Le Typhoon s’en va-t-en-guerre (en Afghanistan)

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Les Britanniques et BAE respirent. Il va être enfin évident que le Typhoon a une utilité militaire. Il part en guerre en Afghanistan, et la RAF annonce la chose avec des exclamations énamourées. L’avion, qui est présenté par le Daily Telegraph du 9 août comme valant £80 millions l’unité, — ce qui le classe dans la catégorie supérieure des avions de combat du point de vue du coût, — sera déployé en 2008 (huit avions sur la base de Kandahar). Le quotidien britannique affirme que les deux premiers avions en version avec des capacités air-sol ont été livrés à la RAF cette semaine.

Voici le “narrative” accompagnant l’annonce du départ prochain au combat de cet avion, détrompant ainsi ses détracteurs qui mettent en doute ses capacités à évoluer dans les airs pour effectuer des missions de combat:

«…Nevertheless, [the Typhoon] should prove a major asset when they replace the aging Harrier squadron that has been operating successfully in Afghanistan since 2004.

»Being able to achieve speeds of more than 1,500mph and carrying a probable payload of two 1,000lb, laser guided Paveway bombs, the multi-role Typhoons will be able to deliver devastating firepower.

»While the Harriers have been useful they are generally second on to the battlefield, with American jets with greater fuel capacity that are able to loiter over the ground providing the primary punch for British troops.

»But by carrying extra fuel pods and with mid-air refuelling, the Typhoons, built in Britain by BAE Systems, can be stationed for several hours in the air, providing cover and support for troops during gun battles that sometimes last an entire day.

»The sophisticated Sniper surveillance system will also allow pilots to view the battlefield through the eyes of ground troops, allowing them to drop bombs with pinpoint accuracy. The development means that in addition to being able to take on other fighters, the RAF Typhoons will be able to attack ground targets. The 27mm cannons will be used for the first time once ammunition can be supplied.

»Wing Co Gavin Parker, officer commanding of XI Squadron, which took delivery of the latest fighters, said: “The Typhoon is already an exceptional air-to-air fighter and is demonstrating excellent potential in the air-to-surface role. It will make it a fantastic close air support machine.”»

Entendre un Wing Commander vanter les qualités “fantastiques” du Typhoon pour l’appui-feu rapproché à quelque chose d’un peu surréaliste. Seuls quelques rares types d'avions en service en Afghanistan, comme les AC-130 et A-10 américains et le Harrier britannique s’il avait de l’autonomie, sont à peu près adaptés à l’appui-feu rapproché. Encore deviennent-ils, dans le cas du A-10A et du AC-130, des machines infernales à tuer, tant leurs interventions se font (surtout pour le AC-130) à partir des seules données informatisées et avec une puissance de feu écrasante et évidemment excessive. Les seuls bons avions contre les guérillas sont des avions lents et solides, permettant l’intervention visuelle, — les T-6 et T-28 en Algérie dans les années 1950, les A-1 Skyraider au Vietnam dans les années 1960, qui étaient tous des avions à hélice déjà vieux et jugés dépassés lors de leurs interventions. (Le cas des hélicoptères de combat est différent, ces machines étant beaucoup plus proches par nature des impératifs de l'appui-feu rapproché.) Dans l'état actuel des priorités des bureaucraties militaires, il n’est plus question de cette sorte de sport et le résultat de l’inadaptation des systèmes que nous nous convainquons d’utiliser se mesure en “dégâts collatéraux”, en ralliements de civils aux talibans ou dans la défaite de Tsahal face au Hezbollah en juillet-août 2006.

Aujourd’hui, dans ces guerres que personne (sauf les Américains) ne veut faire vraiment et que tout le monde fait plus ou moins pour ne pas déplaire aux Américains, le déploiement des avions modernes a surtout pour but d'expérimenter et d'exposer leurs capacités technologiques, donc leur puissance potentielle (l'argument est utilisé pour les ventes à l’exportation), notamment en démontrant des capacités d’autonomie et de précision de vol. C’est-à-dire que ces champs de bataille sont aussi bien des champs de démonstration entre avions alliés “concurrents”, chargés d’affirmer une certaine puissance technologique. Les Français ont envoyé en 2005 le Rafale Marine (et cette année) le Rafale Air en Afghanistan, les Américains utilisent toute leur panoplie la plus avancée technologiquement et ont même songé à envoyer le F-22 en Irak, les Britanniques envoient le Typhoon en Afghanistan en 2008. C’est de bonne guerre mais ce n’est évidemment pas pour faire la guerre pour laquelle ces avions sont conçus.


Mis en ligne le 12 août 2007 à 10H19

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