La presse-Système et Ron Paul après sa confirmation de l’Iowa

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C’est un jeu de plus en plus passionnant que de lire le parcours de Ron Paul dans la presse-Système. Le straw poll de l’Iowa est la cause de cet intérêt grandissant du processus.

(Straw poll, pour “sondage indicatif”, ou “sondage en grandeur nature”, ou n’importe quelle autre expression renvoyant à une des multiples pratiques de l’extrêmement complexe système US. Dans ce cas, un “sondage grandeur nature” pour situer les candidats à la candidature républicaine aux présidentielles...)

Le straw poll de l’Iowa a été décrété comme une étape importante de la pré-campagne électorale pour le parti où la situation est indécise, en l’occurrence le parti républicain. Ron Paul y arrive, dans un mouchoir, deuxième à 152 votes de Bachmann (4.823 votes contre 4.671, soit 28% et 27% respectivement.). Par conséquent, celui qui était en maintes occurrences un “non-être” et un “non-candidat” a forcé le système de la communication à admettre qu’il existe bel et bien, en chair et en os, et en nombre de votes. Par conséquent, la presse-Système est obligée de réagir. Ces deux événements, l’un enchaînant directement sur l’autre, constituent un fait majeur de la politique américaniste, et de la campagne présidentielle. (Les autres résultats du “sondage en grandeur nature” ont leur importance selon les candidats, mais aucune décisive, et toutes soumises à diverses variations, d’autant plus qu’ils ne déterminent aucune orientation impérative en faveur de l’un ou l’autre candidat ; par exemple, Bachmann, victorieuse de justesse devant Paul dans l’Iowa, mais victorieuse affirmée sur les autres candidats “classiques”, ne distance personne, elle ne fait que rétablir de belle façon une situation compromise pour elle ces trois ou quatre dernières semaines par des attaques efficaces contre elle.)

Nous continuons à nous intéresser au cas de Ron Paul parce que c’est le facteur le plus prometteur de déstabilisation du Système. Nous allons prendre trois exemples de réactions de la presse-Système, qui illustrent, à notre avis, les trois sortes de réactions possibles de cette presse-Système désormais obligée d’acter l’existence de Ron Paul. Toutes continuent à être, d’une façon ou l’autre, en partie un déni des capacités et des potentialités de Ron Paul mais toutes constituent des avancées de la réalité évidemment favorables à Ron Paul, ou plutôt des reculs du virtualisme du Système face à la poussée de la réalité.

• Il y a le “service minimum” qui ne se mouille en aucune sorte. On ne peut plus ne pas en parler (de Ron Paul), alors on en parle au minimum et d’une façon assez neutre, tout en conservant la thème universel qui reste partout présent de la quasi impossibilité de la désignation de Ron Paul. C’est le cas de l’article du Christian Science Monitor du 13 août 2011. On dit simplement, sans élaborer en rien : Ron Paul est bon mais il n’a sans doute (prudence) aucune chance. Ainsi dans un long article où l’on parle de Bachmann, de Romney, de Perry et des autres, un paragraphe expédie Paul.

«Congressman Paul’s close second-place finish demonstrated the force that he has become in Republican politics. Viewed as a fringe candidate when he ran four years ago, he had a large, enthusiastic crowd at the straw poll. Paul’s low-tax, small-government approach makes him, to many, the godfather of the tea party movement. But his unorthodox-for-a-Republican views on foreign policy – he opposes US military engagements abroad – will limit his potential in the GOP field.»

• Il y a le très grand intérêt faussaire pour Ron Paul. On prend un aspect de la candidature Ron Paul, qui lui soit favorable pour montrer qu’on ne lui en veut pas personnellement, et on s’y tient sans aucunement s’aventurer dans le champ du commentaire politique. Cet aspect “technique” est, en général, la formidable organisation originale et paradoxale de la campagne Ron Paul : à la fois populiste, sinon populaire, avec beaucoup de bénévoles pleins d’une ardeur conquérante, des jeunes gens et jeunes filles en grand nombre, etc. ; et pourtant incroyablement efficace, autant si pas mieux que les grosses machines des candidats mieux en cour dans le Système et ainsi plus fortunés. C’est le cas de cet article de Politico.com du 13 août 2011. L’article tresse donc des couronnes sans fin à l’organisation de la campagne Ron Paul et termine joliment par l’habituel paradoxe : le constat par ce site-Système qu’est Politico.com que Paul est largement ignoré par la presse-Système, alors que Politico.com est nécessairement de ceux qui, jusqu’ici, l’ont ignoré…

«They have been successful — Paul won both the Republican Leadership Conference straw poll in New Orleans this year and the Conservative Political Action Committee poll in Washington in February — but they haven’t been able to sway the media narrative that paints Paul as a candidate with intense but limited support from Republicans whose views are outside the mainstream.

»For Paul’s ardent supporters, that’s the rub: While the media have been covering Pawlenty as a legitimate contender with a plausible path to the White House, Paul’s presidential bid has been largely ignored press.»

• La troisième méthode est la méthode que nous sommes décidément tentés de désigner comme “à-la-britannique” ; on en a vu déjà un exemple, le 12 août 2011, avec Richard Adams. Ce même Adams est du Guardian et il semble bien que le Guardian (ou son édition du dimanche dans ce cas, l’Observer) abrite nombre de pratiquants de talent de la chose, – ce qui est somme toute assez surprenant, le Guardian étant de centre-gauche, Paul étant libertarien d’extrême droite, et cette méthode étant beaucoup plus laudative pour Paul que, par exemple, pour la démocratie américaniste. Cette fois, c’est Stewart J. Lawrence, le 14 août 2011, qui reprend le flambeau, et qui nous répète le message : “Paul est vraiment très, très bon et il n’a aucune chance”. Notez, par rapport à la première approche, ci-dessus, que le “et” remplace le “mais”, comme on a écrit plus haut, comme une marque du cynisme britannique ; la relation sans doute accidentelle (“mais”) est remplacée par l’impitoyable et direct rapport de cause à effet (“et”) : ce n’est plus “ce candidat est bon, pourtant il n’a guère de chance d’arriver à quoi que ce soit”, mais “ce candidat est vraiment excellent, sans doute le meilleur de tous, et à cause de cela il n’a aucune chance d’arriver à quoi que ce soit”.

(Il faut également noter dans l’extrait ci-dessous, l’excellente remarque selon laquelle les conceptions de Ron Paul sont en train de gagner beaucoup de terrain à l’intérieur du parti républicain. C’est là un point essentiel de la situation politique dans le parti républicain et à Washington… «Paul's longstanding attacks on “big government”, and his neo-isolationist foreign policy, which once caused him to be tarred and feathered as a closet leftist, is now extolled by top GOP leaders, and has even coloured the views of other GOP candidates, including Bachmann and Mitt Romney.»)

Voici les considérations de Lawrence sur le cas de Ron Paul dans la séquence de l’Iowa.

«But if Cain's star has fallen – in part, due to the rise of Bachmann, but also to his own campaign gaffes and missteps – it hasn't left the field wanting for unexpected upstarts. This time, it's Ron Paul, the party's quadrennial gadfly, and die-hard libertarian, who's evolved into something of a “gray éminence” as the GOP's own domestic and foreign policy stances have started to resemble his own. The Tea Party surge has largely vindicated Paul's longstanding attacks on “big government”, and his neo-isolationist foreign policy, which once caused him to be tarred and feathered as a closet leftist, is now extolled by top GOP leaders, and has even coloured the views of other GOP candidates, including Bachmann and Mitt Romney.

»While so much attention has focused on Perry of late, Paul has come out of nowhere to join the ranks of second tier candidates even surpassing Sarah Palin's 12% in the latest national poll – and now running Bachmann a very close second in the Iowa straw poll.

»Does anyone think Paul is electable? Certainly not. And even his strong showing in Iowa probably won't mean much in the end. Except that it's a sign of the continuing discontent in Republican voter ranks over the state of the GOP field, notwithstanding the high hopes surrounding Perry's late entry. Paul exudes a sincerity, simplicity and clarity on the issues – and a sense of compassion – that no other GOP candidate seems to match, which makes him, if not a voice of reason and conscience, at least a striking counterpoint to the increasingly rage-filled ranks of his party.»


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Mis en ligne le 14 août 2011 à 15H08