STRATFOR dévasté par Anonymous

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Un lecteur vient-il à peine de nous interroger sur le dernier livre, à paraître (en janvier 2012), de George Friedman, le directeur de STRATFOR (voir le 24 décembre 2011) que la réponse lui vient sous la forme de la nouvelle que STRATFOR a fait l’objet d’une attaque dévastatrice du groupe Anonymous… Effectivement, quelle meilleure réponse pour nous faire envisager avec un intérêt d'anthropologue un peu rêveur l'avis impératif de Friedman que “durant les 10 prochaines années, [...] l'Amérique dominera, et le président américain devra faire en sorte d'agir comme empereur du monde sans admettre qu'il l'est”. Avec une telle entame, on en ferait une chanson, qui rythmerait la campagne des présidentielles, avec Ron Paul au mixage...

Venons-en donc à la chose qui nous amène dans ces lignes... Le site Charleston Voice, nettement orienté vers une active dissidence du bloc BAO et assez proche de Ron Paul, détaille la nouvelle, le 24 décembre 2011, en fournissant les divers liens nécessaire, dont celui de la liste des 4.000 clients (et “donateurs” de STRATFOR), accessible à l’url http://pastebin.com/8MtFze0s, – un véritable bottin mondain du bloc BAO, de BP à Goldman Sachs, de Coca-Cola à Citigroup et ainsi de suite ; tout cela, dans un esprit de soutien très actif puisque, répétons-le, assortis de diverses “donations”. Même dedefensa.org et sa dynamique campagne d'appel à donations s'incline : chapeau bas...

«This Christmas will not be a happy one for George Friedman (who incidentally was the focus of John Mauldin's latest book promotion email blast) and his STRATFOR Global Intelligence service, because as of a few hours ago, hacking collective Anonymous disclosed that not only has it hacked the STRATFOR website (since confirmed by Friedman himself), but has also obtained the full client list of over 4000 individuals and corporations, including their credit cards (which supposedly have been used to make $1 million in “donations”), as well as over 200 GB of email correspondence.

»And since the leaked client list is the who is who of intelligence, and capital management, including such names as Goldman Sachs, the Rockefeller Foundation and, yep, MF Global, we are certain that not only STRATFOR and its clients will be waiting with bated breath to see just what additional troves of information are unleashed, but virtually everyone else, in this very sensitive time from a geopolitical point of view. And incidentally, we can't help but notice that Anonymous may have finally ventured into the foreign relations arena. We can only assume, for now, that this is not a formal (or informal) statement of allegiance with any specific ideology as otherwise the wargames in the Straits of Hormuz may soon be very inappropriately named (or halfway so).»

Aujourd’hui, ce 25 décembre 2011, ce “jour de paix sur la terre aux hommes de bonne volonté”, la nouvelle de l’attaque contre STRATFOR a commencé à atteindre la presse-Système, obligée de signaler la chose. C’est le cas de Huffington.post, effectivement intégré dans la presse-Système depuis son rachat, qui a consacré un article à l’aventure de STRATFOR, ce 25 décembre 2011 effectivement. On en retiendra ces détails qui indiquent la facilité avec laquelle Anonymous semble avoir pénétré STRATFOR, la confusion de STRATFOR à cet égard, et le possible/probable mécontentement de certains des abonnés/“donateurs” en l’occurrence.

«Anonymous said it was able to get credit details, in part, because Stratfor didn't bother encrypting them – an easy-to-avoid blunder which – if true – would be a major embarrassment for any security company.

»Stratfor said in an email to members that it had suspended its servers and email after learning that its website had been hacked. “We have reason to believe that the names of our corporate subscribers have been posted on other web sites,” said the email, passed on to The Associated Press. “We are diligently investigating the extent to which subscriber information may have been obtained.” The email, signed by Stratfor Chief Executive George Friedman, said the company is “working closely with law enforcement to identify who is behind the breach.”

Nous connaissons bien STRATFOR, fondé en 1997. Nous en parlions en termes aimables le 10 juillet 1999, après la guerre du Kosovo, parce que le site avait participé à la révolution de l’information grâce à Internet qui se manifesta pour la première fois de façon significative et massive lors de ce conflit. Ensuite, d’ailleurs très rapidement (la célébrité nouvelle de STRATFOR suscitant des enquêtes), lorsqu’apparurent les caractéristiques fondamentaux du groupe, nous en vînmes aux réalités de ses influences et de ses orientations, à savoir une organisation fondée à partir d’un groupe d’analystes de la Defense Intelligence Agency (DIA), ayant quitté l’agence pour désaccord avec la politique Clinton jugée trop modérée, mais gardant des liens avec la communauté de sécurité nationale. Depuis, STRATFOR s'est trouvé de plus en plus installé confortablement comme une organisation frontiste de cette communauté, par ailleurs dans une situation extrêmement lucrative avec des soutiens importants de cette communauté et du corporate power ; la presse-Système ne manque pas de le citer régulièrement, comme une référence musclée et incontestable.

A l’occasion, nous parlâmes de Friedman (George), son président, sans tenir compte de ses accointances mais en conduisant la critique selon ce qu’il est certainement (voir le 13 septembre 2007). Ce corrompu de l’américanisme, avec une carrière révélatrice à cet égard, ne l’est finalement pas jusqu’à en être déformé ; sa corruption n’est que le salaire rendu à une psychologie parfaitement américaniste et qui fait son travail dans ce sens. Donc, ce n’est pas une vraie corruption, c’est le système de l’américanisme, qui a, comme vertu principale, la rétribution de la corruption naturelle des psychologies qu’il a sous son empire.

…Mais tout cela n’est pas proclamé. Il y a la bonne réputation, et celle-ci va en prendre un coup après le coup d’Anonymous, en plus de la publicité faite à la liste de la clientèle et des “soutiens” de STRATFOR, et les informations sur leurs cartes de crédit. Il s’agit en vérité d’un engagement quasiment parfait de la guerre qui se livre à l’intérieur du système de la communication, lequel est la clef de la puissance. On comprend en effet que les analyses de STRATFOR, y compris les interventions de son directeur, George Friedman, étaient nécessairement renforcées par une réputation d’analyse indépendante malgré l’engagement bien connu du site ; c’est cette réputation-là qui est en cause, et diablement. Dans l'univers du conformisme aux apparences, c'est un rude coup.

Comme le texte le précise, il s’agit, de la part d’Anonymous et de ce qu’il représente, de la première attaque contre le réseau d’information, ou de désinformation, de la communauté de sécurité nationale du système de l’américanisme, ou du Système as a whole. C'est une “première” importante. L’on comprend aussitôt combien la position de surpuissance où se trouve STRATFOR, d’une façon générale, avec son statut et sa réputation-Système, ses soutiens et sa puissance financière, sa masse d’informations et ses sources d’information, se découvre finalement extrêmement fragile et exposée à des coups qui se nourrissent de cette surpuissance pour affaiblir considérablement la cible, – cette fragilité de la surpuissance, voie logique et directe vers l’autodestruction. L’on comprend aussitôt combien des ripostes venues de systèmes antiSystème a priori de force très inférieure peuvent mettre en grandes difficultés des centres-Système d’une force aussi massive que STRATFOR.

Ce type d’attaque, qui devrait se développer espère-t-on, nous paraît extrêmement important, dans la mesure où il entame, dans le chef de cette sorte d'organisation, un statut de pôle de force du Système dans le système de la communication, et fait naître par ailleurs le doute sur les informations diffusées par lui. L’attaque contre STRATFOR fait en effet penser que la vulnérabilité de cette organisation, reconnue implicitement par Friedman lui-même comme indiqué plus haut, peut aussi favoriser des interférences sur son flot d’informations, de la part des mêmes hackers. Il s’agit donc d’un soupçon éventuel, qui s’installerait sur la fiabilité des analyses, autant que sur leurs origines, voire des soupçons sur des interférences extérieures, hostiles au courant représenté par STRATFOR. Une autre possibilité est que STRATFOR, pour renforcer sa sécurité, soit intégré d’une façon plus décisive, dans le réseau général de gestion de la communauté de sécurité nationale, pour tenter d’assurer une meilleure défense (puisque ces réseaux sont prétendument plus sûres, – ce qui reste à voir). Mais il s’agirait d’un pas supplémentaire dans la révélation du statut d’organisation “frontiste” de STRATFOR, évolution là aussi fort embarrassante.


Mis en ligne le 25 décembre 2011 à 18H28

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