Obama-McCain, ou le “populisme” néo-protectionniste contre le “corporate socialism” libre-échangiste

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Il semble apparaître qu’un des aspects importants de la campagne électorale US, avec des effets effectifs et éventuels d’une très grande importance sur la situation mondiale, est un affrontement entre un “populisme” impliquant un très sérieux néo-protectionnisme, et le libre-échange. Dans ces deux orientations, on distingue les deux probables candidats des deux partis, Barack Obama et John McCain.

Walter C. Uhler, analyste et commentateur indépendant, examine le phénomène sur son site, le 20 février. Il appuie son approche de ces deux tendances qui s’affrontent, et des deux candidats qui les représentent, sur la recension d’un livre de David Cay Johnston, Free Lunch: How the Wealthiest Americans Enrich Themselves at Government Expense (and Stick You with the Bill). Ce livre analyse la politique systémique socio-économique du gouvernement US, les extraordinaires disparités antagonistes d’exploitation qu’il organise avec l’orientation désignée sous l’expression fort bienvenue de “corporate socialism”. L’expression désigne la philosophie des grands conglomérats US/multinationaux évoluant désormais à la façon des systémes socialistes d’antant, avec le soutien et les subsides des gouvernements. Le système massif du “corporate socialism”, qui met à l’encan la situation sociale aux USA avec sa projection dans le monde par le moyen de la globalisation, est ainsi présenté: «Mr. Johnston's sobering conclusion: “Under current government rules, destroying American jobs and creating jobs overseas is the single most effective way for manufacturing companies to increase profits. From the point of view of shareholders and executives, any policy other than moving equipment and jobs offshore as fast as possible is a waste of corporate assets.”»

Il semble que les deux candidats qu’on juge actuellement favoris pour les présidentielles, Obama et McCain, trouvent là un terrain particulièrement puissant d’opposition radicale. L’intérêt de la situation est que l’affrontement des deux position situe clairement la position et les effets du libre-échange dans cette querelle, et présente la justification du populisme néo-protectionniste.

«Speaking in Houston on February 19, 2008, Senator Obama declared: “I want to take away those tax breaks to companies that are shipping jobs overseas. We're going to give them to companies that invest right here in America.” Senator McCain did not address the issue during his February 19 victory speech, but he's on record for asserting: “It sounds like a lot of fun to bash China and others, but free trade has been the engine of our economy. Free trade should be the continuing principle that guides this nation's economy.” [2007 Republican debate in Dearborn, Michigan Oct 9, 2007]

»Free trade might very well be “the engine of our economy,” but that engine hasn't done much to drive the average annual income of the bottom 90% of American workers. On the other hand, it has proven to be enormously lucrative for the financiers and factory owners who arrange the overseas deals.»

(...)

«According to Johnston, when the Supreme Court refused to even hear the case of citizens from Toledo, Ohio – who had their businesses and homes seized by the city, in order to give Chrysler the land it needed to rebuild its Jeep plant – it “sent a clear signal that the policy of the United States is that the government can take from the many to give to the few – and those who object will not have their grievances heard by the courts” [p. 93] In the face of such legally sanctioned corporate socialism, the most effective response would be a widespread taxpayer revolt.

»Finally, as if to guarantee that it's the taxes of the bottom 90% that are used to subsidize their wealth-creating enterprises of the corporate socialists, the Bush administration and Republicans in Congress pushed through tax cuts that not only gave 53% of the savings to the top ten percent of income earners in the United States, but also 15% of the tax savings to the 300,000 people who constitute the top tenth of one percent on the income ladder. In 2005, their average annual income was $25,726,965.

»On February 19th, Barack Obama asserted that “we're going to rollback those Bush tax cuts that went to all the wealthy people, and we're going to give tax cuts to ordinary families, people who are making less than $75,000. We will offset your payroll tax.“ Like Obama, Senator McCain once opposed Bush's tax cuts for the rich. But, he's flip-flopped during his run for President and now will uphold them if elected.

»Consequently, if David Cay Johnston is correct when he answers the question, “Why are the rich getting so much while the middle class struggles and the poor fall behind?” by concluding that “the elites have captured the government and are milking it for their own benefit” [pp. 22-23], then free trading, tax cut flip-flopper John McCain hardly seems to be the candidate to roll back corporate socialism's assault on the bottom 90% of the income ladder.»

Cette analyse met bien en évidence la bataille qui est en train de se nouer dans cette campagne autour du “corporate socialism”, qui triomphe aux USA dans une mesure jamais vue et qui est en train de s’incarner grâce à cette campagne dans la doctrine du libre-échange. Avec cette remarque: «In the face of such legally sanctioned corporate socialism, the most effective response would be a widespread taxpayer revolt», – on tient peut-être une clef de l’explication du succès actuel d’Obama. Son succès serait l’expression directe de cette « widespread taxpayer revolt». Obama tiendrait ainsi, pour l'argument, le rôle que tint Ross Perot comme candidat indépendant à l'élection présidentielle de 1992 (19% des suffrages).

C’est évidemment un autre aspect essentiel de la campagne aux USA, à côté de l’aspect portant sur la politique extérieure (guerre en Irak). Cet aspect, favorisé par la crise financière et économique, comporte une charge potentielle considérable de mise en cause du système, dans le chef de l’activisme actuellement déployé par Obama. Insistons sur le fait que l’important est pour l'instant l’identification des tendances, donc des étiquettes, – quel que soit le destin des candidats, quelle que soit même la politique de l’un ou l’autre en cas d’élection. L’affrontement indirect actuel entre les deux tendances radicales adverses que représentent Obama et McCain identifie le néo-protectionnisme et le “populisme“ comme les adversaires du “corporate socialism” et, à l’inverse, identifie ce même “corporate socialism” au libre-échange jusqu’à faire de ce libre-échange le “corporate socialism” par essence.

Cette installation dans le débat public d’affirmations aussi tranchées est un fait important par la popularisation de l'affrontement qu'elle implique. Elle contribue d’une façon radicale au discrédit du libre-échange et aura un écho mondial dans la perception de la situation du système, de ses orientations, etc. Cela vaut quelle que soit le destin de cette élection, comme un acquis important des débats qui l’ont déjà marquée. Au-delà, bien sûr, si un Obama parvenait à la désignation démocrate, l’emportait en novembre et décidait de tenter d’appliquer cette politique hostile au libre-échange, qui a un soutien important à la Chambre des Représentants où de nombreux jeunes députés démocrates ont été élus sur un programme anti-libre-échangiste, il s’agirait d’un développement capital pour les relations internationales.


Mis en ligne le 25 février 2008

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