Commentaire de notre commentaire: réflexions supplémentaires sur BAE-Yamamah

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Nous ajoutons cette réflexion latérale ou complémentaire pour le cas, mais finalement assez substantielle sur le fond, à notre F&C de ce jour sur le jugement des Lords de la Chambre des Lords de Londres dans l’affaire BAE-Yamamah judicieusement réduite à l’affaire SFO-Arabie. Il se trouverait ou se serait trouvé sans doute l’un ou l’autre lecteur, français sans aucun doute, pour remarquer qu’après tout ce cas de corruption n’est pas tellement plus pendable que certains cas qu’on trouve en France, et qu’il serait bon de faire aussi la leçon à la France comme nous la faisons aux Lords.

D’abord c’est inutile puisque depuis belle lurette, depuis avant la Grande Révolution française semble-t-il, les salons parisiens font l’apologie du “modèle britannique” (entre autres “modèles” sauf le français, notre admiration n’est pas xénophobe, Dieu merci) – aux dépens de la médiocrité et de l’archaïsme français, avec les faiblesses corruptrices qui vont avec. D’une certaine façon mais de façon certaine, dans ces esprits, la France est en-dessous de l’Angleterre; la condamnation de l’Angleterre vaudrait aussi bien pour les étages inférieurs, pour la France par conséquent; case closed là aussi.

(Mais nous ne faisons pas partie des salons parisiens. La chose était signalée pour l’anecdote. Passons outre.)

Ensuite, ce serait mal nous comprendre. Ce n’est pas la corruption que nous mettons en cause essentiellement. Ce qui nous effraie et nous scandalise absolument dans BAE-Yamamah, ce n’est pas tant la corruption que la forme de la corruption. La corruption est cette chose détestable qui existe de tous temps et de toutes les façons, quels que soient les régimes, quelles que soient les époques. Il s’agit de lutter contre elle en permanence, avec alacrité et mesure, voire bonne mesure, comme l’on fait contre une récurrence de la nature humaine qui freine ou contrecarre le fonctionnement et l'évolution des entreprises de développement des communautés humaines. Mais ce qui est essentiel dans le cas BAE-Yamamah, c’est l’aspect absolument manifeste, absolument dominant et déterminant, de la dynamique déstructurante qui anime cette entreprise de corruption (et les activités de BAE en général, – essentiellement parce que ce consortium est de plus en plus globalisé et de moins en moins national, d’ailleurs à l’incitation des dirigeants britanniques).

Cette situation mérite notre attention et notre commentaire constant car il s’agit d’un phénomène, à ce degré de puissance, d’efficacité et donc de nocivité, qui est spécifique à notre époque de déstructuration, et largement concentré pour diverses raisons historiques et de conception dans la sphère anglo-saxonne. Cela mérite notre attention et notre commentaire parce que cela fait partie du devoir du chroniqueur qui entend assumer sa responsabilité d’identifier et de mettre en cause les grands travers de son temps historique, – plus encore lorsqu’il a déterminé combien son temps historique et ses travers constituent une menace fondamentale et très pressante contre les structures de civilisation. Cela n’innocente en rien notre civilisation mais permet de mieux comprendre les fondements de la crise que nous traversons, et, éventuellement, de mieux identifier ses racines.

Ainsi nous attachons-nous régulièrement à certains sujets et thèmes qui peuvent sembler spécifiques, voire “spécialisés” ou “techniques”, même si nous ne pouvons tous les aborder. C’est parce que nous avons identifié en eux des caractères de notre crise générale et qu’à partir de tels “travaux pratiques”, on peut mieux comprendre cette crise. Ainsi traitons-nous régulièrement de BAE-Yamamah, mais aussi du programme JSF, de la crise du Pentagone et ainsi de suite… Effectivement, tout cela a bel et bien une consonance anglo-saxonne.


Mis en ligne le 1er août 2008 à 13H56