d’un épuisement du Système, par l'intermédiaire de l'état absolument déplorable des créatures, – les “zombies-Système”, – qui le représentent. »

De la crise de l’establishment à la Grande Crise du Système

La promptitude et la franchise paradoxale avec laquelle cette crise montra sa véritable essence sont également un aspect quasi-phénoménologique (certains diraient-ils : “pathologique” ?) de son exceptionnalité qui en fait un modèle universel, et il fallait évidemment que cela se produisît dans ce pays qui n’est pas une nation mais l’“empire de la communication” et qui ne cesse de se vanter de cette exceptionnalité. Nous voulons dire par là que la colère qui s’est élevée contre l’establishment washingtonien ne touche pas que l’establishment washingtonien, bien entendu. Derrière lui, c’est tout le Système qui est formidablement ébranlé, parce que les USA sont effectivement au Système comme l'on est, au sens du XVIIème siècle mais sans la noblesse, serviteur d'une puissance et qu’ils en sont le moteur et l’outil essentiels.

Ainsi pouvions-nous écrire le 24 août 2016 qu’il s’agissait non pas d’une des plus graves crises des USA, mais de la plus grave crise des USA, et que, par conséquent, cette crise conduisait et fusionnait directement avec la Crise Générale de l’effondrement du système pour l’alimenter décisivement. Nous utilisons le passé par respect de la chronologie, mais le présent aussi bien que le futur peuvent être utilisés...

« Si vous n’avez pas entendu parler du Général Ion Mihai Pacepa, faites un tour vers le Wikipédia adéquat : malgré la tournure-Pravda et censoriale-Système de plus en plus accentuée de la bonne-à-tout-dire de l’internet, l’article est dans ce cas acceptable. Pacepa est le transfuge le plus fameux et le plus haut gradé de la Guerre froide (il était chef de la Securitate de Ceausescu lorsqu’il passa à l’Ouest, en 1978). Il fut d’un grand secours pour l’équipe Reagan puis, depuis la chute du Mur, il a prospéré dans les milieux de la droite anticommuniste extrême reconvertie plutôt dans l’anti-islamisme tout en entretenant le mythe du communisme-prêt-à-renaître, aux côté des neocons fameux de cet exercice, ainsi que des groupes de chrétiens évangélistes activistes, notamment autour du site NewWorldDaily.

» Pacepa pousse un cri d’alarme en même temps qu’il sort un livre, Looming Disaster, sur l’élection de novembre 2016 (ceci explique cela, ou bien vice-versa) : l’élection USA-2016 est une élection qui ne peut être comparée en importance dramatique, pour l’histoire et le sort des USA, qu’à celle de 1860, qui ouvrit la Guerre de Sécession.

» Si nous débutons sur ce point, c’est parce que l’événement marque deux choses : d’une part, l’exacerbation extrême des psychologies, entraînant le paroxysme des esprits et de leurs jugements ; d’autre part, et le cas Pacepa nous éclairera là-dessus en partie, parce que cette élection se dessine de plus en plus sur un enjeu apparent évidemment plus ou moins extraordinairement-faussé selon le côté considéré, dont tout l’argument est emprunté à la Guerre froide et à l’affrontement avec l’URSS. [...]

» A la lumière de ces diverses remarques, aussi bien que du texte de Pacepa-Rychlag, on est conduit à deux constats. Le premier est que l’impopularité des deux candidats conduit les uns et les autres à s’attacher à eux selon, non pas les idées qu’ils portent mais les orientations, voire les “valeurs” ou les principes”, qu’on leur prête et qu’on estime qu’ils représentent ; cela se fait sur un arrière-plan faussaire (le communisme, l’URSS-devenue-Russie, la Guerre froide, etc.) qui encourage effectivement à débattre en termes de “valeurs” et de principes, contenus dans un ensemble qui se définit, selon le goût du jour, par l’orientation culturelle-sociétale. Les démocrates parlent le moins possible de Clinton, sauf pour proclamer qu’elle est une femme ; contre “le narcisso-totalitarisme” d’un Trump-marionnette-de-Poutine, donc à forts relents soviétiques, ils proclament la nécessité du triomphe des “valeurs” postmodernistes type-LGBTH.

» C’est cela qui est dénoncé par un Lind comme du “marxisme culturel”, ou bien parlerait-on de “progressivisme”, selon un mot de Pacepa rarement employé mais qui est aussitôt mis en équivalence avec le marxisme et le socialisme (« Marxim, socialism, and progressivism means stealing. ») Pour eux aussi, Trump compte moyennement sinon accessoirement, même si pour d’autres raisons que Clinton (« We are not personally acquainted with Donald Trump »). Tout cela signifie que les enjeux théoriques et opérationnels sont bien plus importants que les personnes, et que ces enjeux, lorsqu’ils sont débarrassés de leurs diverses scories paranoïaques et imaginaires (URSS, “pion de Poutine”, etc.), conduisent aux fondements même de notre Grande Crise qui est opérationnalisée autour de la question de la postmodernité et de tout ce qu’elle comporte en fait de philosophie fondamentale mise comme fixatrice de la modernité en l’état avec un maximalisme sociétal, contestée désormais violement et directement par une Résistance en pleine expansion. C’est-à-dire que nous débouchons sur la Grande Crise de notre civilisation.

» Le deuxième constat est d’abord une question décisive : tout cela ne va-t-il pas disparaître avec l’élection, de l’un ou de l’autre, et pouvant d’ailleurs exprimer aussitôt des préoccupations bien différentes de celles qui définissent un débat furieux sur la crise civilisationnelle, et donc noyant ce débat pour un certain temps ? C’est là que se situe l’énorme hypothèque de la légitimité de cette élection, dont on sait qu’elle est déjà, par avance, contestée au nom des fraudes extrêmement probables qui, estime-t-on dans le camp de Trump en acceptant implicitement l’hypothèse d’une défaite, la frappent de nullité par avance... [...]

» C’est dans cette perspective que l’affirmation de Pacepa revue à la lumière de l’enjeu de la postmodernité prend tout son poids : “l’élection USA-2016 est une élection qui ne peut être comparée en importance dramatique, pour l’histoire et le sort des USA, qu’à celle de 1860, qui ouvrit la Guerre de Sécession.” En effet, cet enjeu se trouve détaché de la seule élection et de son résultat pour embrasser tous les événements autour de la campagne USA-2016, de l’élection, et de ce qui va suivre cette élection ; qui plus est, cet enjeu déjà défini, en termes plus ou moins clairs selon les esprits, mais déjà bien présent à la fin-août, avec tant de semaines encore pour faire grandir la pression à ce propos, pour en faire un cas fondamental de la déstabilisation et peut-être de la déstructuration des USA, et alors il s’agit de l’entrée dans la phase finale de la Crise Générale d’effondrement du Système...

C’est bien dans ce cas qu’il faut comprendre l’importance de la transmutation des différentes vociférations politiques et pseudo-politiques, en un énorme questionnement s’exprimant par le biais du sociétal-culturel (qu’on cite le “marxisme-culturel” ou autre chose, et tout le reste dans le même sens) à propos de la signification de notre civilisation, de son ontologie (ou de son a-ontologie) de contre-civilisation, de la perception de plus en plus forte d’aborder le cœur grondant de la Grande Crise d’effondrement du Système. De ce point de vue, l’élection USA-2016 ne serait pas équivalente “en intensité dramatique” à celle de l'élection USA-1860, mais bien supérieure, et pour les USA peut-être, une réplique mimétique mais contradictoire à USA-1860, – de la construction à la destruction, de la structuration par force à la déstructuration par désordre...

Tout cela convient parfaitement aux vérités métahistoriques contre la narrative historiographique, tant l’on sait que 1860, ouvrant la Guerre de Sécession pour la fin de l’esclavage, fut en fait une guerre contre le droit à la sécession (lequel n’est ni autorisé ni interdit par la Constitution, mais bien une question d’état d’esprit et d’interprétation de l'(esprit de la chose, contrairement aux jugements tranchés des constitutionnalistes-Système) ; et plus encore, elle fut une guerre pour la liquidation d’une civilisation (celle du Sud) qui gardait, hors de la question de l’esclavage où le Nord était si loin d’être innocent, des attaches avec la tradition insupportables pour une “civilisation” (celle des yankees) qui était, elle, et qui le reste bien entendu, une production directe du “déchaînement de la Matière”, illustrant le mot de Gouhier, un libéral français qui avait horrifié Stendhal en proclamant en 1824 “Les Lumières, c’est désormais l’industrie”»

Presse-Système et Deplorable

Le tableau de l’ensemble du paysage étant ainsi fixé, on ajoutera deux autres touches puisque l’étape que constitue l’élection elle-même laisse un peu de temps pour reprendre son souffle et rassembler l’essentiel de l’évènement pour bien en rappeler la puissante structure.

• La première de ces touches faite d’un pinceau tout de même assez lourdingue concerne l’extraordinaire délégitimation que s’est imposée pendant cette longue saison la presse-Système. (Aux USA, parce que cette presse-Système s’est imposée à elle-même Hillary Clinton comme rédactrice-en-chef collective ; en Europe/bloc-BAO parce que cette même presse-Système a navigué tout au long de cette saison de crise profonde des USA en pompant le fameux best-seller remis au goût du jour postmoderniste, A l’Ouest, rien de nouveau.) Cette activité faussaire, qui n’est pas nouvelle dans son essence, l’est dans son ampleur proche de l’unanimité, et dans sa manufacture qui s’est faite sans aucun apprêt, sans la moindre dissimulation, marquant ainsi l’urgence de la chose et le sentiment proche de la panique de sa nécessité ; le résultat est une vérité-de-situation qui se nomme délégitimation achevée de la presse-Système ; et elles pèsera lourd, quelles que soient les perceptions temporaires, parce que cette vérité-de-situation est irréfragable par définition. (Accessoirement mais non sans importance d’un point de vue opérationnel, cette activité faussaire de la presse-Système a délégitimé le processus de l’élection USA-2016, quoi qu’il en soit du résultat : certains, comme Newt Gingrich, estime que le rôle de la presse-Système a déplacé arbitrairement autour de 20% des voix qui auraient dû aller à Trump vers Clinton.) Tout cela était exposé de cette façon le 23 octobre 2016 

« Tout cela, au cours de USA-2016, s’est fait à ciel découvert, développant en direct des actions de trucage, apparaissant faussaire aux yeux de tous sans la moindre précaution, coupant des retransmissions lorsqu’on parlait de Trump en termes paraissant trop modérés, interrompant d’autorité une déclaration de l’un ou l’autre invité pas assez anti-Trump, présentant sans s’en dissimuler des méthodologies statistiques biaisées en faveur de Clinton. La presse-Système ne s’est plus “contentée” (!) de servir une narrative absolument hallucinatoire, comme elle l’avait fait avec l’Ukraine, elle s’est organiquement et opérationnellement placée, sans s’en dissimuler une seule seconde et même presque avec un empressement dénotant sa perception de l’urgence de la situation et la panique qui va avec, sous l’empire d’une candidate, d’un “parti” (les 0,1% ou les 0,01% selon votre comptabilité, c’est-à-dire totalement les cadres du parti-Système). Elle s’est institutionnalisée hors de la légitimité d’une prétendue “objectivité”, fût-elle complètement faussaire avec le cas ukrainien ; elle a volontairement abdiqué l’apparence même de la légitimité à laquelle elle estimait pouvoir encore prétendre ; elle a largué comme on largue les amarres les dernières apparences de sa fonction vertueuse qui justifia à l’origine sa légitimité. Voilà notre Grand Basculement, avec l’effondrement de la poutre-maîtresse, de la poutre porteuse du Système dans sa représentation idyllique comme seul le Diable sait y faire en montant son théâtre du simulacre. »

• La seconde touche du pinceau du commentateur est la nécessité de la perception que le mouvement de “rage” qui s’est affirmé durant la campagne USA-2016 fait partie d’un Tout, ce que nous avons nommé une “rage cosmique”. C’est un paradoxe de USA-2016 qu’une campagne qui a vu le regain d’un mouvement populiste dont l’une des facettes est l’isolationnisme ait justement placé les USA dans la dynamique d’un mouvement global nullement artificiel ou fabriqué. Les USA dont une importante partie exige un retour au protectionnisme/isolationnisme se trouvent inscrits, par le fait même, dans la globalité d’un mouvement général dans ce sens. Ce phénomène s’accomplit en actant la rupture fondamentale entre la population (dans ce cas, sa partie la plus active, échappant à la tromperie de la représentation offerte par la presse-Système) et les élites-Système. Ce point était développé le 27 octobre 2016 :

« Il s’agit de “la politique de la rage”, c’est-à-dire une formidable fracture dans tous les pays développés (disons le bloc-BAO), entre les citoyens “ordinaires” et les élites-Système. Les thèmes eux-mêmes (l’élection USA-2016, les inégalités sociales, l’anti-globalisation, le Brexit, etc.) sont certes présents, mais ils ne sont que les nombreux symptômes de l’insurrection générale, globale, de l’“insurrection cosmique” qui affecte cette civilisation en cours d’effondrement. La chose ne cesse d’être actée par des démarches qui se veulent rationnelles, tentant vainement nous semble-t-il de rendre compte rationnellement d’un phénomène dont il est difficile sinon impossible de trouver une explication rationnelle. Toute l’organisation du Système d’une surpuissance inouïe, faite dans ce but, devrait en effet étouffer et ridiculiser tout sentiment de rage et cette “insurrection-cosmique”, notamment au niveau de la communication, et elle n’y parvient pas.

» (Cette organisation de la communication-Système : presse-Système, le monde des “communicants”, l’organisation extrême de l’entertainment-Système avec la complicité extrêmement significative du monde dit du show-business dans son sens le plus large et le plus pervers, la complicité totale et perverse du “monde de l’art” devenu “art officiel” [AC et le reste], complètement perverti et corrompu par le Système, etc. Il s'agit de la plus massive trahison collective qu'on puisse recenser d'une civilisation par ses élites, lesquelles n'auront pour circonstance atténuante lors de leur Jugement de Nuremberg que l'évocation de l'évidente influence satanique. Leurs avocats s'y emploieront avec le talent du connaisseur et le zèle du converti.) [...]

» “The Rise of the Politics of Rage

« “Rage is all the rage these days, but as Barclays notes, what appears less well understood is that this voter rebellion, “the Politics of Rage”, spans nearly all advanced economies, has been taking place for more than a decade, is unparalleled in modern history, and is deeply entrenched.

» “This is not just about Brexit or the US election; it is about a global political movement...” »

La bataille suprême, c’est la spiritualité

La grandeur et l’héroïsme de cette élection USA-2016 est qu’elle n’eut en vérité, malgré les apparences, aucun protagoniste humain majeur dans le sens d’une exclusivité individualiste chargée du soupçon de l’égoïsme et de l’hybris mais, d’une façon bien différente, des concepts qui parlent aux âmes et des psychologies collectives (celle de la “politique de la rage” de l’électeur américain), tout cela qui forme aujourd’hui la partie humaine “des événements” constituant ce que nous nommons “le bruit de fond” qui nous suggère sens des choses et vérités-de-situation ; tout cela dans une époque métahistorique où seuls comptent “les événements” et où les sapiens n’ont qu’à suivre selon leurs choix et leurs penchants, et certains se retrouvant entraînés dans des orientations qu’ils n’avaient pas devinées. Cette campagne USA-2016 fut donc celle des définitions fondamentales ; celle de la bataille entre la postmodernité et sa déstructuration-dissolution et l’identité et sa tradition principielle, entre Système et antiSystème.

(...Et cela, pour justifier la remarque ci-dessus sur certains “sapiens [...] se retrouvant entraînés dans des orientations qu’ils n’avaient pas devinées”, cet affrontement constaté sans définir automatiquement l’un et l’autre camp, car nombre de partisans de tel candidat ont cru qu’il se battait pour des principes et des “valeurs” qui étaient en fait défendus par l’autre camp et vice-versa. Le Système et l’antiSystème reconnaîtront les siens mais il n’est pas assuré que le sapiens, lui, s’y reconnaisse toujours et se regarde dans un miroir en se félicitant de ses. L’engagement absurde, au nom de slogans qui avaient leur très-grande pertinence et leur très-fraîche actualité en 1848 ou en 1933, de toute une gauche complètement déboussolée par l’idéologisation sociétale pour se retrouver en rabatteuse et Kapo du capitalisme globalisé hyper-corrompu et des 1%/0,1% sataniques et stanistes qui soutinrent Hillary contre The Deplorable, cet engagement au rythme des arguments des philosophes de Silicon Valley et de Hollywood est l’une des plus grandes farces-bouffes de la tragique tragédie-bouffe cosmique que nous vivons. Ils découvriront bien assez vite, ces gens-de-gauche, que leur farce-bouffe dans cette élection est une vraie tragédie à l’échelle du monde, singulièrement pour eux-mêmes parce que cette responsabilité politique de dimension métahistorique les écrasera de tout son poids.)

C’est donc un événement exceptionnel pour que les enjeux soient apparus si clairement, et pour cette raison un modèle pour le reste du monde (the Rest Of the World). De ce point de vue les USA restent donc exceptionnels même dans la manufacture de l’affrontement qui, soudain, déchire à belles dents le modèle qu’ils croyaient pouvoir, au nom du Système, imposer au monde sans trop faire de vagues mais en le noyant définitivement ; surpuissance-autodestruction : c’est le modèle lui-même qui se bâfre de lui-même en s’autodétruisant.

En fait de vagues, puisqu’il s’agit d’un tsunami, il n’y a aucune raison pour que nous nous arrêtions là. La puissance de l’événement est désormais inscrite au cœur et dans l’âme des sapiens. USA-2016 doit agir comme un révélateur d’une époque différente de tout ce qui a précédé, en mettant à nu l’immense vérité-de-situation de l’affrontement colossal qui l’anime (cette “époque différente”) depuis 9/11. A cette lumière, tout ce désordre devenu chaos-nouveau qui tourbillonne depuis quinze ans commence à révéler sa signification et tout son sens au travers de la mise en lumière grandissante de la vérité-de-situation des enjeux. Avec USA-2016, nous savons désormais pourquoi cette époque est “différente”, pourquoi cette “époque différente“ est celle d’une lutte à mort, pourquoi elle ne pourra se terminer que par le néantissement du vaincu. On ne fait pas de prisonniers et seul le concept de reddition sans condition est concevable.

La remarque de PhG sur les pratiques sataniques des zombies-Système, si elle concerne un aspect bouffon dans sa forme, n’en définit pas moins l’enjeu, et surtout la forme même de l’enjeu qui prend un aspect absolument civilisationnel, et civilisationnel sur un affrontement de décadence d’une puissance extrême, notamment par le tournant de l’affrontement sociétal qui enchaîne directement sur la contestation et l’affrontement spiritualistes entre ceux d’en-haut et ceux d’en-bas, – et choisissez votre camp ! pourrait-on dire, comme Paraz choisissait pour titre de son pamphlet le plus mordant un Valsez, saucisses ! qui irait si bien à tout notre clergé mondain de leur nouvelle et si extrêmement postmoderne religion-Système... En effet et quels que soient les arguments pour eux-mêmes de ceux qui ont voté, c’est bien sur le terrain de la spiritualité que se déroule la terrible bataille de cette fin de civilisation.

« C’est à la fois un fait étrange, un fait extraordinaire et un fait absolument révélateur que des personnages de la valeur vénale et morale des Clinton et aussi de leur entourage politique (Podesta notamment), soient amenés au fil des révélations à se trouver involontairement dans la position d’afficher contre leur gré leur engagement “spiritualiste-inverti” ; c’est à la fois bouffon, comme nombre de manifestations de magie noire et, pour la postmodernité, de l’Art Contemporain, mais aussi sacrilège par l’aspect le plus bas ; à la fois le signe de l’errance psychologique et métaphysique, et le désir d’en découdre non plus sur les terrains habituels (politique, social, même sociétal), mais sur les terrains pseudo-spirituels, justement pseudo-métaphysiques et tout ce qui va avec, avec ambiance de Fin des Temps garantie... C'est bien sur ce terrain-là qu'il faut s'affronter, et c'est sur ce terrain-là que nous les affronterons : ils verront bien vite qu'il y a du marécageux sous leurs pompes si bien cirées... »

... Finalement, comme conclusion aussi bien spirituelle qu’opérationnelle après tout, c’est notre constat paradoxal dit et redit parce qu'il est un paradoxe que les crétins de la globalisation dénoncent avec des cris de vierges effarouchées, – alors que l’Amérique du président Trump est décrite comme néo-isolationniste, – que l’événement que nous avons décrit, couronné par l’élection du 8 novembre 2016, marque l’entrée des USA, jusqu’alors cadenassés par leur fonction de moteur du Système, dans le monde vrai qui est celui de l’affrontement entre le Système et l’antiSystème. Bienvenus au club, USA, les choses ne sont pas faciles et nous avons bien besoin de votre surpuissance d’autodestruction.