George Bush nous en dit beaucoup sur George Bush (et sur l'Amérique)

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D’abord il y a ceci, qui nous en dit long: «Bush said he was surprised by the audience's criticism of his son.»

Cela se passait hier à Abou Dhabi, chez les amis du Golfe. George Bush “the elder”, 82 ans, donnait une conférence amicale, chez des vieux amis, — chez ceux qu’il considère comme des vieux amis, — entre pétroliers, entre Texans et hommes du Golfe, entre Américains et Arabes modérés, entre vieux complices…

Un texte d’AP sur cette conférence est notamment repris par le San Francisco Chronicle et l’International Herald Tribune: «The oil-rich Persian Gulf used to be safe territory for former President Bush, who brought Arab leaders together in a coalition that drove Saddam Hussein's troops from Kuwait in 1991. But gratitude for the elder Bush, who served as president from 1989-93, was overshadowed at the conference by hostility toward his son, whose invasion of Iraq and support for Israel are deeply unpopular in the region.»

Bush-père fut stupéfait par des phrases telles que celle-ci, dite par une femme dans l’assistance : «We do not respect your son. We do not respect what he's doing all over the world.» Bush-père défendit son fils («My son is an honest man»), jusqu’à dire qu’il croit que les choses s’arrangeront en Irak : « This son is not going to back away. He's not going to change his view because some poll says this or some poll says that, or some heartfelt comments from the lady who feels deeply in her heart about something. You can't be president of the United States and conduct yourself if you're going to cut and run. This is going to work out in Iraq. I understand the anxiety. It's not easy.»

Bush-père dut même se battre pour l’Amérique, choqué par une intervention d’un étudiant accusant son pays de ne faire la guerre que pour ouvrir les marchés extérieurs aux compagnies US : «I think that's weird and it's nuts. To suggest that everything we do is because we're hungry for money, I think that's crazy. I think you need to go back to school.»

En un mot, ce fut un bel exercice d’inculpabilité, si propre à la psychologie américaniste. Il nous paraît en effet inapproprié de voir quelque duplicité que ce soit chez Bush-père. Son comportement, ses réactions paraissent au contraire très sincères. De ces interventions diverses, nous pouvons tirer quelques hypothèses en considérant que Bush-père est très représentatif de l’opinion de la frange modérée de l’establishment washingtonien :

• A côté du sentiment d’une catastrophe en Irak, il subsiste la certitude psychologique que l’Amérique n’est pas vraiment responsable de cela. Il y a quelque chose d’incompréhensible pour Washington et l’establishment washingtonien (comme l’écrit William Pfaff : « The existing policy is a failure, yet nothing can be changed because no one can imagine a valid alternative. American intentions and actions have, it is held, been correct, their goals irreproachable. If anyone is to blame it is the Iraqis, who failed to seize the wonderful opportunity the United States offered them.»)

• GW n’est pas vraiment à critiquer. Il est honnête, il fait son boulot qui est difficile. (S’il y a un coupable, peut-être est-ce Rumsfeld, dont James Baker a eu personnellement la tête.) Cette position implique que les pressions de l’ISG de Baker sur le jeune GW ne sont pas et ne seront certainement pas décisives.

• A entendre Bush-père, à mesurer sa stupéfaction ici et là, on comprend que l’attitude et la politique actuelles des USA ne sont pas le fait d’un accident ou d’une perversion temporaire (GW) mais bien l’expression d’un certain consensus. GW représente beaucoup plus un sentiment général qu’on croit en Europe. Cela implique qu’il ne faut pas attendre de grands changements dans la politique US, malgré un Congrès démocrate. Cela ira jusqu’à la chute finale.


Mis en ligne le 22 novembre 2006 à 10H00