Israël s’attend désormais au pire

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... Mais l'on parle du “pire” de la part des USA, du point de vue israélien. L’évaluation que fait Israël des intentions US depuis qu’Obama est rentré en piste est constante dans le même sens de l'aggravation, marquée par un pessimisme qui ne se réduit pas. Ici, il s’agit d’une dépêche de WorldTribune.com du 23 juillet 2009, qui affirme que le gouvernement israélien est parvenu à plusieurs conclusions particulièrement préoccupantes. Il s’agit notamment de l’interprétation faite des déclarations faites par Hillary Clinton dans les pays du Golfe, le 21 juillet («We want Iran to calculate what I think is a fair assessment: that if the United States extends a defense umbrella over the region, if we do even more to develop the military capacity of those [allies] in the Gulf, it is unlikely that Iran will be any stronger or safer.»)

Pour les Israéliens, ces déclarations impliquent simplement que les USA (et l’Union Européenne avec eux) sont arrivés à la conclusion que l’Iran aura de toutes les façons l’arme nucléaire et qu’il faut prendre les précautions nécessaires pour que cet événement n’encourage pas une politique agressive de l’Iran. D’où ces avertissements selon lesquels les USA étendront leur garantie nucléaire aux pays du Golfe. Un ministre israélien (Dan Meridor, chargé des questions de renseignement) a fait des remarques très défavorables: «I heard, unenthusiastically, the Americans' statement that they will defend their allies in the event that Iran arms itself with an atomic bomb, as if they have already reconciled with this possibility, and this is a mistake. We don't need to deal now with the assumption that Iran will attain nuclear weapons, rather prevent this.»

WorldTribune.com va plus loin, en citant divers experts israéliens. Il affirme deux points:

• Les USA ont pratiquement éliminé la possibilité d’une attaque contre l’Iran. Toutes les options “ne sont plus sur la table”.

• Les USA (et l’UE) se préparent à négocier l’établissement d’une nouvelle situation dans la région, avec un Iran potentiellement possesseur de l’arme nucléaire.

«“We have been receiving signals that Washington will support a compromise that will allow Iran to enrich uranium under international supervision,” an official said.

»Israeli officials and analysts viewed Ms. Clinton's statement as a signal that the United States would tolerate an Iranian nuclear weapons arsenal. They said the Obama administration was resigned to the likelihood that Iran has already completed the nuclear fuel cycle, developed a nuclear warhead and could assemble an atomic bomb within weeks.

»Leading Israeli analysts agreed that Obama has virtually eliminated a U.S. military option against Iran. Instead, the White House was preparing to offer a compromise that would grant approval to Iran's uranium enrichment program, banned by the United Nations Security Council. “Both the United States and the European Union are coming to the conclusion that Iran will turn nuclear in any case, so there is a need for a compromise,” Ephraim Kam, a senior fellow at the Institute for National Security Studies, said.»

On mesure avec ces très récents constats plutôt très pessimistes, du point de vue des Israéliens, la rapidité de l’évolution du sentiment israélien de la dégradation de la situation stratégique d’Israël. Un point important est la conviction presque complète que les USA ont désormais écarté l’option d’une attaque contre l’Iran, ce qui conduit effectivement, d’une façon presque inéluctable, à une sorte d’arrangement où la position nouvelle de l’Iran, – puissance nucléaire ou puissance du “seuil” si des restrictions sont acceptées par les autres puissances nucléaires de la région, – serait actée et reconnue.

Il n’est pas assuré que des actes concrets dans le sens que craignent les Israéliens aient été posés mais il apparaît surtout que les Israéliens estiment qu’une dynamique est en route, qui semble conduire les événements. Les troubles qu’a connus l’Iran n’ont rien apporté de décisif, ni dans un sens ni dans l’autre, et plutôt confirmé que les interférences intérieures, même provoquées, n’influeraient pas notablement sur la ligne iranienne qui est d’acquérir un statut de puissance dans la région. Le sentiment général qui se forme sous cette pression est qu’il faut admettre ce fait et rechercher la formation d’une situation qui, en l'entérinant, permette de trouver un équilibre. Cette dynamique est effectivement redoutable pour Israël, dont toute la politique maximaliste est basée sur la perpétuation d’une tension de déséquilibre où ce pays tient un rôle essentiel pour l’Occident. Appréciée objectivement, on dirait que la crainte d’Israël, si une nouvelle situation se met en place dans la région avec l’Iran comme acteur majeur, ne serait pas tant l’appréhension rocambolesque de l’anéantissement, que la perspective de perdre sa position de relais stratégique essentiel pour l’Occident (pour les USA). Mais cette appréciation objective n’est peut-être pas de mise avec une direction israélienne qui répond à cette dynamique par une exacerbation de la version locale de “la politique de l’idéologie et de l’instinct”. Il existe aujourd’hui suffisamment de forces irrationnelles en Israël pour empêcher une prise en compte raisonnable d’une évolution perçue comme irréversible.


Mis en ligne le 27 juillet 2009 à 08H55