L’enquête sur Yamamah arrêtée in extremis par Blair tout seul

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Il apparaît que la décision d’arrêter l’enquête en Suisse sur le scandale Yamamah a été prise en catastrophe, par Blair lui-même, parce qu’elle était sur le point d’aboutir au cœur du problème : l’implication directe de membres de la famille royale saoudienne. (Selon The Times du 15 décembre : The Prime Minister said that he took full responsibility for the decision to drop the Serious Fraud Office inquiry into bribery allegations involving arms manufacturer BAE Systems.») Il s’agit donc du cas exemplaire d’une enquête sur un énorme fait de corruption internationale arrêtée par le pouvoir politique — mais plus précisément, on va le voir, par un homme politique, — parce qu’elle va faire apparaître le fait au grand jour.

En tout état de cause, il était impensable, de son propre point de vue, que Blair s’envole dans sa tournée moyen-orientale dont il espère un renouveau de son statut diplomatique avec cette affaire en pleine exposition publique du cas Al Yamamah. Il aurait risqué de se voir refuser l’accès à certains pays arabes.

Le Guardian expose aujourd’hui les derniers instants de l’enquête du Serious Fraud Office (SFO), avant que la décision du Premier ministre soit signifiée à ce même SFO.

«A brutal moment came last Tuesday for the 15-strong team from the Serious Fraud Office, led by assistant director Helen Garlick. The team's leaders were ordered down to Lord Goldsmith's offices in Buckingham Gate with their boxes of files. These contained the fruit of more than two years' digging into allegations that huge Saudi bribes had been paid by arms group BAE Systems to get weapons deals.

»In Switzerland, in the federal prosecutors' office in Berne, another box of files was also sitting, waiting to be collected. It was the hottest potato of all. The Swiss dossier contained print-outs of BAE's recent offshore banking transactions with key Saudi middlemen. The normally highly-secret bank records had recently been secured by the authorities at the British investigators' request.

»The SFO believed the banking files could unlock the answer to three questions: Were members of the Saudi royal family receiving secret British pay-offs? Were offences committed under UK law? And had BAE lied to the Department of Trade and Industry to get insurance cover when the company recently claimed it had cleaned up its act and got rid of its confidential Saudi agents?

»But the events of the next 48 hours ensured that the SFO would not be allowed to collect those files. Instead came a sudden harsh lesson in the realities of power and politics in Blairite Britain.

»In trawling through the case-papers, the attorney general appears to have had both an agenda and a careful timetable. Within 48 hours, he had informed his own law enforcement officers that there were severe technical and legal difficulties in bringing any prosecution.

»His timetable, critics suggest, required him to make his statement on the day the Diana death inquiry was published, which would distract attention. Even more significantly, the announcement allows the prime minister to depart for the Middle East this weekend with the SFO's surrender in his pocket.»

Il faut insister sur la solitude et l’extrême urgence, voire l’improvisation de la décision de Blair, notamment sans consultation du reste du gouvernement. (Il semble d'ailleurs que le reste du gouvernement n'ait appris la nouvelle qu'une fois celle-ci prise et, pour certains des ministres, qu'une fois qu'elle ait été rendue publique.)

Un point remarquable de ce point de vue de la situation politique britannique est le complet silence de Gordon Brown dans cette affaire Yamamah, depuis octobre dernier, alors que le Trésor a son mot à dire dans ce genre d’enquête. Brown s’est gardé de s’impliquer de quelque façon que ce soit dans l’affaire, surtout dans le dernier épisode et sa retentissante conclusion. Prudence bien connue du Chancelier de l’Echiquier, probable successeur de Blair, et indication implicite que de possibles retombées ou relances de cette affaire sont possibles, où il ne veut pas être impliqué.

Dans le cas Yamamah, Blair est tout seul, une fois de plus. Il s'agit moins d'une affaire de grande politique britannique que d'une affaire politicienne, où l'on trouve à nouveau la position si particulière du Premier ministre britannique laissé à ses diverses implications et manigances britanniques par le reste du gouvernement, et lui-même manoeuvrant seul, sans le moindre souci de ce gouvernement, alors qu'il se trouve en instance de départ.


Mis en ligne le 16 décembre 2006 à 05H40