L’énigme Obama et sa politique étrangère... (suite)

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Nous continuons à explorer les possibilités de changement aux USA à l’occasion des présidentielles, notamment du côté d’Obama, en prenant comme support les analyses qui nous semblent les plus significatives, qui se succèdent, qui sont toutes nécessairement spéculatives. Il nous semble intéressant de noter la poursuite de la réflexion de Justin Raimondo, dont nous avions signalé la première manifestation dans notre Bloc-Notes du 19 février. (Raimondo, commentateur de la droite extrême libertarienne, “paléo-conservateur“, isolationniste et/ou non-interventionniste, acueillant avec un certain enthousiasme l’affirmation du libéral démocrate Obama, voilà qui présentait une certaine originalité méritant l’intérêt.)

Dans sa chronique de ce jour, sur Antiwar.com, Raimondo poursuit sa démarche qui avait soulevé pas mal de protestations chez ses lecteurs, en cherchant à s’expliquer plus avant. (Nous avons sélectionné les passages qui nous semblent intéresser ce propos des explications sur Obama, le reste du texte concernant la politique étrangère US dans son ensemble.)

«…Continuing our discussion of the other day: Yes, I understand his point that the Obama phenomenon is not going to cure all our foreign policy ills, and I don't fault him at all for trying to tamp down my apparent Obama-mania. I don't think I've made it clear enough that I'm more interested in Obama's supporters than I am in Obama: that is,-the phenomenon is more significant than the man. […]

»Asked by the out-of-control Tim Russert what he would do if Vladimir Putin's successor launched a military attack on Kosovo, Obama endorsed the Clintonian solution to the Yugoslav problem, albeit mildly, and put his imprimatur on Hillary's wild-eyed Russophobia. If you look at the transcript, however, Obama's coolness in the face of Russert's speculative hysterics is encouraging, although I have to say there is a problem with Obama's foreign policy stances, and I can boil it down to two words: George Soros.

(…)

»The Soros wing of the Democratic party, and its international affiliates, were in the front lines of the first wave of Albanian expansionism, and they'll doubtless be in the vanguard of the next. I'm just not so sure that Obama will necessarily sign on to it, just because Soros was one of his early supporters.

»In 2004, the crusading billionaire said he supported Obama because he saw him as “an emerging national leader,” a bit of speculative analysis that turned out to be right on the money. Which is why Soros has so much money. It may turn out, however, that Soro's investment in Obama will fail to reap the expected returns. I don't think, however, that we know at this point.»

Bien sûr, nous avons signalé le membre de phrase qui nous semble essentiel: “le phénomène (de soutien populaire à Obama) est plus important que l’homme”. Nous avons souvent répété cette idée, qui nous semble essentielle. Obama est, dans une certaine mesure, “manipulé” par un très fort courant d’opinion qui le pousse à affirmer, à radicaliser certaines positions. La question aussitôt venue est celle-ci: qu’en restera-t-il lorsque Obama sera élu, s’il est élu? La réponse n’est pas du tout évidente, notamment dans le sens du réalisme cynique habituel (“il n’en restera rien, la créature du système s’inclinera devant le système”). A partir d’une certaine importance d’un mouvement populaire, on ne s’affranchit pas aisément de son soutien, de moins en moins à mesure que le mouvement s’avère de plus en plus exceptionnel, – et il l’est dans le cas d’Obama. Il se peut qu’on aboutisse de cette façon à des situations inédites.

Raimondo s’attache aussi au soutien que George Soros a apporté à Obama. Soros, milliardaire, libéral-interventionniste dans les années 1990, devenu plus pacifique en s'opposant à Bush et à sa politique agressive en Irak et ailleurs, mais qui pourrait s’enflammer à nouveau à propos du Kosovo, de la “Grande Albanie” et tout le reste dans la région. Car, précise Raimondo, et c’est une remarque intéressante, ceux des démocrates qui sont interventionnistes exercent leur rage interventionniste dans le registre libéral-interventionniste (“libéral hawks”), c’est-à-dire beaucoup plus volontiers en Europe qu’au Moyen-Orient (terrain favori des républicains). Leur “logique stratégique” (?) échappe à l’attraction monstrueuse de la guerre contre la terreur mais sacrifie complètement à la politique vertueuse des “bombardements humanitaires” chers à Vaclav Havel. Tout cela renvoie à la politique des années 1990 bien plus qu’à celle d’après 9/11. Dans ce cadre, Raimondo pose la question de la dépendance d’un Obama vis-à-vis d’un Soros, surtout en tenant compte du courant populaire qu’on a déjà signalé, dont il est temps de signaler qu’il est presque exclusivement anti-guerre (n’importe quelle guerre non provoquée). Il y a contradiction potentielle entre le courant Soros s’il redevient “libéral hawk” et belliciste, et le courant populaire anti-guerre qui propulse et manipule Obama.

La prudence du commentaire de Raimondo sur les perspectives est certainement de mise. Elle est moins décevante que significative d’une situation qui est le contraire d’être décevante. Elle marque l’existence de diverses possibilités très différentes, d’alternatives, de possibles échappées vers des politiques nouvelles. Il suffit de se rappeler que cette perspective d’ouverture vers de nouvelles politiques était raisonnablement considérée comme utopique par la plupart des commentateurs il y a encore six mois.


Mis en ligne le 29 février 2008 à 15H21