La Géorgie après l’Ukraine

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Vouloir faire entrer l’Ukraine et la Géorgie dans l’OTAN, c’est bien (et l’on continue à hurler dans les colonnes médiatiques qui vont bien que cela est plus que jamais nécessaire). Faut-il encore qu’il existe une direction et une stabilité politique qui aillent dans ce sens, dans les pays concernés, au moins pour avoir une signature au moment idoine. Ce n’est plus le cas avec l’Ukraine. Cela pourrait vite ne plus être le cas avec la Géorgie.

La première attaque politique violente a été lancée contre Saakachvili, avec une exigence implicite que ce président en vienne à la conclusion qu'il doit quitter sa fonction. L’opposition géorgienne, une fois passée la période inévitable d’“union nationale”, retrouve une attitude critique redoublée par les circonstances de la crise. Si la narrative de l’“Ouest” continue à entretenir religieusement la version officielle d’une Géorgie absolument victime innocente, soumise à la brutalité unilatérale, barbare et délibérée de la Russie, et aussi, dit mezzo voce, à la trahison de l’“Ouest” en question ne volant pas au secours de l’innocent, l’opposition préfère se référer aux faits. Les choses sont donc rétablies en l’état, avec Saakachvili cloué au pilori pour avoir déclenché unilatéralement cette folle guerre.

Ceci, de DPA relayé par Monsters and Critics.com du 9 septembre:

«As peace talks try to defuse the Georgian crisis, Georgia's opposition sparked the first calls Tuesday for President Mikheil Saakashvili's resignation. Two opposition politicians broke an unspoken truce that held during the open conflict with Russia last month to demand early elections. […]

»David Gamkredlidze, head of the New Right party, said he expected to be branded a “traitor and Russian agent” by the ruling party for his words. “Despite numerous warnings Saakashvili unilaterally took the criminal and irresponsible decision to shell [the South Ossetian capital] Tskhinvali, which led to catastrophic consequences for the country,” Gamkredlidze said Tuesday. “Saakashvili no longer holds either political or moral right to be the president of Georgia or commander-in-chief,” he was quoted by local media as saying.

»Sakkashvili came under fire for the scale of the military defeat and for erring in his choice of allies. “As a result of this defeat over a thousand of our citizens were killed and wounded; over 100,000 people were forcefully displaced; the Georgian army is disintegrated, disarmed and demoralized,” Gamkrelidze said at a news conference in Tbilisi after a visit to Washington.

»Opposition leader Shalva Natelashvili of the Labour party a day earlier accused Saakashvili of unthinkingly turning Georgia into the victim of US-Russian rivalry. Over 80 prominent organizations and individuals wrote an open letter asking for an end to government war propaganda. “Extensive propaganda is currently underway, blaming the catastrophic consequences on everyone – an aggressive Russia, an ignorant West (which, it is claimed, ignored the Georgian leader's warnings), the opposition, Russian spies, etc. – everyone, but not the authorities themselves,” the letter published in the Georgian daily Resonansi said.»

Tout y est, tout ce qu’on peut reprocher à Saakachvili, sauf l’ultime constat que tout le monde connaît, celui d’être une créature des relais divers des réseaux d’influence US en Europe de l’Est. Le tableau de la catastrophe se complète pour Saakachvili, avec les inévitables risques, sinon conséquences intérieures.

Pour l’OTAN, le problème géorgien évolue très vite vers la même catégorie que le problème ukrainien. Une direction divisée, avec une opposition grandissante aux politiques aventuristes anti-russes, et une évolution probable vers une position de très grande prudence. L’ultime provocation anti-russe que constituerait l’accélération du processus d’adhésion à l’OTAN, avec la mise en question grandissante de la valeur de garantie de sécurité que constitue cette adhésion, a toutes les chances de rencontrer une opposition de plus en plus catégorique de la part des nouvelles tendances qui se manifestent, et peut-être les nouvelles directions qui vont peut-être s’imposer.

Le tour sera bouclé sur cette pitoyable aventure diplomatique que constitue le projet américaniste de l’élargissement provocateur à l’Est de l’OTAN. Il faudra alors songer à réviser les slogans habituels qui nous tiennent lieu d’axes de réflexion. Ainsi s’amorcent aujourd’hui les grandes révolutions intellectuelles de l’Occident fameux pour son intelligence.


Mis en ligne le 10 septembre 2008 à 09H11